Le soleil inondait de ses reflets les pavés gelés de la ville de Daret. Les habitants marchaient dans les rues en serrant leur manteau contre eux. Un vent froid et la fin de journée arrivant, vidaient progressivement les rues.

Pourtant deux hommes et une femme vêtue de noirs restaient là, devant une maison délabrée abandonnée depuis longtemps, et discutaient nullement gênés par le froid. Pourtant si on tendait l'oreille à leur conversation on comprenait aisément que ce n'était que façade.

La femme accoudée contre un mur dans une position plutôt aguicheuse écoutait avec amusement ses compagnons.

- La hache, c'est bien mieux, enfin Yorlnar ! Couper du bois et frapper avec plus de force.

- Mais ta hache ne frappe pas d'estoc, non, une épée est bien mieux.

- Mais avec le manche...

Le dénommé Yorlnar le coupa en agitant la main.

- Roh tu m'emmerdes, fourre toi ton manche là où je pense, et ta hache avec par la même occasion !

Il cracha par terre en maugréant de manière incompréhensible dans sa barbe avant de se tourner vers l'entrée de l'ancienne maison.

- Je me les gèle, je rentre.

Son compagnon l'arrêta l'air grave.

- Ne fais pas de bêtise ou tu risques de perdre ton travail, tu sais bien ce qui se passe la dessous !

En effet tous trois gardaient en réalité une entrée cachée menant vers les égouts. Au milieu des décombres une trappe permettait de descendre dans les égouts. Et après quelques mètres de tunnel on pouvait, si on savait où aller, tomber sur une salle nettoyée. Gardée de nouveau par un autre soldat.

Dans cette salle trônait une grande table sur laquelle était étalé un petit plan de la ville mais surtout un plan détaillé du château du seigneur. Autour de celle-ci il y avait quatre chaises et quatre personnes installées sur ces chaises, deux hommes et deux femmes. Tous encapuchonnés et parlant en chuchotant.

L'homme qui les protégeait ne pouvait entendre ce que ces chefs disaient, il savait simplement ce qu'on avait bien voulu lui dire.

Ils étaient un petit groupe d'une trentaine d'hommes et de femmes venant des différentes fonctions peu légales de la ville. Voleurs, assassins, mercenaires, arnaqueurs et combattants des rues. Ils avaient tous rejoint ce petit groupe pour devenir plus riches tous ensemble. Il savait aussi que quelque chose d'important se préparait, un contrat donné par un homme externe à leur groupe et à leur ville. Un homme pour lequel se préparait une opération de grande envergure. Le plan se dessinait progressivement et on le mettrait au courant le moment venu.

En attendant il était contraint de humer les relents âcres et putrides des égouts. Aussi il fut particulièrement ravi lorsqu'au milieu des ombres mouvantes il entraperçut un de ses compagnons s'approcher. Ses pas résonnaient comme un écho plaintif et les bruits de succion de ses bottes sortant lentement de la fange humide recouvrant le sol des égouts lui parvenaient depuis quelques minutes.

Son camarade sortit des ombres à quelques pas de lui. Ils se saluèrent d'un signe de tête. Le garde en faction accueillit avec un regard désolé celui qui prendrait sa place. Celui-ci sourit ironiquement avant de lui donner sa pipe.

« Tiens prend ça Tam, je ne pourrais pas fumer ici sans me rendre malade. »

Tam sortit donc, il marcha vite à travers les égouts en prenant garde de ne pas toucher aux murs moites de mousse et d'autres champignons. Il se prépara à l'air froid du dehors, qui serait une bénédiction pour lui qui était coincé à l'intérieur depuis plusieurs heures. Il pensa néanmoins à fermer sa veste. En remontant il croisa Yorlnar à qui il fit un signe de tête amical.

Après quelques temps de marche dans la ville il se perdit dans ses pensées. Il heurta maladroitement un homme aux cheveux argenté.

Il ne s'excusa pas et se composa plutôt un visage sévère mais décampa rapidement en voyant que l'homme était plus grand et fort que lui et que lui possédait une épée au côté. Il bafouilla une excuse et poursuivit son chemin.