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Je me souviens que, depuis mon plus jeune âge, je l'ai envié. Une stupide jalousie enfantine, un caprice incompréhensible sorti de nulle part que je n'ai jamais exprimé. Moi aussi, j'aurais aimé partager mon jour spécial avec cette femme qui était le centre de mon univers. Sauf que moi, je suis née en novembre. J'ai grandi, j'ai appris qu'il y a des coïncidences auxquelles on ne peut rien. Mon secret est resté enfoui, ma jalousie s'est estompée, devenant une relique de mon passé, qui ressurgit à chaque rentrée scolaire, mais avec moins d'importance depuis que je suis adulte.
Mais pourtant, cette année, cette date fatidique revêt un caractère encore plus spécial. Je crois que d'une certaine manière, je lui en veux encore plus, pour tout et rien, même s'il n'a jamais choisi et qu'il l'aurait certainement tout donné pour troquer son destin et le mien. Ironique, n'est-ce pas ?

Les mains moites, je serre mon stupide bouquet comme si ma vie en dépendait. Là, tout de suite, j'avoue que je regrette mon choix. Si j'avais eu deux sous de jugeote, j'aurais écouté Estelle et j'aurais attendu d'être arrivée pour lui acheter des fleurs. Mais sur l'instant, l'idée m'a paru bonne. Je ne voulais pas perdre de temps une fois à destination. Ma dernière visite remonte à plusieurs semaines, alors chaque seconde me semble précieuse. Et je me connais : j'ai déjà cette boule nichée au creux de l'estomac, ce nœud de culpabilité, celui qui m'empêche de dormir depuis près de deux ans et qui, aujourd'hui encore, fait son travail. Alors, comme pour conjurer le sort et parce que je suis seule dans mon wagon, je me laisse aller. Le regard fixé droit devant moi, je compte les sièges. Deux, quatre, six... Ma petite voix intérieure remercie la SNCF d'avoir choisi un nombre pair pour ses places assises. Lorsque je finis par perdre le fil, c'est que mon esprit s'apaise. Très bien. Pour la troisième fois en une heure, mon masque étouffe un bâillement digne du roi de la savane. J'entends la douce voix de ma Mamie résonner dans mon crâne :

Tu ne peux pas mettre ta main ?
— Ces fichus machins me rendent malpolie, songé-je, en riant seule.

Je ressasse chaque souvenir, revis chaque instant. Est-ce que je leur ai dit que je les aimais ? Est-ce que je le leur ai prouvé ? Ces petites voix dans ma tête, celles qui ont toujours fait de moi un trublion, qui m'ont aidée à garder le sourire malgré les heures sombres, se plaisent dorénavant à me torturer. Si j'ai réussi à les faire taire ce matin, peut-être que je peux y arriver ce soir ? Hum. Peu probable. Même moi, je n'y crois pas.

Alors que je m'apprête à compter les fenêtres, la voix mécanique résonne à travers les hauts-parleurs. Nancy, deux minutes d'arrêt. Un coup d'œil rapide à ma montre, puis j'attrape mon sac avant de quitter le wagon. Une fois mêlée aux rares passagers, je sens mon angoisse remonter, et mes doigts se crisper un peu plus sur le bouquet qui commence réellement à se défraîchir. Décidément, mauvaise idée.

Oui, mauvaise idée. Comme celle de leur rendre visite dans la même journée, ricane ma petite voix intérieure.

J'ai envie de lui répondre d'aller au diable quand, au bout du quai, mes yeux croisent ceux d'un bleu cristallin de mon amie Clara. Oubliée, la voix dans mon crâne. Envolées mes envies de céder à mes stupides compulsions. Ma gorge se noue, mes yeux s'embuent et j'accélère le pas pour la serrer dans mes bras. Peu m'importent les regards désobligeants des voyageurs qui s'écartent, mal à l'aise devant cette marque d'affection en pleine période où les contacts physiques sont de plus en plus proscrits ; elle est là. Pour moi. Tout en babillant, elle me guide à travers la gare puis jusqu'à sa voiture.

Dernière ligne droite. Le silence s'est fait dans l'habitacle depuis bien longtemps quand la Seat s'arrête devant l'immense portail en fer forgé d'un autre âge.

— Tu veux que je vienne avec toi ?

La voix de Clara et surtout sa main qui se pose sur mon avant-bras me font sursauter. Mon regard se détache du mur d'enceinte terne pour s'arrimer à ceux de mon amie. Est-ce que je peux lui demander cet ultime service ? Sans rien ajouter, elle sourit et déboucle sa ceinture. Toujours en silence, nous suivons les chemins de sable clair, le bruit de nos pas brisant la chape de plomb qui règne sur l'endroit. Enfin, je me fige, à quelques pas du carré d'herbe tant espéré. Respiration saccadée, envie irrépressible de compter tout ce qui m'entoure... J'inspire un grand coup, et, seule, je franchis les deux pas qui me séparent de la plaque. Doucement, je dépose mes fleurs vraiment défraîchies sur le rebord en marbre et glisse mes doigts sur les lettres et les chiffres gravés :

Pierre
Né le 18 septembre 1978

Je me refuse à lire la suite. Aujourd'hui, je refuse de me rappeler que, comme Mamie, il n'est plus là. Non. Aujourd'hui, nous sommes le 18 septembre et l'un comme l'autre, ils fêtent leur anniversaire. Et en ravalant la boule qui obstrue ma gorge, comme je l'ai fait pour elle ce matin à cinq cents kilomètre d'ici, je lui murmure entre les larmes :

— Bon anniversaire, cousin.

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