Superman 1/2
C'est une matinée classique à la ferme. Levée depuis 5h30, ma première activité de la journée consistait majoritairement au soin des animaux et à la distribution de nourriture. Je me suis ensuite réfugiée dans mon bureau pour traiter les tâches administratives. Je finis ma matinée de travail par un tour en tracteur dans les champs pour réparer une clôture.
De retour à la ferme, je passe par le bureau de Martha pour discuter. Martha Kent est la propriétaire de l'exploitation agricole. Son fils a quitté notre petite ville de Smallville pour devenir journaliste à Metropolis et son mari est décédé d'une crise cardiaque il y a plusieurs années. Se retrouvant seule pour gérer la ferme et le poids des années commençant à se faire sentir, elle m'a donc recruté il y a quelques mois pour l'aider. Je l'apprécie énormément. Elle est toujours aux petits soins avec moi, s'assurant que je ne manque de rien. Elle m'a même permis d'emménager dans une dépendance pour m'éviter trop de trajet ou des frais trop élevé.
"Je viens d'avoir un coup de téléphone de Clark. Il vient dîner ce soir, se réjouit-elle après m'avoir saluée chaudement. Je savais que ses repas de citadin ne remplacerait jamais ma cuisine. Je crois même qu'il compte rester plusieurs jours.
— Vous voulez que je vous laisse en famille ? Je peux aller manger en ville, proposé-je.
— Bien sûr que non, tu peux rester. Tu es ici chez toi, et tu fais aussi un peu partie de la famille, maintenant, affirme Martha en souriant. Et puis, ça fera plaisir à Clark de revoir une ancienne camarade de classe. Depuis combien de temps ne vous êtes vous pas vus ?
— Des années... dis-je en comptant dans ma tête. 5 ou 6, je crois."
En effet, nous n'avons pas eu l'occasion de nous croiser depuis tout ce temps. Après la fin du lycée, je suis moi aussi allée suivre mes études à Métropolis avant de revenir dans ma ville natale. Déjà que nous nous fréquentions peu lors de nos études, nous nous sommes rapidement perdus de vue, nos emplois du temps étant très chargés du fait de nos professions respectives.
Sa mère me parle souvent de lui. Son fils est une réelle fierté pour elle. Il revient de temps en temps, mais je n'ai pour l'instant pas eu l'occasion de le croiser. Nous avons été bons amis. Nous nous entendions bien sans être assez proche pour que cette amitié perdure malgré les années et la distance. Je me demande s'il a autant changé que sa mère me le raconte.
La réponse ne tarde pas à arriver quand une voiture se gare dans la cour alors que je suis aux fourneaux avec Martha. Je peine à reconnaître l'homme qui en sort. Il est toujours brun avec la grosse monture de son éternelle paire de lunettes qui repose sur son nez, mais quelque chose semble avoir changé.
Peut-être est-ce son accoutrement costard-cravate qui me perturbe tant ? Ou peut-être ai-je remarqué ses épaules carrées et les muscles qui se dessinent sous sa chemise ?
Martha s'interrompt pour ouvrir la porte à son fils et le serrer dans ses bras. Je reste en retrait pour les laisser à leurs retrouvailles familiales.
"Salut ! Ça fait plaisir de te revoir, dit-il à mon attention en retirant sa veste de costard. Tu as changé !
— On dirait bien que je ne suis pas la seule." réponds-je en souriant.
J'essaie de rester discrète dans mes observations, mais je ne peux m'empêcher de détailler son visage et ses bras. Je peine à associer les traits du jeune Clark Kent que j'ai en mémoire à l'homme séduisant que j'ai en face de moi.
Nous passons à table et écoutons les dernières nouvelles et les anecdotes de Clark. Il a l'air de grandement apprécier sa vie à Métropolis. Même si je ne quitterais pour rien au monde ma campagne et le sentiment de liberté qu'elle m'inspire, je conçois que la vie est sûrement plus animée en ville que dans notre bourgade perdue au fin fond du Kansas.
Après le repas, je vais me coucher en refusant poliment leur invitation à rester bavarder. Mon réveille sonne tôt demain, et je préfère les laisser en famille.
Le lendemain matin, je me lève aux aurores, comme à mon habitude. J'enfile ma combinaison et mes bottes par-dessus ma salopette et me dirige vers la grange. Je suis ordinairement seule à cette heure-ci, mais j'ai la surprise de croiser Clark qui fait son jogging. Il a troqué son costume pour un short et un t-shirt qui laissent désormais moins de place à mon imagination quant à sa nouvelle musculature. Quand il m'aperçoit, il vient à ma rencontre et me salue chaleureusement.
"Je voulais te remercier pour tout ce que tu fais pour ma mère, me confie-t-il. Je m'inquiétais de la laisser seule en m'installant en ville, mais avec toi je sais que je peux avoir confiance et qu'elle est en bonne compagnie. Elle a l'air de bien se porter.
— Merci, dis-je, légèrement gênée par le compliment. Je ne fais pas grand chose, tu sais. Surtout mon travail. Et elle m'a tellement bien accueillie. Je me sens vraiment bien, ici. Tu as dû te régaler en grandissant dans cette ferme.
— C'est vrai que la ferme me manque de temps en temps. J'y ai plein de bons souvenirs. Je suis peut-être devenu un citadin, mais je n'oublie pas d'où je viens.
— Est-ce que le citadin qui n'a pas oublié d'où il vient aurait envie d'un petit retour au source ? suggéré-je.
— Pourquoi pas ?
— Tu peux m'aider à donner à manger aux animaux, si tu veux.
— Avec plaisir !"
Je suis ravie d'avoir un collègue pour cette matinée de travail. Je me retiens de justesse de ne pas entamer une conversation avec les vaches comme chaque matin, histoire de ne pas paraître étrange. Nous discutons du bon vieux temps, de nos vies respectives, de sa mère... Chacun réactualise ses connaissances sur l'autre. Les souvenirs remontent et je me rappelle pourquoi j'appréciais tant passer du temps avec lui avant. Il est gentil, drôle et terriblement intelligent. Je me remémore en souriant les interminables conversations philosophiques que nous avions dans la cour du lycée ou allongés au milieu d'un champ avec nos amis.
Après le déjeuner, je ne le revois pas de la journée. La mienne se termine vers 22 heures. Après avoir fait le tour des bâtiments pour m'assurer du bon réglage des aérations, je me dirige vers la salle à manger pour récupérer les restes de dîner que Martha a dû me laisser.
Sur mon chemin, je suis étonnée de découvrir la grange allumée.
"Il y a quelqu'un ?" demandé-je en entrant dans le bâtiment qui semble vide.
Je monte alors le long de l'échelle qui mène à l'étage et y trouve Clark, assis dans l'embrasure de la baie qui donne une vue panoramique sur l'ensemble du domaine.
"Désolé, je ne voulais pas te déranger. Je ne savais pas que tu étais là.
— Ne t'inquiète pas. J'ai toujours aimé m'installer ici pour contempler le paysage le jour et les étoiles la nuit. Tout est calme à cette heure-ci, c'est si apaisant."
J'acquiesce, hésitant à partir pour le laisser tranquille.
"Viens voir, me fait-t-il signe d'approcher.
— C'est magnifique, lâché-je en découvrant le ciel étoilé.
— Le ciel est tellement plus beau loin de la pollution lumineuse de la ville." relève-t-il.
Nous restons silencieux. Je ne peux détacher mon regard de la voûte céleste, que je prends rarement le temps d'admirer quand j'enchaîne mes tâches au quotidien.
Fatiguée par ma journée de travail, je lutte contre le sommeil mais refuse de me résigner à aller me coucher. Je m'autorise à clore les yeux quelques secondes pour les reposer.
Quand je les rouvre, ma tête repose sur l'épaule de Clark. Comment suis-je arrivée dans cette position ? J'ai dû m'endormir et je me sens à présent vraiment ridicule. J'espère au moins ne pas avoir ronflé. Je me relève prestement.
"Désolé, je ne m'étais pas aperçue que... je me suis endormie et... tenté-je de m'expliquer.
— Ne t'en fais pas, sourit-il. Tu avais l'air épuisée.
— Je ferai mieux d'aller retrouver mon lit, déclaré-je, toujours un peu gênée.
— Bonne nuit, me dit-il.
— Bonne nuit, Clark."
Je descends l'échelle avec précaution dans l'obscurité. Alors que je m'apprête à sortir de la grange, une forte lumière flashe comme un éclair dans le bâtiment. J'entends des éclats de voix à l'étage, où je me trouvais quelques secondes plus tôt en compagnie de Clark.
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