L'enfant pencha de nouveau la tête sur le côté ; sa mine interrogative me fit ressentir un frémissement le long de ma colonne vertébrale. Pareille à une décharge de bienfaisance qui me conforta dans mon entreprise. D'un geste de la main, je fis disparaître mes os et avançai d'un pas silencieux vers la fenêtre. Puis, à l'aide des arcanes, le petit se mit à léviter dans les airs. Surprit par cette soudaine perte d'adhésion au sol, l'enfant poussa un petit jappement de stupéfaction et tenta vainement de tâtonner l'air de ses petits pieds ; cherchant ses marques dans le flottement de son être.

J'ouvris la fenêtre et fis gentiment passer le marmot, qui ne pouvait s'empêcher de retenir le flot déferlant de questionnements qui se pressait sur le bord de ses lèvres. A mon tour, j'enjambai la fenêtre et la referma d'un claquement de doigts. Je rejoignis en quelques pas l'enfant, pieds nus et vêtu d'une chemise de nuit, dans la neige fraîche qui tombait sur la ville endormie ; je m'engageais sur le chemin du retour lorsque je sentis une petite main s'agripper au bas de mon long manteau.

-Mais attends ! J'ai pas mis mes vêtements. Protesta l'enfant qui grelottait comme un glaçon. Et puis, on va où comme ça hein ?

Que lui répondre ? Que je l'invitais tranquillement dans mon manoir en plein milieu de la nuit ? Soyons sérieux quelques minutes ; mais à quel moment avais-je eu l'idée d'emmener ce gamin chez moi ? Je m'entendais parler sans vraiment avoir pensé à ce que je disais.

-Bon... Ça va, on va jouer... « Qu'est-ce que je raconte ? »

-C'est vrai ? A quoi à quoi à quoi à quoi à quoi à quoi à quoi ? Fit le petit, tout content que son nouvel ami veuille jouer avec lui.

-A un jeu... « Mais non pas du tout ! Rentre chez toi petit... »

-Jouer à quoi ? Renchérit le brunet en penchant innocemment la tête sur le côté.

-A explorer la ville... « Bah voyons... »

-C'est ça le jeu ? C'est pas mieux un deux trois soleil ?

Claquant dans un bruit sourd une main contre mon crâne, je me demandais encore ce qui m'étais passé par la tête lorsque j'avais pénétré dans la demeure de ce petit garnement ; qui soit dit en passant, affichait une mine interrogative des plus innocentes. Le rendant d'autant plus adorable avec ses grands yeux expressifs où se mirait un océan d'étoiles. Je m'accroupis près du petit humain et lui murmura au creux de l'oreille, comme on chuchote un secret : « Une fois chez moi, on jouera à ce que tu veux mais là tout de suite, on ne peut que jouer aux explorateurs de la nuit »

-Ça veut dire qu'on va jouer, non ?

Je hochais la tête en esquissant un mince sourire qui ne se voulait que rassurant. Apparemment, je su convaincre l'enfant car celui-ci m'adressa un sourire à son tour. Il semblerait que pour lui je sois devenu, en l'espace de quelques minutes, son nouveau meilleur ami.

-Oui, allons explorer les merveilles qu'offre la folle nuit d'hiver.

-Mais d'abord...

Le petit se précipita vers la porte d'entrée et l'ouvrit lentement comme je l'avais fait auparavant et disparut dans la maisonnée. Quant à moi, j'attendis patiemment dans le froid et l'obscurité.

-Et tu habites où, toi ? Moi j'habite là. Désignant du doigt sa maison, alors qu'il en sortait tout juste.

-J'avais remarqué...