Maman !
A la fin de la messe, il est minuit passé. Ma fille est encore bien éveillée, malgré les quatre heures de route et la journée accumulée, sans compter le repas fort copieux effectué par mes parents.
- Tu es prête, Marine ? Nous allons découvrir ce que le Père Noël a apporté chez papi et mamie !
- Moi, j'aimerais qu'il ait apporté un appel de maman...
Je prends ma fille dans mes bras, élevant son visage au niveau du mien, en soupirant :
- Oh, ma puce... Ne t'inquiète pas pour maman...
- Je ne m'inquiète pas, papa. C'est juste que j'aurais voulu la voir...
Je serre un peu plus fort ma princesse. Camille me manque énormément également et je m'en veux d'avoir raté son appel.
- Tu sais, maman trouveras surement un moyen de nous appeler demain.
- Pierre ! Marine ! Vous venez ? Les petits ont hâte de découvrir leurs cadeaux ! Et ils sont fatigués !
L'appel d'Adan nous coupe dans notre échange et je repose ma fille par terre pour me diriger vers la voiture, à côté de laquelle m'attendent mes parents, transis de froid.
- Je suis désolé, je vais mettre le chauffage.
- Ce n'est rien, fiston ! Le bien-être de Marine passe avant notre confort, me rétorque mon père.
- C'est quand même dramatique qu'une mère de famille ne puisse pas être présente aux côtés de sa fille le soir de Noël...
- Maman, c'est son travail !
- Mais pourquoi être militaire ? Elle aurait pu faire bien d'autres choses !, s'exclame-t-elle.
- Tu sais, si elle avait travaillé dans la restauration ou dans l'hôtellerie, ça aurait été pareil...
Ma mère ne répond pas, et je sais qu'elle cherche une réponse à ma phrase.
- La société actuelle est bien triste...
J'acquiesce en silence, pensant avant tout à ma fille, qui doit bavarder avec Loric et Ralph, tout en oubliant pas un seul instant que sa mère est en mission bien loin. Mes pensées s'égarent vers Camille, qui doit se trouver dans une tente, un bunker, un abri, qu'en sais-je, avec ses collègues et ses soldats, en grande partie masculin. Elle a énormément travaillé pour passer capitaine l'année dernière. Elle a dû se battre, casser les aprioris de ce monde à majorité masculine, mettre en avant toutes ses qualités physiques, intellectuelles, et de commandement. Elle a tellement donné pour nous apporter une stabilité économique, à Marine et moi, que je ne peux pas lui en vouloir de ne pas être présente aujourd'hui. Quoi qu'en pense ma mère, je sais que mon épouse a tout fait pour venir, et que Marine sera ravie de la retrouver dans deux jours.
Une fois la voiture garée, nous entrons rapidement dans la maison, et les quatre enfants se précipitent vers le sapin, en dessous duquel le Père Noël a déposé tous ses cadeaux.
- Papa ! Regarde ! Il y en a pour maman aussi ! Et tiens, pour toi !
Je me retrouve rapidement avec plusieurs paquets dans les mains et, comme tout le monde en cette soirée, je déchire avec hâte les papiers cadeaux que les petits elfes ont mis tant de temps à confectionner.
- Regarde, papa ! J'ai eu la poupée que je voulais !
Je détaille avec curiosité la poupée vampire, que Marine aime tant, ainsi que les autres jouets qui lui ont été apportés. Dans le salon, auprès du sapin, règne une ambiance assez chaotique, entre les cris des enfants, les bruits de papiers arrachés, les rires, et le flash de l'appareil photo de mon père, qui nous donne à tous des étoiles plein les yeux.
- Han ! Elle a eu la poupée !
- C'est trop génial ! Maman, j'ai eu mon camion !
A cette petite phrase anodine, je vois l'éclat dans les yeux de ma petite princesse changer rapidement. Je devine immédiatement la déception qui l'emplit à ne pas pouvoir, elle aussi, montrer ses cadeaux à sa mère.
- Le jeu que je voulais !
- Marine ! Regarde ce paquet !, s'exclame mon père en me lançant un clin d'œil.
Grâce à son intervention, les yeux de ma fille redeviennent ceux d'une fillette. Les éclats des enfants et la présence de ma famille m'emplit le cœur de joie. Même si l'absence de mon épouse est pesante, la joie de ma fille est ce qui m'est de plus précieux.
Les plus jeunes sont partis dormir, le calme reprend peu à peu la maison. Je profite donc de cet instant de répit pour regarder mon téléphone. Aucun appel en vue. Il en est de même pour mon ordinateur, que j'allume à l'instant.
- Maman a pu appeler ?
- Non, ma puce. Mais elle le fera demain.
- Tu me réveilles, hein, papa ? Même si maman appelle à huit heures !
- Bien sûr, ma petite puce. Allez, il est très tard, il faut que tu ailles dormir.
Ronchonnant un peu, Marine accepte de monter avec moi dans sa chambre qui, après s'être mise en pyjama, entre dans le lit.
- Dis, papa, tu me raconterais une histoire ?
- Oui, ma puce. Même si tu es un peu grande pour ça !, lui répondis-je, en lui faisant un clin d'œil.
- Non, on n'est jamais trop grand !
- Tu veux quel conte ?
- La fée noire !
J'accepte et ouvre le livre de conte. Celui-ci est son préféré, que sa mère, à la peau couleur caramel foncé, adorait lui raconter quand elle était petite. Pas étonnant qu'elle l'ait choisi.
Alors que Marine s'est endormi depuis déjà quelques minutes, j'entends le vibreur de mon téléphone et suis surpris de constater que mon épouse m'appelle depuis son téléphone personnel. Me dépêchant, je descends rapidement les escaliers et décroche.
- Ma chérie ! Je suis tellement heureux de t'entendre ! Comment vas-tu ? Je suis désolé pour tout à l'heure, j'étais sur la route...
- Pas de problème, mon cœur. Tu es bien chez tes parents ?
- Oui, et toi ?
- Aussi.
Je reste un instant sans voix, ne comprenant pas ce que veut dire mon épouse.
- Par contre, je veux bien que tu m'ouvres. Il fait beaucoup plus froid ici que là où je suis en mission.
- Je... je...
Je me précipite vers la porte d'entrée et ouvre sur Camille qui, vêtue de sa tenue d'armée et sac à dos à ses pieds, me regarde de ses grands yeux foncés. Je l'enlace fortement, ayant besoin de savoir si elle est réellement présente ou s'il s'agit d'un mirage.
- Mais... comment ?
- C'est pour cela que je vous appelais hier. Pour vous informer que j'avais eu une permission !
- Marine va être tellement contente !
- Elle dort ?
- Oui, viens.
J'entraîne dans la maison mon épouse, et nous montons doucement les escaliers. Une fois devant la porte de mon ancienne chambre, elle semble hésiter un instant, craignant de troubler le sommeil de notre enfant. Puis, délicatement, elle pousse la porte et entre sur la pointe des rangers. Elle tend la main vers notre fille et lui caresse le front, avant de lui embrasser la joue.
Marine ouvre les yeux, et l'éclat que nous y voyons nous transcende aussitôt. Elle est surprise, mais la joie remplace très vite ce sentiment.
- Maman !
Notre fille autour du cou, Camille rit aux éclats et je la rejoins sur le lit de Marine. Finalement, ce Noël sera peut-être l'un des plus beaux.
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