Troisième partie : le soir
Lorsque je me réveille, la première chose que je vois sont des bottes de cuir vert que je connais bien.
« Félix, je marmonne.
- Reste tranquille, Hyunjin. »
Je me redresse difficilement sur le sol dur et papillonne des yeux. Il fait sombre et je ne vois presque rien, et puis ma tête me fait affreusement souffrir.
« Hey... Ça va ? »
Je hoche la tête en réponse à la question de Félix et regarde autour de moi. Nous sommes dans une pièce sombre, le sol et les murs sont en béton et il y a une porte en fer en face de moi, et surtout, dans la pièce se trouve Intak, Ryujin, Jeongin, Lia, et Minho.
Jeongin est le seul debout, adossé contre le mur, Intak et Lia semblent dormir, affalé l'un sur l'autre, Ryujin est assise en tailleur au milieu de la pièce, son corps émettant une légère lumière bleue, la seule source de lumière de la pièce, et Minho est assis dans un coin, ses bras entourant ses jambes et son front posé sur ses genoux.
« Qu'est-ce que vous faites là ?
- Ils sont venus nous chercher chez toi à peine une heure après que tu sois partis pour l'arène et ils nous ont amené là, et puis ils vous ont amené quelques heures après. Tu étais évanoui et Minho n'a pas prononcé un mot depuis que vous êtes arrivé il y a vingt minutes à peu près, alors je ne sais pas grand-chose. »
Je me frotte les yeux puis tend le bras à Félix pour qu'il m'aide à me lever et vais m'asseoir à côté de Minho. J'entoure ses épaules de mon bras et laisse tomber ma tête sur la sienne.
« Hyunjin, murmure-t-il.
- Mmh ?
- Je suis désolé.
- Je sais.
- Tu m'en veux ?
- Jamais.
- Je m'en veux.
- Je sais.
- J'aurai dû mourir ce jour-là.
- Je serai mort aussi.
- On aurait été réuni.
- Mais vous nous auriez laissé seul. »
Félix s'assoit en face de nous et prend nos mains dans les siennes.
« Et vous savez très bien que l'on n'aurait pas survécu seuls.
- Et maintenant vous êtes enfermés avec nous. »
Le silence se fait. Et plus personne ne le trouble, même lorsqu'on nous apporte un bout de pain à chacun, même lorsqu'un garde nous annonce que nous allons être exécuté le lendemain, même lorsque Lia se réveille en pleurant d'un cauchemar, même lorsque la porte s'ouvre doucement et se referme aussi discrètement qu'elle s'est ouverte.
Yeji se tient devant nous, elle a quitté sa tenue de combat et ne porte plus qu'une longue chemise blanche avec une large ceinture marron.
« Hyunjin, appelle-t-elle en se précipitant vers moi. Tu n'es pas blessé ? »
Mais évidemment seul le silence lui répond.
« Écoute, il faut faire quelque chose. »
Toujours le silence. Elle se relève.
« Je suis ici en cachette, j'ai besoin de comprendre pourquoi vous avez fait cela, surtout toi Hyunjin.
- Pourquoi ? »
Ma voix est rocailleuse et tremble un peu.
« Comment ça pourquoi ?
- Pourquoi tu es là ? Tu ne me déteste pas ? »
Je sens Minho se tendre à côté de moi et attraper ma main.
« Oh Hyunjin... Bien sûr que non je ne te déteste pas. Tu restes mon petit frère, quoi qu'il arrive. »
Je déglutis difficilement.
« C'est pour ça que j'aimerai comprendre.
- Il n'y a rien à comprendre, Yeji. On est les méchants. On suit nos idéaux sans se soucier des conséquences. »
Ses yeux aussi noirs que les miens me fixent en silence. Elle enregistre l'information.
« Tu ne peux pas dire ça Hyunjin, intervient Ryujin qui nous tourne toujours le dos, au milieu de la pièce.
- Surtout vu la manière dont ils sont venus nous chercher, grommelle Jeongin.
- Comment ? demande Yeji.
- Ils ont retourné toute la maison jusqu'à nous trouver et ils nous ont traîné dehors, ils s'en foutaient que Lia soit aveugle, alors Intak a tenté de leur faire comprendre, l'officier lui a envoyé son poing dans la gueule, je n'avais jamais vu un coup aussi violent. »
Mes yeux se tournent vers Intak et Lia, toujours l'un à côté de l'autre, Lia a les yeux fixés sur ses pieds mais Intak me regarde, les yeux pleins d'une fureur que je n'ai jamais vus. Un énorme coquard est visible sur sa joue.
« Sans Félix je pense que j'aurai foncé dans le tas aussi, avoue Jeongin. Il a réussi par je ne sais quel miracle à les faire se calmer, mais sérieusement, c'était du jamais vu, les soldats étaient plus violent que tout ce que tu peux imaginer. »
Mon sang s'est glacé dans mes veines. Minho serre ma main comme si c'était la seule chose qui le retenait, et c'est bien possible que ce soit le cas.
« Est-ce qu'ils ont blessé quelqu'un d'autre, demande Yeji d'une voix blanche.
- Quelques bleus par ci par là, répond Jeongin. Mais rien de grave. »
Je me lève et commence à faire les cent pas, je ne pensais pas que ce serait si grave. Et puis s'ils sont venus les chercher à peine une heure après que je sois partis c'est qu'ils savaient déjà qu'ils étaient là, mais comment ? Et ça veut dire que le marché du chancelier était faux, puisqu'il connaissait déjà mes alliés.
La panique s'installe doucement en moi, mon rythme cardiaque s'accélère, mes mains sont moites, je sens la sueur couler dans mon cou. Il n'y a pas d'issus à ce problème.
« Madame Hwang ? Il y a quelqu'un qui arrive. »
Yeji se redresse brusquement et me jette un regard désolé.
« Vas-y, je lui dis. De toute manière l'issus de ce combat est déjà décidé.
- Je vais voir ce que je peux faire, me souffle-t-elle.
- Si tu veux. »
Elle m'offre un sourire crispé puis disparaît derrière la porte qui se referme sans bruit.
« Qu'est-ce qu'on fait Hyunjin ? »
Je me tourne vers Félix qui me regarde avec attention. Il a toujours été celui qui m'aidait le plus, celui qui a toujours cru en moi et en Minho.
Ses grands yeux bruns me regardent avec attention. Jeongin s'est redressé, Intak me fixe toujours, Lia a relevé la tête, et Ryujin s'est levée. Je me tourne vers Minho, mais lui aussi me regarde comme si j'étais celui qui avait les réponses.
Mais si je ne les ai pas ? Et si eux aussi se sont fait une image de moi qui n'est pas la réalité ?
Arrête Hyunjin, tu ne peux pas les décevoir, il faut que tu trouves une idée, et vite.
Mais au moment où je m'apprête à parler la porte s'ouvre avec fracas et les gardes du chancelier entre pour nous forcer à nous aligner contre le mur, je serre la mâchoire en les voyant soulever Lia sans ménagement et la coller contre le mur sans se préoccuper de ses pleurs.
« Calme toi, me chuchote Minho. Ça ne sert à rien. »
Épaule contre épaule, on regarde le chancelier entrer dans la cellule, son visage d'habitude habillé d'un sourire hypocrite est fermé et sans émotion.
« Bien, dit-il en s'arrêtant devant nous. Il semblerait que certains habitants aient trouvé touchant le fait que monsieur Hwang saute pour retrouver son traître d'amant. Vous êtes remonté dans leurs estimes alors la cour suprême à décider de vous condamner à simplement à dix ans de prison. »
Minho se serre de plus belle contre moi, il a peur que je craque, je le sais. Mais cette annonce, curieusement, à suffit à me faire redescendre les pieds sur terre.
« Vous vous doutez bien que je suis contre cette décision, continue le chancelier. Mais le bonheur de mes citoyens est ma seule motivation. »
Un rire sans joie m'échappe et je me redresse, moi aussi le bonheur des citoyens est ma seule motivation.
« Je crois qu'on n'a pas la même définition de bonheur, dis-je sarcastiquement. Pour moi le bonheur c'est la liberté. C'est aimer qui on veut, c'est vivre comme on l'entend, c'est apprécier ce qui nous entoure. Vos citoyens, non, vos sujets n'ont rien de tout ça.
- Et cela fait de moi un méchant ? Juste parce que je fais en sorte qu'ils n'aient pas à s'inquiéter de quoi que ce soit ? »
Il m'observe en silence, attendant ma réponse. Mais je n'ai rien à lui dire.
« Quoi qu'il en soit, vos amis seront exécutés demain à la première heure, pendant que vous resterez bien sagement dans votre petite cellule.
- Plutôt mourir, crachais-je.
- Comme je vous l'ai dit, la cour suprême a décidé et même moi ne peux rien faire contre.
- Alors je me laisserai mourir.
- Hyunjin, chuchote Minho.
- Non. Je suis sérieux. »
Le chancelier plisse ses yeux et reste silencieux quelques instants, me fixant. Mais je tiens son regard, je suis plus sérieux que je ne l'ai jamais été, et un plan commence à se former dans mon esprit.
« Très bien, alors vous serez exécutés aussi. »
Ses lèvres s'étirent en un faux sourire et il se retourne sans un mot de plus. Une fois de nouveau seul je fais signe à mes amis de se rapprocher de moi.
« J'ai un plan. Ils ne nous ont pas encore eu. »
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