
Chapitre 6
Mon réveil sonne d'un bruit strident qui résonne dans ma tête durant plusieurs minutes. Je me lève difficilement avec une courbature et un bleu au bras droit. Comme à mon habitude, je prends mon petit-déjeuner préparé par ma mère, mais aujourd'hui, elle a aussi laissé un mot :
Bonjour ma chérie,
Je suis désolée pour tout ce que tu as subi en étant enfermée avec moi. Je ne m'étais jamais rendue compte que tu n'allais pas bien... Ou du moins, je refusais de me dire que c'était par ma faute. C'est vrai que tu souris tout le temps, tu ne montres jamais tes faiblesses, tu es forte comme ton père ! Ah.... ton sourire, ce qu'il m'a manqué hier soir !Je t'aime mon amour, et je te promets d'essayer de me rattraper .
Gros bisous, ta maman qui t'aime
Je prends l'enveloppe rose dans laquelle était la lettre, et la fourre dans ma poche. Quant à la lettre, je l'examine. La calligraphie de ma mère est tellement jolie, que c'est dommage qu'elle soit gâchée par une bavure ronde, ressemblant à une larme tombée dessus. J'empoigne la lettre, la froisse tout en marchant vers ma chambre, en fait une boule et vise ma poubelle. La boulette entre directement dedans.
Je mets de l'arnica sur mon bras, me prépare pour aller en cours, prends mon sac, et m'apprête à sortir, lorsque je me rappelle mes paroles de la veille :"je fais ce que je veux". Je retourne dans ma chambre, sors ma boîte à maquillage. Seulement après m'être occupée de mon visage, je prends le chemin du lycée.
Arrivée dans la cour de récréation, je sens les regards braqués sur moi. Une boule au ventre apparaît, mais je continue de marcher, la tête haute, et un regard noir sous mes couches excessives de mascara.
La matinée n'a rien de passionnant, une heure de mathématiques, deux heures de français, et une heure d'histoire. Tous les professeurs me regardaient de haut en bas, mais n'osaient rien dire, pas même mon professeur principal.
A la pause déjeuner, je décide de manger seule. Je choisis alors mon repas, et vais m'asseoir le plus loin possible de" la bande de Karine". Je mange tranquillement quand Claire arrive et s'assoit à mes côtés :
"-Salut, me déclare-t-elle
-Salut.
-Je suis venue te parler sans les filles, je me suis dit qu'après ce que tu m'as dit hier, tu n'aurais pas voulu qu'elles soient là...
-Tu as très bien fait, dis-je en lâchant mes couverts, merci.
-Qu'est ce qui est arrivé à ton visage ce matin ? sais-tu que nous n'avons pas le droit au maquillage ?
-Oui, je le sais très bien !
-Mais que dirait ta mère, si elle t'avait vu partir comme ça ?
-...
-Bon écoute Ana, je voudrais t'aider, mais pour ça, il faut que tu sois coopérative"
Elle part, récupère son plateau à la table des filles et revient.
"- Bon, par où commencer ? lança-t-elle en m'observant
-Peut-être par finir de manger, dis-je
-Excellente idée !"
Nous rions timidement avant de finir notre repas.
C'est fou comme Claire arrive à me faire oublier ma vie quand elle parle. Avec ses amies elle paraît très effacée alors que c'est une bonne personne.
La fin du repas arrivée, nous sortons du self. Je remarque que Karine et les autres nous regardent, enfin..., me regardent plutôt. J'ai l'impression de passer pour une "voleuse d'amie maquillée". Je n'en ai pas du tout envie. Je déclare donc à Claire:
"-Va rejoindre tes amies, je crois qu'elles t'attendent...
-Non, non t'inquiètes pas, elles sont très ouvertes tu sais, tu devrais apprendre à plus leur faire confiance.
-Ah, de la confiance ! Encore de la confiance ! marmonnai-je
-Pardon ?
-Non, rien.
-Bon, allons te démaquiller.
-Mmm, je sais pas, j'aime bien
-Toi tu aimes peut être bien, mais pas le proviseur, et ni les pions !
-Bon, allons-y alors, qu'est-ce qu'on attends ?!"
Nous nous dirigeons vers les toilettes. Ceux-là sont vides, et je commence à comprendre pourquoi. Une odeur nauséabonde envahie mes narines et risque de me faire évanouir. Je prends place devant l'évier, rince plusieurs fois mon maquillage qui reste durement accriché à ma peau. Le gris sur mes paupières coule, accompagnant le rouge à lèvre bordeaux, le mascara, et l' eye-liner, ainsi que les trois couches de fond de teint. Lorsque je m'observe dans le miroir, j'ai l'impression que ce n'est pas moi. Les larmes commencent à me couler sur les joues. Je ferme les yeux, et repense à la jeune fille heureuse que j'étais, le sourire aux lèvres, tout le temps. La jeune fille dont parle ma mère dans la lettre que j'ai jetée ce matin. Comment en suis-je arrivée là ?
Claire me demande si je vais bien, et je lui réponds, après un moment de silence, que tout va bien, qu'elle n'a pas à s'inquiéter. Il faut que je fasse attention, je me rapproche de plus en plus d'elle, et je crois que sa compagnie me plaît, comme si elle était essentielle à mon bien-être.
L'après-midi passe lentement, mais les cours de demain matin devrait tout rattraper. Je l'espère.
La journée est finie. Je sors de l'établissement et enroule mon écharpe autour de mon cou. Le vent souffle, la pluie commence à se montrer, décidément, quelle journée de merde !
Je rentre ma clef dans la serrure, la tourne et ouvre la porte de notre appartement. Une odeur de poulet au curry s'empare de moi. Je referme vite la porte d'entrée pour que cette odeur nous reste et je me dépêche d'ouvrir celle de ma chambre pour qu'elle pénètre dans mon espace.
Nous mangeons dans le silence. Enfin, jusqu'à ce que ma mère dise :
"-Ta journée s'est bien passée ?
-Bof.
-Pourquoi ?
-Ça te regarde pas !
- Bon d'accord... et Claire ? Comment elle va ?
-Très bien."
Je débarrasse la table sans décrocher d'autres mots.
Je me précipite dans ma chambre, ferme la porte à clef et me prépare à aller au lit. Je m'allonge sous l'épaisse couette et me tourne vers mon bureau.
Je regarde la poubelle, ainsi que la lettre, en boule, gisant au milieu des vieux documents et chewing-gums.
Je la regarde, la fixe. Dois-je la récupérer ?
Soudain, ma mère frappe à la porte.
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