Chapitre 1
Mon nom est Marie Bédard, j'ai 30 ans et je suis originaire de Montréal au Canada. J'ai eu une enfance typique, mes parents se sont divorcé quand j'avais 6 ans, rien d'anormal jusqu'ici. J'ai vécu avec ma mère qui tentait tant bien que mal d'assumer le rôle du père et de la mère puisque mon géniteur (il ne mérite pas le titre de père) était plus occupé à courir les jupons qu'à s'occuper de sa propre fille. J'ai longtemps tenté d'attirer son attention, sans jamais y parvenir. Je m'appliquais à l'école et j'étais première de classe, mais ce n'était jamais assez. J'ai fait une tentative de suicide à 14 ans, rien de bien méchant, un cri du cœur pour essayer d'attirer son attention, mais il ne s'est même pas déplacé pour venir me voir à l'hôpital. Je ne l'ai d'ailleurs pas revu depuis l'âge de 22 ans, moment où j'ai appris qu'il souffrait d'un trouble de la personnalité limite avec trait narcissique. J'en ai compris des choses ce jour- là, notamment que tout ce qui s'est passé n'était pas ma faute et que ma préservation était plus importante qu'une relation conflictuelle avec un homme qui ne serait jamais satisfait de la jeune femme que j'étais devenue.
J'ai quitté le domicile familial à l'âge de 17 ans, question de développer mon autonomie et mon sens des responsabilités et je suis partie habiter à Québec où j'étudiais pour devenir physiothérapeute sportive. Quelle blague, je DÉTESTAIS les sciences. Encore une fois, j'essayais de plaire à un géniteur qui au fond n'en avait rien à foutre. Après deux ans d'études intensives à me torturer et à être malheureuse, j'ai décidé de me réorienter vers les communications. Celles-ci m'avaient toujours intéressée que ce soit l'aspect art et culture ou communautaire. J'ai donc finalement obtenu mon bac et depuis un peu moins de 10 ans, je travaille comme chargée de communication pour des organismes à but non lucratif.
Il y a six mois, Ryan Carter, le PDG d'une grosse boîte new-yorkaise, Carter Corporation, est venu me recruter pour me mettre à la tête de l'une de ses fondations. Il m'a connue grâce à une campagne qui mettait en lumière la problématique de l'itinérance récurrente chez les jeunes âgés entre 17 et 25 ans et comme il venait tout juste de mettre sur pied sa fondation Together for the Youth, il a pensé que je pourrais être à la direction des communications. Logique me direz-vous, puisque celle-ci avait pour but d'amasser des fonds pour lutter contre l'itinérance. J'avoue avoir longuement hésité, non seulement je devrais quitter tous mes repères pour me retrouver dans un environnement complètement inconnu, mais j'allais devoir travailler principalement en anglais, dans un monde qui m'était totalement étranger. Ryan a su se montrer très convaincant, d'abord en m'assurant que Carter Corporation prendrait la totalité des modalités en charge. Je n'aurais donc à me préoccuper de rien, ni des papiers, ni du déménagement, ni de me trouver un logement. Ajoutez à cela une offre salariale plus que compétitive, de même que toutes les ressources dont dispose sa boîte pour créer mes différentes campagnes de communication, impossible de dire non. Je me suis donc retrouvée il y a quatre mois, bien installée dans un studio meublé avec vue sur Central Park et avec un bureau à même l'édifice de Carter Corp, entourée d'une charmante équipe de créatifs, de graphistes, de rédacteurs et de développeurs Web.
Depuis, je m'acclimate à ma nouvelle vie et je travaille d'arrache-pied à l'organisation du premier concert-bénéfice de la fondation. C'est le premier événement d'envergure pour celle-ci. Une façon de la lancer et de la faire connaître. La soirée doit avoir lieu dans six mois et il reste encore beaucoup de travail à faire. Mon équipe et moi sommes responsables de tous les éléments de communication, du visuel au Web en passant par les discours, les publicités et le Q&A des porte-parole. Je jette un coup d'œil à ma montre et me rends compte que je dois quitter pour me rendre à une réunion avec Ryan et Mark Leviel, qui s'occupe de l'aspect logistique de l'événement. De mon côté, je suis accompagnée de Matt Ortega, graphiste et de Cynthia Thompson, rédactrice. Tous deux font partie de mon équipe. Matt était auparavant au département communication et marketing de CC tandis que j'ai moi-même recruté Cynthia à mon arrivée. Elle vient du monde de la philanthropie et a une solide expérience en rédaction.
Matt est l'une des premières personnes que j'ai rencontrées en arrivant à New York. C'est un véritable rayon de soleil, sa bonne humeur est contagieuse et il participe à améliorer le moral des troupes. Seul bémol, c'est un dragueur invétéré, mais nous avons mis les choses au clair au départ et nous sommes vite devenus bons amis. Il m'a aussi présenté Lisa Parker, qui est agente au service à la clientèle. C'est un peu le visage de Carter Corporation, puisqu'elle est la première personne que les visiteurs voient quand ils entrent dans l'imposant édifice.
— Matt, Cynthia, c'est l'heure, le dossier est prêt? demandé-je pendant que nous nous dirigeons vers les ascenseurs pour aller rejoindre Ryan et Mark.
— T'inquiète pas Princesse, tout est prêt, ils n'en reviendront pas! me lance mon collaborateur avec un clin d'œil.
Je lève les yeux au ciel, mais ne peux m'empêcher de sourire.
— Contente-toi de sourire et d'expliquer la partie graphisme Ortega. Je me chargerai de les épater.
Il me fait un de ses sourires enjôleurs et appuie sur le bouton.
— Cynthia, j'ai beaucoup aimé les correctifs que tu as apportés aux différents textes qui se retrouveront sur le Web et les réseaux sociaux.
—Merci Marie, mais j'ai travaillé avec les notes et les idées que tu as développées, se contente-t-elle de me répondre en rougissant.
— C'est un travail d'équipe ma chère. J'espère seulement que ça plaira aux hautes sphères.
Nous descendons au 32e étage de la tour pour nous rendre à la salle de conférence où Ryan et Mark nous attendent. En nous voyant arriver, Ryan lève les yeux de son téléphone, sourire aux lèvres et vient à notre rencontre.
— Bonjour mademoiselle Bédard, entrez, installez-vous, j'ai vraiment hâte de voir ce que vous avez développé, me dit-il en m'indiquant la chaise où je dois prendre place.
— Bonjour monsieur Carter, nous avons beaucoup travaillé, j'espère que la présentation sera à la hauteur de vos attentes, réponds-je en allant installer l'ordinateur portable.
— J'ai totalement confiance en vous mademoiselle sinon je ne serais pas allé vous chercher au Canada, fit-il un fin sourire se dessinant sur ses lèvres.
Toutes les fois où j'ai rencontré Ryan, il ne s'est jamais départi de son sourire énigmatique. Le PDG de Carter Corporation doit avoir 35 ans, il est plutôt bel homme, grand brun au regard calme et apaisant. Toujours tiré à quatre épingles, je suis certaine qu'il collectionne les conquêtes comme je collectionne les montres.
— Vous vous souvenez de Mark? s'enquiert-il.
Il se tourne vers celui-ci qui se lève à son tour pour venir me saluer.
— Bonjour mademoiselle, j'ai bien hâte d'entendre votre présentation. Nous pourrons par la suite discuter de ce qu'il restera à faire, m'explique-t-il en me tendant la main.
— Bonjour monsieur Leviels, mon équipe est prête à vous épater!
Nous nous installons et lançons notre présentation. Je donne les grandes lignes du projet et explique les différents axes qui seront utilisés selon les publics qui sont choisis – grandes compagnies, gens d'affaires, monsieur et madame tout le monde. Matt présente la charte graphique et les différents formats développés en fonction des supports visuels qui seront utilisés pour la promotion – affiches, dépliants, coroplastes, publicités (Web, journaux, télé, métro). Finalement, Cynthia donne les différents exemples de textes qui ont été développés pour nourrir les différentes plateformes – site Web, Facebook, Instagram, Twitter. Nous passons l'heure suivante à répondre aux différentes questions de Ryan et Mark. Celles-ci sont plutôt pointues, mais nous sommes très bien préparés. Nous sommes donc en mesure de répondre à toutes leurs interrogations.
— Merci mademoiselle, c'est de l'excellent travail! nous félicite Ryan.
— C'est un projet qui est très stimulant, j'ai vraiment hâte que le tout soit en production.
— Bien! continuez comme ça.
Il se tourne vers Mark.
— Comment avancent les choses de votre côté Mark?
— Les préparatifs vont bon train. Nous avons trouvé la salle, les services techniques, le traiteur et deux groupes, le troisième n'étant plus disponible. Il faut donc essayer d'en trouver un autre ou simplement revoir la programmation.
Celui-ce se tourne vers nous soucieux. On est à six mois de l'événement, ça laisse encore du temps pour trouver un nouveau groupe, mais ça fait un peu serrer. Pendant que je réfléchis à une alternative, je vois Matt trépigner à mes côtés. Je lui chuchote :
— Mais c'est quoi ton problème garçon?
— Je connais un groupe qui serait PARFAIT pour remplacer celui qui vient de se désister.
— T'es sérieux? demandé-je en haussant le sourcil.
— Oui et en plus Carter connaît le chanteur, se contente-t-il de me répondre mystérieux.
Je sens alors le regard brûlant de Ryan se poser sur nous.
— Vous aimeriez peut-être partager avec le reste du groupe?
— Non... me contenté-je de répondre avant que Matt me coupe.
— Vous avez pensé au groupe de Colin pour remplacer celui qui n'est plus disponible monsieur? demande-t-il.
Mark observe Matt curieusement pendant que Ryan semble réfléchir. Quant à mon collègue, il continue à se tortiller comme un enfant sur sa chaise.
— Excellente idée monsieur Ortega! Une touche de métal pourrait nous apporter un différent type de donateurs. Je compte sur vous pour lui en parler.
— Bien monsieur!
— Je pense que ça fait le tour de ce dont nous devions discuter. Je vous remercie et poursuivez votre excellent travail. On se revoit à nouveau dans deux semaines.
Nous nous saluons, rassemblons nos affaires et quittons la salle de conférence pour remonter au 46e étage. J'observe Matt qui est tout sourire à côté de moi.
— T'as bouffé un clown ou quoi? m'énervé-je.
— Non, j'ai seulement vraiment hâte de parler à Colin, me répond-il en trépignant.
— Au fait, comment Ryan le connaît?
Matt éclate de rire, ce qui m'insulte légèrement.
— Parce qu'en plus tu te fous de ma gueule?
— Mais non Princesse, Colin est mon meilleur ami. C'est aussi un des meilleurs développeurs chez Carter Corporation. Tu ne l'as probablement jamais croisé pour deux raisons : parce qu'il vient tout juste de revenir d'une affectation en Asie et parce qu'il a, disons une personnalité particulière, m'explique-t-il tout sourire.
— OK... Il a l'air super sympathique ton ami.
Cynthia pouffe de rire derrière nous. Mais c'est quoi ce personnage que je n'ai encore jamais vu? Nous arrivons aux ascenseurs et j'appuie sur le bouton.
— D'ailleurs, son groupe, les Nightmareden, se produit dans un petit bar vendredi. Comme tu risques de travailler avec eux, tu dirais quoi de venir les voir avec moi? Lisa y sera aussi, elle les connaît bien et a un œil ou deux sur Adam, le batteur.
— Mouais, c'est pas une mauvaise idée. Ça pourra m'aider pour la promotion des groupes.
— Ben voilà, c'est arrangé!
Nous arrivons à notre étage et nous dirigeons vers nos cubicules pour terminer la journée. Je m'installe derrière mon ordinateur pour faire le suivi de mes courriels quand je vois la tête ébouriffée de Matt apparaître. Il arbore un large sourire.
— Vas-y Ortega, crache ton morceau.
— Je veux seulement que tu te prépares mentalement pour la soirée vendredi. se contente-t-il de me dire hilare.
— Comment me préparer? demandé-je intriguée par ses propos.
Pour toute réponse, Matt éclate de rire.
Mais dans quoi est-ce que je me suis embarquée?
***
Musique en entête : Terre promise d'Eric lapointe
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