Zeik regarda le ballon entre ses mains. Son touché rugueux, sa couleur orange. Il aimait cela. Il aimait le son qu'il faisait lorsqu'il rebondissait sur le parquet ciré du petit gymnase.

Les élèves couraient pour s'échauffer, d'autre s'étiraient, d'autres encore attendaient les consignes du professeur, plantés comme des piquets au milieu du terrain. Cette dernière catégorie regroupait tous les non sportifs, ceux qui n'aimaient pas mettre des joggings et n'attendaient qu'une chose : la fin du cours.

Il observa le panier au-dessus de sa tête. Son père lui avait interdit de jouer au basket. Il en était conscient. Mais là, c'était dans le cadre d'un cours. Il ne pouvait pas y échapper. Ne pas jouer revenait à sécher le cours.

Avec un sourire, l'adolescent fit rebondir le ballon, puis le lança. Un geste banal, sans réel forme. Le ballon traversa le filet, avec un frémissement qui était si agréable à entendre.

Le professeur siffla.

- Venez par là. Aujourd'hui, nous commençons un cycle de basket.

Zeik remercia silencieusement le professeur d'avoir choisi ce sport, plutôt que le volley Ball, ou le badminton.

- Comme vous le savez, notre établissement possède une équipe de basket. L'une des meilleurs de la région niveau lycée, si je puis dire. Vous, premières années, pouvez bien être la relève de nos actuels titulaires. C'est pourquoi, à la demande de monsieur Hector, le coach, je fais ce cycle.

Zeik s'assombrit un peu en entendant parler de l'équipe de basket du lycée. La meilleure de la région... Il lâcha un petit rire. Le capitaine n'était qu'un joueur trop sûr de lui, fier et arrogant. Pour le reste de l'équipe, qu'ils soient titulaires ou suppléants, ce n'étaient pour la plupart que des moutons. Ils le suivaient et lui obéissaient au doigt et à l'œil.

Une équipe si différente de celle qu'il avait quitté au Japon.

- Bien, nous allons commencer par des exercices pendant une heure. Pour finir sur de cours matchs.

Devant un tableau qui avait vu passer bien trop d'explications et qui virait du blanc au gris, le professeur commença ses explications. En les écoutant, l'adolescent avait l'impression de remonter quelques années auparavant, lorsqu'il avait lui-même commencé le basket. Les exercices n'étaient pas exactement les mêmes, le principe restait identique. Ils apprenaient à dribbler, à attaquer, à défendre, à bouger sur un terrain, à marquer un panier et toutes les règles de base du basket.

Pour la plupart, qui touchaient un ballon de basket pour la première fois de leur vie, c'était laborieux.

Les dribbles n'allaient pas loin, les attaques ne ressemblaient à pas grand-chose et peu de panier étaient marqués. Zeik ne pouvait pas leur en vouloir. Après tout, ce n'était que le premier cours. Peu pouvait prétendre y parvenir parfaitement la première fois.

En observant les personnes de sa classe jouer, il se revit lui, lors de son tout premier entraînement. Proche du catastrophique. Ce souvenir le fit sourire. Le passé le fit sourire.

Il était si bien à cette époque.

Pourquoi l'avait-il quitté ?

- Kaîda, tu n'es pas là pour rêver.

Les minutes défilèrent, si rapidement, jusqu'à ce que le professeur siffle.

Tous se rassemblèrent, certain abandonnant des ballons sur place.

- Nous allons commencer les matchs. Vous êtes vingt-cinq, c'est parfait. Vous me faites cinq équipes de cinq. Vous savez tous compter jusqu'à cinq ? Et vous m'équilibrez tout ça, je ne veux pas tous les garçons d'un côté et les filles de l'autre ! C'est compris ?

Les élèves bougèrent, les équipes se formant petit à petit.

Zeik les regarda, sans savoir vraiment où il pouvait aller. Il fit un pas vers certaines personnes, s'arrêta, ils étaient déjà cinq et ils ne voulaient pas de lui.

- Zeik ! Viens avec nous.

Intérieurement, le garçon poussa un soupir de soulagement. Il se retourna. Sâme lui sauvait la mise. Elle était avec trois autres filles. Niveau équipe équilibrée, il y avait encore du travail à faire.

- Non Sâme, pas lui !

La jeune fille jeta un regard noir aux autres membres de l'équipe.

- Et pourquoi pas ?

Elle fit un sourire malicieux à l'attention du garçon.

- Croyez-moi, vous serez bien contente de l'avoir dans l'équipe.

Elle lui prit le bras, pour l'entraîner avec elle.

- Pourquoi tu ne me parles plus depuis que tu es revenu ? Lui demanda-t-elle tout bas.

Zeik lui répondit sur le même ton.

- Mes parents mon tout interdit, y compris voir qui que ce soit. Enfin c'est mon père surtout, mais peu importe, c'est la même chose.

- Tu m'en veux ?

- Tu n'as rien fait Sâme ! Je suis seul responsable et je dois l'assumer.

La jeune fille baissa les yeux sur ses chaussures de sport jaunes.

- Jusqu'à quand es-tu puni ?

Zeik haussa les épaules.

- Je ne sais pas. Cela risque de durer.

Seules quatre équipes commencèrent à joueur. Le professeur lança deux matchs sur demi-terrain. L'espace de jeu semblait minuscule.

Ne jouant pas encore, Zeik et Sâme allèrent s'asseoir sur les gradins.

- Tu peux faire quelque chose pour moi Sâme s'il te plaît ?

- Ce que tu veux !

Zeik regarda autour de lui. Personne ne faisait vraiment attention à eux.

- Je n'ai plus mon portable non plus. Et... Depuis quelque jour, je le vois plus... Lui.

- Lui ?

Le garçon lâcha un soupir.

- Tu sais de qui je parle Sâme !

- Oui je pense avoir compris...

- Tu peux envoyer un message à Ekel pour moi ? J'ai besoin de savoir où il est. J'ai besoin de le voir.

A son tour, Sâme regarda partout autour d'elle.

- Je n'ai pas son numéro.

- Mais tu es la mieux placée pour le trouver.

Elle eut un petit air satisfait et fière d'elle.

- Je lui enverrai ce message Zeik, c'est promis.

L'adolescent avait envie de la prendre dans ses bras et de la serrer fort. Elle n'allait pas faire grand-chose, pourtant pour le garçon, c'était tout ce qui comptait.

- Merci Sâme.

Elle aussi semblait se retenir de le prendre dans ses bras.

- Dernière équipe, sur le terrain !

Ils descendirent.

Zeik regarda leurs adversaires. Une équipe cent pour cent masculine. Cinq garçons, c'était bien la preuve que les équipes n'étaient pas équilibrées. Pourtant, Zeik était confiant. Cent pour cent masculine, certes, cent pour cent débutante également.

- Allez les filles, c'est à vous de jouer.

Des ricanements.

Zeik préféra ne pas relever.

Il se concentra.

Il allait jouer au basket, c'était tout ce qui comptait. Les garçons eurent le ballon, le professeur siffla. Ils s'élancèrent. Maladroitement et à un rythme plutôt lent. Zeik resta sans bouger. Il n'avait pas besoin de perdre du temps à analyser leur technique de jeu. Tout simplement parce qu'ils n'en avaient pas. Celui avec le ballon, arriva devant lui, continua son chemin, s'arrêta. Il lui manquait quelque chose. Cette chose essentielle lors d'un match. Le ballon.

Sans vraiment se presser, le voleur alla jusqu'au panier, sauta et fit un simple dunk. Il se laissa retomber légèrement sur ses pieds, un sourire satisfait sur les lèvres.

Le match dura à peine dix minutes. Un temps bien trop court pour Zeik. Un temps durant lequel l'équipe adverse n'eut pratiquement jamais le ballon et où Zeik joua quasiment seul. Sâme ne cachait pas sa fierté lorsque la fin du match fut annoncée.

- Zeik, tu sais jouer, c'est bien. Toutefois, vas-y doucement, d'accord ?

Il fit rebondir le ballon sur le sol.

- Je vais essayer.