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Un été à la gomme (version non raccourcie)

— Mini ? Mini ?

Jimin est avachi dans le canapé. Il fait monstrueusement chaud et la clim est de nouveau en panne. Mme Syuk, la voisine de palier, affirme que, d'ici une heure ou deux, tout sera rentré dans l'ordre. En attendant, Jimin ne supporte plus sa propre peau. Il n'aurait peut-être pas dû retirer son tee-shirt ; son coude colle à ses côtes, c'est poisseux. Jimin grimace.

— Mini ? insiste la voix agacée de Namjoon depuis leur chambre.

Jimin se redresse péniblement, se met à genoux, s'accoude au dossier du canapé, cale ses joues entre ses mains et observe Namjoon, à quatre pattes, fourrageant dans des piles de livres à même le sol.
Jimin sourit.

— Moni..., répond-il avec du rire dans la voix.

Namjoon se tourne vers lui. Son front est perlé de sueur, ses cheveux collent. Et pourtant il est magnifique !

— Tu as vu mon bouquin sur Charlotte Perriand ? Tu sais le gros, là ?

Avec ses mains, il mime quelque chose de vraiment large et long. Heureusement que Jimin sait de quoi il s'agit, sinon il hésiterait entre une valise ou peut-être leur aspirateur.
Jimin ne lui répond pas et l'observe. Namjoon commence à s'emporter. Il déteste perdre ses affaires (ce qui arrive trop souvent). Il gesticule, et les muscles de sa poitrine sautent au rythme de ses mots.

"Dommage qu'il fasse si chaud !" pense Jimin.

— Mais ! Jimin-ah ? Dis ? Tu ne l'as pas vu ?

Namjoon fait les cent pas autour de leur lit. Jimin le trouve très beau aussi, leur lit. Quand ils ont emménagé ensemble, il y a trois ans, ils se contentaient d'un matelas sur le sol. Mais Jimin fait des allergies aux acariens. Et comme ni l'un ni l'autre ne sont des chasseurs de poussière invétérés, Jimin a passé une grande partie de leur première année à éternuer et se moucher. Alors, ils ont investi dans un magnifique lit de bois blond. Jimin aurait préféré, au début, le lit à baldaquin, avec ses grands montants en métal blanc et or, et ses voilages. Namjoon aurait pu céder à Jimin, mais ils ont eu un éclair de lucidité en s'asseyant un peu brusquement dessus dans le magasin de meubles : c'était un lit bien trop léger et bruyant pour eux !

Namjoon passe devant la fenêtre et se penche pour regarder sous leur commode. La lumière de cette fin d'après-midi s'échoue sur sa nuque et l'orne de brun et d'or quand Namjoon y ébouriffe les petits cheveux humides de transpiration.

— Tu avais raison, tu aurais dû passer chez le coiffeur hier. Finalement, j'aime bien tes cheveux rasés, aussi...

Jimin se souvient qu'il faisait déjà terriblement chaud hier, et que la perspective d'accompagner Namjoon jusque chez le coiffeur, après avoir fini les dernières formalités à l'agence de voyage, l'épuisait.

— Ne les coupe pas, a-t-il supplié. Tes cheveux longs te vont si bien.

Ce n'était pas un gros mensonge. Juste un petit. Pour pouvoir rentrer à la maison. Et comme Jimin obtient toujours ce qu'il veut de Namjoon, ils sont rentrés, ont jeté leurs habits sur le canapé - ils y sont toujours, d'ailleurs - avant de faire la course jusqu'à leur douche.

Namjoon passe maintenant une main dans les cheveux qui pendent sur son front, les balaye vers l'arrière, essuie la sueur du dos de la main. Puis il se plante dans l'encadrement de la porte, les mains sur les hanches.

— J'ai toujours raison.

Jimin sourit. Namjoon est le plus sceptique, le plus dubitatif, le plus humble des hommes qu'il connaisse. Jimin sourit encore, avant de grimacer à nouveau. À présent, ce sont ses paumes qui collent à ses joues.

— Alors, tu as vu mon bouquin ?

Jimin pointe le doigt vers la cuisine.

Même s'il lui arrive d'avoir des crises de maniaquerie où il a besoin de ranger, trier, nettoyer leur petit appartement de fond en comble, Namjoon est désordonné. Jimin l'est encore plus que lui.

— Et qu'est-ce qu'il fait dans la cuisine ?

"Quelle mauvaise foi !"

Jimin se sent accusé. Quand Namjoon perd quelque chose, c'est toujours de la faute de Jimin. Ça, ça l'énerve !

Namjoon passe près de lui. Le parfum de son baume hydratant flotte jusqu'aux narines de Jimin. Et cette odeur apaise un peu l'agacement. Ou peut-être est-ce les proportions parfaites du corps de son petit ami. Ou ses larges épaules (Jimin a un faible pour les hommes aux larges épaules).

— Tu peux m'expliquer ? fait Namjoon en soulevant l'énorme pavé à bout de bras dans sa direction.

Ce qui est très impressionnant car ce livre doit bien peser deux kilos ! Mais, pour la forme, Jimin hausse les yeux au ciel et se laisse retomber mollement dans le canapé de velours gris.

— Pas deux kilos. Tu exagères toujours. Sept-cent-trente-cinq grammes. Exactement.
Jimin hausse un sourcil. Namjoon s'assoit près de lui.

— Oui, je l'ai pesé. Et oui, tu l'as dit tout fort.

Jimin ne sait pas s'il se fera un jour aux petites bizarreries de Namjoon, si cela cessera de le surprendre. Rien que d'y penser, Jimin est ému.

Quitte à mourir de chaud, à sentir sa peau coller, autant que ce soit tout contre Namjoon.

— Si j'étais un chat, je ronronnerais.

Jimin frotte son nez dans le cou de Namjoon. Et Namjoon, de sa main libre, caresse doucement sa nuque. Exactement là où Jimin aime sentir les doigts de Namjoon.

— Si tu étais un chat, mon dos et mes jambes seraient couverts de cicatrices, rit Namjoon en tournant une page de son énorme bouquin.

Jimin se glisse sous son bras et regarde les photos. Des photos de cette femme, Charlotte, que Namjoon admire, des hommes plus ou moins influents à ses côtés, des paysages mais surtout des meubles. Et du bois. Namjoon aime les meubles en bois, le design, la France.

Chaque été, ils fuient Séoul, sa chaleur étouffante et les regards plus ou moins bienveillants sur leur couple. C'est devenu leur petit rituel de passer trois semaines à Paris, en juillet, chaque année. Il peut y faire chaud aussi. Étouffant, même. Mais être soi-même sans penser à rien, sans se soucier de ce qui se fait ou ne se fait pas est si rafraîchissant ! Se tenir la main dans les rues de Montmartre, se dire des mots tendres à la terrasse d'un café, s'embrasser sur le pont des Arts... sans recevoir de regards désapprobateurs ou menaçants, cela n'a pas de prix !

Un jour, Jimin épousera Namjoon à Paris ! Il fera d'eux les hommes les plus heureux que la Terre n'ait jamais portés. Namjoon a beau dire que le mariage n'est qu'une formalité administrative, un bout de papier sans grande valeur, Jimin sait qu'il hésite et tergiverse. Il a bien vu la pile de livres de philosophie, de sociologie et de poésie sur l'amour, le mariage, le couple qui traine sous sa table de chevet. Il voit bien que les yeux de Namjoon brillent comme jamais lorsque Jimin aborde le sujet. Namjoon n'est que dilemmes, entièreté, sincérité presque naïve.

Paris leur tend les bras cette année encore. Namjoon y explose de bonheur et emmène Jimin au musée, dans les galeries d'art, au bord de la Seine. Jimin savoure les nuits parisiennes et se réjouit de voir enfin Namjoon danser librement. Le plus souvent, ils ne font rien d'extraordinaire. Rien de plus que ces couples de personnes âgées qui se tiennent la main et passent devant eux au Jardin des Tuileries. Jimin les admire et les envie. Namjoon le devine et lui répète inlassablement :

"Chacun son histoire, mon ange. La nôtre est déjà magnifique. Laisse-la mener tranquillement sa vie. Hummm ?"

Jimin est touché. Chaque fois. Cela vaut tous les "Je t'aime" soufflés et murmurés.

Mais quand même ! Pourquoi n'y aurait-il pas une sorte de créature divine qui fasse signer un contrat magique, avec leurs sangs mêlés en guise d'encre, qui les lierait pour toujours et à jamais ? Un contrat qui leur garantirait que jamais la douleur, l'indifférence, le désamour ne s'invitent entre eux.

Jimin aime Namjoon jusqu'au plus profond de ses os. Jimin le suivrait au bout du monde.

— Et si on allait prendre un bain, mon amour ? Hummm ? Hé ! Tu m'écoutes ? Tu fais semblant de ne pas m'entendre ! Moniiii ! Namjoon, c'est pas drôle. Réponds-moi. Je meurs de chaud !

Jimin se tortille pour placer son visage devant le livre. Le coin de la bouche de Namjoon se soulève. Jimin sait qu'il a gagné la partie. Il attrape le livre d'une main et le poignet docile de Namjoon pour l'entraîner vers la salle de bain.

PLILILI PLILILI

C'est leur sonnette.

"La poisse !" pense Jimin.

Namjoon rit. Jimin fronce le nez. Aurait-il encore laissé échapper ses pensées ?

— Oui, la poisse, répète Namjoon en enfilant rapidement un tee-shirt froissé abandonné sur le canapé. J'arrive ! crie-t-il. C'est sûrement Mme Syuk. Souris, Mini, ajoute-t-il avant de l'embrasser et de caracoler vers la porte d'entrée. Ce soir, on dormira bien au frais.

— Dormir ? geint Jimin.

📚🐈🪑


— Au printemps prochain, on adoptera un chaton ?

Jimin est assis en tailleur. Il range leurs affaires dans les deux grandes valises. Namjoon l'observe prendre un soin infini à bien disposer ce qu'il chamboulera en moins d'un quart d'heure une fois arrivé à l'hôtel.

— Tu es allergique au chat.

Namjoon adorerait avoir un chat. Mais qui s'en occupera tous les étés ? Lequel d'entre eux sera assez responsable pour ne pas oublier de l'emmener chez le vétérinaire ou d'aller lui chercher des croquettes ? Et surtout qui se collera à la corvée de litière ?

— L'allergologue m'a dit qu'on n'est pas allergique à tous les chats. Je lui ai demandé, poursuit Jimin en venant le rejoindre sur le lit.

Jimin s'assoit à cheval sur les jambes de Namjoon et des ses deux adorables petites mains le pousse contre le matelas. Jimin est léger comme une plume, frêle par certains aspects, mais aussi fort et solide. Si Namjoon voulait se redresser, il ne le pourrait pas. Quoiqu'il en soit, il ne le souhaite pas. Jimin, qui le chevauche à présent, plante ses deux paumes contre son torse et le maintient.

— On n'aura jamais de bébé, poursuit-il avec une moue boudeuse. Je peux bien avoir un chaton. Avec des poils blancs. Une femelle. L'allergologue dit que ça limite les risques.

Un bébé...

Avant Jimin, un de ses rêves était de devenir un père comme son propre père peut l'être. Probablement plus laxiste et gâteux. Il imaginait un tout petit humain à son image et à celle de l'amour de sa vie, à aimer, câliner. Un petit humain à qui introduire le monde et ses merveilles.

Et puis, il l'a rencontrée. Elle, si volcanique, si pleine de vie. Mais brisée aussi et poursuivie par les problèmes de santé. Qui devait congeler ses ovocytes à seulement vingt-trois ans ? Qui souffrait d'autant de maux à un si jeune âge et avait pourtant la force des survivants ? Namjoon l'avait aimée d'une passion violente et aveugle, refusant de voir que la distance entre eux n'était pas seulement géographique et se creusait de séparation en séparation. Après elle, après eux, lorsqu'elle a mis au monde l'enfant d'un autre, son désir d'être père s'est consumé, a disparu.

Jimin sait ce qu'il y a en savoir. Peu.

Namjoon lui dit parfois qu'il ne se sent pas prêt. Lorsqu'il a un peu de courage, qu'il ne souhaite pas devenir père. Lorsqu'il s'ouvre un peu plus que d'ordinaire à Jimin, qu'il veut bien y penser.

Namjoon y pense donc souvent. Quand on est incapable de prendre soin d'un chat, peut-on avoir un enfant ? Et comment feraient-ils ? Faudrait-il déménager, refaire leur vie dans un autre pays ? Dire au revoir aux amis, à la famille, à leur quartier, leur immeuble, leur "nid d'amour" ? Est-ce que leur couple y survivrait ? Il avait déjà refusé de le faire. Une fois. Dans une autre vie.

— Mon amour ?

Jimin frotte à présent son nez contre le sien. Il semble inquiet, moins volubile. Namjoon sait qu'il a tendance à se perdre dans ses pensées et à ne pas les partager suffisamment. Jimin le lui reproche si souvent.

— Mmm ?

— C'est OK pour le chaton ?

Jimin ne perd jamais le nord. Il est si intense et décidé parfois ! Namjoon glisse ses mains le long des hanches de l'amour de sa vie, et, soudainement, le retourne sur le matelas. Maintenant qu'il le domine, la douceur de ses traits, la profondeur de son regard, le surprend une nouvelle fois. Jimin répand l'affection autour de lui. Mais c'est aussi une personne avec des besoins de démonstration de tendresse, d'attachement, de dévouement si ardents ! Namjoon doute parfois que lui seul suffise à le combler. Et cela lui fait peur.

— On en reparlera.

— Moni...

— Mini ?

— Tu m'as déjà dit ça l'été dernier.

Namjoon se laisse couler tout près de lui. Il sent les doigts de Jimin chercher les siens. Namjoon soupire.

"Va pour prendre ce risque... Après tout, ce n'est qu'un chat, pas un petit humain à protéger du monde, de la société, de la désorganisation et de la folie douce de ses pères, de l'amour fou avec lequel ils pourraient l'étouffer..."

— C'est d'accord. Un tout petit, alors.

Jimin pousse un cri. En un clin d'œil, il est debout et saute sur le matelas.

Namjoon lui sourit bien qu'il n'aime pas tant que ça d'être secoué.

— Et tu feras sa litière.

— Pas de problème !

Namjoon a le sentiment de déborder de tendresse. Jimin le pousse à surpasser ses peurs. À petits pas, lentement mais sûrement. Il y a quatre ans, jamais il n'aurait imaginé partager un appartement, une vie, avec Park Jimin ! Park Jimin, l'être le plus lumineux et profond qu'il lui ait été donné de rencontrer ! Maintenant, ils ont un chez eux. Ils ont acheté un canapé et un lit, font leurs courses ensemble, et visitent leurs parents et grands-parents. Que des choses qui lui semblaient impossibles et inatteignables pour un homme tel que lui.

— Tu penseras à ses rendez-vous chez le vétérinaire. Tu sais, moi, j'oublie tout...

— Promis !

Jimin saute une dernière fois, retombe sur ses genoux, prend le visage de Namjoon en coupe entre ses mains.

— Tu sais combien je t'aime, hein ?

— Non, plaisante Namjoon.

— Hé ! Jimin pince le bras de Namjoon. Dans ce cas, je le graverai sur un banc du square Jehan-Rictus.

Namjoon fait claquer sa langue, s'assoit sur le bord du lit, et croise les bras sur sa poitrine.

— Deviendrais-tu un délinquant ? se moque-t-il gentiment.

— Parfaitement ! Un délinquant avec un chaton. Un délinquant dont tu es fou amoureux !

📚🐈🪑


La poussière vole autour de lui. Yoongi passe un dernier coup de cale à poncer, souffle sur sa pièce, sourit. Son travail est tel qu'il se l'imaginait ; il a hâte de se faire une clientèle.
Lorsque l'agent immobilier lui a fait signer le bail, il lui a vendu l'emplacement.

"Le Marais, vous pensez bien, vous ne pouvez pas rêver mieux ! En plus, c'est vivant ! Juste en face, vous avez le Marché des Enfants rouges. Une ins-ti-tu-tion... Et puis, vous serez entre le charcutier et le café les plus réputés de la rue de Bretagne."

Yoongi a pensé au commerce précédent qui avait fait faillite en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Il a regardé l'homme gesticuler et l'a écouté égrener tous ses arguments. Quelque part, il l'a amusé à tenter de convaincre quelqu'un qui aurait signé les yeux fermés.

Combien de temps s'est écoulé depuis qu'il s'est lancé dans son rêve malgré les mises en garde de ses parents et leur réticence à le laisser partir ? Un stage de plus de huit mois au Japon, puis ces cinq années avec les Compagnons du devoir en France. Son rêve ultime ! Un rêve commencé au Kofurn, l'exposition de design qui a modifié irrémédiablement le cours de sa vie.

Il ne fait ni vraiment beau, ni vraiment moche. Yoongi aime la douceur du climat ici. Il ne maudit ni l'été ni l'hiver.

Il passe le plat de sa main sur le bois, satisfait. Il s'apprête à aller préparer le vernis quand il aperçoit une personne de l'autre côté de la vitrine, une jeune homme. Il passe une main dans ses cheveux et observe son chef-d'œuvre. Celui dans lequel Yoongi a mis toute son âme pour terminer sa formation. Un fauteuil inspiré de ceux de Jeanneret.

Yoongi s'immobilise. Son cœur bat la chamade. Quelqu'un admire son travail et va peut-être entrer dans son atelier. Et ce quelqu'un n'est pas seulement beau. Ses traits lui rappellent les siens, lui rappellent d'où il vient. Mais, sur lui, tout accroche la lumière matinale, crie la douceur et le charme.

Le jeune homme se redresse et semble chercher la porte. Yoongi baisse brusquement les yeux et fait mine de s'affairer. Son visage est incandescent, ses mains sont moites. Il les essuie longuement sur son tablier de travail quand la porte s'ouvre sur un "bonjour" mal prononcé. Mais quelle voix ! Une voix qui l'électrise de la racine des cheveux au coccyx.

— Bonjour, répond Yoongi.

Il sait qu'il doit paraître froid, distant peut-être. Son dernier maître en menuiserie le lui a beaucoup reproché avant de comprendre que Yoongi était d'une timidité maladive.

Le jeune homme reste planté, se frotte la nuque, se gratte la gorge. Il tente quelques mots en anglais mais Yoongi ne comprend pas. Il secoue la tête de gauche à droite.

— Putain, murmure le jeune homme en coréen.

Yoongi sent ses yeux s'arrondir avant de saluer de nouveau le jeune homme dans sa langue. Et ce bonjour est magique. L'homme face à lui se redresse et se met à rayonner. Puis il réalise sa grossièreté, rougit et s'excuse à n'en plus finir.

Yoongi explose de rire. Et il rit avec lui.

— Je cherchais un cadeau. C'est exactement ce que je voulais. C'est extraordinaire !

Yoongi s'approche de la vitrine et montre le fauteuil.

— Ce fauteuil ?

— Oui. On dirait du Jeanneret.

Le soleil rayonne à présent dans la cage thoracique de Yoongi.

— J'aime beaucoup Pierre Jeanneret. Il m'a servi de modèle. Il y a quelques différences ici et là...

Yoongi énumère tous les détails. Le jeune homme ne l'interrompt pas. Yoongi sent son regard sur lui. Il a l'impression que les mots ne veulent pas se tarir. Et plus il parle, plus il se sent honteux d'être si volubile.

— On dirait mon petit ami, dit le jeune homme dans un souffle.

L'estomac de Yoongi tombe brusquement. Le flot de paroles est rompu.
Pourquoi se sent-il si déçu ? Il n'est pas là pour séduire. Juste pour travailler.

— Je veux dire, lui aussi est passionné par le design, le bois... mais je n'ai pas vraiment les moyens de lui offrir un tel objet, commence le jeune homme. Heu... pardon, je ne veux pas dire que votre travail... Enfin, j'aime beaucoup ce fauteuil... il est à vendre ? Il fête bientôt ses trente ans. J'aimerais un cadeau inoubliable.

La voix de l'homme est presque suppliante. Yoongi ne parvient plus à penser.

— Non, pas celui-ci.

— Oh ! Bon, merci.

Le jeune homme s'apprête à quitter la boutique. Yoongi ne sait pas quoi dire pour le retenir encore un peu.

— Je... votre boutique est très belle... j'aime bien l'odeur...

Yoongi baisse les yeux sur son établi.

— Sûrement l'odeur du vernis.

Le jeune homme tourne la tête de droite à gauche en signe de dénégation.

— Non, ce n'est pas ça. Il fixe un temps les planches entreposées dans un angle de la pièce avant de continuer. Le bois. C'est le bois... Bon, au revoir.

— Attendez ! s'écrie enfin Yoongi. Vous pouvez passer commande.

Le sourire naît brièvement sur le visage du visiteur angélique.

— Je ne suis que de passage. J'imagine qu'il vous faut bien plus de trois semaines.

— En travaillant vite, je peux y arriver pour le début de l'automne.

— Début septembre ? tente le jeune homme.

Yoongi calcule et se perd dans ses projections. Il n'a qu'une envie : le revoir.

— Début septembre, ça va être difficile. Mais, je n'ai pas encore beaucoup de travail. Je viens de m'instal...

Yoongi ne peut finir sa phrase. Il s'est rapproché de lui à une vitesse vertigineuse, a attrapé ses mains et les secoue en répétant encore et encore merci.

Yoongi n'entend rien. Il sent. Il sent le parfum de celui qui le tient. Il sent la chaleur de mains très douces se répandre et pénétrer jusque dans ses veines. Il voit de belles lèvres bouger et s'adresser à lui.

Tout est trop et si peu.

— Je reviens demain matin. Voici mes coordonnées. Je dois filer. Une surprise...

L'apparition est partie. Yoongi regarde ses mains, s'assoit sur son tabouret haut.

Un autre séisme dans sa vie. Inattendu. Comme le premier. Magnifique. Effrayant.
En quoi changera-t-il le cours de sa vie, celui-ci ?

Yoongi s'ébroue, se lève, attrape son carnet de croquis.

"Ma vie est paisible. Ma vie est calme. Ma vie est solitaire. Ma vie est heureuse. Je suis là où je dois être."

Yoongi se sent soudain triste et impatient.

📚🐈🪑


Jimin fredonne sur le chemin de l'hôtel.

Il a trouvé LE cadeau.

"Il va falloir revenir dans deux mois. Ou je ferai livrer le fauteuil. Je vais devoir économiser beaucoup ! Mais j'ai un gros cachet qui tombe mi-août. Ça va le faire. Moni va adorer !"

Quelque chose d'autre est responsable de la bonne humeur de Jimin. Il se sent séduisant. En passant devant les vitrines, il jette un œil à son reflet. Une fois, deux fois, trois fois. Devant chez Bourgeois père et fils, il s'arrête, passe une mèche derrière son oreille. Non, décidément, il n'a rien de plus que d'ordinaire. Il se trouve même le visage un peu bouffi, les cheveux un peu ternes ; c'est le contre-coup du voyage. C'est chaque fois pareil.

Est-ce les attentions de Namjoon ? Il est toujours effroyablement tendre et romantique à Paris. Jimin adore. Il repense à son réveil, dans les bras de "l'homme de sa vie", à ses sublimes épaules... De très belles épaules, bien larges...

— Merde !

Comment son esprit est passé des épaules de Namjoon à celles de l'ébéniste ? Et maintenant ses cheveux longs, son visage tout en rondeurs, son sourire timide et son rire grave ?

Jimin reprend sa marche d'un pas nerveux. Il se sent vaguement honteux. Il tente de reprendre le fil de ses pensées.

Anniversaire de Namjoon, surprise, billet pour Carnavalet...

"Ha ! Enfin l'hôtel du Petit moulin !"

— Tu en as mis du temps.

Namjoon est comme Jimin l'a laissé une petite heure plus tôt : allongé dans leurs draps défaits, un livre entre les mains. Il lui sourit gentiment. Mais Jimin se sent accusé. Accusé de quoi au juste ?

— J'ai fait aussi vite que j'ai pu !

Jimin sait bien qu'il répond de manière trop agressive. Namjoon fronce les sourcils.

— Pas de cookies ?

Jimin regarde ses mains vides.

"Merde, les cookies. Complètement oubliés."

C'était pourtant son idée, les cookies. Jimin mourait d'envie de faire plaisir à Namjoon. L'été dernier, ils étaient tombés sur cette petite boutique. Namjoon est un gourmand adorable. Jimin s'était délecté de le voir grogner à l'idée de ne pas pouvoir tout goûter. Alors, ce matin, le nez dans son cou, il le lui a proposé.

— Moniii... mon coeur, ça te dirait un de ses fameux cookies de l'été dernier ?

Et il est revenu les mains vides, un autre homme dans ses pensées, des mots un peu trop acerbes dans la bouche.

— La boutique a fermé. C'est un ébéniste d'art à la place.

— Dommage, fait simplement Namjoon en tapotant le lit près de lui.

Jimin a envie de sauter se blottir contre lui, de le respirer et oublier l'autre.
Pourquoi l'obsède-t-il tant ?

— Je dois... je dois aller aux toilettes... Je reviens...

Jimin essaie de ne pas voir le regard interrogateur de Namjoon, ses sourcils subtilement froncés.

"Inutile de l'inquiéter. Aucune raison. Non. Si ?"

📚🐈🪑


Comme il est bon de retrouver les rues dans lesquelles on a ses meilleurs souvenirs de vacances ! Comme il est léger de se laisser aller à être soi-même sans crainte ! Ici, ils ne sont que des hommes parmi d'autres.


Namjoon trouve Jimin particulièrement agité. Pas que Jimin ne soit pas nerveux d'ordinaire, mais il est plus rêveur, plus susceptible aussi. Et surtout, légèrement plus distant. Namjoon se demande s'il ne pousse pas trop loin son investissement dans son nouveau projet professionnel. Il est sans doute exténué.

Alors qu'il passe de salle en salle, dans la galerie Perrotin, Namjoon est distrait et détaille les traits de son petit ami. Il glisse sa main dans la sienne et un "je t'aime" discret à l'oreille. Pas si discret, parce qu'une dame au rouge à lèvre carmin et au parfum entêtant se retourne et leur sourit.

Jimin rougit et serre les doigts de Namjoon.

Quand la dame s'éloigne, Jimin lui donne une tape sur l'épaule.

— C'est malin !

Ses yeux se plissent et disparaissent. Ce visage radieux efface le souvenir du Jimin taciturne de la matinée.

Et la journée s'écoule ainsi, paisiblement, entre visites et menus propos, shopping et pauses gourmandes. Au Square du temple, Jimin ôte ses chaussures et balance ses pieds nus, assis sur un banc.

— Quand il fait chaud, ils gonflent, c'est affreux.

Namjoon regarde les pieds un peu rouges, certes. Il compatit. Lui aussi a mal aux pieds.

— Tu as raison. Remets tes chaussures. Ils sont affreux.

— Hé !

Jimin lui pince la cuisse. Namjoon l'attire contre lui et l'embrasse. Ici, à Paris, il fait bien chaud. Mais rien à voir avec l'air irrespirable et l'humidité infernale de Séoul. Ici, l'inconfort est supportable. Mais comme à Séoul, les lèvres de Jimin sont douces et parfaitement à leur place sur les siennes.

— On y va ?

La rue de Bretagne, Namjoon la connaît bien. Il adore le marché des Enfants rouges. C'est ici aussi qu'il y a la boutique de cookies.

"Qu'il y avait. Aucune raison de penser que Jimin ait menti, n'est-ce pas ?"

— Si on prenait un autre chemin ? demande Jimin en le tirant en arrière.

Namjoon ne sait pas trop pourquoi il résiste cette fois.

— Une autre fois.

Il avance devant. Jimin le suit de près sans toutefois venir marcher à sa hauteur. Namjoon sent monter la suspicion. Il déteste cela. D'abord parce que les sentiments négatifs, il tente de tous les bannir. Ensuite, parce qu'il ne comprend pas bien d'où elle lui vient.

Arrivé devant ce qui devrait être le magasin de cookies, la devanture a été refaite dans les tons vert bouteille. La vitrine expose des meubles. Des meubles magnifiques, comme ceux qu'il aime.

— Oh ! Mini ! Regarde ce fauteuil ! J'adore !

— Je sais, murmure Jimin.

Jimin semble vouloir déjà repartir, mais la porte de la boutique s'ouvre et un homme l'appelle. En coréen.

Cette voix et cette silhouette lui sont familières. Mais Namjoon n'a pas le temps de se souvenir car de nouvelles questions inquiétantes s'invitent brutalement.

— Je vous ai attendu toute la matinée. Entrez, le croquis et le devis sont prêts.

📚🐈🪑


Le cœur battant, Jimin suit Yoongi dans l'atelier, Namjoon lui emboîtant le pas. L'ébéniste parle vite et leur tourne le dos. Ses mains volent de papiers volants débordant de croquis à des échantillons de bois.

Jimin essaie de cacher son affolement.

"Ma surprise est fichue. J'aurais dû essayer de m'éclipser ce matin. Respire ! Bon sang ! Qu'est-ce qu'il me prend ? Ne pas rougir, ne pas rougir. Reste calme. Tout va bien. Il ne va pas voir qu'il me plaît. Il va le voir !"

Jimin jette des regards furtifs en direction de Namjoon, espérant qu'il ne remarque pas la panique dans ses yeux.

Les pensées de Jimin continuent de se bousculer alors qu'il essaie de trouver une issue à cette situation impossible. Il ne comprend rien de ce que Yoongi dit. Ce dernier parle du projet, sans le regarder. La gêne est évidente dans ses gestes maladroits. Jimin sait qu'il doit rester calme, mais leur nervosité leur donne un air plus que coupable.

"Coupable de quoi, au juste ?" s'emporte intérieurement Jimin.

Namjoon, derrière lui, est étrangement silencieux. Jimin sent la tension monter, la colère sourde, et la tristesse dans l'air. Il pense sentir la suspicion exploser en lui comme des étincelles, et il sait qu'il doit agir vite pour empêcher une confrontation désastreuse.

— Ce devait être une surprise, pour ton anniversaire, murmure-t-il en glissant une main tremblante dans celle de Namjoon. Désolé.

— Hein ? Une surprise ? dit Namjoon.

Yoongi s'interrompt brutalement, se retourne enfin vers eux, fronce les sourcils.

Jimin est rassuré d'entendre le son de la voix de son petit ami. Il ose enfin regarder Namjoon alors qu'il sert ses doigts un peu trop fort. Ses traits sont tendus et il dévisage l'ébéniste. Pourtant pas une trace de défiance sur son beau visage, ni même de colère ou de surprise. Namjoon a ce regard perplexe et mélancolique, celui qu'il a lorsqu'il cherche à se souvenir ou se perd dans ses pensées.

— Je suis désolé pour la surprise, je m'excuse... commence à dire l'ébéniste mais Namjoon lui coupe la parole.

— Min ? Min Yoongi ?

L'ébéniste ne répond pas, leur tourne de nouveau le dos, empile les feuillets. Il semble prendre une grande inspiration ; Jimin suit le mouvement lent de ses épaules du haut vers le bas.
La suspicion change de camp. Jimin se sent oppressé. Il est prêt à exploser. Dans ces moments-là, il laisse habituellement tout déborder : les mots et les vérités doivent être exposés au grand jour. Tant pis si ça fait mal. Jimin ne se laisse jamais le temps de réfléchir et de penser aux conséquences tant il a besoin d'évacuer ses émotions.

Il s'apprête à ouvrir la bouche quand Yoongi répond d'une voix cassée.

— Mmmm... Oui Joon, c'est bien moi.

"Joon ?!!"

Dans les rais de lumière qui filtrent à travers la vitrine, flottent des grains de poussière. Le silence se fait pesant. Namjoon lâche la main de Jimin.

📚🐈🪑


— Je vous ai attendu toute la matinée. Entrez, le croquis et le devis sont prêts.

La veille, il a travaillé tard dans la soirée. Parce que Yoongi est ainsi. Il s'est engagé à fournir un meuble plus rapidement qu'il estime en être capable, alors, maintenant, il doit y faire face. Les raisons pour lesquelles il a cédé à une telle demande, il a tenté de ne pas y penser. Yoongi aime penser de lui qu'il est un homme raisonnable et fiable. Il veut s'y tenir.

Il s'est couché une fois les bois sélectionnés et l'approvisionnement rapide vérifié, une fois la fiche de production établie. Il a suspendu son tablier à un clou après avoir passé un dernier coup de plumeau et de balai, a poussé un soupir de contentement, tiré la porte de sa boutique-atelier derrière lui, tourné la clef.

Et là, il s'est retrouvé seul, au milieu de la nuit et de cette rue de Bretagne dite "très animée". Oui, seul, tout à fait seul. Jusqu"à ce jour, cela ne l'avait pas marqué ni accablé. Fuir l'extérieur et se réfugier dans son appartement rue Portefoin, ne l'a pas consolé. Ni la belle porte bleue à double vantail de son immeuble qu'il aime tant, ni le parquet qui craque joliment sous ses pas, ni son piano à l'angle de son salon, ni sa chambre simple mais chaleureusement décorée.
Comme il le faisait plus jeune, au lycée, quand la vie lui semblait trop accablante, il a voulu se réfugier dans le sommeil. Dormir est également une chose dans laquelle Yoongi excelle. Bien qu'il se plaigne de rêver trop peu.

Cette nuit-là, il a pourtant rêvé. Un rêve intense et décousu qui laisse les draps défaits et le front collant de sueur. Dans son rêve, il présentait le fauteuil terminé au jeune homme, Park Jimin. Puis il était dans un bois, ses doigts courant sur le tronc blanc rayé de noir d'un bouleau, et appelait "Jimin, Jimin-ah !" Et le rire du jeune homme résonnait entre les arbres d'une forêt si dense que la lumière chaude de l'été y pénétrait à peine. Il appelait encore une fois et autour de lui la forêt se muait en café bondé. Il avait une envie effroyable de pleurer. "Alors, c'est comme ça ? Tu vas vraiment partir Yoon ?".

— Je vous ai attendu toute la matinée. Entrez, le croquis et le devis sont prêts.

C'est vrai que Yoongi a attendu le jeune homme toute la matinée. Parce que c'est ce qu'ils ont convenu la veille. Parce qu'il a espéré faire se dissiper les brumes tenaces de la nuit en les confrontant à la personne en chair et en os.

Et puis le voilà, un peu avant midi. Accompagné d'un homme très grand que Yoongi ne souhaite pas regarder. Pas tout de suite. Alors il se met en pilote automatique et va le chercher pour le faire entrer dans son monde qui sent bon la résine. Le faire pénétrer dans son atelier bien entouré de quatre murs pour contenir l'imprévisible. Il s'aperçoit qu'il est volubile et fuyant, que ses mains s'agitent nerveusement. Il sent les regards dans son dos et aperçoit du coin de l'œil la silhouette imposante du petit ami qui lui en rappelle une autre. Une laissée en Corée. Une victime d'un choix cornélien.

— Ce devait être une surprise, pour ton anniversaire.

Le murmure de Jimin rappelle Yoongi au moment présent. Il vient, dans sa précipitation, de commettre un impair.

— Hein ? Une surprise ? dit la grande silhouette.

Les muscles et les intestins de Yoongi se contractent brutalement. Il reconnaît la voix. Et c'est tout à fait impossible ! Cette voix aurait dû rester dans ses souvenirs, à Séoul, ou bien, au pire, dans ses rêves. Mais pas là, dans son atelier à l'autre bout du monde. Et pas auprès de celui qui le bouleverse tant depuis la veille.

Yoongi veut s'excuser, terminer la commande, utiliser son polissoir, occuper ses mains... tout, n'importe quoi pour échapper à cette drôle et cruelle farce de la vie.

— Je suis désolé pour la surprise, je m'excuse... commence-t-il à dire mais la grande silhouette lui coupe la parole.

— Min ? Min Yoongi ?

Entendre de nouveau son nom prononcé par cette bouche est amer et sadique.
Yoongi a besoin de bras pour le serrer, d'un souffle dans ses cheveux pour l'ancrer sur terre, d'une voix dans son oreille qui lui dise que tout va bien pour l'apaiser. Mais autour de lui, sur lui, il n'y a que la pression inconsistante de ses vêtements et l'odeur familière de sa lessive.
Yoongi pleure rarement. Et, dans ces moments-là, il parvient toujours à attendre d'être seul. C'est bien difficile aujourd'hui. Les deux seules personnes ayant réussi à le bouleverser sont ici, dans son atelier, à Paris, ensemble. Et elles ne sont pas à lui, pour lui.

— Mmmm... Oui Joon, c'est bien moi.

Ce surnom tendre, Yoongi l'avait oublié, avait souhaité l'oublier.
Il entend la voix de Namjoon vaciller. Il faudrait boucler cette affaire au plus vite.
Soudain, une main tremblante se pose sur son épaule.

— Yoongi ? demande de nouveau l'homme.

Jamais Yoongi n'a imaginé qu'il faille faire un tel effort pour faire face à quelqu'un. Ses pieds pèsent plus lourd que du plomb. Plus lourd que son cœur.

📚🐈🪑


Avant Jimin, il y avait eu "Elle", et puis lui, Min Yoongi.

Si Jimin en savait peu sur "Elle", il ne savait rien de lui. Yoongi a laissé une telle méfiance envers les autres et l'amour après son départ, que Namjoon ne se sentait plus que comme une gigantesque cicatrice mettant trop de temps à cicatriser.

Jimin est le bonheur inattendu, le souffle de joie salvateur, le baume sur ses plaies à vif.
Mais tout cela, si miraculeux soit-il, ne fait pas moins de Yoongi celui qu'il considérait comme son âme sœur.

Namjoon venait tout juste d'apprendre qu'il était embauché comme ingénieur chez S-Oil comme son père avant lui. La nouvelle aurait dû le réjouir mais l'avait déprimé. Il s'était réfugié au Kofun. Dans une autre vie, il aurait été artisan ou artiste et riche collectionneur. Devant un fauteuil de bois et d'osier, il était resté admiratif, perdu dans ses pensées, jusqu'à ce qu'une voix timide le ramène à la réalité.

— J'adore aussi Pierre Jeanneret.

Étonné, il avait regardé, incrédule, le jeune qui se cachait derrière une mèche de cheveux trop longs. Il lui avait souri. Namjoon aimait les gens et faire leur connaissance. Et cette personne était déjà extraordinaire : elle partageait ses goûts. Il l'avait invité à poursuivre la conversation loin du brouhaha de l'exposition. Devant un café, Yoongi - car c'était lui - l'avait écouté attentivement sans sourire ni se moquer de ce que ses parents appelaient "ses obsessions". Puis, Yoongi, son nez dans la tasse de café, lui confiait timidement qu'il en avait assez de sa vie qui n'avait aucun sens, que s'il s'écoutait, il démissionnerait et quitterait sa vie de fonctionnaire pour devenir artisan et travailler de ses mains. Namjoon se souvient avoir longuement observé les belles mains de Yoongi avant de dire sans réfléchir :

— Tu as raison, fais-le. Lance-toi.

Namjoon ne saura jamais si ce sont ces quelques mots ou simplement le destin qui l'avait voulu ainsi, mais Yoongi avait voulu le revoir. Namjoon avait oublié "Elle" et toutes les peines qui ont accompagné leur relation. Les yeux fermés, il s'est abandonné à la folie raisonnable, tendre et douce que lui offrait Yoongi. Jamais il ne s'était senti si serein et complet qu'avec lui.
Les mois avaient filé. Yoongi avait osé se lancer avec les encouragements et le soutien de Namjoon. Les huit mois de stage à Osaka de Yoongi avaient été supportés tant bien que mal car, pour Namjoon, ce n'était qu'une transition pénible avant de reprendre leur quotidien tranquille. Mais Yoongi était revenu avec un désir et un projet immenses : il voulait suivre la formation des Compagnons du devoir en France. Il parlait de plusieurs années. Namjoon avait senti tout son être s'effondrer de l'intérieur.

— Alors, c'est comme ça ? Tu vas vraiment partir Yoon ?

Namjoon avait retenu ses larmes. Il y avait bien trop de monde dans ce café. Ses rires, ses sourires et ses larmes n'appartenaient qu'à lui, qu'à Yoongi, qu'à eux. Il n'avait pas voulu les offrir au monde.

Yoongi l'avait supplié d'envisager de le suivre ; il pourrait trouver du travail en France ; ils ne seraient séparés que quelques mois, non, en fait, un an, peut-être plus, le temps de son tour de France en tant qu'apprenti compagnon. Namjoon avait refusé et n'avait pu que regarder Yoongi se débattre avec sa propre douleur. Après tout, c'est lui qui faisait le choix de sa carrière avant leur couple !

Et, voilà, cet homme est là devant lui. Plus âgé, plus beau aussi. Il a réussi à mener son rêve à terme. Namjoon meurt d'envie de le toucher, de vérifier qu'il est bien réel, qu'il ne l'a pas rêvé. Il déteste sentir ses anciens sentiments revenir violemment et se superposer à ceux qu'il ressent pour Jimin.

Il est perdu et en colère. Il voudrait fuir et être étreint.

📚🐈🪑


Jimin aurait roulé des yeux au ciel et aurait bougonné un "Comme de bien entendu !" si un orage avait éclaté lors d'une scène similaire dans un des dramas qu'il adore regarder.
Mais il n'est pas blotti contre Namjoon, dans leur canapé, dans leur petit appartement. Il est dans cette boutique parisienne entre l'homme de sa vie et celui qui vient tout bouleverser.
A l'extérieur de la boutique, l'air chaud et lourd de la matinée se mue en pluie soudaine. La lumière disparaît et tout devient gris autour d'eux. Le tonnerre gronde ; Jimin frémit à peine car c'est déjà la tempête en lui. Il observe les deux hommes se dévisager et Jimin pourrait presque lire dans l'attitude de Namjoon. Un éclair déchire le ciel et la retenue de Jimin vole en éclat.

— Quelqu'un peut me dire ce qu'il se passe ici ?

Sa voix descend bien trop dans les graves. L'impatience et l'inquiétude le dominent. Il doit marquer sa position, protéger et se protéger.

— Pardon, reprenons, bégaie l'ébéniste en se dirigeant vers son comptoir.

Ses mains s'agitent, et il fait tomber un bloc-notes. Il se baisse et marmonne quelque chose étouffé par un nouveau coup de tonnerre.

— Je peux commencer dès à présent. Il me faut un acompte de trente pour cent. Je vais commander le bois d'i...

— Yoongi, le coupe Namjoon. Laisse-moi lui dire.

L'ébéniste cesse de parler, ses yeux brillent et ses mains tremblent. Jimin aimerait retrouver l'homme charmant de la veille, tout en redoutant ce qu'il s'apprête à entendre. Jimin a toujours apprécié la sincérité de Namjoon. Mais là... Là, il jette un œil affolé à la rue.

"Est-ce que je peux retourner à l'hôtel sans être trop mouillé ?"

— Jimin ? Jimin-ah ? Mini ?

Namjoon, d'une main douce, tourne son menton pour l'obliger à le regarder. Jimin sait que Namjoon lui a caché sa vie amoureuse grâce à leurs amis. S'il avait voulu en savoir plus, il aurait su faire parler Namjoon ; il obtient toujours ce qu'il veut de lui. Alors non, il ne veut pas entendre que celui qu'il veut épouser a tremblé avant lui pour l'ébéniste, car, il en est certain, c'est de ça dont il s'agit.

— Mini, c'est Min Yoongi, l'homme avec qui j'étais avant toi.

Jimin jurerait qu'il y a eu un nouveau coup de tonnerre, pourtant il ne l'a pas entendu.

— Avant.

— Oui, avant.

— Alors pourquoi tu le regardes comme ça ? explose Jimin.

— Comment ça, comme ça ?

— Comme moi ! Tu le regardes comme tu me regardes moi !

— Je... tu te fais des idées, proteste Namjoon.

— Non ! s'obstine Jimin.

Quand Jimin est blessé, il le sait, il fait parfois preuve de méchanceté. Il y fait attention et se jure de mûrir et de devenir un meilleur humain. Cependant, Jimin n'est plus en capacité de raisonner. Il veut une preuve flagrante que Namjoon l'aime et tient à lui. Il veut le faire réagir.

— Reste ici avec lui ! Moi, je rentre à Séoul !

Quelque chose tombe dans la boutique, près du comptoir et quelque chose se trouble dans le regard de Namjoon.

— Tu ne penses pas ce que tu dis.

— Putain de vacances, putain d'été à la gomme ! s'écrie Jimin avant de s'enfuir sous l'orage sans que Namjoon ne puisse le retenir.

📚🐈🪑


Yoongi voudrait se terrer. Dans son arrière-boutique, chez lui, ou retourner se cacher - si seulement les machines à remonter le temps existaient - dans les jours précédant sa rencontré avec Jimin, quand tout était encore sous contrôle.

Namjoon, l'homme qui a refusé de le suivre, celui qu'il aimait plus que tout, est dans sa boutique. Il l'a imaginé. Souvent. Dans ses rêves éveillés, Namjoon le retrouvait et s'émerveillait devant l'habileté et la créativité qu'il avait acquises. Et, il reprenait leur vie là où il l'avait laissée. Tout était pardonné et, Namjoon n'avait plus peur de l'inconnu, de faire des paris sur l'avenir et de se laisser chérir.

Mais, à présent, Yoongi le voit s'agiter nerveusement, fouiller dans sa sacoche, les larmes au bord des yeux. Yoongi voudrait le rassurer et le prendre dans ses bras. Mais ce n'est plus son rôle.

— Heu, je vais te laisser les 30%. Tu as sûrement dû avancer les frais. Je suis désolé. Vraiment. J'ignorais...

— Namjoon, le coupe Yoongi, s'il te plaît ne t'excuse pas.

Namjoon lui tend sa carte de paiement, d'une main tremblante, et ne le regarde pas.

— Je suis désolé. Je n'imaginais pas te revoir... enfin... pas comme ça. Plus maintenant...
Parfois, quand Yoongi se sent acculé à l'urgence, un autre lui, plus brave et inconséquent prend le dessus.

— Tu m'as manqué, murmure-t-il en passant la carte. Affreusement. Personne ne te remplace. Et moi ? Je t'ai manqué ? Je te manque ?

Yoongi compte sur l'honnêteté légendaire de Namjoon. Il oublie Jimin et le sentiment de bonheur et de légèreté qu'il lui a donné. Yoongi veut de nouveau ressentir ce que ça fait d'être dans les bras de Namjoon. Ne serait-ce qu'un instant.

— C'est loin, Yoon. Nous deux. Tu sais. Et il y a Jimin.

Quand Namjoon passe la porte et disparaît sous les trombes d'eau, Yoongi réalise ce qu'il vient de dire et de demander. Il ne sait pas bien si c'est de la colère ou de la honte qui l'envahit. À moins que ce ne soit de la frustration et de la douleur parce que Namjoon a posé tranquillement une distance entre eux.

"Qu'est-ce que tu lui reproches, triple andouille ? C'est toi qui l'as abandonné en Corée pour réaliser ton rêve !"

Yoongi envisage sérieusement de fermer sa boutique et de rentrer chez lui afin de se rouler en boule sous sa couette. Mais il aperçoit son carnet de commandes et ses croquis. Il soupire, passe les mains sur son visage.

— Au boulot, Min Yoongi ! Fais au moins ça pour lui.

Le temps passe vite quand Yoongi se plonge dans le travail. Il peut même dire qu'il se sent content et plus serein. Les tracas volent avec la poussière de bois. Il est interrompu une petite dizaine de fois par des curieux de passage et une dame du voisinage qui pensait pouvoir faire retapisser son canapé. Enfin, un homme est entré alors que Yoongi se demandait combien de temps il allait pouvoir tenir sans véritable client. Une grosse commande ! Tout l'aménagement d'un studio à concevoir, sur mesure. Un projet ambitieux. Yoongi sifflote en éteignant les lumières. Il choisit de reléguer au plus profond de lui l'événement de la journée, de l'enterrer sous la bonne nouvelle, de faire comme si Namjoon n'avait pas resurgi le matin même.
Un clac, celui de la porte de la boutique, un courant d'air chaud et humide, une voix cassée.

— Je peux vous parler ?

Enterrer les souvenirs de la matinée ne sera pas possible. Park Jimin se tient devant lui, l'air grave et les yeux noirs. Yoongi frissonne.

— Je peux vous parler ? répète-t-il.

Pour toute réponse, Yoongi lui fait signe d'avancer, tire une chaise et l'invite à s'asseoir. Les lumières de la rue et des quelques voitures qui passent dansent sur le sol. Yoongi redoute ce qui va venir. Il s'assoit également, ni trop près ni trop loin. Son cœur bat la chamade.

— Parlez-moi de lui, de vous, reprend le jeune homme.

Yoongi pourrait refuser de livrer ses souvenirs les plus chers à un inconnu. Un inconnu qui partage maintenant la vie de Namjoon. Mais justement, il s'agit de Namjoon, de Namjoon et son sourire, de ses manies et de sa capacité incomparable qu'il avait à le faire rire. Alors, pour Namjoon, il se plie à la demande.

Yoongi hésite puis commence par des généralités sans réelles importances. Jimin l'écoute, vraiment. De tout son corps ; ses coudes sont plantés dans ses cuisses, sa tête repose sur une de ses mains, ses yeux ne quittent pas Yoongi. Yoongi ne se souvient plus de la dernière fois qu'on lui a prêté une telle attention. Alors, petit à petit, les faits impersonnels deviennent des détails chaleureux. Il ne va toutefois pas jusqu'à exprimer franchement ses sentiments.

— Vous l'aimiez tant, murmure Jimin. Vous l'aimez encore, affirme-t-il.

"On lit en moi si facilement" pense Yoongi. Il voudrait pourtant nier. Mais rien ne vient. Pourquoi nier ?

— Il est fragile, vous savez ? Il a besoin de tendresse et qu'on prenne soin de lui.

Yoongi sait. Il opine doucement de la tête.

— C'est vrai. Peut-être plus encore à cause de moi et...

Jimin ne le laisse pas finir.

— Je me demande... je me demande si...

Jimin hésite, torture les petites peaux autour de ses ongles. Yoongi voudrait l'arrêter. Non pas seulement parce qu'il déteste voir ce genre de choses mais aussi parce que Jimin l'émeut. Alors les mains de Yoongi agissent pour lui et se posent sur celles de Jimin.

— Oui ?

— Il vous manque ?

— Parfois, admet Yoongi tout bas.

— J'aimerais bien savoir... oubliez, c'est idiot !

— Non, dites, encourage Yoongi qui s'étonne de ne ressentir aucune once de jalousie, qu'un tel instinct de protection l'envahisse pour le petit ami de celui qu'il aime toujours.

Pour toute réponse, Jimin se penche lentement vers lui.

— Je peux vous embrasser ? J'ai besoin de savoir.

Yoongi cligne des yeux parce qu'il ne peut dire oui qu'ainsi et que son cœur affolé est remonté dans sa gorge. Et, diable, que c'est doux et délicat ! Quand Jimin s'écarte, les mains de Yoongi se resserrent sur celles de Jimin. Il voudrait faire durer encore un peu cet instant.

— Je comprends, dit enfin Jimin.

Une grosse larme roule sur sa joue.

— Hmmm ?

— Namjoon a toujours eu bon goût en matière d'hommes, rit en sanglotant Jimin. Je voudrais vous connaître comme Namjoon vous connaît.

Yoongi se sent pris dans une véritable tornade de pensées et de sentiments. Embrasser le petit ami de son ex, est-ce bien ? Être séduit par lui tout en étant convaincu de toujours aimer Namjoon, comment est-ce possible ? Et puis, quoi ? Ils vont repartir, chez eux, et il sera de nouveau seul.

Yoongi rit faiblement.

— Oui, il a bon goût.

Oui, ils vont repartir et le laisser dévasté et seul. Yoongi veut des bras autour de lui. Il veut se sentir aimé et important. Il ne sait plus comment faire pour entrer et rester dans la vie de quelqu'un. Il en a assez d'être raisonnable, d'un coup.

— Je peux, moi aussi ?

Jimin acquiesce alors que son souffle caresse déjà la joue de Yoongi. Yoongi lâche les mains si menues pour prendre le visage sur lequel les larmes sèchent. Et voilà qu'il embrasse quelqu'un qui lui plaît, quelqu'un qui ramène la lumière en lui, quelqu'un qu'il voudrait serrer tout contre lui comme il aimerait que Namjoon le fasse avec lui. Son souffle se bloque quand Jimin enroule ses bras autour de sa nuque.

Ils devraient arrêter. Ils ne devraient pas faire ça. Ils n'en ont pas le droit.

La bouche de Jimin glisse le long de sa joue avant de se nicher dans son cou. Yoongi serre son tablier entre ses poings fermés. Le moment de grâce a été si bref.

— Vous devez me détester, n'est-ce pas ? souffle Jimin dans son cou.

Non, voudrait encore dire Yoongi. Il faudrait le retenir encore un peu, retrouver ses esprits, trouver quelque chose de rationnel à dire ou à faire. Mais il est encore là, fiché sur sa chaise quand Jimin se lève et s'enfuit presque.

Ce soir-là, Yoongi se tourne et se retourne dans son grand lit vide. Jamais jusqu'à maintenant, il n'avait remarqué combien son appartement était impersonnel. La pluie tambourine sur ses vitres. L'orage s'est muée en pluie continue. Yoongi se redresse pour regarder les gouttes dévaler le long des carreaux entre les rideaux mal tirés. Il se demande comment va Namjoon, si Jimin lui a parlé des baisers échangés et de tout ce qui cache derrière. Et le magnifique Jimin, pleure-t-il de nouveau, à côté de Namjoon qui ronfle faiblement ? De guère lasse, Yoongi sort ses pieds du lit, les observe un temps, nus sur le tapis.

"Je suis raisonnable. Je suis courageux. Je suis digne d'être aimé."

Yoongi frictionne ses cheveux, les glisse derrière ses oreilles et tend la main vers son téléphone. Il a enregistré les numéros de ses clients. Et parmi ses clients, il y a Park Jimin.

Il est tard. Plus de minuit. Ce n'est pas une heure pour appeler. Yoongi s'apprête à raccrocher, honteux de son emportement.

— Oui ? Qui est-ce ?

C'est Jimin et sa voix douce et profonde. Il n'a pas la voix de quelqu'un qu'on sort du sommeil. Oui, il faut prendre le risque.

— Yoongi. Min Yoongi. Il faut qu'on parle. Pas du fauteuil. De nous.

— Je...

Yoongi entend la voix de Namjoon derrière. Une voix qui n'est pas ensommeillée non plus. Yoongi croit y déceler de l'inquiétude.

"C'est qui ?"

— Jimin, dis-lui. Je peux te tutoyer ? Dis-lui qu'il faut que nous parlions. De nous. De nous trois. Hummm ?

📚🐈🪑


— C'est lui, répond Jimin.

Namjoon déteste voir les yeux rougis de Jimin. Il déteste la jalousie et le ressentiment qui l'ont envahi après que Jimin lui ait raconté ce qui s'est passé ce soir, à la boutique.

"Je ne suis qu'humain après tout !" Il pouvait bien s'autoriser ça. Être faible et imparfait. Il a monté la voix. Il a crié sur lui. Jamais il n'avait crié sur personne. Pourtant, il veut que Jimin sourit et soit heureux. Mais ses anciens démons reviennent en cavalerie serrée :

"Tout a une date de péremption. Tu ne l'avais pas vu venir celle-là. Il voulait t'épouser la semaine dernière, et maintenant il embrasse ton ex, l'ex "amour de ta vie" ! Comme c'est caustique !"

Malgré lui, Namjoon hausse un sourcil ironique. Sa gorge se serre, une colère sourde gronde en lui, mélangée à une tristesse qu'il peine à contenir.

— Je dis que c'est d'accord ? insiste Jimin, sa voix tremblante, ses yeux suppliants.
Namjoon détourne le regard, souffle, et hausse les épaules.

— OK, murmure-t-il finalement, presque à contrecœur.

Namjoon ne voit pas bien où cette conversation va mener. Il veut juste se retrouver seul, penser, penser aussi longtemps que nécessaire. Voire même tout mettre sous le tapis. Oublier Yoongi, cette histoire de mariage et le chat. La confusion le submerge.

— C'est d'accord. Demain. Oui. Au Peloton. À neuf heures. Entendu. Pas très bien, non. D'accord.

Namjoon perçoit la voix grave de Yoongi. Une voix qu'il n'a pas entendue au téléphone depuis des siècles, des vies entières mêmes. Et pourtant, cette voix lui semble aussi familière que celle de Jimin. Aux intonations, Namjoon sait à quel point Yoongi est torturé lui aussi. Une nouvelle couche de tourments !

Jimin raccroche. Il est toujours là, les genoux repliés contre son torse dans le grand fauteuil de velours rouge, là où il s'est réfugié lorsque Namjoon s'est emporté, avant l'appel inattendu de Yoongi. Namjoon entend encore les "Je suis désolé. Je suis si désolé, mon amour."

À l'opposé de la chambre d'hôtel, Namjoon se cramponne au lit défait, les poings serrés, comme si le monde tanguait véritablement. Il lève les yeux vers Jimin, cherchant désespérément une réponse dans son regard. Mais tout ce qu'il voit, c'est la même confusion et douleur qui le tourmentent.

— Je ne sais pas si je peux faire ça, Jimin, admet-il finalement, sa voix brisée. Je ne sais pas si je peux partager ou même comprendre ce que je ressens en ce moment.

Jimin s'approche de lui, posant une main douce sur son bras.

— Namjoon, je ne veux pas te perdre...

Namjoon ferme les yeux, une larme solitaire roulant sur sa joue. Il ne tend pas les mains vers le corps tant adoré.

— Moi non plus, Jimin. Moi non plus.

📚🐈🪑


Jimin a le sentiment d'avoir traversé une nuit de cauchemars. Il ne saurait même pas dire s'il a réussi à dormir un peu. Namjoon s'est roulé en boule de son côté du lit et lui a tourné le dos. Il n'y a pas eu de "Dors bien" ni de baiser, et encore moins d'invitation à se blottir contre lui. Jimin se sent puni, et s'il est tout à fait honnête, à tort. Il n'a pas repris tout l'amour qu'il offre à Namjoon ; il n'a même jamais tant voulu le comprendre et être en totale empathie avec lui.

Le matin, ils s'habillent sans se parler ni se regarder. Jimin tente de remettre le col de la chemise en jean de Namjoon, mais il le repousse mollement.

— Laisse, Jimin, je vais le faire.

Namjoon ne le repousse jamais. Une énorme boule se forme dans sa gorge. Jimin a l'impression qu'il pourrait exploser de frustration et de chagrin, repeindre les murs de cette chambre de ses entrailles et des débris de leur relation.

"Est-ce que je dramatise ? Peut-être ? Faites que oui."

Lorsqu'ils entrent dans le café, ils sont accueillis chaleureusement. Un sourire qui sonne comme un "Entrez, nous allons prendre bien soin de vous."

Derrière le comptoir, trois petites tables s'alignent le long d'un grand miroir. Jimin aperçoit le reflet de l'ébéniste. Il se tient le dos légèrement voûté, des cernes violettes enlaidissent son beau visage. Comme Jimin aimerait se précipiter vers lui. Mais ses doigts cherchent timidement ceux de Namjoon. Ce dernier se laisse entraîner jusqu'à la table.

Il n'y a qu'une demi-douzaine de pas à faire et pourtant la distance s'étire. Yoongi lève les yeux vers eux. Un regard à couper le souffle. Un regard qui crie la réassurance.

— Tout va bien se passer, murmure Jimin pour lui-même.

— Vraiment ? répond Namjoon sur le même ton.

Un silence étrange et inconfortable s'installe une fois assis, là tous les trois. Les tasses de café claquent joyeusement sur la petite table de marbre. Jimin s'aperçoit que Namjoon replie ses coudes autant que possible et rentre ses pieds sous sa chaise pour ne toucher personne, même par mégarde. Encore un crève-cœur !

— Je comprendrais que vous annuliez la commande, dit enfin Yoongi, rompant le silence.

Jimin s'apprête à donner une réponse respectueuse et rassurante, mais Namjoon le devance, le surprend.

— Tu nous as vraiment demandé de venir pour que nous discutions de cela ?

Jimin reconnaît à peine Namjoon. Son ton est froid, distant. Il sait de leurs amis communs que Namjoon peut s'enfermer dans une distance glaciale pour se protéger, mais jamais il n'en a été témoin.

Yoongi fait claquer sa langue, repousse sa tasse de café, souffle doucement et reprend sur un ton très doux.

— Joon, je sais ce que tu es en train de faire là. S'il te plaît, parlons-nous.

Jimin perçoit la détresse de Namjoon et glisse une main sur sa cuisse. Il n'aurait peut-être pas dû. Il voit Namjoon cligner des yeux, un prémisse aux larmes.

— Oh ! Un remake du rendez-vous où tu m'as annoncé que tu filais à l'autre bout du monde ? ajoute-t-il d'un air sarcastique.

— Joon, gronde tout bas Yoongi. Je ne pouvais pas renoncer. Tu aurais pu venir, me suivre.

Jimin se dit qu'il devrait se sentir de trop dans cette conversation. Mais, étonnamment, non. Il a le sentiment que Namjoon a besoin de lui plus que jamais ; sa grande main se pose sur la sienne et s'y cramponne.

— Tu ne regrettes donc rien ? Peu importe... Écoute, j'ai réussi à tout recommencer de zéro... avec Jimin... grâce à lui... tu veux me prendre ça aussi...

— Moni ! proteste Jimin faiblement, mais Yoongi s'impose.

— Non. Je ne veux rien te prendre. J'ai juste tant à donner...

— Pourquoi lui ?

— Il me plaît, fait simplement Yoongi.

Jimin bondit de l'intérieur. Ses sentiments sont partagés. Il nage en pleine confusion.

— Oh ! Merveilleux. Je... Écoutez... je... bafouille Namjoon.

— Tu me manques aussi, poursuit Yoongi.

Namjoon ne semble plus écouter.

— Je ne comprends pas. Je suis désolé. C'est trop. Je vais rentrer à Séoul. J'ai besoin de temps pour...

— NON ! s'écrie Jimin.

— Joon, on devrait vraiment en parler. De ce que chacun souhaite.

Mais Jimin sent la main de Namjoon glisser sur la sienne et, comme dans une scène au ralenti, le voit se lever.

— Jimin, ne me suis pas. S'il te plaît. Si tu m'aimes vraiment autant que tu le dis. Laisse-moi ce temps.

Qu'est-ce qui retient Jimin d'éclater en sanglots devant des inconnus, dans cette ville qui n'est pas la sienne, où, à présent, il a aussi de mauvais souvenirs ? Probablement le bras qui s'enroule autour de ses épaules, et ces quelques mots soufflés sur sa tempe.

— Laisse-le quelque temps. Il en a besoin. On trouvera une solution.

📚🐈🪑


Namjoon est parti, laissant Jimin seul dans leur chambre d'hôtel. Yoongi le sait parce que Jimin l'a appelé le soir suivant, effondré, presque incompréhensible entre les sanglots. Yoongi a de nouveau eu le cœur brisé : une fois encore, il a été incapable de le retenir, de le garder près de lui.

Après leur rendez-vous au café, en coupant, ponçant, vernissant, Yoongi a dessiné dans son esprit un arbre des possibles à mille et une branches. Il pourrait fermer sa boutique et aller retrouver Namjoon, prendre le temps de le comprendre, le ramener peut-être, ou bien le laisser poursuivre sa vie sans lui, avec Jimin, à moins que Jimin ne choisisse une autre voie. Ou bien, il pourrait tenter d'oublier Namjoon et apprendre à connaître Jimin, être fondamentalement égocentrique. Quel mal y aurait-il à cela ? Il ne serait pas le premier à briser un couple.
Dans son arbre des possibles, il y a aussi la branche la plus folle à ses yeux, celle qui le fait se sentir vivant : laisser à Namjoon le temps de se retrouver, faire connaissance avec Jimin et enfin trouver un moyen de faire partie de leur vie à tous les deux sans en faire souffrir aucun.

Jimin l'attend dans la pénombre, assis sur une chaise dans un coin de son atelier. Il observe Yoongi mettre de l'ordre, vérifier d'un dernier regard que tout est bien propre et à sa place. C'est devenu un petit rituel cette dernière semaine. Jimin occupe ses journées comme il peut. Yoongi devine que cela consiste à rester en boule dans son lit vide de la chambre d'hôtel, à pleurer, et à surveiller les messages sur son téléphone (comme il le fait actuellement). Yoongi soupire, s'approche de Jimin et regarde les ombres que la lumière de son téléphone forme sur son visage qui s'affine.

— Je t'invite à manger, ce soir.

Jimin entre timidement dans l'appartement de Yoongi et en fait le tour, laissant courir sa main sur les objets et les meubles. Il s'assoit au piano et fait résonner quelques touches.

— Tu joues ?

Et parce que son idée est folle mais belle, Yoongi la confie soudainement à Jimin. Yoongi se demande quelle quantité de larmes peut contenir le jeune homme. Il reste les bras ballants, se disant qu'il est une catastrophe, que Namjoon a bien fait d'essayer de l'oublier, que Jimin devrait le fuir.

— Prends-moi dans tes bras, supplie Jimin.

Yoongi hésite avant de l'envelopper et de le serrer délicatement. Ses paumes tapotent doucement son dos. Yoongi sent Jimin se détendre, les sanglots s'espacent, et contre son torse Yoongi sent le souffle régulier de Jimin. Il ose alors déposer un baiser léger dans ses cheveux.

— Tu me le promets ?

— Hum ? répond Yoongi, confus.

— Il va revenir dans nos vies et on trouvera le moyen d'être heureux, tous les trois ? Tu le promets ?

Yoongi promet. Il promet à Jimin, le si lumineux des premiers instants et le si anéanti d'aujourd'hui. Il se le promet à lui aussi. Lui qui s'est si longtemps nié pour réaliser un rêve. Mais il le promet aussi pour Namjoon. Une promesse qu'il aurait aimé lui faire il y a si longtemps déjà.
Ce soir-là, Jimin refuse de partir. Le lendemain, Yoongi l'aide à ramener ses bagages. Jimin s'installe petit à petit, se blottit contre lui la nuit et lui demande de lui parler de lui. Lui enfant, lui plus jeune, lui et ses rêves. Il lui demande encore et encore de lui conter Namjoon. Yoongi le laisse mettre de la vie dans son appartement impersonnel et l'accompagner à la boutique. Il le laisse exploser de rage et de désespoir devant la presque centaine de messages sans réponse. Yoongi tombe amoureux. Éperdument.

L'heure de raccompagner Jimin à l'aéroport est arrivée. Yoongi n'a aucun plan pour mettre en œuvre sa promesse mais il se dit que, ça, il ne peut pas l'éviter. Jimin est là, près de son piano, avec son énorme valise et un regard qu'il ne peut définir. Yoongi essaie de deviner mais il est surpris une fois de plus.

— Je ne prendrai pas cet avion à la gomme ! éclate-t-il soudain. Je reste.

— Tu restes ? répète Yoongi, incrédule.

Jimin dégaine son téléphone comme une arme, ouvre sa messagerie pleine à craquer de messages lus mais sans réponse et tape rageusement. Puis d'un air triomphant, les larmes dévalant ses joues, il tourne son téléphone vers Yoongi pour qu'il lise.

"Je reste à Paris. J'espère que tu as bien remis de l'ordre dans tes idées. Rejoins-nous et peut-être que je t'offrirai ton foutu fauteuil. On t'aime, triple idiot ! Ne nous raye pas de ta vie si facilement !"

Yoongi explose de rire et en sanglot en même temps. C'est absolument dégoûtant et un tel bonheur à la fois !

— Mais ton travail ?

— Je travaille d'où je veux. Mon agent fera avec.

— Ton appartement, tes affaires ?

— Elles viendront avec Namjoon et le chat.

— Namjoon ? Le chat ? C'est atroce comme les mots de Yoongi se mêlent aux reniflements.

— Tu verras. J'ai raison. Ils viendront.

Aussi repoussant que se trouve Yoongi, Jimin l'enlace et l'embrasse. Yoongi s'autorise à se laisser à ce bonheur que Jimin lui offre. Leur baiser a le goût de sel, et pourtant très doux. Le miel d'une promesse qui se réalise pas à pas.

📚🐈🪑


Août touche à sa fin. Jimin retient son souffle, les yeux rivés sur son téléphone, espérant désespérément un signe de Namjoon. Il joue distraitement avec un copeau de bois, son esprit tourmenté par les incertitudes. Hier, il a osé envoyer un message rappelant à Namjoon son rendez-vous chez le dermatologue, un signe discret de son amour persistant.

Yoongi, à l'atelier, reçoit des éloges d'un client, une lueur de fierté illuminant ses traits. Jimin admire la force tranquille de Yoongi, rappelant involontairement celle de Namjoon quand il parlait de ses passions.

Une main chaude sur son dos le tire de ses pensées. C'est Yoongi. Jimin ne l'avait pas vu approcher, perdu dans ses inquiétudes.

— Mon ange, ça va ?

Un sourire timide se dessine sur les lèvres de Jimin. Il aime donner ses sourires à Yoongi et voir la tendresse dans ses yeux.

— Je pensais... peut-être que je devrais rentrer à Séoul, le voir. Je m'inquiète.

Un sourire énigmatique traverse le visage de Yoongi.

— Peut-être... dit-il en rangeant ses outils.

— Dis-moi ! Tu as des nouvelles ? Jimin bondit de sa chaise, plein d'espoir.

— C'est possible... Yoongi répond, un éclat de joie dans ses yeux.

Jimin ne peut plus contenir son impatience. Il s'accroche à Yoongi, désespéré de savoir.

— Pendant que je dormais ? Tu l'as eu au téléphone ? Il va bien ? Il m'en veut ? Je lui manque ? Les questions fusent, exprimant toute son anxiété.

Yoongi attend patiemment, caressant doucement les cheveux de Jimin. Puis il continue, sa voix douce apportant un réconfort tant attendu.

— Il a lu tous tes messages, Jimin. Tu lui manques énormément. Il avait besoin de temps, mais tu peux rentrer à la maison quand tu veux.

Une explosion de joie éclate en Jimin. Il commence à sautiller, puis s'arrête brusquement.

— Et toi ? Et nous ? demande Jimin, les yeux brillants d'espoir.

Yoongi fait asseoir Jimin face à lui, prenant ses mains dans les siennes.

— Jimin, il pourrait y avoir un nous. Un nous à trois. Avec du temps et de la bienveillance. Tu serais d'accord ?

Jimin essaie de comprendre, submergé par les émotions. Yoongi rit doucement, les larmes aux yeux.

— Je prends ça pour un oui. Viens, dit-il en ouvrant ses bras. Encore un peu de patience, mon ange.

📚🐈🪑


Namjoon a hésité. Partir maintenant, à l'essai, en prenant mille et une précautions, ou se jeter tête baissée dans l'inconnu. Il se dit qu'il est passé par toutes les étapes du deuil, alors que personne n'est mort. Bien au contraire. C'est une naissance. Une naissance imprévue et improbable. Une naissance d'une nouvelle étape de sa vie. Alors, après le déni, une colère effrayante, après avoir pleuré, s'être plaint et enfermé chez lui, est venu une période de calme mélancolique.

C'est à ce moment que Yoongi a commencé à l'appeler. Invariablement, à dix-sept heures. Namjoon, la première fois, a songé à ne pas décrocher, à ignorer son appel comme il se refusait de répondre à Jimin. De peur de dire des choses qu'il pourrait regretter, de peur de sombrer de nouveau. De manière surprenante, il a décidé de décrocher. Et cela a été le début d'une série de longues conversations cœur à cœur. Avant de raccrocher, Yoongi lui donnait des nouvelles de Jimin.

Aujourd'hui, c'est son anniversaire. Il espère s'en souvenir longtemps. Il passe le double vantail d'une porte bleue d'un immeuble rue Portefoin. Il monte les escaliers en colimaçon. "Chut, mon cœur !" a-t-il envie de dire. Il bat dans sa gorge et dans ses tempes. Trois petits coups sur la porte 13.

— Chut, dit-il tout fort à une plainte qui s'échappe.

La porte s'ouvre. Un beau visage apparaît, rayonnant de tendresse et de gratitude.

— On t'attendait. Impatiemment.

— C'est qui ? crie une voix qui a tant manqué à Namjoon.

— Viens voir toi-même, répond Yoongi en faisant signe à Namjoon d'entrer.

Jimin déboule dans le salon, s'arrête brusquement, avance, puis s'arrête de nouveau. Il semble ne pas savoir comment se comporter. Et Namjoon sait que c'est à lui de remettre de la douceur et de la spontanéité dans leur relation.

— Alors, où est mon foutu fauteuil ? demande-t-il en tendant les bras.

Jimin ne se fait pas prier et se jette contre lui. Namjoon se demande si Jimin respire encore. Ses mains cramponnent son tee-shirt dans son dos, son nez est enfoui contre sa poitrine. Yoongi lui sourit. Alors, Namjoon lui fait signe. Jimin redresse enfin la tête et assiste à un moment merveilleux. Yoongi s'approche timidement et vient le rejoindre dans les bras de Namjoon. Namjoon se sent enfin en paix. Une paix qui l'a quitté des semaines durant.

Tout est à sa place. Comme lui a dit Yoongi, avec du temps et de la patience, ils trouveront leur équilibre. Mais Namjoon a l'impression d'avoir déjà fait le plus difficile : accepter et sauter le pas. Tout le reste ne pourra qu'être plus doux et meilleur. Il serre les deux hommes contre lui un peu plus fort.

— Tu vas m'étouffer, ronchonne Jimin. Encore !

Yoongi explose de rire, entraînant Namjoon avec lui.

— Miou.

Jimin sursaute. Namjoon tourne la tête vers la porte d'entrée où il a laissé la petite caisse si précieuse.

— Miou, répète Jimin. Miou ?

— Mmmmm, mais je te rappelle que c'est toi qui fais la litière.

Jimin pousse un cri strident. Le petit être enfermé dans la caisse s'affole et gratte le plastique. Jimin tente un coup d'œil entendu à Yoongi.

— Même pas en rêve. Je ne m'occupe pas de ce truc !

Jimin pouffe et Namjoon se détend. Quand Yoongi glisse sa main dans la sienne, l'air de rien, pendant que Jimin libère un chaton angora d'un blanc immaculé. Le petit animal renifle le nouveau venu avant de donner un coup de tête sur le dos de la main de Jimin, et de ronronner.

— C'est une femelle ?

— Oui, confirme Namjoon.

— Elle a pris l'avion ? s'étonne Jimin qui tient à présent le chaton dans ses mains.

— Non. Yoongi l'a trouvée pour nous. Je suis allé la chercher ce matin, sitôt arrivé.

— Tu vois comme tu m'aimes !

— Je vois, confirme Namjoon à deux doigts de pleurer, encore.

— Je vous préviens, ce truc, là, il reste pas chez moi ! bougonne Yoongi. Il va faire ses griffes partout.

— Si je reste, elle reste !

— OK ! Fin de la blague ! Tout le monde dehors, grogne Yoongi en riant et en poussant Namjoon et Jimin vers la sortie.

— Tu ne peux pas nous faire ça, minaude Jimin qui contient mal sa joie.

— Mmmm, alors je choisis son prénom !

— D'accord, approuve Jimin qui se niche sous le bras de Namjoon.

— Et son collier.

— D'accorrd, concède Jimin.

— Et elle ne dort pas dans notre lit ! Déjà, qu'avec une baraque comme ça, ajoute Yoongi, pince-sans-rire, en pointant Namjoon, il va falloir songer à une autre solution...

— Quoi, moi ? Je ne bouge pas. C'est Jimin qui gigote !

— Oui, mais moi je ne parle pas en dormant ! proteste Jimin

— Chacun sa chambre, chacun son lit, déclare Namjoon sans penser plus avant. Comme ça, c'est réglé.

— Hors de question ! Zou ! Cuisine tout le monde ! Premier conseil de trouple, fait Jimin d'une voix autoritaire.

Yoongi hausse les sourcils en regardant Namjoon.

— Nous voilà bien partis ! Bonjour, au fait !

Namjoon connaît cette petite phrase. Il la connaissait. Il comprend ce que Yoongi demande. Cela fait si longtemps. La familiarité reviendra-t-elle. Il se penche lentement, une main sur l'épaule de Yoongi, dépose un baiser sur une bouche qui sourit légèrement. Soulagement. Bien-être quand Jimin s'écrie depuis la cuisine.

— Tu as une dette de baisers de cinq semaines, Moni ! Je t'attends !

Namjoon sourit, sentant la chaleur et la tendresse de leurs liens renaître. Il savait que ce n'était que le début, mais ensemble, ils allaient bâtir quelque chose de beau et de durable, un jour après l'autre.

— Oui, un jour après l'autre, murmure Yoongi.

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