Au début du mois de mai, les beaux jours se faisaient de plus en plus nombreux. Damaris marchait dans les rues du vieux Tours en compagnie d'Héloïse, mais discuter au téléphone avec sa petite amie :

— Rejoins-nous en ville, dit Damaris.

— Je croyais que tu avais une soirée ce soir, souleva Nina.

— Oui, c'est pour ça que je te propose de nous rejoindre en ville. Je ne compte pas rentrer avant notre soirée.

— Je ne te vois pas ce soir alors ?

— T'es chiante chérie. T'as cas venir à la soirée.

— Ok, je dis plus rien. On se voit demain au moins ?

— Mais oui. Tu me manques déjà.

Elles raccrochèrent, sous les moqueries gentillette d'Héloïse. Il était dix-sept heure passée, les deux jeunes femmes s'orientèrent vers un café de la place Plumereau pour prendre un gouter, histoire de prendre des forces avant une longue soirée de beuverie. Au loin, Damaris reconnut une silhouette qui lui était très familière.

Des formes généreuses drapées dans une robe légère, une veste de cuir sur laquelle débordait des boucles rousses.

— Ça ne serait pas Louise ? demanda Héloïse.

— Ouai, souffla Damaris. Attends moi deux minutes, dit-elle après un silence.

Damaris alla à la rencontre de Louise qui sortait de la chocolaterie La Cure Gourmande. Cette dernière ne la remarqua pas et fut surprise quand elle se fit interpeller.

— Damaris, quelle belle surprise, dit Louise avec un sourire chaleureux.

— Ça fait longtemps. Qu'est-ce que tu fais ici ?

— Bah, comme tu le vois, j'achète du chocolat.

Elles rirent de bon cœur.

— T'as un truc de prévu là ? demanda Damaris, ça te dit de prendre un café avec nous ? Je suis avec Héloïse, ajouta-t-elle en montrant son amie au loin.

— Avec plaisir.

C'était la première fois que l'étudiante rencontrait Louise, elle était un peu nerveuse que ça se fasse dans ces circonstances, mais ce n'était certainement pas la plus anxieuse des trois femmes. Elles n'abordèrent que des sujets futiles.

Damaris envoya un message à Nina pour l'avertir qu'elle était avec Louise.

Nina : « Tu dis ça juste pour que je te rejoigne. »

Damaris : « Non. Je suis vraiment avec elle, je l'ai croisé à Plume. »

Damaris : « Est-ce que ça te dérange si je passe du temps avec elle ? »

Nina ne répondit pas immédiatement, pas convaincu que Damaris lui dise la vérité. Elle hésitait à la rejoindre pour en être certaine. Mais, à bien y réfléchir, qu'est-ce que ça pouvait lui apporter de mentir, surtout à propos de ce sujet.

Nina : « Fais comme tu veux, mais tiens-moi au courant. »

Damaris : « T'es sûre ? Tu vas pas me faire des reproches demain ? »

Nina : « Promis »

Nina : « Mais dis-moi ce qui se passe »

Louise était ravie de cette opportunité de discuter avec Damaris, même si ce n'était pas les meilleures conditions. C'était un signe du destin. Elle aurait voulu faire durer cette rencontre plus longtemps, mais Héloïse rappela à son ami qu'elle devait encore aller faire quelques emplettes avant d'aller à leur soirée. Elles restèrent quelques minutes à la table, alors que Damaris envoyait des messages.

Damaris : « On va à la soirée, je peux inviter Louise à m'accompagner ? »

En lisant le sms qu'elle venait de recevoir, Nina expira longuement. Généralement, Damaris ne l'informait pas du déroulé de ses soirées étudiantes, mais la situation était assez particulière. Elle ne se sentait pas jalouse, mais ne pas savoir exactement ce qui se passait, ne pas contrôler la situation lui faisait ressentir une certaine pression. Elle hésitait encore à les rejoindre, mais elle avait peur de donner l'impression d'être la femme possessive qui venait marquer son territoire.

Nina : « ça commence à se transformer en rencard »

Damaris : « Je ne lui ai rien proposé encore, si tu es contre, je ne lui demande pas. »

Nina : « Qu'est-ce que tu as derrière la tête ? »

Damaris : « Rien en particulier »

Damaris : « Elle est là. J'ai envie de passer du temps avec elle, prendre des nouvelles. »

Nina : « C'est en toute amitié ? »

Damaris : « Pour l'instant oui »

Damaris : « Mais je ne sais pas comment les choses vont évoluer au cours de la soirée »

Damaris : « Je ne ferai rien sans t'en parler, sans que tu sois d'accord »

Nina considéra toutes les possibilités, si les choses dérapaient entre elles, qu'est-ce que ça signifiait ? Allait elle être exclue de cette histoire ? Est-ce que Louise reviendrait dans leur vie ? Est-ce qu'elle le voulait ?

Ce qu'elle savait c'est que Damaris semblait vouloir vivre cet instant avec Louise. L'étudiante ne voulait pas trahir Nina et s'en remettait complètement à ses choix.

Nina : « Invite là »

Damaris lut le message juste avant de se séparer de Louise, elle lui proposa sans plus attendre de les accompagner à leur soirée. Elle accepta, alla jusqu'à sa voiture déposer ses chocolats pour rejoindre Damaris et Héloïse à l'épicerie avant d'aller à la soirée de Biscuit.

Dans l'épicerie, Héloïse questionna Damaris sur ses projets concernant Louise.

— T'es pas en train de faire une connerie ?

— Pourquoi ?

— Je suis pas sûre que Nina soit d'accord pour que tu passes ta soirée avec ton ex.

— Je te rappelle que c'est aussi son ex, précisa Damaris. Mais, t'inquiète, Nina est au courant et elle m'a donné son accord.

Damaris montra les quelques messages qu'elle avait échangés avec sa petite amie pour convaincre son amie.

— Vous jouez à des jeux dangereux, commenta Héloïse.

— Oui, je sais. Mais c'est un peu excitant.

— C'est bien ça le problème.

Héloïse se demandait ce qu'elle était en train de faire. Voir Damaris était une chose, reprendre contact c'était une bonne chose, mais le faire derrière le dos de Nina n'était pas très sérieux, surtout si elle voulait les reconquérir. Elle ne savait même pas si elles étaient encore ensemble, elles n'avaient pas abordé le sujet. La rousse n'avait jamais envisagé que ses ex s'étaient séparés. Mais le comportement de Damaris, le fait qu'elle lui propose de passer la soirée ensemble comme ça, peut-être qu'elles n'étaient plus un couple.

Elle rejoignit Damaris et Héloïse et elles se rendirent chez Biscuit. Le jeune homme trapus sembla ravi de rencontrer une nouvelle amie de Damaris et se montra très accueillant.

L'ambiance de la soirée était très festive, Louise se mélangeant aux étudiants sans difficulté. Alors qu'elle était sortie sur le petit balcon pour fumer une cigarette, Damaris la rejoignit :

— Anxieuse ? demanda-t-elle.

Louise ne répondit pas et se contenta de souffler lentement la fumée.

— Ça fait vraiment longtemps qu'on ne s'est pas vu, dit Damaris.

— Je crois que c'est le principe d'une rupture, dit la rousse sans ménagement. Comment va Nina ? demanda-t-elle après un silence.

— Elle va bien.

— Vous êtes toujours ensemble ?

Damaris acquiesça d'un signe de tête.

— Pourquoi elle n'est pas avec toi ce soir ? Elle avait un rencard de son côté ? taquina Louise.

— Elle n'aime pas les soirées étudiantes, dit Damaris. Et il n'y a plus de rencard.

Louise fut un peu blessée. Quand elle était avec Nina, cette dernière sortait avec d'autres femmes. Damaris l'avait rendu fidèle. Elle était certainement plus amoureuse d'elle qu'elle l'avait été de Louise.

— Mais tu connais Nina, continua Damaris, elle ne peut pas s'empêcher de draguer. Je n'ai jamais voulu qu'elle ait d'autre relation, je ne suis pas partageuse.

C'était donc là, le secret de la fidélité de Nina, lui refusait simplement les relations en dehors du couple.

— Et comment va Enzo ? demanda Damaris.

— Bien. Mais on n'est plus ensemble.

— J'en suis désolée, menti l'étudiante. Ça fait longtemps ?

— Depuis la soirée... Louise chercha ses mots, champagne.

— Il n'a pas dû apprécier que sa petite copine s'envoie en l'air avec ses ex dans les toilettes du club, commenta-t-elle avec une joie non dissimulée.

— Pas trop. Mais c'est moi qui l'aie quitté. Je n'étais pas, comment dire, amoureuse.

— Et depuis, des nouveaux Jules ou Juliette ?

— Rien de sérieux.

Elles quittèrent le balcon pour aller s'asseoir sur le canapé, sous l'œil inquiet d'Héloïse qui discutait avec Biscuit.

— Elle est sexy la copine de Damaris, releva le jeune homme.

— Tu trouves aussi ?

— Ouai, je crois que je vais tenter ma chance.

Héloïse ne put s'empêcher de rire, mais encouragea quand même son ami à tenter sa chance.

— Pour te dire la vérité, commença Louise, je n'ai trouvé personne à votre hauteur à Nina et toi.

— C'est vrai qu'on est exceptionnelle, dit Damaris en rougissant. Je peux en conclure qu'on t'a manqué ?

— Oui, dit la rousse en voyant Damaris envoyer un message, mais toi tu sembles heureuse avec Nina.

— Je le suis, mais on ne t'a pas oublié. Je ne parle pas que de mon ressenti, je sais que Nina est du même avis.

Louise rougit sans se cacher. C'était les mots qu'elle voulait entendre. Damaris prit la main de Louise dans la sienne, l'attira un peu plus prêt d'elle. Elle laissa ses doigts glissaient sur l'avant-bras de Louise.

— Tes taches de rousseur m'ont manquées, murmura-t-elle.

Un frisson parcouru le corps de Louise, Damaris semblait lui faire clairement des avances, mais elle ne cessait de regarder son téléphone, ce qui était loin d'être romantique.

De l'autre côté de la pièce, Biscuit les observait et demanda des éclaircissements à Héloïse :

— Damaris a rompu avec sa copine ?

— Non, pourquoi ?

— Parce que je crois qu'elle est en train de la tromper.

— C'est plus compliqué que ça, dit Héloïse en se retournant pour voir son amie embrasser le cou de Louise.

Quand les lèvres de Damaris se déposèrent sur son cou, Louise avait l'impression d'être dans un rêve. Elle s'attendait à ce qu'elles s'embrassent mais Damaris reçu un texto. Elle s'éloigna quelque peu de Louise pour lire son message.

— Avec qui tu échanges ses messages si importants ?

— Avec Nina.

— Ah.

— Je ne veux pas la tromper, tu comprends ?

Louise s'éloigna de Damaris, elle comprenait que ce n'était certainement pas le comportement à suivre pour ne pas tromper sa petite amie.

— Je lui ai demandé si je pouvais t'embrasser, expliqua Damaris.

— Ok, dit Louise en pouffant. Et qu'est-ce qu'elle a répondu.

— Rien pour l'instant. Mais toi est-ce que tu veux que je t'embrasse ?

Louise plongea son regard dans les yeux de Damaris, passa ses doigts dans ses cheveux, elle caressa sa joue, laissa son pouce glissait sur ses lèvres. Oui elle en avait envie, elle en avait besoin.

Le téléphone de Damaris sonna, elle y jeta un coup d'œil et lu le message.

Elle approcha son visage de celui de Louise, y détailla les traits, sa langue collée à son palais. Cet instant se figea, la seconde s'étira en une éternité. Elle ferma les yeux, leurs lèvres s'approchèrent, elle pouvait sentir son souffle caresser sa peau. Elle ouvrit les yeux en s'arrêtant à quelques millimètres du baiser, prenant conscience de ce désir qu'elle avait su faire taire pendant des mois.

Le temps explosa, ses lèvres s'écrasèrent sur celle de Louise qui s'agrippa à sa nuque. Elles s'embrassèrent avec passion, oubliant les gens autour d'elles qui applaudirent comme des enfants dans un cirque voyant les lions sauter au travers de cercle de feux.

Elles s'éloignèrent le souffle court, les joues rouges. Sans dire un mot, Damaris prit la main de Louise dans la sienne pour l'inciter à la suivre. Elles quittèrent le milieu du salon pour un endroit plus intime. Damaris embrassa Louise encore et encore, s'enivrant de ses baisers.