Chapitre 24 : Une bouteille à la mer
Le samedi soir, vers dix-neuf heures, Enzo frappa à la porte de Louise. Habillé d'un costume bleu nuit et d'une chemise noire cintrée qui mettait sa musculature en valeur, elle le trouva particulièrement séduisant. Il la trouvait tout aussi attrayante dans sa robe bustier noir soulignant ses courbes, perchée sur de haut talon. Ils échangèrent un tendre baiser, Louise passa une redingote camelle et ils quittèrent l'appartement pour débuter leur soirée.
Louise n'avait pas changé d'avis, elle avait toujours pour projet de rompre avec Enzo, même si leur relation se passait bien. Il avait des défauts, mais il restait un gentil garçon, quelques fois ignorant. Il n'était seulement pas fait pour elle. Elle n'avait cessé de penser à Nina et Damaris depuis leur rupture, surtout depuis qu'elle avait revu cette dernière, elle avait beaucoup réfléchi à leur relation ses derniers jours, ne sachant toujours pas ce qu'elle voulait. Elle ne pouvait pas leur faire vivre ses hésitations, les faire une nouvelle fois souffrir. Elle prenait conscience qu'elle devait d'abord prendre du temps pour elle, avant d'envisager une nouvelle histoire ou une ancienne.
Comme souvent, elle et Enzo allèrent chez des amis de ce dernier. Louise avait réussi à lui exposer ses difficultés à s'entendre avec ces personnes. Elle lui avait expliqué, qu'elle le trouvait différent quand ils étaient avec ses amis, elle avait l'impression qu'il devenait un adolescent un peu bête. Il s'en était excusé, expliquant qu'ils les connaissaient depuis le lycée et qu'il ne pouvait pas démentir qu'en leur présence il avait l'impression de revenir à cette période. Louise avait quand même accepté de passer la soirée avec eux, puisqu'elle s'était organisée avant qu'elle n'ose lui en parler, mais Enzo lui promis de faire des efforts et de moins lui imposer ce genre de soirée. Il en avait profité pour lui faire remarquer qu'il ne connaissait aucun de ses amis. Louise était plutôt du genre solitaire, elle avait quelques amis à la banque, mais leur relation n'était pas non plus des plus proches. Ses amis du lycée étaient pour la plupart mariés et parents, ne partageant pas son rythme de vie. Elle avait quelques amis au Royaume-Uni, mais les voyait très peu. Elle se rendit compte qu'à part sa famille, Nina et Damaris étaient presque ses seules relations sociales.
Ils frappèrent à la porte de Myriam qui l'ouvrit en catastrophe, ses cheveux bouclés en pagaille, elle se plaignit immédiatement qu'elle était seule en cuisine pour préparer le repas, alors que Lucas et Mathis, son petit copain, jouaient à la console. Myriam était un peu plus âgée que les jeunes hommes, même si elle était plus jeune que Louise, elle avait plus tendance à se comporter comme la maman du groupe plus tôt que comme la petite amie de Mathis. Louise n'avait pas tout de suite compris qu'ils sortaient ensemble.
Dans le salon, les deux jeunes hommes jouaient bruyamment sans une once de compassion pour Myriam. Ils saluèrent les nouveaux arrivés et proposèrent à Enzo de rejoindre la partie, pensant certainement que Louise irait aider la maitresse de maison.
— Je passe mon tour, dit Enzo en jetant un regard à Louise. Tu devrais peut-être aller te préparer, ajouta-t-il pour Mathis qui était torse nu.
— Ça va, on a le temps, dit-il avec dédain. Le repas n'est même pas encore prêt.
— Peut-être qu'on pourrait aider Myriam, dit Lucas qui était un peu plus sérieux, tu pourrais au moins nous servir à boire.
Lucas, lui, était habillé, un jean sombre et une chemise noire un peu trop grande pour lui, Enzo avait raconté à Louise qu'il avait perdu beaucoup de poids, mais qu'il ne voulait pas refaire sa garde-robe de peur de reprendre du poids ou au moins de la masse musculaire. Mathis proposa une bière à tout le monde, Louise refusa, prétextant qu'il devait bien avoir quelqu'un de sobre pour conduire, mais elle n'aurait pas dit non à un bon verre de vin blanc qu'elle savait d'expérience qu'ils n'en avaient pas.
Pour le diner, Louise s'attendait à un plat de gourmet au vus de tout le mal que semblait s'être donnée Myriam, mais ils eurent le droit à un apéro-dinatoire. Elle ne remettait pas en doute l'investissement de son hôte, mais en comparaison avec les bons petits plats de Nina, les torsades feuilletés de Myriam faisaient pâle figure. Cette dernière ne profita pas vraiment du repas, devant se préparer pour sortir. Alors que Mathis se contenta de passer une chemise, elle dut aller prendre une douche avant de s'habiller et de se coiffer. Elle revint dans le salon, avec une robe noire qu'elle portait avec fierté, l'ayant fait elle-même. Louise salua son œuvre sincèrement alors que les hommes la regardèrent à peine. La rousse se rendait alors compte que ce ne devait pas être facile d'être la seule femme dans un groupe d'hommes.
Pendant cette même soirée, Damaris était chez Nina, elles regardaient une série sans intérêt, ce qui ne l'enthousiasmait pas. Elle avait plus les yeux rivé sur son téléphone.
— Si on sortait ? proposa-t-elle.
— Tu veux faire quoi ? demanda Nina. Il est déjà tard.
— Ça fait un bail qu'on n'est pas aller danser. On quitte nos tenues confortables et on est parti.
— Je ne dirais jamais non à une soirée où ton corps ondule contre le mien, dit Nina avant d'embrasser sa petite amie.
Elles se préparèrent sans attendre et prirent la route pour un club dans lequel avait leurs habitudes.
Il était presque vingt-trois heure quand Enzo et ses amis arrivèrent devant le club et ce n'était pas n'importe quel club. Louise eut le cœur serré, elle sortait encore avec Nina et Damaris la dernière fois qu'elle y était venue et elle se souvenait surtout de cette fois, cette toute première fois où ses lèvres avaient caressé celle de l'étudiante.
Ils se placèrent à la suite de la queue qui était déjà longue :
— Je croyais que t'avais pris des entrées, dit Louise à Enzo.
— C'était prévu, dit-il, mais il n'y avait que les tables VIP à la réservation.
— On aurait peut-être dû venir plus tôt, dit Lucas en comptant le nombre de personnes qu'il y avait devant eux, je suis pas sûr qu'on puisse entrer.
— Mais bien sûr que si, dit Mathis, le club est grand et il n'y a pas tant de personnes que ça qui attendent.
— Oui, mais regarde, ajouta Lucas en tirant Mathis un peu hors de la queue, il y a les habitués qui arrivent et passent devant tout le monde.
Ils ne le savaient pas, mais Louise faisait partie des habitués. Elle dit à Enzo qu'elle revenait, il la suivit du regard longé la queue pour se présenter au videur à qui elle fit la bise. Le jeune homme et ses amis restaient bouche bée, Louise restait une femme mystérieuse et pleine de ressources insoupçonnées. Le videur s'inquiéta de ne pas voir Nina accompagner Louise, qui expliqua que, ce soir, elle était avec des collègues de travail, ne voulant pas rentrer dans les détails de sa vie privée. Il se montra très compréhensif :
— C'est important de bien se faire voir par ses collègues, commenta-t-il en acceptant de les laisser entrer.
Louise fit signe à ses quatre acolytes qui sautèrent de joie en la rejoignant. Le videur leur souhaita une bonne soirée, alors qu'ils s'enthousiasmèrent de pouvoir entrer dans le club. Sans attendre Louise se présenta à la femme qui tenait le vestiaire pour dire qu'elle ne prendrait pas la table habituelle, Enzo comprit alors que ce n'était certainement pas la première fois qu'elle venait dans ce club. Ils prirent une bouteille et eurent accès à une table dans un coin où ils n'avaient aucune vu sur la scène.
Louise ne pouvait s'empêcher de jeter des coups d'œil à la table qu'elles avaient l'habitude de prendre. Elle ne savait pas si elle avait envie de voir Nina et Damaris assises là, s'embrassant, ou si elle le redoutait. Le club se remplissait assez vite. Elle se tourna une nouvelle fois vers la table et cette fois, elles y étaient. Son cœur se serra et elle ne put détourner le regard de ses ex petites amies qui ne semblaient pas l'avoir remarquée.
Damaris et Nina étaient arrivées devant le club quinze minutes après Louise et son petit ami. Quand elles déposèrent leurs affaires au vestiaire, la femme qui le tenait leur dit que Louise était déjà là avec ses collègues, mais qu'elle n'avait pas pris leur table habituelle.
— Dami, je ne veux pas y aller, dit Nina, si on rentrait.
— Mais non, faut pas qu'on s'empêche de vivre pour elle, expliqua Damaris. On mérite cette soirée.
— Mais elle est là avec Ponzo.
— Si elle a tourné la page, montrons-lui que nous aussi. Montrons-lui qu'on n'a pas besoin d'elle pour être heureuse, continua-t-elle alors qu'elle voyait la tristesse s'emparer de sa petite amie. On devrait lui montrer ce qu'elle a perdue au change.
Nina réfléchissait en suçant sa lèvre supérieur. Elle ne savait pas comment agir. Elle voulait partir et ne surtout pas voir Louise encore moins accompagnée de son petit ami, mais les paroles de Damaris avaient du sens. Elle ne pouvait pas espérer faire regretter son choix à son ex si elle ne lui montrait pas que c'était elle qui avait le plus perdu en les quittant.
Damaris avait plus que cette idée en tête, elle ne pensait pas seulement montrer à Louise qu'elles étaient heureuses sans elle, elle espérait aussi la troubler pour qu'elle revienne vers elles. Elle pensait que Louise avait envie de revenir, qu'elle voulait quitter Enzo, qu'il lui fallait seulement un petit coup de pouce pour qu'elle franchisse le pas.
Nina accepta de rester, mais elle fit promettre à Damaris d'accepter qu'elles partent sans discuter si elle en sentait le besoin. Elles demandèrent la table qu'elles avaient l'habitude de prendre, expliquant qu'elle ne voulait pas déranger la soirée de Louise avec ses collègues. Elles s'installèrent et remarquèrent très vite leur ex avec ses nouveaux amis, surtout parce qu'elle ne cessait de leur jeter des regards au lieu de profiter de sa soirée.
Louise ne savait pas comment réagir. Elle était certaine que Nina et Damaris devaient savoir qu'elle était là, surement que l'un des videurs ou une des personnes qui tenait le vestiaire ou l'entrée les avaient prévenues. Elle aurait espéré qu'elles renoncent à venir, mais maintenant qu'elles étaient là, elle regrettait d'être là avec Enzo et ses amis, c'était avec elles qu'elle avait envie d'être. Elle se tourna vers Enzo et lui mentionna que Nina et Damaris étaient là. Il leur jeta un regard et expliqua ensuite à sa petite amie qu'il était content de la soirée, qu'avant aujourd'hui il n'était jamais rentré dans ce club qui acceptait rarement les nouveaux clients. Il lui demanda si elle ne passait pas une bonne soirée qui ne pouvait que s'améliorer avec le début du live si elle était capable de faire abstraction de la présence de ses ex. Après ce petit discours, il lui demanda :
— Tu veux qu'on s'en aille ?
— Non, c'est bon, répondu Louise.
De l'autre côté de la salle, Damaris et Nina se moquaient de celui qu'elles aimaient appeler Ponzo. C'était mesquin, mais ça leur permettait de relativiser la situation. Nina qui connaissait très bien Louise, se rendit compte qu'elle n'était pas très à l'aise.
— Tu penses qu'elle regrette ? demanda-t-elle à Damaris.
— Peut-être, dit l'étudiante mourant d'envie de lui raconter la discussion qu'elles avaient eue plusieurs jours plutôt.
— Elle ne doit pas trop s'amuser avec son Ponzo et ses nouveaux amis en tout cas, elle n'arrête pas de nous regarder.
— Ça doit la perturbée de nous voir ici. En même temps, si elle ne voulait pas nous voir, elle aurait dû sortir ailleurs.
— Ou peut être qu'au contraire, elle est venue ici dans l'espoir de nous voir.
Cette réflexion plaisait beaucoup à Damaris. Elle n'y croyait pas trop, mais elle savait que cela pouvait être un moteur pour Nina, qu'elle reprendrait les choses en mains au lieu de se lasser faire. Elle avait l'impression que la femme pleine d'assurance et séductrice s'était quelque peu effacée ses derniers temps et elle lui manquait.
— Je sais ce qu'on va faire, dit Nina en se dirigeant vers le bar.
Elle ne développa pas avant de revenir à la table où était resté Damaris. Elle revint, un grand sourire aux lèvres. Elle embrassa Damaris avec passion et s'installa sur la banquette.
— Tu vas me dire ce que tu comptes faire ? demanda Damaris face au silence de sa petite amie.
— Excuse-moi ma petite Dami, dit Nina en la prenant dans ses bras. Je sais ce qui fera réagir Louise, ça va la faire rager, j'en suis sûre. Je leur ai payé une bouteille de champagne.
— T'es pas possible, réagit-elle, c'est quoi le but, montrer à Ponzo que tu pèses dans le game ?
— Un peu, dit Nina en riant franchement. Mais je veux surtout que Louise pense qu'on a plus que tourner la page et qu'on la soutient dans son choix.
— Elle n'y croira jamais, Ponzo peut être, releva Damaris.
— Elle va avoir une réaction, dit Nina en voyant la serveuse amener la bouteille à la table de Louise.
Ça ne manqua pas, Louise se retourna vers ses anciennes petites amies, le regard sévères, Nina pouvait presque voir le rouge lui montait aux joues. Damaris salua la performance en soulignant que c'était très passif-agressif comme façon de faire. Elle se demandait comment la soirée allait continuer après ce coup de poker, regardant Nina qui affichait un sourire victorieux. Elle se dit alors que ce soir, d'une manière ou d'une autre, elle retrouverait ses petites amies.
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