Chapitre 19 : Visite surprise
En rentrant, chez elle ce soir-là, Damaris fut surprise de rencontrer Nina qui l'attendait devant son immeuble.
— Qu'est-ce que tu fais là ? demanda Damaris sans pouvoir cacher le rouge qui lui montait aux joues.
— Tu ne voulais pas répondre à mes messages, je me suis dit qu'il fallait que je vienne à toi, dit Nina ravie de son effet.
Elles restèrent une longue minute l'une face à l'autre à se fixer.
— Tu comptes me laisser sur le trottoir ou tu vas me faire entrer ?
— Tu veux venir chez moi ? s'inquiéta Damaris.
— Tu me caches un amant ?
— Non, pas du tout, dit Damaris anxieuse, allons y.
Elles montèrent les escaliers qui menaient au petit appartement. Une fois devant la porte, Damaris hésita.
— On peut aller chez toi aussi.
— On ne va pas aller jusque chez moi pour discuter. Qu'est ce qui ne va pas avec ton appartement ?
Damaris finit par la faire entrer.
— Voilà mon chez moi, dit-elle alors que Nina entra dans l'appartement en regardant autour d'elle.
— C'est pas mal, complimenta la brune.
— Te moques pas de moi.
— Mais quoi ?
— C'est un taudis par rapport à chez toi.
— Tu crois que j'ai toujours vécu dans le luxe et l'opulence ? interrogea Nina.
— Exactement, Louise m'a dit que vos parents étaient riches.
— C'est vrai. Louise est peut-être une fille à papa, expliqua-t-elle, mais je n'ai pas du tout la même relation avec mes parents.
Louise était très proche de ses parents, ils étaient partis faire le tour du monde, son père venant de prendre sa retraite anticipée. Elle les appelait au moins une fois par semaine, Damaris l'avait déjà entendu leur parler d'elle, ce qui l'avait mis un peu mal à l'aise. Louise avait aussi un frère plus jeune, musicien avec qui elle s'entendait très bien. Damaris était fille unique d'une famille modeste, elle s'entendait bien avec ses parents, mais ce n'était pas au point de Louise, elle leur envoyait des messages de temps en temps et les appelait une fois par mois. Nina, elle, ne parlait jamais de sa famille.
— Peut-être, mais j'ai du mal à t'imaginer dans un si petit appartement.
— Tu as tort. J'ai l'air si matérialiste que ça ?
— Oui, dit Damaris sans prendre de gant.
— J'ai vécu dans bien plus petit.
— Raconte. Je ne peux pas y croire.
— Tu le sais, j'ai arrêté les cours avant le bac.
— Oui.
— Ce que tu ne sais pas, c'est que mon père n'était pas d'accord avec mes décisions, commença Nina. Je voulais commencer ma vie. J'avais un ami plus âgé. Moi, j'avais dix-sept ans , lui il devait avoir vingt-trois, vingt-quatre ans. Il voulait ouvrir un food-truck. A l'époque, ce n'était pas démocratisé comme aujourd'hui. Alors, j'ai emprunté une grosse somme d'argent à mon père sans rien lui dire.
— Tu l'as volé.
— Emprunté, je lui ai tout rendu ensuite. Je suis partie dans le sud. On a mis tout l'argent dans le food-truck, on n'avait pas de quoi payer un loyer, ni une chambre d'hôtel, à peine de quoi manger, on se nourrissait des restes du food-truck.
— Toi qui aujourd'hui renvoie tes frites parce qu'elles sont trop salées, coupa Damaris avec moquerie.
— On a vécu deux semaines dans sa voiture, continua Nina sans relever ce que disait sa petite amie. Après, on a trouvé un studio plus petit que ton appartement en sous-location, on y a vécu trois mois. Louise, la pauvre, elle venait me rendre visite deux fois par mois. Ses parents ont mieux accepté notre relation que les miens. Elle faisait les courses, payer des chambres d'hôtels pour qu'on ait plus d'intimité. Sa mère me préparait de bons petits plats qu'elle me ramenait dans des tupperwares.
— Je ne te crois pas.
— Tu pourras demander à Louise de te raconter, à l'époque elle devait m'entretenir.
Damaris avait du mal à s'imaginer Nina dans une telle situation, mais elle n'avait aucune raison de lui mentir. Elle lui demanda si le food-truck avait marché.
— Une vraie réussite, dit fièrement Nina. Un an plus tard, on a engagé des employés pour nous aider et on a ouvert un second camion. Deux ans encore après, il m'a racheté mes parts. J'ai pu rembourser mon père avec les intérêts pour ne plus rien lui devoir et j'ai fait une formation d'agent immobilier. Et puis, me voici aujourd'hui, devant toi, prête à m'excuser.
— Tu n'as pas à t'excuser, dit Damaris alors que l'atmosphère devint lourde subitement. J'ai exagéré. Je sais que tu ne me prends pas pour une p... Enfin, tu veux juste qu'on soit heureuse.
— Oui. Je ne me sens pas supérieur parce que j'ai de l'argent, expliqua Nina. Je sais que je peux paraitre froide ou même condescendante, mais j'ai seulement du mal à m'ouvrir aux gens.
— Je sais, intervint Damaris.
— Ça me fait beaucoup de peine que tu penses que je suis ainsi.
— Je ne te vois pas comme ça.
— Damaris, dit Nina sur un ton solennelle, je crois que, elle marqua une pause, je crois que je t'aime.
Voilà, le mot était lancé. Damaris devint coquelicot. Elle se figea, ne sachant pas quoi dire. Nina la fixa, se sentant vulnérable. L'étudiante essaya de bégayer quelque chose, mais sa petite amie avait peur de lui forcer la main et l'embrassa avec passion pour couper court à la conversation. Ce baiser soulagea Damaris qui n'était pas prête à avouer ses sentiments, elle avait encore peur que ça ne tourne au vinaigre. Elles s'enlacèrent un long moment sur le lit de la jeune femme avant qu'elle n'ose reprendre la parole.
— Comment on réagit tes parents quand ils ont appris pour toi et Louise ?
— Mal. Je pense qu'ils m'auraient à la porte si je n'étais pas partie de la maison familiale.
— Mes parents ne savent pas que je suis lesbienne.
— Tu ne veux pas leur dire ? demanda Nina en commençant à caresser les cheveux de Damaris.
— Je ne leur ai jamais vraiment caché, commença Damaris. Je ne pense pas qu'ils seraient surpris si je ramenai une fille à la maison. Deux, peut-être un peu plus.
Nina sourit à cette réflexion. Elle était pensive, elle n'aimait pas beaucoup parler de sa famille, malgré les années qui c'étaient écoulées, ça lui faisait toujours de la peine.
— Et comment ont réagi les parents de Louise ? demanda Damaris.
— Beaucoup mieux que les miens. Cela a été difficile pendant une semaine à peine, après tout est redevenu normal. Je pense que c'est plus la façon dont ils l'ont appris qui leur ont fait de la peine.
— Comment ?
— Mon père nous a balancé, expliqua Nina. Ma mère nous avait surprise en train de nous embrasser.
— Pas cool. Mais ils t'ont accepté finalement vu que sa mère te faisait des tupperwares.
— Oui. Son père m'a seulement demandé de ne pas entrainer sa fille bien-aimée dans mes plans foireux.
— Tes plans foireux ?
— Oui, j'étais une délinquante à ses yeux. Il avait confiance en sa fille, mais aucune en moi. Louise est sa petite princesse. Je l'envie quelquefois, continua Nina, elle a des parents et un frère qui la soutiennent.
Damaris profita de ce moment de confidence pour en apprendre plus sur la famille de sa petite amie. Elle avait un frère et une sœur plus âgés qu'elle et un frère plus jeune que Damaris. ils lui avaient tourné le dos quand elle avait commencé à s'embrouiller avec ses parents au sujet des études et de Louise. Ils ne l'avaient jamais soutenu, préférant l'argent paternel à leur sœur.
Elles discutèrent jusqu'à s'assoupir, c'est la faim qui finit par les réveiller.
— Tu veux que je commande quelque chose à manger ? demanda Nina.
— Tu veux manger ici ? Chez moi ?
— Vu l'heure, je comptais même y dormir, dit Nina avec un large sourire.
Damaris était étonnée que Nina soit enthousiaste de passer la nuit dans son petit studio plutôt que dans sa belle maison. Elles appelèrent Louise pour qu'elle les rejoigne, mais elle préféra les laisser se réconcilier. Nina et Damaris se rendaient bien compte que ça ne devait pas être facile à vivre pour leur petite amie de se retrouver au milieu de leurs disputes, elles devaient se faire pardonner et lui accorder plus d'attention.
— Je vais pouvoir rencontrer cette fameuse Héloïse, dit Nina en accompagnant Damaris à son cours de travaux dirigés le lendemain.
Malheureusement, en jetant un coup d'œil à l'intérieur de la salle, l'étudiante constata que son amie n'était pas encore arrivée, ce qui ne l'étonnait pas, Héloïse n'était pas connue pour sa ponctualité. Elles discutèrent dans le couloir, espérant qu'elle arrive avant le début du cours.
— Nina ? Interpella une voix féminine.
L'intéressée se retourna sur une jeune femme qui la toisait avec un mélange de dégoût et de surprise.
— Salut...hmm, bégaya Nina en recherchant son prénom au fin fond de sa mémoire. Nadya, dit-elle triomphante, t'as l'air en forme.
— Ouai, je me suis remise, dit-elle sèchement, qu'est-ce que tu fais là ?
— J'accompagne mon ami Damaris à son cours et toi ?
— J'ai cours avec ton amie Damaris.
— C'est vrai que tu faisais des études de psycho.
— Toujours aussi perspicace, conclu-t-elle avant de rejoindre la salle.
Damaris avait observé la scène sans rien dire, elle avait les yeux qui pétillaient de question. Connaissant la personnalité sulfureuse de Nina, ce genre de situation ne l'étonna pas.
— Ton amie Damaris se demande ce que tu as bien pu faire à cette Nadya, dit-elle avec enthousiasme.
— Rien.
— Elle n'a pas l'air du même avis. Je crois qu'elle t'en veut pour quelque chose.
— Je suis sortie avec elle, c'est tout.
— Je veux en savoir plus, insista l'étudiante, je veux tout savoir.
— Il n'y a rien à dire de plus. Et puis, ton cours va commencer, se défila la brune.
— Tu ne t'en sortiras pas comme ça, si tu ne veux rien me dire, je demanderai à Louise, dit-elle avant de l'embrasser pour rejoindre son cours.
Dix minutes après le début du cours, Héloïse frappa à la porte, s'excusa de son retard et s'installa à côté de son amie.
— Tu as raté Nina, murmura Damaris, elle m'a accompagné ce matin.
— Ce n'est pas vrai, dit-elle désabusée, j'ai failli être à l'heure ce matin en plus.
Alors qu'elles commençaient le travail de groupe, Nadya demanda à parler à Damaris. Elle prit une voie grave et un air beaucoup trop sérieux :
— Je voulais te prévenir, comme toi, j'ai succombé à cette femme, dit-elle avec un certain dédain. Il ne faut pas croire ce qu'elle te raconte.
— Elle ne m'a rien raconté de particulier, intervint Damaris.
— A mon avis, ça ne va pas tarder. Elle m'a fait croire que j'étais particulière, mais en vrai elle a une petite amie, une vraie bombe, elle ne compte pas la quitté pour toi.
Damaris était fière qu'on complimente sa petite amie, mais elle se demandait si Nina avait réellement joué avec les sentiments de Nadya ou si cette dernière s'était monté la tête toute seule.
— Si je dis ça c'est pour toi, reprit Nadya, si tu ne veux pas me croire, c'est ton problème, au moins je t'aurai prévenue.
— Merci, dit Damaris avec un sourire forcé avant de rejoindre Héloïse.
Elle ne manqua pas de lui raconter ce qui les fit bien rire. Nadya ne pouvait pas savoir que Damaris connaissait l'existence de Louise et encore moins qu'elle sortait aussi avec elle.
Quelques jours plus tard, à la banque, Louise continuait d'éviter Enzo. Ce dernier s'en voulait de la tournure qu'avait pris les choses. Il n'était pas bien placé pour réclamer un choix, même s'il était convaincu qu'il était la meilleure alternative pour elle. Il frappa à la porte de son bureau, à peine avait-elle posé le regard sur lui qu'elle se sentit agacée.
— Comment ça va ? demanda-t-il d'un ton doux.
— Ça va, répondit sèchement Louise.
— Ça n'a pas l'air.
— J'ai juste une tonne de travail. Tu voulais quelque chose ?
— Juste m'assurer que tout aller bien.
— Ok. Bah ça va. Tu peux partir.
— Tes copines se font toujours la tête ? insista Enzo.
— Non. Elles se sont réconciliées.
— Tant mieux. Ça doit te rendre heureuse, dit Enzo en pensant qu'il n'obtiendrait rien de plus de la rousse.
— Non. Non, dit brusquement Louise énervée. Tu sais que ça ne va pas et c'est ta faute.
Louise essayait de faire bonne figure depuis plusieurs jours devant ses petites amies, mais elle ne cessait de penser à Enzo et au fait qu'elle avait voulu l'embrasser. Nina et Damaris pensaient que c'était leur dispute qui lui avait fait prendre ses distances. Elles avaient même organisé une soirée où elles étaient aux petits soins avec elle pour se faire pardonner. Et voilà comment elle les remerciait, en pensant à une autre personne.
— Qu'est-ce que j'ai fait ? demanda Enzo qui savait très bien ce qu'il avait fait.
— Tu me mets le doute sur ma relation. J'ai tout pour être heureuse et je suis en train de tout gâcher parce que je t'... parce que je suis trop conne.
— Je ne pense pas que tu sois conne. Peut-être que tu ne voulais pas de cette relation, qu'elle ne convient pas et que c'est pour ça que tu t'y sens mal. Ce n'est pas parce qu'on trouve les personnes parfaites qu'elles sont faites pour nous.
Les propos d'Enzo trouvaient un écho en Louise, ce qui l'énerva encore plus. Elle le chassa et s'enferma dans son bureau.
Le soir même, Louise retrouva Damaris et Nina chez cette dernière. L'étudiante avait diminuée ces heures au café, se rendant bien compte qu'elle ne pouvait pas tout assumer, d'autant plus qu'elle dépensait beaucoup moins d'argent dans les courses depuis qu'elle squattait plusieurs fois par semaine chez Nina. Elle avait finalement réussi à accepter qu'elle paie leur sortie. Louise se sentait à côté de la plaque comme si elle était à contre temps dans un concert que lui jouait ses petites amies.
— Ça ne va pas ma chérie ? lui demanda Nina.
— J'ai eu une journée chargée, je suis fatiguée, menti la bancaire.
— Tu veux que je te fasse couler un bain chaud, proposa Damaris.
Encore une fois, elles voulaient bien faire et ça donnait à Louise un sentiment de culpabilité qu'elle ne supportait pas. Elles ne s'y intéressèrent pas plus longtemps, car un invité surprise venait de sonner au portail. L'expression de Nina changea quand elle reconnut la silhouette de l'autre côté de l'interphone.
— Entre, dit-elle d'un ton dur en déverrouillant le portail.
Elle ouvrit la porte pour laisser entrer un jeune homme d'une vingtaine d'année qui la prit dans ses bras avec un enthousiasme qui n'était clairement pas partagé.
— Tu m'as manqué, dit-il alors que Nina se dégageait de son étreinte. Louise est là, dit-il en regardant l'intéressé.
Il se dirigea vers elle et la pris aussi dans ses bras, Louise se laissa faire, mais elle n'était pas plus enthousiaste que Nina.
— Et toi, je ne te connais pas, dit-il à Damaris.
— Damaris, dit-elle en lui tendant la main.
— Mais non pas de cérémonie, dit-il en lui faisant la bise.
— Damaris, je te présente mon frère Axel. Et ses affaires, ajouta Nina en posant le regard sur les bagages de son frère.
Elle s'enferma dans son bureau avec Axel. Damaris et Louise n'entendait rien de leur conversation.
— Elle n'a pas l'air ravie de le voir, souleva Damaris.
— Ah ça non, elle n'a pas de bon rapport avec les membres de sa famille.
— T'as une idée de pourquoi il débarque comme ça avec tous ses bagages.
— Soit il s'est pris la tête avec son père qui l'a mis à la porte, soit il vient lui demander de l'argent. Ou peut-être les deux.
Au bout de quelques minutes, Nina sorti du bureau d'un pas énergique, son frère la suivait la tête baissée comme un chien qu'on venait de surprendre faire une bêtise. Elle prit une boite sur une étagère, en sorti une liasse de billet qu'elle lui tendit. C'était donc pour l'argent pensa Louise et Damaris, mais Nina avait quelque chose à leur annoncer :
— Axel va passer quelques jours à la maison.
Nina ajouta une assiette à table et Axel s'invita pour le diner. Il se montrait un peu trop familier et entreprenant avec Damaris, ce qui agaça de plus en plus sa sœur :
— Tu peux arrêter de draguer ma copine, dit-elle.
— Je ne drague pas, je m'intéresse, rectifia le jeune homme. Et puis Damaris me le dirait si ça la gênait. Ce n'est pas comme si je draguais Louise.
— Si c'est pareil, dit Nina.
Damaris se mit à boire son verre d'eau à grande gorgée, espérant pour si cacher. Louise, elle, observait avec intérêt, prête à intervenir si la discussion devenait trop houleuse.
— Je ne comprends pas, dit Axel. Je croyais que tu sortais avec Louise, vous vous êtes séparées ?
— On est toujours ensemble, je sors avec les deux.
— N'importe quoi, dit-il.
Nina se leva et embrassa ses deux petites amies tour à tour. Louise avait l'habitude de ces démonstrations, mais Damaris était un peu gênée, mettant sa main devant le bas de son visage pour ne pas montrait le rouge qui lui montait aux joues.
— Convaincu ?
— C'est quoi ce nouveau délire ? demanda-t-il. Ça ne te suffisait pas d'être homosexuelle, fallait que tu sois polygame en plus.
— Si t'es pas content, tu peux aller chercher refuge ailleurs, attaqua Nina.
— Nina, intervint Louise calmement, s'il te plait.
Elle n'avait rien à dire de plus. Ce n'était pas la première fois qu'Axel débarquait chez sa sœur pour qu'elle règle ses problèmes. Il ne pouvait s'empêcher de la juger, de se comporter avec elle comme son père l'avait fait dans le passé. Elle en été déjà venue aux mains, ce qu'elle avait regretté. Après tout Axel était son frère, un gamin trop gâté qui n'avait aucune notion de savoir vivre. Nina reprit un semblant de calme et monta dans sa chambre.
— Et toi t'es d'accord avec ça ? demanda-t-il à Louise.
— La façon dont on vit ne te regarde pas, dit-elle avec un calme olympien.
Elle le regardait avec intensité et Damaris crut qu'elle allait le gifler, mais elle se contenta de lui faire un discours moralisateur.
— Regarde-toi un peu. Tu fais pitié. Tu viens faire l'aumône à ta sœur, la queue entre les pattes à la moindre petite embrouille avec ton père. Elle t'offre un toit, elle paie tes dettes et toi tu la juge. T'es pathétique.
Louise continua de la fixer alors qu'il évitait son regard en serrant la mâchoire. Damaris était intimidée par la situation, mais elle n'osait pas se lever pour rejoindre Nina. La rousse finit son verre de vin et se leva avant de dire à son beau-frère d'une voix stricte et posée.
— A la fin de la semaine, faut que tu sois parti. Supplie ton père ou fait le trottoir, je n'en ai rien à faire, mais trouve une solution. Et surtout, ne fait rien qui pourrait énerver ta sœur, parce que si elle est énervée, je le serais aussi et tu sais ce qui risque d'arriver.
Axel ne dit rien et dégluti avec difficulté. Il ne l'avouerait jamais, mais il avait une peur bleue de Louise. Cette dernière demanda à Damaris de la suivre à l'étage. L'étudiante obéit promptement ne voulant pas découvrir la Louise énervée.
Dans la chambre, Nina faisait les cent pas en pleurant.
— Pourquoi il vient toujours me voir, dit-elle dès qu'elle aperçut ses petites amies.
— Parce qu'il sait que tu vas lui donner tout ce qu'il veut et que ça va faire enrager ton père, expliqua Louise en la prenant dans ses bras.
Après un long moment et après avoir reprit son calme, Nina s'excusa auprès de Damaris. Elle aurait aimé qu'elle ne la voie jamais dans cet état et qu'elle ne rencontre jamais son frère. Elle s'excusa d'avoir gâché la soirée, mais sa petite amie ne lui en tint pas rigueur.
Les jours suivants, les rapports entre Nina et son frère furent plus cordiaux, comme s'il s'agissait de deux étrangers partageant un logement pendant des vacances.
Une fin d'après-midi, Damaris fut surprise de voir Nina débarquer au café pendant son servie. Elle avait plus tendance à venir le matin quand l'étudiante ne travaillait pas.
— Qu'est-ce que tu fais là ? lui demanda-t-elle en lui préparant sa boisson.
— Je suis venue te voir et surtout je m'éloigne un peu de la maison.
— Ça ne va pas avec ton frère ?
— Mon père a appelé, il vient le chercher ce soir et je ne préfère pas être présente.
— C'est Axel qui l'a appelé ?
— Oui, maintenant que j'ai payé toutes ses dettes, il a promis à mon père qu'il ne recommencera pas.
Damaris avait appris qu'Axel avait de gros problèmes de jeu d'argent et qu'il ne connaissait sa sœur que lorsque son père ne voulait plus lui donner d'argent. C'était comme si aller réclamer de l'argent à sa sœur était une leçon que voulait lui donner son père. Une leçon qu'il ne retenait jamais, puisque jusqu'à présent il recommençait à chaque occasion.
Nina profita de sa boisson en lisant un livre, attendant que Damaris finisse son service. Louise avait une réunion qui était censée se terminer tard, ses petites amies avaient eu l'idée d'aller dans son appartement lui préparer un bon diner. Elles se sentaient toujours un peu coupable depuis leur dispute futile. Nina était encore plus désolée de mettre leur vie entre parenthèse depuis l'arrivée de son frère.
En réalité, Louise n'avait aucune réunion, elle était bien chez elle, n'imaginant pas une seule seconde que ses petites amies voulaient lui préparer une surprise.
Vers dix-huit heures, les filles se tenaient devant la porte de son appartement, les bras chargés de provisions. Elles avaient tout prévu, repas gastronomique, vin, dessert chocolaté, bougie et ruban de satin pour les jeux de fin de soirée. Nina mit la clé dans la serrure de la porte et fut surprise qu'elle ne soit pas verrouillée. Elle entra dans l'appartement, Damaris à sa suite, et constata que les lumières étaient restées allumées. Louise vint à leur rencontre, un air paniqué sur le visage.
— Qu'est-ce que vous faites ici ? dit-elle en essayant de les empêcher d'aller plus loin.
— On voulait te faire une surprise, dit Damaris enthousiaste, ta réunion s'est finie plutôt ?
— Je vais déposer tout ça dans la cuisine, dit Nina en contournant Louise après avoir déposé un baiser sur ses lèvres.
Elles entrèrent dans le salon et constatèrent que Louise n'était pas seule dans son appartement. Un jeune homme se tenait debout au milieu du salon un sourire crispé sur les lèvres. Nina se tournant nerveusement vers Louise et lui demanda :
— C'est qui lui ?
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