- Chapitre 19 -
Vendredi 15 Octobre :
- Je... Je t'aime. Voilà, c'est dit.
Natsu la fuya du regard. Il parut rapidement gêné tandis que Yukino penait à reprendre contenance. Ses joues avaient soudainement pris une couleur cramoisie. Elle bafouillait tant que Yukino finit par laisser son regard dévier du rosé.
Je les observais faire en silence, ne quittant pas la scène des yeux. Les bras croisés, j'attendais la suite, qui ne vint pas.
Exaspéré, notre professeur de français poussa un long soupir et tapa des mains. Natsu, qui tenait avec douceur les mains de la jeune fille aux cheveux argentés, s'éloigna immédiatement d'elle à la fin du jeu d'improvisation.
- Ça manque de sérieux dans cette classe ! Râla l'homme. Natsu, quand est-ce que tu vas t'ancrer dans la tête qu'une personne qui confesse son amour y met toute sa sincérité et sa passion ? Je veux que tu joues avec passion et sincérité bon sang !
Le professeur se pinça la racine du nez et s'octroya un temps de réflexion. Il rouvrit les yeux et embrassa la pièce du regard, jetant un coup d'œil à chaque élève.
- Tiens, Lucy. Viens ici.
Je me raidis à son ordre et lançai un bref regard à mon frère. Ce dernier ne cachait pas son amusement et je grinçai des dents.
Nous nous trouvions dans notre habituelle salle de cours. Les chaises et les tables avaient été rangées de telle sorte à créer un grand espace où nous pouvions nous déplacer sans mal. Au centre de la pièce se trouvait Natsu et Yukino qui fuyaient encore et toujours le regard de la classe, se sentant honteusement humiliés par notre enseignant.
Sachant pertinemment que je ne faisais pas le poids contre le quarantenaire, je m'avançai vers le centre. Un élève à la chevelure rousse prit la parole.
- Je ne vois pas en quoi ce jeu nous est utile. Lança Loki en replaçant avec une certaine classe ses lunettes.
- Eh bien, Loki, si tu étais un peu plus attentif en cours, tu saurais que nous poursuivons le programme avec un rappel des bases du théâtre. Et je tenais à ce que vous vous imprégner de l'atmosphère.
Le roux se racla la gorge et se tut, ayant pris conscience qu'il n'avait rien à ajouter.
Notre professeur me prit par les épaules, s'accaparant l'attention de ses élèves. La gêne germa en moi et je sentis la paume de mes mains s'emmitoufler dans une certaine quantité de sueur.
Le professeur se rapprocha de mon oreille.
- Lors d'un entretien avec tes parents, ta maman m'avait fait l'éloge de tes exploits théâtraux. J'attends de voir ça, Lucy. Me murmura-t-il alors.
Mon sang ne fit qu'un tour et je me tendis sur place. Je lorgnai le quarantenaire du regard et tentai de reprendre une respiration régulière.
L'homme se détacha de moi et me laissa en compagnie du fameux garçon roux de tout à l'heure.
Je connaissais Loki depuis un bout de temps maintenant. Sept ans, plus précisément. Rares avaient été les fois où je ne m'étais pas retrouvée dans sa classe. Nous n'étions pas réellement amis. Nous nous connaissions juste très bien. Loki avait la manie d'absolument tout entreprendre pour briller plus que les autres. Le centre de l'attention, personne ne le méritait à part lui et lui seul. Je me rappelais de toutes ces fois où Loki s'était présenté en tant que délégué. Il voulait avoir le monopole de tout et de rien. La prétention et le narcissisme faisaient partie intégrante de Loki. Et hélas, l'arrogance pouvait prendre le contrôle de ses actions.
Yukino et Natsu avaient repris place près des autres. Sentant le regard de tous pesé sur moi, je restais pétrifiée. Néanmoins, seul celui de Grey comptait. Le savoir là, dans la même pièce où je devais jouer me paralysait sans que je ne puisse tenter quoi que ce soit. Le silence perdurait, pesant. Il écrasait l'atmosphère alors que tous n'attendaient que le coup de départ. Mais je ne pouvais faire abstraction de sa présence. Je le savais présent, son regard ne déviant pas. Comment veulent-ils que je joue ?!
Mon regard croisa celui de Sting qui, d'un hochement de tête, m'encouragea. Il m'adressa un doux sourire compatissant et je soufflai pour me rasséréner.
Je fermai lentement les yeux, laissant mon esprit vagabonder précautionneusement dans mes souvenirs. J'ouvris les portes à d'anciens et douloureux sentiments qui explosèrent en moi dans une douce lumière que seule moi percevait. Je cédai à toutes ces émotions passées et abandonnai mon corps à leur déferlement, en sachant pertinemment l'effort colossal que j'aurais à réaliser pour atténuer cet amour enfoui. Avant, jouer signifiait tellement pour moi que je ne pouvais pas me rater.
Alors, je posai mes yeux sur Loki qui me dévisageait depuis le début. Je lui lançai un simple regard, dont l'effet produit lui valut un léger écarquillement d'yeux, et le roux percuta.
Loki se racla la gorge et me tourna le dos.
- Bon, je ne vais pas rester là trois milles non plus ! Dit-il en haussant.
Le roux s'éloigna en quelques pas et je me précipitai dans sa direction, lui prenant doucement le poignet. Ce dernier me jeta un regard par dessus son épaule avant de se tourner en vers moi dont un air préoccupé avait changé les traits de mon visage.
J'inspirai profondément et plantai mes yeux dans les siens.
- Loki, je... Débutai-je, laissant pourtant ma phrase en suspens.
Je me mordis la lèvre et resserrai ma prise sur son poignet. Le roux s'approcha de moi et posa sa main sur mon épaule.
- Tu quoi, Lucy ? Ça ne va pas...?
Je parus reprendre une bouffée d'air puis je me lançai, le regard brillant d'un courage boosté.
- Écoute, Loki, je te trouve génial. Tu es si bienveillant et si mature... je n'ai pas les mots pour te dire à quel point tu comptes pour moi. Je ne peux pas te décrire ô combien tu me combles seulement en étant là, à mes côtés. Mais, Loki... sache que je t'aime. Je t'aime du plus profond de mon cœur, du plus profond de mon être. Alors, laisse moi une chance de te montrer ce que je peux t'offrir. Avouai-je, le cœur battant, le regard pétillant d'une fausse sincérité.
Ma tirade laissa pantoise ma classe entière. Un silence suivit ma déclaration alors que je m'étais approchée du roux pour lui effleurer tendrement la joue. Ils buvaient tous mes paroles avec attention.
- Oh, Lucy... Si tu savais combien tes mots me touchent. Tu viens d'allumer un feu dans mon cœur que je pensais alors flamme. Sache que tu mérites de vivre un bonheur sans précédent. Et je te le donnerai avec joie. Je t'aime aussi, Lucy. Je t'aime plus que tu ne peux l'imaginer.
Loki brisa la distance entre nous et m'enlaça. Je me serrai à lui pendant que nous attendions le signal de fin qui tarda pourtant.
La silence planait dans la salle de classe, les élèves abasourdis par la scène qui venait de se dérouler sous leurs yeux.
Puis l'écho de mains qui battent entre elles résonna dans la salle. Il y eut alors une acclamation sonore. Je me tournai vers notre professeur dont son regard luminait de respect, et mes yeux passèrent en revue ma classe qui m'aplaudissait, atterrissant sur Juvia. Ses yeux brillaient, prêts à céder place aux larmes. Un constat qui me serra le cœur. Je posai un regard touché sur elle et lui montrai alors toute mon affection.
Le professeur nous avait félicité avec gratitude pour " ce spectacle digne d'une pièce de Shakespeare " et nous avait laissé rejoindre le groupe.
Je me rassis près de Natsu et lui jetai un regard fier. Le rosé me gratifia d'un sourire. Je me sentis tressaillir devant lui et détournai le regard.
Aussi, je prenais des précautions pour ne pas aller chercher Grey du regard. Je m'étais efforcée à ne pas prêter attention à sa réaction lors du jeu d'improvisation. Son existence devait rester la plus insignifiante possible pendant ma reconstruction. Le temps que je m'adapte à sa présence. Je ne savais pas si j'agissais correctement mais j'en aurais bientôt le cœur net lors de mon prochain rendez-vous psychologique.
Dans les couloirs du lycée, je discutais avec mes amies, Sting et Natsu. Levy et Juvia me parlaient encore de ma prestation précédente alors que Sting rajoutait combien il avait toujours adoré assister à mes représentations lorsque nous étions gamins. Natsu et Erza, eux, les écoutaient avec un certain sourire amusé.
- C'est vrai que t'as géré, Caramel. Avoua alors le rosé, me sortant de mes pensées.
Je lui jetai un regard. Il m'adressa un sourire rassurant que je rendis, plus grand.
- Merci. Ça fait toujours plaisir à entendre.
- Tu m'avais pas dit que tu faisais du théâtre avant.
- Il y a beaucoup de choses que tu ne sais pas sur moi, Nat'.
- Et toi de même, Luciana. Dit-il sur un ton moqueur.
- Par pitié, m'appelle pas Luciana. Râlai-je.
Erza ricana.
- Luciana, c'est le nom d'une fille qui s'était amusée à lui jeter une merde de chien depuis la fenêtre de notre école primaire. Pouffa l'écarlate, amusée.
Sting éclata de rire, apparemment rattrapé par un souvenir follement amusant.
- Je m'en rappelle, putain ! Lucy s'était enfermée dans les toilettes des filles et n'en était plus ressortie jusqu'à l'ouverture forcée du gardien !
- Je veux pas m'en souvenir, Sting... C'était tellement humiliant... Soufflai-je, honteuse.
Le rire de mon frère fut contagieux et provoqua le rire de la petite troupe entière. Juvia reprit ses esprits et tilta.
- Aaah mais c'est pas le jour où tu avais voulu préparer une sadique vengeance en retour, nan ? Ça a donné quoi en fait ?
Je soupirai et roulai des yeux, agacée de ressasser cette honteuse histoire.
- J'ai voulu casser la vitre de la fenêtre de sa chambre mais un voisin m'a chopée et je me suis faite enguirlander par les parents de cette folle. Du coup, elle s'est moquée de mon coup foireux...
- ... et Lucy s'est jetée sur elle en plein cours de musique. Continua alors Erza, prise dans la discussion. Elle lui a foutu une raclée avec sa flûte à bec.
Le groupe fut rattrapé par un fou rire. Je fulminai sur place mais je ne pouvais nier. Cette histoire était vraie et entièrement vraie, à mon plus grand malheur.
- Je t'aurais jamais cru capable de ça, Lucy. Se moqua Levy, en larmes.
La petite bleutée n'arrivait presque plus à respirer et vu sa créativité à toute épreuve, ça ne m'aurait pas étonnée qu'elle s'imagine une scène complètement abracadabrantesque.
- Franchement, vu comment tu peux être sauvage, ça ne m'étonne même pas de toi, Luce. Pouffa Natsu en me lançant un regard amusé.
- Tu parles mais moi, au moins, je sais me battre ! Me défendis-je avec conviction. Mais allez y, moquez vous de moi car comme on dit, rira bien qui rira le dernier...
- Ça va ! Ça ne sortira pas de ces murs ! Par contre, je pourrais y faire en sorte si tu te tiens pas à carreau. Déclara Sting. Capiche ?
- Tu te fous de moi ? C'est moi la victime et en plus, vous vous retournez contre moi ? Je me tournai vers mes amies. Les filles ? Vous allez pas le suivre dans son délire tout pété quand même ?
La petite littéraire et l'écarlate levèrent leurs mains et firent signe que ce n'était plus leur problème. Lorsque mes yeux se posèrent sur ma meilleure amie aux cheveux bleus, celle-ci se mit à ricaner comme réponse.
Je leur dressai mon majeur et me rendis seule au réfectoire, vite rejointe par ce groupe de félons.
Penchée sur la table basse du salon, j'organisais en trois parties les résultats de mes dernières recherches pour l'exposé. Je devais réussir à capter l'attention de ma classe en parsemant ma partie de quelques informations intéressantes et ça me semblait être une tâche impossible vu certains élèves vraiment lourds. Je terminais d'écrire ma conclusion alors que du côté de Natsu, il tapait sa partie sur ordinateur. Il rédigeait au propre ses brouillons et alternait aussi entre précisions importantes et résumé.
Nous travaillions depuis près de deux heures, interrompus par Tom qui cherchait des gâteaux à grignoter ou par Tom qui désirait des câlins de sa maman, oh et encore par Tom qui trébuchait ou cassait quelque chose. Sa dernière bêtise fut de faire renverser mon verre rempli d'Ice Tea sur mes feuilles.
À cet instant précis, prise par la fatigue et l'agacement, j'avais péter une durite. La morale passée, Tom avait rejoint Sting, à mon plus grand bonheur même si les larmes avaient coulé à flot.
Une demi-heure plus tard, j'avais fini avec ma partie. Je poussai un soupir de soulagement et laissai mon dos toucher le cuir de mon canapé derrière moi, étendant mes jambes. Je fermai lentement les yeux et inspirai profondément. Je me concentrai alors sur la tranquillité d'une pause bien méritée puis mon regard se posa sur Natsu qui tapait sur les touches de son clavier.
J'observai les traits de son visage bien dessiné, remarquai le sérieux dont le rosé faisait preuve et un sourire se dessina malgré moi sur mes lèvres. Se sentant épié, Natsu se tourna dans ma direction et me dévisagea.
- C'est quoi ce sourire ?
- Rien. Juste un sourire. Je te demande " c'est quoi ce regard ? " moi ?
- Oui. Pleins de fois même.
Je levai les yeux au ciel et pestai, ce qui lui valut un riotement. Je me levai et lui proposai de remplir à nouveau son verre.
Ma jarre d'Ice Tea en main, je scrutais Natsu du regard qui s'était étalé en poussant la petite table. Je sirotais ma boisson alors que mille et une questions me trautaient dans la tête.
- Dis, Nat', ça t'arrive souvent d'être... hum, impulsif quand tu as bu ? Natsu posa ses yeux sur moi dans un froncement de sourcils. Fais pas le choqué, Natsu. T'as assommé un gars à la soirée d'une amie. J'en suis témoin puisqu'il s'est fracassé la gueule sur moi.
Le rosé percuta alors et je le sentis se raidir. Son regard m'examina un bref instant avant qu'il ne soupire.
- Tu te rappelles encore de ça ?
- Et pas qu'un peu.
- Pourquoi t'en parles que maintenant ?
- Je sais pas. Je me demandais juste. Répondis-je dans un haussement d'épaule.
Natsu poussa un nouveau soupir.
- Ne crois pas que je suis violent. C'est juste que quand je bois trop, je perds le contrôle de mon corps. C'est comme si j'étais spectateur d'un film en résolution de 144p. Bref, et après, trou noir au matin. Sauf ce soir là.
Il but une gorgée de son verre d'eau et vérifia l'heure sur son téléphone. Je m'étais placée de telle sorte à pouvoir le regarder sans me tordre le cou et j'écoutais attentivement ses explications qui m'intéressaient beaucoup.
Le savoir pacifique en temps normal m'enlevait un poids qui me soulageait. J'avais l'impression que la crainte qu'il s'en prenne un jour à moi sans raison venait de s'envoler. Et pourtant, je voyais bien que ce genre de situation le mettait vraiment dans l'embarras et je ne pouvais que compatir.
- Mais c'est fréquent que tu aies des moments de lucidité ? Genre, que tu saches ce que tu fais ou ce que tu as fait ?
- Je crois que les rares fois où je me souviens des soirées sont aussi celles où ça a le plus dérapé. Après, on ne peut être sûr de rien quand tout est flou. M'avoua-t-il d'un air désinvolte.
Je l'observai filer dans sa mémoire en silence. Il y resta un moment avant que je ne me racle la gorge.
Natsu se tourna dans ma direction et me sourit.
- Et toi ? Il s'est passé quoi avec ton ex ?
En ravalant ma salive, je sentis un nœud qui se formait dans ma gorge. Toujours au sol, je m'enfonçai dans le canapé, les yeux rivés dans le vide. Hésitante, je bataillai avec mon esprit avant que je ne prenne une bouffée d'air.
- Ok... qu'est-ce que tu veux savoir précisément ? Lui demandai-je.
Natsu posa son regard sur moi et but une lampée de son eau.
- Qu'est-ce qu'il t'a fait ? Tu peux résumer si ça te chante.
Je toussotai pour défaire le nœud dans ma gorge et déposai mon verre sur la table basse. Puis je me mis à nerveusement tripoter mon bracelet.
- Grey m'a... il m'a laissée tomber à une période de ma vie où c'était le gros bordel. Sans aucune raison. Sans rien dire. Rien. Il est parti du jour au lendemain et je n'ai plus jamais eu de nouvelles. Lâchai-je d'une traite, sans réfléchir à ce que je devais dire ou non.
Natsu me dévisagea longuement avant qu'un soupir ne s'esbigne de sa bouche.
- Une personne de son genre, qui ne pense même pas au ressenti de la personne en face, ne peut qu'être égoïste et mauvaise. Mais tu ne devrais pas garder cette rancœur dans ton cœur. Ça ne t'apportera rien de bon et se serait te tuer à petit feu.
Je me mordillai le lèvre inférieure. Mon cœur se pressait douloureusement dans ma poitrine. Je me levai pour me dégourdir les jambes puis m'assis confortablement sur le canapé, faisant brièvement le vide dans mon esprit. Je soufflai puis reposai de nouveau mon regard sur lui.
- À qui le dis-tu... sans lui, j'avais l'impression de perdre tous mes repères. Je croyais que tout était fini, qu'il n'y avait plus de suite envisageable. Mon monde avait fini par s'écrouler sous mes pieds, et je ne me suis accrochée à rien pour m'en sortir.
Natsu ne répliqua rien immédiatement. J'osais à peine soutenir le regard.
Outre ma psychologue, je n'avais parlé à personne de cette histoire. Je ne me trouvais pas encore prête pour divulguer mon passé, et je ne l'étais encore assez pour tout raconter.
Je me contentais de tripoter inlassablement mes cheveux, anxieuse. Natsu me rejoignit sur le canapé. Il se posa à mes côtés sans un mot et me fit signe.
Je le considérai avant de comprendre qu'il était sérieux. J'eus un temps de réflexion, réticente. Puis, pourtant hésitante, je laissai ma tête reposer sur son épaule.
- Tu ne méritais pas de souffrir pour lui. Il ne méritait sûrement pas ton amour et ton engagement envers lui. C'est Grey qui a tout fait foiré, pas toi. Ne laisse pas tes épaules s'abîmer par un poids que tu ne devrais même pas porter. Me souffla-t-il au creux de l'oreille, m'entourant de son bras. Tu n'as jamais été seule, et tu ne le seras jamais.
- Parce que tu lis dans le futur pour le savoir ? Me moquai-je sans trop de sérieux.
- Pas besoin d'être un génie pour comprendre à quel point il est impossible qu'une fille aussi géniale que toi soit seule.
- Pff tu dis ça que pour gagner des points. Râlai-je alors que je m'efforçais d'oublier le sourire idiot qui s'était dessiné sur mes lèvres.
- Nan. Je suis sincère avec toi, petite Luce. Je sais combien l'amour peut faire souffrir.
Je me dégageai doucement de son étreinte pour le regarder dans les yeux. Un sourire moqueur remplaça le précédent.
- Toi ? Genre, toi, on te l'a mise à l'envers ? J'aurais plutôt cru à l'inverse.
Natsu réprima un petit sourire. Un sourire qui tentait de cacher sa peine.
- Les garçons aussi ont un cœur. Toi qui veut abattre les préjugés, apparemment tu oublies ceux des hommes, Mistinguett.
- Parce qu'un homme peut aimer ? Je croyais que c'était une légende...
Nous nous échangeâmes un regard complice avant de soudainement éclater de rire.
- Ne t'inquiète pas, Nat'. Je sais que certains garçons peuvent avoir un cœur. Ça te dit de me raconter ton histoire, père Castor ?
Le rosé émit un petit rire et acquiesça. Il s'enfonça dans le canapé et je m'éloignai de lui pour m'allonger sur le peu d'espace qui me restait.
- C'était en Seconde. J'étais tombé amoureux de ma meilleure amie et après trois longues années à l'aimer en secret, je le lui ai dit. Un soir de Noël. C'était réciproque. Je te passe les détails mais j'ai vécu une merveilleuse année avec elle... puis je l'ai retrouvé avec son soi-disant " cousin " dans son lit. Un soir de Noël...
- Quelle salope... mais c'est incroyable comment il y a des gens inhumains sur cette Terre. Pourquoi rester avec quelqu'un si on ne l'aime plus ? Incompréhensibles, ces énergumènes !
- Peut-être qu'elle voulait pas me blesser...
- Eh, Nat'. T'as souffert dans tous les cas, nan ? Même plus que ce que t'aurais dû. Elle devait être celle qui te rendrait éternellement heureux. Elle a choisi d'être à tes côtés et de t'aimer. Alors, il n'y a aucune excuse pour ce qu'elle t'a fait.
Je fixai avec attention Natsu. Il était plongé dans ses pensées, penché en avant, les mains jointes. Son regard restait figé dans le vide. Natsu poussa un soupir de résignation et m'adressa un petit sourire. Le coussin coincé derrière son dos fut projeté dans ma direction et je me le pris en pleine tête. Je lâchai un cri d'indignation et lui rendis rapidement le coup.
Natsu ricana et ses yeux verts me scrutèrent
- Faut croire qu'on n'a pas eu de chance en amour. Dit-il.
- Rares sont ceux qui en ont. Répliquai-je dans un haussement d'épaule.
- Peut-être. C'est vrai... mais je crois aux miracles. Et je suis sûr que tout le monde a l'opportunité d'en vivre un.
J'arquai un sourcil, dubitative, mais gardai ma langue dans ma poche, entreposant cette idée dans un coin de ma tête.
Le craquement des marches des escaliers nous interrompit dans notre réflexion personnelle de la vie. La bouille de mon frère apparut aussitôt tandis qu'il s'approchait du canapé.
Alors que je m'étais rassise correctement, Sting m'enlaça par derrière. Je lui donnai une tape sur le front et il couina.
- Va te faire, Luciole. Déjà que j'm'occupe de ton g-... euh... hum, de Tom, tu pourrais faire l'effort de... d'être plus sympa avec moi ! Hum.
Sting avait encore du mal avec le fait de mentir. Ça lui arrivait de se tromper publiquement et, encore heureux, il n'y avait jamais eu de grosses répercussions. Des regards perplexes, des messes basses... Rien de jamais grave pour l'instant. Mon frère tentait tant bien que mal de s'adapter à la situation mais parfois, les habitudes revennaient à pas de galop et il avait du mal à se rattraper.
Mais Natsu ne releva rien, peut-être n'avait-il rien remarquer.
- Bon, tu restes, Nat' ? Reprit Sting J'vais nous commander une pizza. Rien de mieux que de se rassasier après un travail acharné !
- T'as fait quoi d'acharné, toi ? Lui demandai-je, moqueuse.
Mon frère ignora mon intervention, s'asseyant sur la table pour nous faire face. Il tenait en main Bob le bricoleur, ce qui m'aida à savoir que Tom ne dormait pas encore.
- Nan... tu lui as toujours pas fait faire sa sieste ? Il faut tout faire dans cette maison !
Je me levai d'un bond et me dirigeai vers les escaliers au moment où Natsu accepta l'offre de Sting. À l'entente de sa voix, je me tournai légèrement et remarquai que Natsu m'observait déjà.
Mon regard se perdit dans ses yeux un instant qui me parut éternité. Mes pensées divaguèrent vers notre conversation de tout à l'heure et ma mine se teintait involontairement d'affection. Une étrange affection que le rosé remarqua rapidement. D'abord intrigué, il m'adressa par la suite un doux sourire complice que je rendis que plus grand avant de monter promptement les dernières marches, le sourire aux lèvres.
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