⚜ Loυιѕ ⚜
Je tentai vainement de me rappeler si, au cours de mon existence, mon autorité ainsi que mon statut furent autant contestés. En présence de cette femme, je perdais tout sens et me sentais rabaissé.
Je me tirai de mon hébétude et me frottai le front qui palpitait de manière douloureuse sous mes doigts. Elle avait eue l'audace ainsi que l'impertinence de m'envoyer sa chaussure en plein visage. Cette coureuse de Remparts qui se fardait d'être une princesse, de sang noble, osait lever la main sur le Roi de France !
Je ne saurai tolérer une fois encore son comportement inqualifiable et indigne. Je fis montre d'une certaine courtoisie envers elle et son bâtard mais dorénavant, elle n'obtiendra plus de ma personne que de la fureur.
Je me hâtai de quitter cette pièce et rencontrai sur mon chemin plusieurs membres de la Cour qui s'étaient déplacés en l'honneur de mon union avec l'Infante d'Espagne. Ils me saluèrent tous en s'inclinant de manière respectueuse et chacun d'entre eux ne cessait de me féliciter pour la célébration de mon mariage avec Maria. Si seulement l'un d'eux avait pu se douter de l'horreur qu'était devenue mon existence. Ils enviaient tous ma position et souhaiteraient détenir mon pouvoir mais aucun de ces nobles ne pourrait véritablement comprendre le poids qui pèse depuis ma naissance sur mes épaules. Ils n'en savaient rien.
— Sir.
Je me tournai vers Blouin et malgré moi, je ne pus réprimer l'irritation qui grondait au plus profond de mes entrailles. Il m'était désormais impossible de voir en lui un serviteur, fidèle et loyal. Il avait osé poser sa main sur mon épouse, sur ma reine.
— Votre monture est prête, Sir.
— Peux-tu me dire pourquoi l'on a apprêté mon cheval ? me questionna Philippe.
Il s'était aussitôt précipité vers nous et je pus lire à ses expressions faciales qu'il n'était guère ravi de débuter le voyage de retour en montant sur un cheval mais peu m'importait son exaspération, il était mon sujet et il ferait tout ce que je lui demanderai car cela en avait toujours été ainsi. Il était né, non pas pour gouverner, mais pour me servir.
— N'est-ce pas évident, mon frère ? le taquinai-je. Tu feras, au moins, la moitié du chemin sur le dos de ta splendide monture. Un peu d'exercice hors chambre ne pourra que te faire du bien.
— De l'exercice ? Je n'ai guère besoin de cela ! grogna-t-il, agacé. Mais que te prend-t-il aujourd'hui ? Je ne me sens pas capable de...
— Plutôt que de passer tes soirées à te complaire dans le pêché, tu aurais mieux fait de te repaître dans la prière, mon frère, le coupai-je d'une voix froide. Maintenant, ton roi t'ordonne de monter sur ton cheval et de faire un petit bout de chemin en sa divine présence. Aurais-tu un mot à dire contre cela ?
Philippe posa sur moi un regard emplit de rage.
— Comme il plaira à Sa Majesté, dit-il la voix pleine de fiel.
Mon jeune frère se détourna et alla murmurer quelque chose à l'oreille de l'homme qui partageait sa couche puis je le vis invectiver l'un des palefreniers qui s'occupaient de nos chevaux.
— La reine, où se trouve-t-elle ? questionnai-je.
— Sa Majesté, la reine, votre épouse a été conviée par Sa Majesté, votre mère, à partager son carrosse en compagnie de Monseigneur Mazarin. Une invitation à laquelle elle a répondu favorablement, répondit Blouin.
— Lorsque nous arriverons à Paris, vous serez remplacé par Bontemps.
— Sir ?! fit-il, stupéfait.
— Aussi, je vous conseillerai de ne plus vous approcher de la reine, de ne point poser votre regard sur elle et encore moins d'apposer vos mains sur elle. Vous n'êtes qu'un simple serviteur, Blouin, et elle, c'est une reine, ma reine. M'avez-vous compris ?
— Oui, Sir.
— Ce n'est certainement pas la réponse appropriée pour ma question alors je vais reprendre. M'avez-vous compris ?
— Je ne poserai ni mon regard ni mes mains sur Sa Majesté la reine, votre épouse, Sir, reprit-il la voix vacillante.
— Soyez reconnaissant que je ne vous fasse pas jeter en geôle.
— Sir...
D'un regard, je le dissuadai de poursuivre. Il m'insupportait de le regarder tandis que peu de temps auparavant, il fut sur le point de me trahir.
Très vite, notre cortège se mit en route pour Paris et j'avançai sur un rythme lent mais soutenu aux côtés de mon frère qui n'avait souhaité m'adresser un seul mot depuis notre départ. Il s'entêtait dans son mutisme et cela contribua à intensifier ma colère.
— Philippe !
Il m'ignora de façon ostensible.
— C'est un ordre de ton roi, parle-moi.
Il tourna la tête vers moi et la lueur qui brilla dans ses prunelles me fit perdre contenance car il était rare que mon frère adopte une attitude froide et détachée. C'était un comportement qui ne lui seyait pas.
— Sa Majesté m'ordonne de parler alors je ne peux que m'y plier, dit-il. Sa Majesté voudrait-il que je parle de la violence dont il a fait montre envers Sa Majesté la reine ?
— Violence ?
— Je ne suis peut-être qu'un sujet comme un autre mais je ne suis point dénué d'intelligence ! Nous l'avons tous vu et personne n'ignore l'identité de l'artiste qui a peint la joue de Sa Majesté la reine, cracha-t-il avec venin.
Je perdis soudain tout usage de la parole face aux accusations de mon frère et ne pus me défendre car il n'y avait rien à nier. J'étais coupable.
— Philippe...
— Elle est ton épouse ! m'interrompit-il en haussant le ton.
Je remarquai du coin de l'œil que l'un des gardes qui se tenait à ma droite s'était légèrement rapproché. Je ne saurai dire avec exactitude si ce geste était protecteur ou s'il souhaitait tendre un peu plus l'oreille pour ouïr la conversation que j'entretenais avec mon frère.
— Il n'a guère fallu peu de temps pour que ton mariage fasse les gorges chaudes et profondes des nobles de la Cour. Ils auront de quoi cancaner pendant un long moment et les rumeurs les plus folles se propageront dans tout le royaume. Des nobles aux paysans, l'on se demandera quelle raison aurait pu pousser le roi, à peine marié, à lever la main sur la reine !
— Elle a manqué de respect à Marie ! me défendis-je. Elle a osé assimiler Marie à une femme de mauvaise vie !
Je l'entendis rire mais ce n'était point un rire moqueur. Il sonnait comme incrédule.
— Tu as levé la main sur ton épouse pour défendre l'honneur de l'une des nombreuses femmes qui a partagé ta couche ?
— Je n'ai jamais considéré Marie comme une autre de mes conquêtes. Je l'aimais et je continue de l'aimer, protestai-je.
— Tu l'aimes ? Tu tombes amoureux de toutes les femmes qui se refusent un tant soit peu à toi ! Il suffit qu'elles prétendent s'intéresser à l'homme et non au monarque que tu te métamorphoses aussitôt en Éros ! claqua-t-il avec sécheresse. Mais qu'importe ce que tu penses éprouver pour Marie, tu n'avais nullement le droit de porter la main sur ta femme !
— Elle ne peut être considérée comme telle lorsqu'en son sein...
— Il suffit ! Assez ! tonna-t-il, furieux. Tu as souhaité entendre mes conseils la veille mais il m'apparaît aujourd'hui que tu n'as rien retenu de mes mots. Remercie notre bon Dieu que tu sois protégé par ton statut de souverain car mère n'aurait pas hésité à te rendre le soufflet que tu as infligé à ton épouse mais cela ne te dispensera pour autant pas d'une dispute de sa part à notre arrivée à Paris. Ton geste l'a grandement mécontenté.
— Cette femme est une démone ! Elle...elle a tenté de corrompre Blouin de ses charmes.
— Quoi ? fit-il incrédule.
— Je les ai trouvés dans une position incriminante avant que nous n'entamions notre voyage.
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