Je ne savais pas trop comment prendre la consigne du jour... Je l'ai prise au pied de la lettre, j'espère que ça ira :/

A peine étions nous revenus de notre déménagement que nous devions recommencer à construire. Mais cette fois-ci, ce ne sont plus des dortoirs qu'il nous faut mais des maisons. Le chef de l'expédition nous confia à tous une carte qui représentait la plaine où nous nous tenions. Sur cette carte était indiquée une parcelle de terrain chacun. Je regardais la mienne. Parcelle D109. De même taille et de même forme que les autres, mais tellement plus belle. Parce que celle-là est à moi.

- Arrête de chouiner Marlot, file-moi ma carte.

Cliff était dans la tente infirmerie, la seule a être déjà montée. Je lui apportai sa carte. Sa parcelle était proche de la mienne. Levinson et Thompson étaient également dans le même pâté de maisons. Et à cet instant ils étaient également en train de commenter leur dû dans la tente infirmerie. LE médecin nous chassa rapidement, prétextant que cette tente n'était pas un salon de thé. Nous abandonnâmes Cliff, sans que je pusse déterminer s'il était triste de perdre sa seule compagnie ou heureux d'être débarrassé de nous.

Thompson se posait des questions sur son voisinage, Levinson sur la vue qu'il aurait depuis ses fenêtres lorsque sa maison serait construite. Moi j'étais juste heureux de voir enfin ma nouvelle chance arriver. Je commençai à bâtir le jour même, fort des quelques connaissances que Bertrand m'avait apportées. Nous allâmes à trois chercher du bois dans la jungle, puis chacun parti chez lui. Je commençais à couper le large tronc qui me revenait. Au bout d'une demi-heure, j'étais en sueur. Et je n'avais pas avancé. Mon tronc était coupé de travers, j'avais abîmé la moitié du bois en tentant d'en faire des planches. Je les regardais le cœur serré. Elles seraient inutilisables. Je m'énervais, arrachais son écorce, ses feuilles, tout ce qui passait à ma portée et n'était pas trop solide pour mes bras ridiculement fins. Le crissement de l'écorce qui se déchirait sous mes doigts me crispa encore plus.

- Qu'est-ce que t'as ?

Cliff trottinait depuis l'infirmerie jusque sa parcelle. On lui avait construit des béquilles de fortune avec des branches. Je ne savais pas comment une jambe cicatrisait d'un coup de lance, mais je sentais qu'il ne pourrait jamais remarcher normalement.

- Rien.

Il s'agissait d'un magnifique mensonge. C'était stupide, mais je ne voulais pas paraître faible et enfantin devant le fermier. Cliff était grand, costaud, plus âgé que moi. Il faisait figure de mâle alpha dans notre groupe. Et malgré sa nouvelle infirmité, je me sentais honteux de me présenter à lui aussi lamentablement.

- Il est moche ton morceau de bois.

Je ne luis répondis pas. Il s'en alla. Qu'allait-il bien pouvoir faire tout seul avec ses béquilles, jamais il ne pourrait construire une maison ! A moins que ...

- Cliff !

Je le retenais un moment. Tant pis pour la honte, c'était ma seule chance.

- Tu étais toujours le meilleur bricoleur de nous quatre.

- C'est vrai, dit-il comme s'il s'agissait d'une évidence.

- Aide-moi.

Je m'en voulu immédiatement. Le ton était aussi peu pathétique que possible, néanmoins j'aurais eu du mal à le dire de façon véritablement courageuse.

- T'aider à quoi ?

- A construire ma maison.

Il ricana.

- Un homme n'a pas besoin qu'on l'aide à construire une maison. Si tu ne sais pas construire une maison, tu n'es pas un homme.

- Ou tu es un homme blessé.

La comparaison ne paru pas lui plaire, mais il ne rétorqua rien.

- Qu'est ce que j'y gagnerais, femmelette ?

- Je t'aiderais à construire la tienne.

- Je n'ai pas besoin d'aide.

- Tu en auras besoin.

- Stupide garçon.

- Je ne le dirais pas aux autres. Je serais tes jambes.

Il grommela un dernier juron avant de partir. Je savais que ma tentative était incertaine, mais je pensais avoir touché un point sensible.