PDV : Despair.

Despair s'ennuyait. Beaucoup. Il contena un énième bâillement, tandis que Kasmar, lui s'amusait comme un petit fou. Il avait surpris un groupe de 5 âmes, les avaient toutes attrapées, il leur avait demandé de choisir lequel serait sa proie. L'un d'entre eux, courageux, s'était porté volontaire, mais il avait finit par capturer les 5 et était maintenant en train de les toucher du bout du doigt, observant leur peau brûler et se flétrir au contact de la sienne qui était corrosive. Lui ça le faisait marrer, eux crier, et Despair, bailler.

Ils étaient dans les très bien nommés lacs, qui étaient tous plus ou moins grands et profonds et reliés entre eux par de petits ruisseaux. Le paysage était plutôt plat, mais la végétation luxuriante bloquait la vision de sorte qu'il était impossible de voir quelqu'un qui se trouve devant le lac voisin.

À côté on trouvait les grottes, devant les plateaux de farine et derrière, la petite jungle. Il aurait préféré une bonne vieille forêt, mais bon Kasmar était tellement plus fort que lui qu'il ne devait en aucun cas le vexer ou le fâcher, car dans ce cas, ami de longue date ou pas, ça pouvait très mal virer pour lui.

Une des âmes poussa un cri plus fort que les autres quand son pied se détacha du reste de sa jambe, et Kasmar éclata de rire, Despair l'accompagna, même si toute cette souffrance ne l'amusait pas du tout.
À cause de son manque de sincérité, son rire sonna un peu faux. Et Kasmar s'en aperçu. Une fois son petit jeu finie il trouva Despair et lui demanda

- Eh t'as pas l'air de t'éclater, tu veux faire autre chose ?

Despair resta très neutre et lui sortit le plus naturellement possible la première idée qui lui vint.

- En fait je crois que je préfère quand les âmes sont en mouvement, genre leur courir après, ça m'amuse plus que de les torturer quand on les a déjà attrapé...

- Aah, si ce n'est que ça, s'exclama l'autre démon, on peut aller dans les plateaux de farine, c'est juste à côté ! Là-bas on trouvera bien quelques âmes à courser, après tout, ces plateaux sont le passage le plus sûr pour rallier la frontière, on y trouve pas mal d'âmes de passage.

Il arracha la gemme des âmes inconscientes, les laissant se désagréger doucement n'abandonnant derrière eux que leurs gemmes translucides, puis ils partirent vers les plateaux.

- Allez viens !!!

Despair le suivit, se demandant comment il allait justifier sa nullité en course à pied alors qu'il avait prétendu aimer ça.

PDV : Lava.

Lava écoutait Matthis lui raconter ses 7 sept années d'enfer.

- Les collines trouées sont, comme leur nom l'indique, un ensemble de collines, couvertes de longues herbes hautes et, ce qui est un inconvénient, parsemées de trous, plutôt petits mais très profond. On ne les vois pas bien alors quand je suis apparue, je suis évidemment tombé dedans, et pas moyen d'en sortir, j'ai donc attendue jusqu'à ce qu'un démon me trouve. Il a fallut trois jours. Mon première démon était de taille moyenne on aurait un yéti. Ensuite, j'ai marché et traversé pas mal de lieu, et un jour j'ai trouvé Tracy. C'était deux ans après mon arrivé.

Elle avait du mal à se concentrer sur ses paroles, préoccupée par une question. Elle finit par lui poser.

- Où va-t-on ?

- Eh bien... Hésita-t-il, on va vers la frontière entre la strate 5 et 6, donc on va traverser les plateaux de farine. On longera la frontière, et quand on aura les pieds dans la boue, on saura qu'on sera arrivé près des marécages. On les traversera et ensuite on avisera.

Elle ne répondit rien. Ils étaient dans un paysage très irrégulier et rocheux, plein de grottes. Ils étaient souvent obligés de faire demi-tour car ils se retrouvaient bloqué dans un cul-de-sac.
Matthis portaient toujours Tracy, enroulée dans de vieilles tuniques déchirées. Elle ne bougeait pas.
Au bout de quelques heures, le relief changea. Il devenait plus plat, et peu à peu, les grottes se faisaient plus rare. Le ciel était rouge clair, débarrassé de ses nuages gris. Il faisait chaud et les pierres brûlaient les pieds de Lava.
C'est quand elle commençait sérieusement à penser à enrouler ses pieds dans des morceaux de sa tuniques déchirées que soudain la température chuta. Matthis lui parla à ce moment

- On est bientôt arrivé aux plateaux. On les appelle plateaux de farine mais plateaux gelés leur iraient mieux...

Le sol sous leur pieds n'était maintenant plus uniquement de la pierre. Il y avait aussi... De la glace ?!
Il faisait désormais vraiment froid et Lava frissonnait. Le ciel était pourtant toujours aussi dégagé.

Une petite voix s'éleva.

- Tracy est réveillée ! S'exclama Matthis.
Il posa le paquet à terre, qui tint tout seul debout. Il ajusta les tissus pour lui faire comme un gros manteaux. Elle marcha un peu, doucement. Puis elle se tourna vers Lava. Son petit visage fondu fit frissonner Lava, mais cette fois pas de froid. Elle vint se coller contre ses jambes et la voix étrange et presque éteinte de la fillette se fit entendre une nouvelle fois. Lava se baissa et sourit à Tracy. Puis elle dit doucement à l'enfant.

- Je suis désolée, je n'ai pas compris...

Puis elle leva la tête vers Matthis.

- Elle t'a dis bonjour. Et... Bienvenue en enfer...

Elle re-regarda la brûlée et lui répondit un grand sourire sur le visage.

- Merci !

Puis la fillette retourna vers Matthis et leva les bras vers lui. Il la prit et l'emmitoufla dans les tuniques, puis invita Lava à continuer. Il était peut-être en enfer, mais il ne le méritait pas. Il était toujours d'une gentillesse incomparable.

Devant eux s'étendaient de très larges et épaisses plaques de glaces qui se chevauchaient étrangement, mais surtout ces dernières étaient complètement recouvertes d'une fine couche de neige très fine et blanche qui volait au moindre coup de vent et qui, effectivement, ressemblait un peu à de la farine.Matthis, qui marchait devant Lava, s'interrompit soudainement.
- Lava, il faut que je te parles de deux trucs...

Elle le regarda, il lui tournait le dos. Comme il ne continuait pas, elle l'y invita.

- vas-y, je t'écoute.

Il inspira profondément.

- Déjà, on arrive dans la partie dangereuse. Ici, on est à découvert. Et cet endroit est très fréquenté par les âmes qui veulent aller à la frontière. Et qui dit beaucoup d'âmes, dit beaucoup de démons... À vrai dire... Ça m'étonnerait qu'on ne n'en croisent aucun.

Il se tourna vers elle en souriant légèrement.

- J'espère que tu cours vite.

Puis il lui montra encore son dos.

- Et... Deuxième chose...

Il semblait gêné et hésitait beaucoup.

- J'aurais dû te le dire beaucoup plus tôt, mais je suis déjà poursuivis. Et pas par des démons, mais par des âmes. Elles sont huit. Et elle ne me veulent pas du bien croit moi... Elles sont encore assez loin pour l'instant parce que j'ai réussis à leur mettre pas mal d'avance en avançant la nuit, mais on doit faire attention et avancer vite... Désolé..

Il se tourna vers elle pour la deuxième fois. Elle restait un moment muette, surprise. Qui pourrait en vouloir à ce point à quelqu'un d'aussi gentil ? Matthis était un ange ! Pourquoi le poursuivait-t-on ?

- Mais, pourquoi ? Qu'est-ce que tu leur a fait ?

Il se frotta la tête sans la regarder.

- Eh bien... Il voulait que je rejoigne leur groupe, mais je savais bien que tout ce qu'ils cherchaient c'était un type faible et naïf à livrer au premier démon qui les menaçaient. Mais j'ai accepté... Et quand on s'est fait courser par l'un d'entre eux, c'est à Tracy qu'ils s'en sont prit. Ils pensaient probablement que je comptais l'utiliser comme ça moi aussi... Et quand j'ai essayé de la récupérer, ils ont tenté de moi aussi me rajouter aux appâts...et... Dans le feu de l'action, en plus avec Tracy menacée, et j'étais en colère... J'ai arraché la gemme de l'un d'entre eux, et assommés et laissés aux démons tous les autres.

Lava était interloquées. Matthis avait "tué" quelqu'un et assommé 7 personnes, et ce avec un démons approchant.

- J'en suis pas fier tu peux me croire ! Mais pour celui dont j'ai arraché la gemme, j'ai vraiment pas eus d'autres choix, il était franchement fort et je n'arrivais pas à l'assommer, le démon approchait et les autres arrivaient en renfort... J'aurais préféré ne pas avoir à faire ça...

Il la regarda avec appréhension, attendant sa réaction. Elle était surprise, mais elle se dit que c'était une plutôt bonne nouvelle finalement, cela voulait dire qu'il savait se battre. Et puis, elle même n'était pas fière de tout ce que elle avait fait. Par exemple à Théophile, ou à l'enfant dans la jungle qu'elle avait abandonné.

- Qu-est-ce qu'on attend alors ! Tu veux qu'ils nous rattrapent ? Allez go on y a !

Ils continuèrent leur route dans une ambiance plus légère. Il discutèrent et l'apparence de Tracy qui était réveillée et tentait de prendre part à la conversation ne gênait même plus Lava.
L'action leur permettait de ne pas prendre froid, alors ils se mirent à courir.
Environ une heure plus tard, ils commençaient à être un peu essoufflés et ils firent une pause.

- On est à mi-chemin.

Lui indiqua Matthis.
C'est alors que celui-ci se figea.

PDV : Despair

Ça faisait trois heures qu'on marchait. J'aimais bien Kasmar, mais on était trop différent. Il était un vrai démon, un vrai de vrai. Du genre cruel qui aime la souffrance, la torture, les courses et les traques sans pitié dans les enfers. Ils ne voyaient les âmes que comme du bétail, des insectes insignifiants avec lequel on pouvait jouer à loisir, Il aurait même mérité d'aller dans une strate bien plus élevée, mais il devait encore grandir un peu pour ça. Moi non. Pas avec mes origines, que lui avait déjà abandonné corps et âmes depuis bien longtemps.
Moi je n'avais pas oublié.
Et je n'oublierais pas
Kasmar poussa une exclamation.

- Enfin !!! Les plateaux !

Nous avons continué pendant un peu moins d'une heure sans voir d'âme et Kasmar qui commençait à s'ennuyer laissait un grondement grave s'échapper de sa gorge en continue. J'espérais de tout mon coeur que nous finirions par en croiser sinon je sentais que ma vie serait menacée. Enfin bon, ça ne m'empêchait pas de le suivre nonchalamment malgré tout.
Et c'est là, quand je sentais clairement que Kasmar allait retourner son ennui vers moi, que enfin les petites silhouettes rouge de deux âmes se découpèrent à l'horizon.
C'est Kasmar qui me le fit remarquer, et c'est après seulement que je regardai les pauvres victimes de Kasmar.

Je me suis arrêté net.
Je reconnaissais l'une des deux. C'était Lava. J'en étais certain.
Je me suis empressé de déclarer à Kasmar.

- Je prends la fille aux cheveux blond !!

Il me regarda l'air menaçant. Je n'aurais pas dû lui donner d'ordres, maintenant c'était sur qu'il l'a choisira rien que pour affirmer sa supériorité.

- Il n'en est pas questions, c'est moi qui choisit et je préfère celle là ! Tu prends l'autre !

Et il s'élança à leur poursuite.

PDV : Lava.

Matthis s'était figé dès la fin de sa phrase. Il me prit la main, me releva et se saisit de Tracy avant de commencer à courir en me hurlant

- Des démons ! Cours !!

Je ne me suis même pas retournée et je l'ai suivit. Mon rythme cardiaque s'était affolé et j'avais l'impression de suffoquer. En arrivant ici, je n'avais pas aussi peur aussi souvent. Je me souvenais clairement, dans les plaines rocheuses, alors que je savais que c'était dangereux et que je sentais la menace dans l'air, je n'avais pas peur. Quand le démon reptile nous avait attaqué Zac et moi, je lui avais échappé grâce à la nuit mais cela aurait été impossible si je n'avais su taire ma peur. Face à Despair j'avais eus peur, mais je n'avais pas Désespéré. Et pourtant face au démon dans la jungle, non seulement j'avais complètement paniqué, mais en plus, j'avais perdu espoir. Plus le temps passait, plus je ressentait les émotions de façon violente. Pourquoi ?

Je courrais à en perdre haleine, Matthis courrait vite mais son chargement le ralentissait, et je me maintenais aisément à son allure.
Je jetai un regard en arrière, et ce que je vis me glaça le sang.
Le démon. Celui de la jungle, celui là même qui m'avait capturé et qui avait mangé mes émotions. C'est pas possible, ça doit être une blague, une hallucination !!!

J'ai pris Tracy des bras de Matthis et j'ai accéléré. Ce dernier débarrassé de son poids à pu maintenir la même allure que la mienne. La neige nous empêchait de glisser et nous avancions vite mais je savais que le démon derrière nous allait plus vite et qu'il nous rattraperait. J'ai pris le risque de re-regarder par dessus mon épaule.

J'ai dû retenir un sanglot. Il était à peine 100 mètres plus loin. Deux fois moins que la dernière fois que j'avais regardé.
J'ai pris une décision. Je ne pouvais pas laisser Tracy et Matthis se faire attraper. Et il nous attraperait.

J'ai remis Tracy dans les bras de Matthis qui m'a regardé étonné. Je l'ai remercié tout en lui faisant un signe de la main, de la même manière que j'aurais dit "à plus tard" à quelqu'un avant d'aller faire les courses, et je suis partie vers la droite. Une fois assez éloignée d'eux, je me suis retournée, arrêtée, j'ai regardé le démon bien dans les yeux et je lui ai fait un bras d'honneur, j'ai vérifié qu'il me suivait bien, avant de repartir à toute vitesse.
Je crevais de trouille. Je sentais faible et idiote, mais au moins je n'aurais aucun regret plus tard.
La plante de des pieds heurtait le sol froid douloureusement, écrasant la très fine couche de neige gelée.

Il n'était plus très loin derrière, et j'hésitais à tout simplement arrêter de courir. Mais cette fois je ne voulais pas désespérer. Je l'entendais maintenant clairement dans mon dos. Chaque seconde passait au ralentie.
Et il me rattrapa. Il me saisit par le bras, stoppant ma course et me déboîtant l'épaule. J'aurais aimé pouvoir laissé mon bras sur place pour pouvoir continuer à fuir, comme un lézard avec sa queue.

Tout mon bras me brûlait, il me balança à terre et je dérapai sur quelques mètres. J'essayai de me relever, de m'enfuir mais j'en fut incapable. Je vis la peau de mon épaule devenir mauve et mon bras se creuser et se flétrir comme si il pourrissait à l'accéléré. Le démon se tint au dessus de moi

- Eh ! Mais c'est l'âme de la jungle !! Comme on se retrouve !

Il éclata de rire, mais le son qui sortit de sa gorge ne ressemblait en aucune sorte à un rire.

- T'as vraiment pas de bol de tomber deux fois de suite sur moi !!

Il m'a envoyé un gros coup de pied dans le ventre. Si j'avais eus quoi que ce soit dans le ventre je l'aurais vomi. J'ai de nouveau été envoyé au loin. Il me rejoint et me redonna un autre coup de pied. Il continua de me shooter dans le ventre, comme si il jouait au foot. Et puis, alors que je voyait des étoiles danser dans mon regard, il s'est approché, il a prit mon visage entre deux de ses doigts, et il m'a craché dessus.

J'ai hurlé. Sa salive rongeait la chair de la joue et la douleur de ses doigts sur ma peau était abominable. Une odeur de chair brûlée monta à mes narines. Mais dans un élan de conscience, je lui ai rendu son geste et je lui ai craché à la figure.

Il s'essuya l'air plus étonné qu'autre chose et, d'un coup, il m'envoya une baffe monumentale.
Ma tête partit en arrière avec tant de violence que j'entendis distinctement mes vertèbres craquer.

Il prit mon autre bras et le serra. La peau se recroquevilla et les os se brisèrent en petite fragments. À travers mes yeux brouillés de larmes j'ai aperçus ma main, détachée de mon corps, par terre, mais pas une goutte de sang ne coulait. La douleur irradiait de partout dans mon corps, respirer était douloureux, penser était douloureux.

Il me lâcha. Je tombai, couchée sur le dos, les yeux à peine entre-ouvert, et suffocante.
Je voyais flou.
Je sentis soudain que ses griffes perçaient mon ventre et puis, il arracha ma gemme.
J'eus soudain très froid et toute la douleur disparut.
J'ai fermé les yeux.
Et puis j'ai perdu connaissance.