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[Arc 1] Chapitre 10

Tout est similaire à la dernière fois. Quand était-ce la dernière fois exactement ? Un peu après la rentrée scolaire, s'il se souvient bien. Il avait eu besoin de s'y rendre, de parler, de dire les choses qu'il n'oserait jamais dire à quiconque, pas même à son psychologue.

Aujourd'hui est quasi identique. De l'extérieur, ce cimetière impose la crainte. De grands murs de pierres s'élèvent et cachent ce qu'ils gardent en leur sein. L'entrée principale est un large portail noir, dont les grilles sont suffisamment épaisses pour obstruer la vue, sauf si l'on s'approche assez pour regarder aux travers des fins espaces.

Eridan pousse l'un des deux battants. Le bruit métallique le fait frissonner, mais le son est si familier qu'il n'en a pas réellement peur. Il s'avance et embrasse du regard ce lieu qui l'a bercé toute sa vie. C'est beau, en contraste total avec la façade. Les pierres tombales sont toutes parfaitement alignées et créent des chemins pour se déplacer. Des chemins de verdure qui baignent dans le soleil de l'après-midi, se mêlant aux couleurs des fleurs qui ornent la plupart des tombes.

Eridan laisse ses jambes le guider. Dès lors qu'il a passé le portail, il a la sensation d'être entré dans un autre monde, de s'enfermer dans une bulle, se couper de ses soucis. Il est seul, personne ne semble être venu rendre visite aux morts à part lui, mais les fleurs fraîches lui indiquent qu'il a dû y avoir du passage plus tôt dans la matinée, ou bien tout juste la veille.

Son regard s'attarde sur les tombes qu'il connaît déjà, même si deux ou trois d'entre elles n'étaient pas là à sa dernière visite. Il lit les noms sans vraiment les retenir, également les dates, et imagine naturellement le visage de ceux qui reposent à présent en ce lieu. Il souffle, frissonne à une brise, sent son écharpe voleter un instant.

Il parvient au bout du sentier, s'arrête devant une tombe modeste. Les deux tombes qui l'entourent sont décorées de fleurs, même de photos, et Eridan perçoit sur celle de droite une petite assiette avec des biscuits. Touchante intention, bien qu'il songe que c'est du gâchis.

Il reporte son attention sur celle qui lui fait face. Il n'y a rien, si l'on excepte quelques pétales séchées. Sa gorge se noue, il serre ses mains l'une contre l'autre :

« ... P-Pardon maman, je n'ai rien amené... »

Il est surpris que sa voix soit si faible, il craint de ne pas s'être fait entendre. C'est stupide, c'est si stupide, bien sûr qu'elle ne peut pas l'entendre même s'il vient à parler plus fort. Pourtant il l'imagine là, debout face à lui, qui le regardait de ses yeux doux, qui serait attentive à ses paroles.

Il inspire et il essaie de reprendre, haussant un peu le ton :

« ... Je suis désolé... Je suis désolé de venir te voir seulement quand ça va mal, j'ai juste... c'est juste que j'ai... vraiment besoin de parler à quelqu'un, et je... »

Il doit reprendre une inspiration pour étouffer un sanglot :

« ... et je ne peux parler qu'à TOI ! »

Sa voix se brise sur le dernier mot, il plaque une main sur sa bouche, mais les sanglots affluent et il se recroqueville. Il pose son autre main sur son cœur, s'agrippe à sa chemise désespérément, manque de la déchirer. Il s'accroupit, se fait tout petit face à la tombe, comme le gamin qu'il a toujours été.

Ses gémissements douloureux sont le seul bruit qu'il saisit. Mais il s'en moque. Il n'y a personne, personne pour l'écouter ou le juger.

« T-Tu me m-manque... ! ugh... J-J'aimerai juste... j'aimerai... »

Il a un hoquet, ferme si fort les yeux alors que son visage est trempé de ses larmes amères.

« Si seulement... Si seulement t'étais là... J-Je serais pas comme ça... J-J'aurai été m-meilleur.. agh... Je serais... je serais pas devenu comme ça... ! »

Un sanglot plus fort le coupe, il renifle encore, sent ses lunettes glisser un peu. Il s'en moque, il se moque de tout, il veut qu'on lui foute la paix, il veut pleurer, il veut sa mère.

Il ne perçoit pas le bruit métallique du portail, signe que quelqu'un est entré. Ou peut-être que son esprit l'ignore naturellement. Il n'est pas rare que d'autres personnes viennent visiter les morts, et en cet instant il n'a pas honte qu'on le voit pleurer. Il est dans un cimetière, personne n'aurait à le juger.

« J-J'en peux plus m-maman... J-Je fais tou-out foirer... ! J-Je... S-Si tu m'avais pas eu... Si seulement tu... »

Sa main quitte sa bouche et passe sur son visage, essuie en vain les larmes. Ses lunettes achèvent de glisser et tombent dans l'herbe. Il y jette à peine un œil, sanglote encore, geigne à la douleur sèche qui parcourt sa gorge.

Des pas feutrés s'approchent dans sa direction, mais son esprit les obstrue une nouvelle fois.

« C-Ca aurait été tellement mieux... T-Tu serais peut être encore là... ? Tu s-serais là et Cronus aurait gardé l'héritage... e-et papa ne serait pas si aigri ... e-et Feferi n'aurait pas à me supporter... S-Si j'étais pas là, si j'existais p-pas... »

Il force sur ses cordes vocales pour parler, et il gémit encore. Sa main glisse dans ses cheveux, il en attrape quelques mèches et les serre, les tire. La douleur l'extrait à peine de sa crise, il a dû mal à respirer, et à son désespoir s'ajoute la colère :

« PUTAIN ! »

Il tremble, se mord la lèvre, et l'éclair de douleur le fait gémir. Il se recroqueville un peu plus, cache son visage dans ses bras, et dans un sanglot il jure encore, plus piteusement :

« Putain... ! »

Et cette fois, son esprit ne peut pas ignorer le voix qui l'interpelle :

« ...Eridan... »

Il sursaute, comme projeté hors de sa bulle, projeté hors de cette barrière qu'il a érigée. Il redresse vivement la tête, regarde le chemin qu'il a emprunté plus tôt, et son corps se pétrifie. Karkat et Aradia se tiennent là, à quelques mètres de lui, l'observant avec des mines défaites, les yeux humides. Il aperçoit Kankri un peu plus en retrait mais ne s'y attarde pas, son regard fixant ses deux camarades avec effrois :

« Q-Qu'est-ce que vous...? P-Pourquoi vous ...? »

Sa voix est en éclat, il est lui-même brisé, et la seule réponse qu'il obtient, c'est Karkat qui se rapproche de lui sans autorisation, qui ignore son mouvement de recule et le prend dans ses bras avec toute la douceur du monde. Karkat qui le serre contre lui, ses deux bras entourant ses épaules avec force alors qu'il tremble tant. Eridan a un noeud dans la gorge, qui se rompt encore à ce contact, et il recommence à pleurer, à pleurer si fort qu'il en a honte, mais il est incapable de s'arrêter. Il répond à l'étreinte, serre la taille de son compagnon tout en cachant sa tête contre son épaule. Il a l'impression de s'effriter, qu'il tombe en miette entre ses bras réconfortants.

Aradia a un sanglot et s'approche à son tour. Elle s'accroupit auprès des deux garçons, passe une main timide dans les cheveux de Eridan et lui caresse aussi tendrement qu'elle le peut, comme si elle touchait du verre, qu'un mouvement trop brusque pouvait tout détruire.

Ils restent comme ça de longues, très longues minutes, à pleurer de détresse et de soulagement mêlés. Il leur faut tout autant de temps pour se calmer, pour laisser les larmes se tarir. Eridan renifle encore, reste blotti contre Karkat tandis qu'il sent Aradia s'écarter et se redresser. Elle prend son téléphone et envoie un message sur leur groupe d'amis, leur indiquant qu'ils ne doivent plus s'inquiéter, qu'ils ont retrouvé Eridan.

Karkat se racle doucement la gorge, caresse le dos de son amant en parvenant à murmurer :

« ... tout va bien Eri... on est là... on est là, tout va bien ... »

Eridan ne sait pas quoi dire, il secoue la tête, et Karkat fronce les sourcils :

« ... 'non' ? Pourquoi 'non' ? »

L'Ampora secoue à nouveau la tête, sans donner d'explications claires. Karkat se mordille la langue mais n'insiste pas, pas tout de suite. Il continue de le câliner patiemment, de prendre le temps que les battements de son cœur se calment.

Tout est si maladroit, si timide. Aradia comme Karkat craignent de faire une erreur bête qui aggraverait la situation. Mais ils ne peuvent pas non plus rester là pendant des heures, si ? Doivent-ils dire quelque chose de particulier ? Ils n'en savent strictement rien, et cela ajoute une pression qu'ils ne devraient pas ressentir.

Aradia prend une inspiration et ose prendre la parole :

« A-Alors... »

Elle s'humecte les lèvres et parvient à stabiliser sa voix :

« Alors c'est ta maman ? »

Eridan renifle, relève légèrement les yeux pour l'observer, et voit la jeune fille regarder la tombe. Alors il tourne la tête et observe à nouveau le lieu où repose sa mère.

« ... Oui ... » répond-il doucement, sans avoir la force d'en dire davantage.

Il n'en a pas besoin. Aradia retrouve ce petit sourire qu'elle affectionne tant et s'approche un peu, pour s'adresser gaiement à la tombe :

« Bonjour Madame, ravie de vous rencontrer ! Je suis Aradia. Aradia Medigo ! »

Eridan et Karkat la regardent avec de grands yeux, mais elle continue naturellement :

« Oh, et voici Karkat Vantas, et son frère Kankri qui est là-bas ! Pardon d'interrompre ce moment mère et fils, mais nous étions inquiets pour Eridan !

- A-Aradia ... bégaie le concerné.

- Nous sommes ses amis. Enfin, 'amis' ... Eheh, vous seriez surprise de savoir que Karkat est 'un peu plus' qu'un ami, mais ce n'est pas à moi d'en parler ! Eridan vous a-t-il parlé un peu de nous ? En bien j'espère ! On a eu quelques conflits, mais j'ose espérer que c'est derrière nous et qu'on va pouvoir continuer à être amis! »

Eridan l'écoute avec confusion, la regarde sans savoir que dire. Puis Karkat se relève doucement et le pousse à faire de même. Eridan le regarde avec stupeur alors que son compagnon prend la parole à son tour :

« Je suis désolé Madame, la voix de Karkat est ferme bien que son regard soit fébrile. Il s'est tourné vers la tombe mais a baissé les yeux. Aujourd'hui il y a eu une horrible dispute, et je n'étais pas là. Je suis censé être là pour Eridan, et tout ce que j'ai réussi à faire c'est l'enfoncer alors qu'il n'avait rien fait de mal. »

Eridan se fige, mais Karkat continue en relevant les yeux, déterminé malgré ses yeux humides :

« Mais laissez-moi une autre chance ! Je ne vais plus laisser ça arriver, je vais m'occuper de lui correctement, je permettrais plus qu'on lui fasse du mal ! Il a fait beaucoup d'erreurs, comme tout le monde, mais il en a pris conscience et il s'est amélioré, et vous... vous êtes obligés d'être fier de lui ! Parce qu'il le mérite ! Parce que moi JE suis fier de lui ! »

Karkat est bien plus malhabile, trébuche sur les mots. Il n'a pas pensé à un discours en avance et les phrases s'écoulent sans qu'il n'y réfléchisse vraiment. Eridan ouvre la bouche pour la refermer aussitôt, bouleversé. Et finalement, quand il se met à rire, Aradia et Karkat le regardent avec stupeur.

« Ahah... Ahahah... ! M-Mais qu'est-ce vous faites...? Qu'est-ce que vous racontez... ? »

Le sourire d'Eridan est fissuré mais sincère, et surtout le garçon semble beaucoup plus calme, moins enclin à fondre en larme ou prendre la fuite. Karkat et Aradia ont le regard fragile mais lui souris en retour, viennent chacun lui prendre une main.

« ... On essaie de te réconforter, souffle le Vantas. D'habitude je suis plutôt doué pour ça, mais aujourd'hui je me sens comme un crétin...

- Pareille ... avoue Aradia. Je suis désolée Eridan, j'aurais dû intervenir quand ça a éclaté. »

Eridan le regarde tour à tour et serre leurs mains plus fort :

« ... vous n'y êtes pour rien... Vraiment, c'est moi qui ...

- Ah non, ne commence pas ! s'énerve Karkat. Ce n'est pas toi, c'est moi !

- Non, c'est moi ! » intervient Aradia.

Puis ils se fusillent du regard, savoir lequel laissera les autres porter le blâme... avant d'exploser de rire devant le ridicule de la situation.

Finalement Eridan reprend son souffle, essuyant quelques larmes dû au rire :

« ... Pardon d'être parti comme ça, j'avais juste, vraiment besoin de réfléchir. »

Aradia hoche la tête, mais Karkat regarde son compagnon et lui lâche la main pour caresser son dos :

« ... Tu veux en parler ? et il ajoute devant son hésitation. On est là pour toi, on a tout notre temps, et ça nous ferait vraiment plaisir d'en discuter avec toi. »

Eridan lui fait un pauvre sourire, se laissant convaincre, et regarde à nouveau la tombe sans vraiment la voir, laissant Aradia et Karkat lui faire des caresses encourageantes :

« Maman... enfin... Ma mère est morte quand j'étais petit. Je devais avoir 5 ou 6 ans... ? J'ai ... »

Il inspire :

« ... Elle a contracté une maladie à ma naissance. Ça l'a tué à petit feu. Les souvenirs les plus nets que j'ai d'elle sont.. elle, allongée dans sa chambre, avec tout ce matériel médical... »

Il avale sa salive, un peu nerveux, n'ayant jamais pu partager ce genre de choses avec qui que ce soit.

« ... je sais ce que vous allez dire... que ce n'est pas ma faute, q-que ce n'est pas moi qui l'ai tué. Mais si je n'étais pas né, elle serait encore là. Si je n'étais pas né, il y aurait pas eu tous ces problèmes, n'est-ce pas... J'ai gâché la vie de Cronus et Feferi, et je vous gâche la vie à présent, e-et je pense juste que... je... »

Il inspire à nouveau. Il a suffisamment pleurer, il ne va pas recommencer.

Karkat fronce les sourcils, sa main remonte dans la nuque de Eridan et vient lui caresser les cheveux :

« ... Tu n'as gâché la vie de personne. On ne reproche pas aux gens de naître.

- ... Moi si. Tout ça parce que je suis né, je suis ... »

Mais ce n'est pas la voix de Karkat qui le coupe. Plutôt celle de Cronus qui arrive dans leur direction, et qui clame assez fort pour résonner dans tout le cimetière :

« ... un sale petit con qui inquiète tout le monde avec ses dramas ! »

Eridan sursaute, fait volte face pour regarder son cousin, et ce n'est pas la colère qui tire ses traits mais l'ahurissement. Kankri s'apprête à réprimander son compagnon, mais Eridan le coupe en s'éloignant de ses deux amis pour faire un pas vers son cousin :

« Cronus ?! Mais qu'est-ce que tu... ? »

Cronus lance un regard nerveux autour de lui, comme si ce trouver là le mettait vraiment mal à l'aise. Mais il fait comme si de rien était et s'avance en grandes enjambées, dépassant Kankri et venant se planter devant Eridan :

« Donc j'avais raison, Feferi t'a vraiment dégagé hein ?

- Qu- C'est- !

- Et alors quoi ? Elle t'a reproché tes conneries ? Car si c'est ça, moi aussi j'ai des choses à reprocher. T'iras aussi pleurer maman si je le fais ? »

Karkat sent un pique de colère, serre les poings et veut intervenir, sauf que Aradia le retient. Il ne comprend pas, l'interroge du regard, et s'aperçoit qu'elle semble avoir compris quelque chose.

La voix de Cronus attire encore son attention :

« T'as entendu ce que le petit Vantas a dit ? Que t'avais changé, que t'avais réalisé tes erreurs et que tu t'améliorais. Alors qu'est-ce qu'on s'en moque qu'une gamine te jette tes quatre vérités au visage?

- ... m-mais... c'est Fef...

- Oui, une gamine, comme toi. Et te connaissant, tu es le premier à te faire du mal en pensant à toutes les conneries que tu fais, donc tu n'as pas besoin que ton amie d'enfance en rajoute une couche. »

Cronus soupir franchement, se masse la nuque en cherchant ses mots. Puis il regard Eridan et hésite un peu, avant d'oser lever la main et venir lui ébouriffer les cheveux :

« Ecoute ... t'as la vingtaine. T'as le temps d'angoisser et de culpabiliser. Mais tu n'es pas le centre du monde. Tu sais ce que ça veut dire ?

- ... qu'on s'en fou de moi ?

- Rah, mais non ! Ca veut dire que tu peux pas gâcher la vie de quelqu'un ! Pour gâcher la vie de quelqu'un, faudrait que tu sois le centre de son univers ! Mais toi t'es juste un gamin. Maman a fait ses choix, ton père aussi, moi aussi... Et Feferi aussi. T'as fait des erreurs, les autres aussi, point. Si les autres ont la vie 'gâchée' à cause de tes choix, c'est qu'ils sont trop stupides pour gérer leur propre vie, c'est tout. Et ... »

Cronus arrête de lui caresser les cheveux et se balance d'un pied sur l'autre, le visage rouge et embarrassé :

« ... bordel, ça a du sens ce que je dis au moins ? J'ai l'impression de m'embrouiller là... »

Eridan le regarde avec de grands yeux... avant de gonfler les joues et croiser les bras :

« Tu te moques de moi là ! »

Il lui donne un coup de coude :

« Avant de me réconforter, occupes-toi de tes propres problèmes !

- Hey, j'ai aucun problème ! rétorque Cronus en grimaçant.

- Tu te moques de moi ? C'est la première fois en dix ans que je te vois ici ! »

Il pointe soudain la tombe de sa mère et hausse le ton sur Cronus :

« Va dire bonjour à notre mère, fils indigne ! »

Le visage de Cronus devient plus rouge encore alors qu'il gromelle, tandis que derrière eux c'est Kankri qui s'exclame :

« QUOI ?! Attendez, attendez, VOTRE mère ? Je croyais que vous étiez cousins, ou bien je me suis trompé? Non, il me semble avoir bien compris, vous m'avez vous-même affirmé êtes cousins, alors pourquoi parlez vous de la mère d'Eridan comme si c'était également celle de Cronus ? »

Cronus fait la moue, lance un piteux regard à son compagnon avant de soupirer à nouveau :

« H-Hum, écoute Kank', c'est... »

Il baisse les yeux :

« ... On est cousins. Cousins ET demi-frères... ? »

Karkat et Aradia ne disent rien mais leurs expressions parlent pour eux, alors que Kankri assimile l'information :

« ... Cronus, es-tu en train de me dire que ton père et celui d'Eridan sont frères, et que votre mère a eu un enfant avec les deux ?

- ... c'est ça, chef. »

Et Karkat qui s'exclame :

« Mais quelle salope ! »

Pour que Cronus réponde un "OUAI !" alors que Eridan s'outre avec un "HEY !!" et que Kankri hurle un "LANGAGE !"

Cronus fait demi-tour et se dirige rapidement vers la sortie :

« Bon, on a retrouvé l'autre avorton, c'est bon, on se casse !

- Cronus Ampora, ne prends pas la fuite !! » ordonne Eridan en se jetant à sa suite.

Mais son aîné ne compte pas se laisser attraper et se précipite vers la sortie, son cadet sur les talons. Finalement Eridan parvient à lui attraper le bras au niveau du portail... et se fait traîner par son cousin qui a bien plus de force que lui, alors que leurs trois camarades les suivent de loin et ricanent à la scène.

Karkat aurait bien de nombreuses questions à poser mais il s'abstient, il est juste heureux de voir qu'Eridan a retrouvé son entrain.

Ils reprennent la voiture de Kankri et font un saut à un café, où ils dégustent des boissons sucrées en parlant de sujets plus légers. Aucun ne laisse le temps à Eridan de déprimer à nouveau, particulièrement Cronus qui ne se gêne pas à le taquiner et le traiter comme un gamin, ce qui vexe le cadet qui rétorque par des coups bien placés.

Puis il est temps de se séparer.

« Je vous dépose où ? interroge Kankri.

- Chez Eridan ! » répond Karkat sans demander de quelconque avis.

Aradia ne dit rien, comme si elle savait déjà qu'elle les accompagnait, et Eridan n'ose pas dire grand chose. Au fond ça le rassurerait qu'ils restent avec lui... Il n'est pas sûr de pouvoir se confronter à la solitude de son appartement, n'étant même pas certain que Gamzee y soit et n'osant pas poser la question. Il n'a pas du tout regardé son téléphone et a préféré éviter le sujet avec Aradia et Karkat, craignant qu'il n'y ait qu'eux deux qui veulent encore de lui.

Karkat perçoit son inquiétude et pose sa tête sur son épaule sans un mot. Ce simple contact lui arrache un rougissement, et Eridan parvient à se détendre assez pour poser sa tête sur la sienne.

La voiture s'arrête au bas de l'immeuble. Après des salutations chaleureuses, les deux adultes repartent et les trois étudiants se dirigent vers le bâtiment. Aradia siffle d'émerveillement :

« Whoua, c'est la classe ici ! »

Il est vrai qu'elle n'était jamais venue, comme beaucoup de leurs amis en fait.

Ils prennent l'ascenseur et gagnent l'étage. Eridan sort ses clés, mais quand il les insère dans la serrure, il s'aperçoit que la porte est déjà ouverte. Son coeur bat un peu plus fort, d'appréhension surtout. Il déglutit et regarde les deux autres en se mordillant la lèvre :

« ... je... je pense que Gamzee est là... »

Karkat hoche la tête :

« Pas étonnant. Il était inquiet.

- Tout le monde t'as cherché, tu sais ? » ajoute Aradia avec un petit sourire.

Eridan les regarde avec de grands yeux :

« ... Je- Vraiment ? Mais... tout le monde... Tout le monde ?

- Tout le monde, affirme Karkat. Gamzee, Sollux, Nepeta et Equius, même Vriska ! »

Et brusquement, la porte de l'appartement s'ouvre et claque contre le mur. Eridan sursaute et se retourne, pour faire face à une Vriska en furie :

« Comment ça, 'même Vriska' ?! Je t'emmerde Vantas !! »

Karkat lève les yeux au ciel alors que Aradia se met à rire. Eridan, lui, cligne des yeux sous la stupeur, complètement confus. Il fixe la Serket et cherche ses mots :

« ... Mais.. Vriska, tu...? »

La jeune fille le regarde alors, se mord la langue, puis vient le prendre quelques instants dans ses bras avant de s'écarter presque aussitôt, trop embarrassée. Elle détourne le regard, les joues rouges :

« I-Images rien connard, n'importe qui aurait été inquiet que tu disparaisses comme ça. »

Eridan se sent rougir également alors qu'il la regarde, muet. Elle était inquiète ? Vraiment ? Elle ?

Vriska lui jette un autre coup d'oeil nerveux puis lui tire la langue :

« Et par n'importe qui, je confirme juste 'ouai, tout le monde t'a cherché' ! »

Elle se permet un sourire narquois malgré son embarras, et s'écarte pour laisser Eridan entrer dans l'appartement. Il fait à peine quelques pas qu'il s'arrête à nouveau, l'émotion lui nouant la gorge et lui humidifiant les yeux, tandis qu'il aperçoit le reste du groupe présent chez lui, qui le regarde avec stupeur et soulagement, comme s'ils attendaient sa venue.

Eridan ouvre la bouche mais ses mots se perdent, car Nepeta se jette dans ses bras :

« Espèce de crétin stupide !! s'énerve-t-elle en le serrant fort. Crétin, crétin, crétin ! »

Equius s'approche un peu bien qu'il n'initie pas de contact :

« Nepeta, laisse le respirer, il rentre à peine. »

La jeune fille s'écarte et renifle, faisant la moue :

« On t'a cherché des heures !! Je t'interdis de refaire ça !! Crétin !! »

Aucun 'crétin' ne lui a jamais paru aussi affectueux qu'en cet instant. Eridan ne sait que dire, n'ayant jamais vécu ce genre de situation, et encore une fois il n'a pas trop le temps d'assimiler que, une fois Nepeta éloigné, c'est Gamzee qui se rapproche pour le prendre contre lui et le couvrir de baiser sur tout le visage :

« Bordel, Eri ... T'aurais dû venir me voir... T'aurais dû... »

Eridan sent son cœur se serrer devant la mine bouleversée de son amant. Il bégaie un peu et a l'impression qu'il va sangloter, alors il répond timidement à l'étreinte et enfouie son visage contre son épaule :

« P-Pardon... j'ai... j'ai pas vraiment réfléchi... »

Il entend Gamzee prendre une profonde inspiration, comme s'il avait besoin de se calmer, avant de s'écarter à contre cœur et tourner la tête pour faire signe à Tavros. Ce dernier s'approche à son tour avec timidité, mais le regard brillant de larmes contenus :

« H-Hey, hum... Je suis désolé, pour tout ça... c'est... hum... »

Tavros baisse les yeux mais parvient à lui prendre doucement la main :

« E-Ecoute Eridan, quand... quand j'ai dit qu'on était ami, c'était vrai... et quand je dis que je veux discuter avec toi, c-c'est vraiment parce que je m'inquiète... et que je tiens à toi, et... »

Il relève le regard avec hésitation :

« ... et je veux pas que t'ai peur de me déranger, o-ou... juste d'aborder certains sujets ? »

Eridan hoche la tête en reniflant, serrant sa main en retour. Tout le monde s'est un peu rapproché, même si tout le monde ne parle pas. Ils évitent de l'étouffer sous les contacts et les discours, mais ils semblent tous tellement soulagés de le voir que Eridan ne sait vraiment pas quoi dire. Il s'en veut de les avoir inquiétés, il s'en veut de ne pas leur avoir fait confiance, mais le bonheur de se sentir aimé, le bonheur d'avoir été cherché et attendu, surpasse le reste et lui réchauffe le cœur.

Il articule quelques excuses pendant qu'il ravale des larmes d'émotions, rigole un peu aux tentatives de blagues maladroites. Mais pendant que son regard glisse sur l'assemblée, il s'aperçoit qu'en réalité tout le monde ne s'est pas rapproché.

Son regard s'accroche d'abord à celui de Feferi, et aussitôt il retient son souffle. Elle est restée loin en retrait, et baisse les yeux dès qu'il la regarde. Il a de nouveau ce bourdonnement qui vient prendre place dans son esprit, qui le coupe du reste. Il tourne un peu la tête, pour apercevoir Sollux assis dans l'un des fauteuils, qui regarde le sol les bras croisés.

Eridan prend une inspiration, trouve le courage de bouger ses jambes lourdes, dépasse l'assemblée et se retrouve en quelques pas face à Feferi :

« ... Fef...eri... ? »

Elle sursaute, se mord la lèvre sans oser relever la tête. Il hésite, et le silence gênant qui s'installe ne l'aide pas vraiment. Mais il ouvre la bouche et puise en lui le courage pour parler à nouveau :

« ... On peut parler en privé... ? »

Elle qui était déjà tendue, semble l'être davantage à la question. Mais elle hoche la tête, et Eridan la guide jusqu'à sa chambre en évitant le regard des autres. Tout ça lui semble tellement surréaliste... comme tiré d'un film ou d'un roman.

Il ferme la porte derrière eux, puis reste juste debout comme deux idiots. Il la regarde, elle le regarde, et ils s'empourprent et regardent le sol à nouveau.

« ... T-Tu veux t'assoir... ? » dit-il, et toute sa nervosité remonte dans sa voix.

Elle hoche la tête, un peu trop vite pour qu'on la croit confiante, et s'assoit au bord du lit. Il l'imite, mettant quand même une petite distance entre eux

Finalement, puisqu'aucun ne semble décidé à prendre la parole, Feferi souffle, se redresse, ferme les yeux pour calmer ses émotions. Elle parvient enfin à regarder Eridan et parle d'une voix pas trop tremblante :

« Je veux que tu sois honnête. Est-ce que Sollux est important pour toi ? Vraiment important ? Est-ce que tu l'aimes ? »

Eridan manque d'avaler de travers, rougit, triture ses doigts nerveusement. Il n'a jamais sut rester de marbre devant Feferi.

« Je... Je sais pas très bien où j'en suis avec lui, ou avec Karkat ou Gamzee m-mais... »

Il prend une inspiration :

« Ce que je veux dire c'est... c'est que oui, je tiens à eux... ils sont vraiment..vraiment importants... je n'ai pas envie de juste... me servir d'eux, de manipuler leurs sentiments. Encore moins pour te faire du mal... »

Il la regarde timidement, un peu triste aussi :

« ... j'essaie de changer Feferi... vraiment, j'essaie... de devenir quelqu'un qu'on pourra aimer. Et pas quelqu'un qu'on trainerait comme un boulet... »

Et au fil de ses mots, le visage de la jeune femme vient à changer. Elle a la gorge nouée, se mordille la lèvre, les yeux brillants. Elle renifle, se passe une main sur le visage, et sa voix paraît plus faible quand elle reprend la parole :

« Les mots ont dépassé ma pensée tout à l'heure... ce que je veux dire, c'est que tu n'as jamais été un poid Eridan. Ou plutôt, c'est moi qui t'es considérée comme un poids. J'ai aimé... j'ai toujours aimé passer du temps avec toi, te voir, rire avec toi. Parce que j'ai toujours su que tu m'aimais, que tu m'aimais vraiment, que tu n'étais pas hypocrite avec moi. Et j'ai toujours été...toujours été tellement... »

Elle se passe une main dans les cheveux.

« ... tellement frustrée ! Frustrée de ces crétins qui s'arrêtent à ta première image, qui... qui t'insulte parce que tu es un Ampora, qui ne prennent même pas le temps de te connaître ! Et j'ai juste... Rah, j'étais aussi tellement frustré par toi ! Toi et ta manie de ne t'attacher qu'à moi ! Comme si subitement j'étais la seule qui importait, que tu ne voulais plus essayer d'être ami avec d'autres personnes ! Alors que tu le peux ! Tu peux trouver d'autres gens, tu peux devenir leur ami, leur amant, tout ce que tu veux ! T'en as toujours été capable, mais... mais tu faisais l'effort que pour moi ! Et... »

Elle agrippe quelques mèches avec lesquelles elle joue nerveusement :

« E-Et je sais pas ! Je... Je t'en veux pour tellement de choses, mais je m'en veux aussi pour tellement de trucs nuls ! Si je t'avais parlé plus tôt, si j'étais pas restée gentille, si je t'avais hurlé dessus, ça aurait changé quelque chose tu crois ? J-Je sais vraiment pas, je peux pas juste mettre le blâme sur toi ! Est-ce que j'aurai dû arrêter notre amitié plus tôt ? Ou j'aurai jamais dû être ton amie ? Ou bien j'aurai dû ... Je sais pas... je sais pas ce que j'aurai du faire... je sais même pas ce que je fais à présent... ! »

Il posa une main sur son genoux, un geste qu'il avait toujours quand elle allait mal.

« Feferi... Je... Je sais pas quoi te dire... Je pense pas que tu doives te reprocher tout ça, j'étais juste... J'ai jamais été facile à vivre. »

Elle lui sourit doucement :

« Ahah, c'est vrai ... Mais... ça ne m'a jamais empêché de t'aimer. »

Elle pose sa main sur la sienne, renifle encore en ravalant un début de larme :

« Je t'ai toujours tellement aimé, tu sais... Je sais que... Que c'est hypocrite, après toutes les horreurs que je t'ai balancé, mais...

- Non... Non, tu étais en colère, c'est normal...

- Non, c'est pas normal justement... j'aurai jamais dû aller si loin... au point de remettre ta tentative de suicide en cause. J'ai été une vraie connasse, je le sais.

- Mais non ! »

Elle rit :

« Ahah... T'as toujours cette manie de me défendre, même après tout ça.

- Parce que je peux pas te laisser dire ça ! Je sais pas à quoi aurait ressemblé ma vie sans toi, c'est vrai, mais... je veux pas le savoir ! Même si tu as fini par me jeter, j'ai jamais pu... je pourrais jamais te détester ! Je t'aime tellement, tellement fort Feferi... Si fort, tu ne sais pas à quel point...

- ... Dis pas ça... Dis pas ça, tu vas me faire pleurer... »

Et elle a beau arborer un petit sourire, Eridan voit effectivement des larmes dans son regard. Il hésite, amorce un mouvement pour la prendre dans ses bras sans réellement oser franchir le pas. Ils le faisaient toujours avant, s'enlacer, se consoler. Et maintenant ? Il peut se permettre de...?

Feferi balaie ses doutes en diminuant l'écart entre eux, et c'est elle qui vient l'enlacer de toutes ses forces. Eridan sursaute, rougit, ému. Il se blottit contre elle et répond à l'étreinte, avec le sensation de ne l'avoir jamais quitté. Comme si brusquement leurs disputes n'étaient plus rien, que les cris, les insultes, les reproches, tout ça étaient supprimées pour ne les laisser qu'à ce tendre contact qui leur avait tant manqué.

Il enfouit son visage dans son cou, dans sa chevelure ondulée, retrouve son parfum exotique, mélange des fruits et de la mer. Il pourrait se remettre à pleurer, il n'en fait rien. Ils inspirent tous deux, soulagés, la pression quittant leurs épaules, et laissent leurs cœurs se calmer, se calquer sur les battements de l'autre et aborder un rythme similaire, serein.

Feferi a un petit rire :

« ... c'est tellement silencieux ... »

Il sourit :

« Oui... »

Elle s'écarte pour lui sourire :

« Ton appartement est toujours mal isolé ?

- Effectivement, pourqu- Oh. »

Il rougit en comprenant et regarde nerveusement vers la porte. Quelques secondes s'écoulent, puis la voix de Gamzee s'élève :

« Continuez, continuez, on a rien entendu. »

Suivi d'un "LA FERME CRÉTIN" de Karkat, ainsi qu'un petit couinement de la part de Gamzee qui s'est probablement fait frapper, avant que des rires s'en suivent.

Feferi et Eridan échangent un regard et pouffent, se relevant pour rejoindre leurs amis. Ils sortent timidement de la chambre, et heureusement les autres ont la décence de ne rien dire, de ne pas rebondir sur leur conversation même s'ils ont tout entendu.

« Bon, avec tout ça, j'ai super faim ! s'exclame Nepeta. On se commande quelque chose ?

- Eridan a peut être envie de se reposer, intervient Equius. Nous ne devrions pas nous imposer. »

Mais Eridan leur sourit :

« Non, c'est bon, ça ne me dérange pas. »

Puis il réalise comme son sourire doit être béat et, gêné, il se racle la gorge et croise les bras, reprenant une posture hautaine pour se donner une contenance, même si à présent son petit manège ne berne plus personne :

« Profitez donc de mon appartement, ce n'est pas tous les jours que vous pouvez séjourner dans un lieu si luxueux ! Et puis je vous invite, hors de question que vous mangiez une nourriture de prolétaire chez moi ! »

Feferi roule des yeux et lui donne un coup de coude :

« Monsieur Ampora, veuillez surveiller votre langage ou je vais encore hausser le "thon" !~

- Mademoiselle Peixes, si vous me criez encore dessus je ferais appel à mes fervents chevaliers !~ »

Ils se fixent en plissant les yeux, comme se défiant du regard, avant de se mettre à rire de bon cœur. Leur complicité nouvellement retrouvée arrache des sourires à leurs amis, et Nepeta ronronne de contentement en tapant dans ses mains :

« Alors Eridan, qu'est-ce qu'on mange ? »

Il fait mine de réfléchir, mais avant d'ouvrir la bouche Feferi le coupe :

« Je prendrais le menu B12~

- Qu- Hey ! Ne me prends pas de vitesse !

- Oh arrête, on sait tous que tu vas choisir des sushis !

- Alors déjà c'est complètement faux, je ne prends pas 'toujours' sushis !

- Si, chaque fois qu'on te laisse le choix~ »

Elle lui tire la langue et s'écarte rapidement lorsqu'il s'apprête à lui donner un coup de coude, faisant mine de bouder. Personne n'est contre des sushis, et ils s'installent pour commander, Eridan leur donnant un budget suffisamment élevé pour que chacun puisse prendre ce qui lui fait envie.

C'est étrange mais agréable de voir Feferi et Eridan parler et plaisanter si légèrement, sans tabou. Comme si cette crise leur avait provoqué un déclic. Ca ne va probablement pas rester éternellement 'ok', il y aura sans doute d'autres problèmes qui vont survenir, mais pour le moment tout va bien et c'est le plus important.

Alors qu'ils attendent le livreur, le groupe se sépare un peu. Certains vont se servir à boire, ou se rafraîchir dans la salle de bain. On allume la télé, on met une petite musique de fond, et Eridan se sent choyer devant les attentions de chacun, que ce soit Kanaya qui vient furtivement lui caresser les cheveux, Nepeta qui se permet un autre câlin, ou encore Gamzee qui lui glisse des baisers sur la joue ou la tempe.

Son appartement n'a jamais été si rempli, et Eridan songe qu'il aimerait bien s'habituer à ça. Surtout que, contrairement à ce qu'il aurait pu craindre, les autres prennent garde à ne pas mettre le bazar. Certes il faudra ranger un peu, mais rien d'insurmontable.

Pourtant, devant toute cette agitation, l'attention d'Eridan n'est quasi portée que sûr une chose : Sollux, qui ne l'a pas encore approché depuis leur dernière altercation. Il ne sait que penser. Est-ce que son compagnon lui en veut ? D'après ce que les autres ont dit, et d'après les messages qu'il a parcouru, Sollux a participé aux recherches et s'est inquiété pour lui. Mais il n'est pas venu lui parler, ne lui a pas porté la même attention que les autres lui donnent.

Il aperçoit Sollux se lever et s'éclipser en direction du balcon. Les baies vitrées lui permettent de l'observer encore, même s'il est de dos à présent. Eridan hésite un peu, se lève mais ne fait pas un pas, cherchant comment lancer la conversation. C'est Karkat qui le sort de ses pensées, en lui donnant une petite claque dans le dos :

« Arrête de réfléchir, va le voir. » lui intime-t-il.

Eridan le regarde, crispé, mais se détend au sourire du plus petit. Il hoche la tête et s'éloigne, sortant à son tour. La soirée est assez avancée à présent, le ciel s'obscurcit lentement. L'air frais le fait frémir mais il n'en dit rien. Il fixe Sollux silencieusement, les mots ne souhaitant pas sortir.

Finalement il fait encore quelques pas, parcourt la distance qui les sépare et se place à côté de lui, l'imitant en s'appuyant sur le muret qui les empêche de tomber la tête la première.

« ... Hey.

- ... Hey. »

Ils ne se regardent pas, la gêne se mêle au silence. Ils fixent la ville qui s'étend sous leurs yeux.

Sollux tapote nerveusement le muret du bout des doigts. Il veut visiblement prendre la parole mais les mots ne lui viennent pas. Il souffle, se passe une main dans les cheveux, avant de finalement grogner en retirant ses lunettes, venant se masser l'arrête du nez.

« ... Pourquoi c'est toujours putain de gênant entre nous ? »

Eridan fait la moue :

« Si je le savais, on en serait pas là. »

Sollux fait mine de le fusiller du regard, mais ça n'a rien de convainquant.

« Si t'étais pas si coincé aussi...

- Qu- Moi, coincé ? Va te faire foutre Sol !

- J'aimerai bien, c'est justement ça le problème ! »

Eridan s'étrangle :

« H-Hein ?

- On en a déjà parlé non ? Pourquoi, quand je tente des trucs, tu me rejettes, mais quand c'est Gamz' c'est bon ? »

Sollux grommela en baissant les yeux :

« T'as dis toi-même à Fef que... que tu tenais autant à moi qu'aux deux autres. Alors pourquoi c'est différent? »

Eridan s'empourpre, triture ses doigts avec nervosité :

« ... Alors déjà, je pensais qu'on allait parler de ce midi, pas de nos histoires de cul. »

Celui aux yeux bicolores fronce les sourcils et le fixe à nouveau, mais cette fois il semble vraiment en colère :

« Ouai t'as raison, parlons en aussi de cette merde ! J'aurai pas dû gueuler comme je l'ai fait, mais sérieusement, ça n'enlève rien à la gravité de la situation ! Et... Putain, vous avez si peu confiance en moi ? »

Il a voulu rester implacable, mais sa voix tremble sur la fin. Eridan se fige, se redresse pour poser une main sur son bras :

« Non ! Non non non, Sollux, ça n'a rien à voir ! Je ... Je voulais en parler, mais Karkat avait l'air de gérer la situation, alors je... Ecoute, pardon, je suis vraiment désolé, j'aurai dû en parler et faire quelque chose, j'ai complètement foiré.

- Franchement, je vous en veux autant à toi qu'à Karkat. Mais je suppose que j'ai pas dû aider à mettre en confiance... »

Il le regarde rapidement avant de baisser à nouveau les yeux :

« ... T'as raison, j'ai tendance à suréagir. »

Il a un pauvre rire :

« Rien qu'à voir ce matin, je t'ai fait la gueule seulement car tu ne voulais pas être embrassé en public. Mais ça me rend fou votre proximité avec Gamzee, il est tellement plus... doux ? Il arrive à mettre facilement en confiance, et moi j'arrive juste à te faire flipper. »

Sollux relève encore la tête, mais cette fois son regard s'attarde sur le coup de Eridan. Il se permet de glisser la main pour tirer un peu sur l'écharpe et observer la peau marquée par sa bouche.

« ... Est-ce que ça fait flipper si je te dis que j'ai envie de te plaquer contre un mur et de te faire hurler ? »

Eridan avale de travers, son visage le brûle alors qu'il bégaie :

« Qu-Hein... M-Merde, le dis pas comme ça !

- Donc c'est flippant.

- Pas flippant ! Gênant ! »

Eridan fait la moue en lui donnant un coup de coude :

« Sérieux, laisse-moi le temps de me faire à tout ça ! J'arrive à peine à assimiler qu'on est... qu'on est en couple. »

Sollux se met à rire et passe son bras autour de ses épaules, le ramenant contre lui :

« Ouai ouai, je sais crétin. Pas ma faute si t'es si mignon que je veux te sauter dessus !

- Hey, et ton histoire de 'prendre son temps' et 'd'apprendre à se connaître'.

- C'est une vérité, mais j'ai pas de patience.

- Pff, je vois ça ouai. »

Eridan lui tire la langue :

« Et si pour une fois, c'était toi qui te retrouvais en dessous ?

- Je dis pas non, mais pour ça faudrait que tu oses prendre les devants ! »

L'Ampora ouvre la bouche mais la referme quasi immédiatement, le regard fuyant. Il ne s'attendait pas à ce que l'autre accepte si facilement. Sa réaction arrache un ricanement à Sollux, et Eridan lui écrase le pied :

« La ferme, te fou pas de moi !

- Aïe ! T'es susceptible !~ »

Le rire de Sollux résonne encore, et quelque part c'est vraiment doux à entendre. Malheureusement cette mélodie cesse trop tôt, celui aux yeux vairons finissant par soupirer :

« ... mais sérieusement, tu ne m'as pas répondu. C'est vraiment mon impatience qui gêne notre relation...?

- ... Je suppose, en partie. Et peut être aussi que fefnfonge... »

Eridan a baissé la voix au point que les derniers mots ne sont qu'un baragouinement. Sollux hausse un sourcil, l'interrogeant du regard tandis que l'Ampora se renfrogne et se trouve soudain bien intéressé par leurs pieds.

« ... peut être aussi que... ? demande Sollux, confus.

- ... que gnreognergo....

- Pardon ? »

Eridan se mordille la lèvre, frustré de ne pas parvenir à le dire correctement.

« ... peut-être que... sortir avec toi, c'est juste trop exceptionnel...

- ... exceptionnel ... ? Je comprends pas ?

- C-C'est... quelque chose que j'aurai jamais crû réalisable...

- Pourquoi ? »

L'Ampora s'écarte avec agacement :

« Rah, non, je dis plus rien, c'est stupide ! C'est... T'as toujours semblé me détester, e-et j'ai toujours crû que je te détestais, et Feferi a toujours été tellement intéressé par toi, et finalement j'ai réalisé que j'étais juste tellement jaloux que toi et Fef soyez proches et que... que tu lui portes de l'attention à elle, et pas... à moi? »

Sollux cligne des yeux, assimile lentement ce qu'il vient de dire, puis reste ahuris pendant que son visage rougit à son tour. En d'autres circonstances, Eridan aurait sûrement rit. A la place, il se balance d'un pied sur l'autre en s'humectant les lèvres :

« O-On s'est jamais vraiment parlé à part pour s'engueuler, j'ai jamais été capable de juste... te proposer de t'amuser normalement, parce que j'étais sûr que tu te foutrais de moi, et parce que j'avais l'impression que tu me volais Fef, et puis juste... tu m'as bloqué sur le réseau, et je me suis senti tellement, tellement con, et nos engueulades m'ont manqué, et d'un coup tu viens me voir au déjeuner comme si de rien était et tu me parles normalement sans m'insulter et... »

Eridan se passe une main dans les cheveux, ignorant qu'il se décoiffe. A cet instant il s'en moque de ne pas être présentable, il a couru partout toute la journée avec du stresse, il a bien le droit d'être un peu débraillé. Il fixe le muret, sentant son visage être si chaud qu'il pourrait presque croire qu'il a de la fièvre.

« ... que tu me portes de l'attention, et pas seulement pour qu'on s'engueule, c'est quelque chose que... j'aurai jamais crû réel jusqu'à maintenant. J'ai l'impression que mon cerveau a pas assimilé, qu'il a juste pensé que c'était une...blague ? Je veux dir-AH ! »

Il couine quand Sollux se jette contre lui, le prend dans ses bras avec force :

« Putain, même si je te détestais, qui serait assez cruel pour blaguer de cette façon ? Te faire croire qu'il t'aime, te faire espérer, pour te jeter après ! Merde, tu me crois capable de ça ?!

- S-Sol, je...

- Je t'aime ! »

Eridan émet un glapissement pathétique. Sollux s'écarte mais le saisit par ses épaules, le regarde droit dans les yeux, la mine sévère :

« Je t'aime Eridan ! »

L'Ampora pousse un autre couinement aigu dont il a aussitôt honte, essaie de cacher son expression qu'il ne maîtrise pas, mais comment se dissimuler quand on vous immobilise de la sorte ? Il se sent trembler, ça le rend plus ridicule encore alors qu'il regarde partout sauf en direction de Sollux. Ce dernier se frustre à le voir esquiver son regard, alors il attire son attention en venant lui prendre un chaste baiser, puis un second, et encore un.

Eridan gémit, tente de reculer, mais abandonne sous l'assaut et ferme les yeux, piaillant chaque fois que les lèvres de Sollux viennent couvrir son visage. Et quand finalement, une énième fois, sa bouche rencontre la sienne, Eridan s'ose à répondre à l'étreinte ainsi qu'au baiser, malgré son souffle devenu fébrile et le battement de son cœur qui martèle sa poitrine. Lentement leur alchimie se transforme, l'Ampora sent que son compagnon se rétracte, comme s'il lui laissait gentiment le contrôle.

Malgré l'appréhension, Eridan saisit l'occasion, approfondit leur contact, colle son corps contre le sien en cherchant à unir plus profondément leurs bouches, venant timidement mordiller les lèvres qui lui sont offertes, jusqu'à ce qu'elles s'ouvrent et qu'il puisse y glisser la langue.

Sollux émet un bruit ravit, glisse une main sur sa taille tandis que l'autre se perd dans ses cheveux. Lorsqu'ils se séparent pour reprendre leurs souffles, toujours blottis l'un contre l'autre, ils rouvrent les yeux et leurs regards se rencontrent, leurs visages sont fiévreux.

Eridan rigole doucement :

« Ça va... cette fois ce n'était pas trop gênant.

- Eheh, t'es peut être moins coincé que je le pensais~

- Rah, Sol !! »

L'Ampora lui donne un petit coup dans l'épaule, non sans prendre une mine boudeuse. Sollux lui tire la langue narquoisement et s'apprête à rétorquer, mais son regard est attiré par du mouvement et il tourne la tête... pour se figer net et s'empourprer subitement. Confus devant cette réaction, Eridan regarde dans la même direction, et se fige en voyant leur groupe d'amis les regarder avec de grands sourires. Il saisit certains sourires narquois, ainsi que Nepeta qui forme un cœur avec ses mains et Gamzee qui fait un mouvement obscène de va et vient avec son index.

C'est Karkat, le doux Karkat, leur grand sauveur, qui interrompt la situation devenu embarrassante en ouvrant la porte fenêtre pour s'exclamer :

« Vous venez manger ou vous comptez baiser sur le balcon ?! »

Sollux et Eridan ne se font pas prier, rentrant en trombe en essayant de faire bonne figure, malgré les rires et les regards moqueurs.

=== ===

ET VOILA !

J'estime que ce chapitre est une bonne finalité. Du moins : le final d'un premier Arc. J'aimerai encore écrire sur cet univers avec cette chronologie et ces versions des personnages, mais je vais voir si je continue sur "Un Ampora ne pleure pas" ou si je vais créer un autre livre.

Pour le moment je mets donc l'histoire en "Achevée" bien qu'il pourrait y avoir de nouveaux chapitres ! Mais je ne donnerais pas d'estime de publication, cela se fera en fonction de mon inspiration ;)

Bonne continuation et merci d'avoir suivit cet Arc !

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