11.
Plus le temps passe, plus je me rend compte des sentiments qui m'animent par rapport à Yuki. Je ne peux plus me mentir. Depuis notre retour de Tokyo, j'ai vraiment l'impression que tout à changer. Comme si le fait de le savoir me rendait plus faible face à mes propres émotions. Je pense beaucoup trop souvent à lui pour que je le considère comme mon meilleur ami. Mon cœur bat trop fort lorsqu'il me touche pour que ce soit une simple amitié. Je suis amoureuse de lui. Ou du moins, j'ai un très gros béguin pour lui. Mais je ne veux pas en parler avec lui, je ne vois même pas à quel moment c'est intelligent... Seulement, Isuzu n'entend pas les choses de la même façon que moi, au contraire.
On s'est beaucoup rapprochées, elle et moi en trois moi, et elle passe souvent chez moi après la fin des cours. On parle de tout, et de rien. On se confie, on rigole, on parle du futur, mais aussi du passé... Jamais je n'aurais pensé être proche de cette façon avec elle.
C'est comme si j'ouvrais les yeux sur quelque chose qui est là, et qui l'a toujours été, mais dont je ne m'étais jamais aperçue. Je ne peux même pas imaginer la peine que je lui ai fait subir durant ces dernières années. Elle ne le peut pas non plus, ce qui nous remet, d'une certaine façon, sur un pied d'égalité. On a reconstruit notre amitié, comme si elle n'avait jamais été là. Seulement, à chaque fois que le sujet abordé est celui de Yuki, rien ne va.
-Mais c'est débile! Tu vas pas me dire que t'as fait tout ce chemin pour rien? Enfin, je veux dire, t'as mis du temps à découvrir tes sentiments et à vivre avec, et maintenant tu vas faire comme si de rien était ? dit-elle en fronçant ses sourcils.
-Isuzu, tu sais très bien que je suis bien comme ça... J'ai pas envie de perdre son amitié parce qu'il me rejette, ou parce qu'on se sépare !
-Ça, c'est parce qu'il a pas encore de copine. Tu sais, au début, je pensais comme toi avec Keiji, puis je me suis dit que si moi j'étais tombée amoureuse de lui, pourquoi pas d'autre? Et puis en plus, connaissant Yuki, même si il ne t'aime pas (ce dont je doute fort), il restera quand même ami avec toi! Ces mois ou vous ne vous êtes pas parlé, l'ont marqué autant que toi ! affirme Isuzu, sûre d'elle.
-Mais ça n'a absolument aucun rapport ! Si il veut sortir avec une fille parce qu'il l'aime, je vois pas où est le soucis ! C'est juste que je ne veux pas le perdre, c'est même quelque chose qui me fait horriblement peur, et tu le sais très bien... Alors je vois pas l'intérêt de risquer de tout détruire entre nous pour des sentiments débiles.
-Ouais, je pense vraiment que vous êtes tous les deux cons. dit-elle, fermant ainsi la discussion.
Je lève les yeux au ciel, lassée par ses paroles. À croire qu'elle me rabâche sans cesse les mêmes histoires. Elle sait pertinemment que le perdre serait la pire chose qui pourrait m'arriver, alors je ne comprend même pas comment elle peut me pousser autant. Je sais qu'il a probablement les mêmes sentiments que moi, mais ça ne change rien. Et quand bien même je voudrais me déclarer à lui, Yuki est devenu trop beau à mes yeux, trop parfait pour que je tente quoi que ce soit. Encore une fois, mes sentiments me font oublier les défauts de la personne que j'aime. Je les connais parfaitement, mais j'arrive pas à me dire qu'ils ne font pas parti de son charme ! C'est comme si ses défauts le rendaient encore plus beau.
Nous sommes déjà en mars, et la fin de l'année arrive à grands pas. Et qui dit fin de l'année, dit examens. Pour ne pas être submergés, on a décidé de réviser ensemble, et je dois avouer que pour l'instant ça marche plutôt bien. On va très souvent chez Keiji ou chez moi pour travailler. C'est les deux endroits les plus calmes, même s'il arrive de temps en temps à mes sœurs de se disputer et à faire un boucan pas possible. On va presque jamais chez Isuzu, son petit-frère vient de naître, et c'est mort pour arriver à travailler. Quand à la maison de Yuki, on a peur de déranger le restaurant en dessous, même si c'est totalement stupide.
Néanmoins, on a décidé d'aller chez lui, aujourd'hui. Ça ne le dérange absolument pas ; il nous a même invité à dormir à sa maison, pour qu'on puisse aussi travailler ensemble dimanche. Ce qu'on a tous trouvé plutôt astucieux. On s'est donc tous invités chez lui en début d'après midi, et j'ai l'impression qu'on travaille depuis une éternité.
À moitié affalée sur la table à manger de chez Yuki, j'essaie d'engranger le plus d'informations possible, sans grand espoir de réussite. J'ai l'impression que mon cerveau est une sorte de trou noir, avalant les choses sans les retenir. Je soupire, et regarde mes amis. Seul Yuki semble être dans le même état que moi. Keiji est à fond, et Isuzu essaie de faire bonne figure devant lui. Chacun apprend comme il peut, et c'est assez drôle à voir.
N'empêche, aussi bizarre que ça semble être, les voir travailler me donne du courage, et je me redresse, prête à me reconcentrer. Je travaille les cours de maths, une matière qui s'avère très compliquée pour moi, mais je tiens bon, soutenue par l'ambiance dans la pièce.
Vers 20 heure, on décide enfin de faire une vrai pause, de plus de quinze minutes, pour aller se faire à manger. Le ventre d'Isuzu et le mien appellent déjà à l'aide depuis un petit quart-d'heure quand on décide d'arrêter. Yuki, Isuzu et moi, on se met donc à préparer à manger, préférant laisser Keiji ne toucher à rien, de peur qu'il fasse une catastrophe. Il n'a jamais été doué pour la cuisine.
-Vous êtes sûrs que je peux pas vous aider? Je me sens complètement inutile là. dit-il affalé sur la table du salon, l'air de s'ennuyer ferme.
-Tu pourrai même rater des toast, Keiji ! dis-je en rigolant.
-Je suis sûr qu'il pourrait même rater le branchement du toaster! renchérit Yuki, nous faisant rire encore plus, sauf Keiji.
-Eh Isuzu tu pourrais me défendre quand même! Je suis seul contre vous trois là, c'est de la triche! dit Keiji, un peu énervé, mais laissant paraître un sourire.
-Haha, non y a pas moyen! Pour la nourriture, j'avoue que t'es pas doué du tout! On a tous nos faiblesses! le rassura Isuzu.
-Non, moi je suis parfait, j'ai pas de faiblesse! dit Yuki, nous faisant mourir de rire.
-Pardon? T'as pas de faiblesse? Dois-je te rappeler que t'as peur des chats? C'est complètement ridicule! dit Isuzu en riant.
-Vous vous souvenez de la fois où en allant chez Saya on a croisé un chat? Je me souviendrais toute ma vie du cri que ce cher Yuki a poussé... renchérit Keiji, content qu'on ne parle plus de lui.
-Oh ça va! Les chats c'est flippant, on dit qu'ils ont neuf vies! Et puis quand ils me regardent, j'ai l'impression qu'ils vont me tuer! C'est pas possible, je suis sûr qu'ils veulent envahir la terre! réplique Yuki, parcourut de frissons en disant cela.
-C'est ridicule comme peur. D'autant plus que t'as pas peur de Kuro, juste parce que c'est ton chat. Autant avoir peur des souris ou des mouches... dis-je, très sérieuse.
-Ouais, ça va mademoiselle j'ai peur de tous les insectes qui rampent, qui grouillent, ou qui marchent! lança Yuki.
-Brr... Juste le fait d'entendre ça me fait peur. C'est déjà beaucoup moins ridicule comme peur, je suis désolée! Les insectes c'est moche (la plupart du temps) et puis ça se faufile partout! C'est la grosse panique un insecte. dis-je, sûre que ma phobie était de loin moins ridicule que la sienne.
-Je suis d'accord avec elle, c'est flippant un insecte! soutenait Isuzu.
-Ouais enfin l'autre fois elle a eu peur d'une fourmis, quoi. Une toute pitite fourmis qui avait grimpé sur sa chaussure. dit Yuki en levant les yeux au ciel.
-De toute façon on à tous des peurs pourries. répliquai-je, un peu honteuse de cet événement.
-Ah ouais une fourmis, quand même... marmonne Isuzu, à ma droite.
-Je crois qu'on a fini! dit Yuki, après un petit blanc.
Sur ces belles paroles de Yuki, cette affreuse discussion, qui aurait pu nous couper l'appétit, se stoppe. On observe un instant notre travail, mais surtout celui du Yuki, avant de mettre la table. On laisse cette fois-ci Keiji nous aider, ce qu'il fait avec joie. Le repas est un délice, et le talent de Yuki en cuisine me surprendra toujours. En même temps, ses parents s'occupent d'un restaurant, donc c'est pas si choquant que ça...
Cette soirée me rend profondément heureuse, et me prouve encore une fois à quel point on s'est ressoudés incroyablement facilement. C'est comme si les mois durant lesquels on a arrêté de se parler n'avaient jamais existé. Et je trouve ça magique.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro