Chapitre 3
-Bon... Je pense qu'il est temps que je me présente: Je m'appelle Sara et c'est moi qui ai... En quelque sorte... Qui t'ai mise dans cette situation, je suis désolée pour ça...
Elle lâche un petit rire gêné. S'en suivit un petit silence bourdonnant, le temps que j'assimile les nouvelles informations.
-J'ai l'air débile comme ça à parler à quelqu'un qui ne m'entend probablement pas...
No problème. Je te reçois cinq sur cinq. Je n'ai que toi à écouter de toute façon, donc vas-y, expliques qui tu es, cela me faciliterais la tâche...
-Bref... J'ai seize ans. Il se trouve que j'allais à mon lycée quand l'accident s'est produit. D'ailleurs je m'étonne du fait que tu n'étais pas en direction d'une école vu ton apparence. J'ai l'impression que tu as le même âge que moi ou du moins, proche du mien...
Si si... J'ai bien le même âge que toi, quelle coïncidence...
-Si ça se trouve, tu es beaucoup plus âgé que tu ne laisses paraître et tu as fini tes études depuis bien longtemps...
J'ai l'air vieux peut être??! Je suis dans la fleur de l'âge et cette fille vient juste de me rabaisser à un vieux jeune... Je laissai un soupir s'échapper de mes lèvres. Son écho retenti dans l'immense galerie où je me trouvai. Toujours dans le noir, entouré d'une pluie stagnante. La salle aux perles, comme je l'avais nommé.
-Mon lycée, c'est le François Ballardieux... C'est peut être le tien aussi, qu'est-ce que j'en sais...
Désolé de te décevoir,mais ce n'est pas le mien...
-Il faut beaucoup d'argent pour y rentrer... Et de bonnes notes! L'inscription est chère et seuls les élèves les plus prestigieux peuvent y entrer... Personnellement, c'est grâce à mon père que j'ai pu m'y faire une place, je ne suis pas la plus intelligente du lycée mais comme il a une grande influence sur l'établissement, j'ai tout de même été prise...
Oh oh... Ainsi donc tu te vante de ta richesse! Le lycée dont je faisais parti il y a un an n'est qu'un lycée public pourri dans lequel mon père se pouvait permettre de m'y inscrire. Bref, je ne suis pas aussi riche que toi, Sara.
-Bien que je ne sois pas fière de cette derrière information...
Zut, je me sens mal maintenant, je l'avoir jugé aussi vite...
-Bon, tant qu'on est dans le ridicule, autant tout te raconter! Je m'entends bien avec mes amies... J'en ai deux et on est inséparables. Il y a une époque où on faisait du shopping tous les week-end et... Elle marqua un temps de silence pour déglutir. Désolée... Ça ne doit pas vraiment t'intéresser... C'est juste que je ne sais pas quoi te dire alors je te raconte ma vie. Mais bon... Raconter la vie d'une fille à un garçon, ce n'est pas très commun. Surtout qu'on ne se connait même pas!
Exacte ma chère... Je t'avouerais qu'entendre parler shopping et problème de fille à longueur de journée ne m'intéresse pas du tout... Certes on ne se connait pas mais... Au moins cela me fait de la compagnie dans cet hôpital de malheur. Tu savais ça? Je n'avais pas parlé à quelqu'un mis à part mon père depuis un an. Là, on ne peu bien sûr pas dire que je te parle. Enfin... En quelque sorte si. C'est mon esprit qui te parle.
-Bref, j'ai lu des articles sur le coma ainsi que des témoignages de personnes s'en étant sorti... Ils disent que lorsqu'ils se sont réveillés, ils n'avaient plus la notion du temps. Alors j'ai décidé que je viendrais te voir chaque jour pour te dire la date du jour et les actualités. Comme ça, tu seras à jour quand tu reviendras dans le monde réel. Car je suis sûr que tu y parviendras! Courage!
Wouha.... Ben...Merci Sara.
Je retiens des pleurs qui n'existent pas.
Je n'ai pas de mots pour décrire ce que je ressens.... Pourquoi tu es si intentionnée envers moi? Je ne mérite pas ça... Et puis, venir tous les jours? Cela ne ferait pas trop pour elle? Je veux dire... Je suis un garçon qu'elle ne connait absolument pas et ce n'est même pas elle qui m'a renversé même si elle semble vouloir affirmer le contraire...Ce n'est pas un peu trop, tous les jours? Je ne voudrais pas lui faire perdre son temps. Comme elle l'a dit à l'instant, ses copines et elle s'entendent à merveille. Pourquoi devrait-elle gâcher un moment passé entre elles juste pour moi?
J'entends l'imperceptible raclement des pieds d'un meuble sur le sol, puis un léger craquement lorsque Sara s'y assoit. Au bruit chaud et rond, je devine une chaise en bois.
Je fais pitié. Je me dégoutte de moi-même. Il y a une fille, là, à quelques mètres de moi, qui me parle d'elle et moi, je ne peux rien faire.
Rien. Même pas lui répondre par des gestes. Rien du tout. Je suis impuissant. Totalement impuissant. J'aimerais pouvoir sortir de cette chambre d'hôpital, qu'on me retire cette couverture dans laquelle je suffoque, tendre le bras pour atteindre la clim... J'AIMERAIS QUE LES MÉDECINS ARRÊTENT DE ME DÉRANGER APRÈS DIX HEURES DU SOIR! Le sommeil, c'est sacré! J'aimerais pouvoir leur lancer un regard meurtrier quand ils ouvrent les rideaux à six heures du matin. Vous saviez ça? Quand on ne peut pas protéger ses yeux instinctivement, la lumière du matin tue les yeux. J'avais envie de pleurer tellement ça faisait mal.
-Donc... J'entends le bruit feutré des pages d'un journal. Aujourd'hui on est le quatorze mai. Et le président a... Fait de la merde, comme d'habitude. Je t'explique....
J'écoute, longtemps, son homologue. Oh là là... Mais qui nous a donné un dirigeant comme lui déjà? Ah oui mince... C'est nos parents qui ont voté... C'est encore un coup de mon père ça... Il n'y a que lui pour emmerder le monde entier.
Mais attendez une minute... Quatorze mai?? Je sens mes poils s'hérisser sur mes avant bras. Cela ferait donc cinq jours que je suis dans le coma?? Oh non pas ça... Je n'ai pas envie de passer ma vie à l'hôpital moi! Je préfère encore mourir! Toutefois... Je ne peux pas bouger. Donc je ne peux pas me suicider. Ah! Vie cruelle! Heureusement que tu es là Sara! Tu m'apportes un peu de baume au cœur dans cet enfer.
-Oh! Désolée, je dois aller à mon cours particulier d'anglais... Je te revoie demain!
Smack!
Minute papillon... C'était quoi ce bruit?! C'est... Pourquoi je sens comme une fraicheur sur mon front? Elle ne m'aurait tout de même pas fait un bisou, hein? Oh misère... Je panique, mon pouls s'accélère et je sens... Oui bon, j'espère que ce n'est que mon âme qui ressent ça, et que cela ne se voit pas sur mon corps!! La poisse sérieux! Hugh... J'ai vraiment trop chaud.
-Beurk! s'exclama Sara.
Comment ça, "beurk"?! Tu viens de m'embrasser! C'est moi qui devrais dire "beurk"!! Et comment ça "beurk", hein!?? Dis tout de suite que je te dégoutes non!
-Ton front est plein de sueur... Tu vas bien? Tu as de la fièvre? lança-t-elle d'une voix légèrement tremblante. Tu veux que j'appelle un médecin? Ah merde... C'est vrai que tu ne peux pas parler... Attends, je reviens. Mon cours peu bien attendre.
J'entends sa voix s'éloigner avant que je ne puisse dire ouf, et la porte se refermer sur ses pas glissants.
"Attends je reviens" qu'elle dit. Elle en a encore des comme ça? Comme si j'allais m'évader.... Je.Ne.Peux.Pas.Bouger. Combien de fois il va falloir que je le répète? Je soupirai et me mis à maugréer contre mon sort. J'ai dû attendre ainsi encore à peu près dix minutes, si j'ai bien compté... Bah quoi? Il faut bien s'occuper... On m'enleva alors la couverture afin que ma peau puisse respirer à son aise.
-Voilà. Je pense que tu vas mieux maintenant... Je suis désolée, si j'avais su que c'était à cause de la couverture, je te l'aurais enlevé. Sur ce, je dois vraiment y aller! À demain! lâcha-t-elle en s'enfuyant, l'heure à ses trousses.
À demain, Sara... Et merci pour tout!
La porte se referme, laissant derrière elle un désarroi presque tangible. Seul dans ma salle aux perles, je me sens tout petit dans l'immensité de cet univers. Les ronronnements assourdissants des machines accompagnent ma solitude, comme un soutien défectueux.
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