Kala

        Des coups de feu, des hurlements, le bruit d’un camion de pompier, les ambulances, une mare de sang qui semble grandir progressivement jusqu’à former une épaisse vague rougeâtre qui s’abat sur moi. Je me noie. Je donne la main à quelqu’un, maman ? Papa ? Ohani ? Je ne sais pas mais bientôt cette main me serre violemment le bras et j’ai l’impression qu’il m’attire un peu plus vers le fond. Je me débats, je hurle, je n’ai plus aucun repère, je vois rouge et mon souffle est coupé. Je suis en train de mourir et je ressens une multitude de poids sur mon ventre. On  me tire dessus.

        D’un bon je m’arrache de mon sommeil, criant, entortillée dans mes couvertures au sol et manquant bientôt d’oxygène tant je suis en panique. Je bouge dans tous les sens, tirant la couette du mieux que je peux pour enfin pouvoir sortir au moins ma tête, mais je n’y arrive pas. Je respire mon propre air devenu insoutenable par la chaleur si bien que je me demande si je ne suis pas encore en plein cauchemar, à deux doigts de mourir asphyxiée. Mais non, même les yeux ouverts les cauchemars continuent.

        D’épaisses larmes dévalent mes joues alors que je m’arrête un instant pour reprendre mes esprits. Ca ne sert à rien de s’énerver, ça ne m’aidera pas à me défaire de ma couverture. Je prends une minute pour me détendre, essuyant mes larmes et respirant du mieux que je peux sous ma lourde couette avant de reprendre ma lutte plus lentement. Finalement j’arrive à sortir de mon piège et j’allume ma lampe de chevet. Autour de moi mes chats se sont tous cachés, sûrement apeurés à l’idée de se prendre un coup, seul les plus téméraires me grimpent dessus, provoquant des poids sur mon ventre.

        Je tressaille. Ces poids, j’ai cru qu’il s’agissait de balles alors qu’en fait ce n’était que mes chats qui s’amusaient à me grimper dessus, trouvant ça original de voir une espèce de grosse larve se mouvoir sous leurs yeux. Je déglutis avant de redresser la tête pour observer le réveil sur mon meuble.

17 heures.

J’ai dormi presque toute la journée.

        Je me lève avec difficulté avant de finalement sentir ma tête tourner violemment. Je vois trouble et je suis obligée de me tenir au bord du lit pour ne pas m’effondrer. Saleté de chute de tension. Autour de moi tous mes chats se mettent à miauler, protestant contre leur mauvaise maitresse qui a passé sa journée à dormir plutôt qu’à leur donner à manger. Je souris en coin à cette pensée et me redresse, avançant à petits pas tout en me maintenant à chaque objet que je trouve pour pouvoir avancer sans tomber.

Je déteste les nuits et les jours comme ceux-là.

*

« Oh mon Dieu Kala tu nous fais un remake de The Walking Dead ? –Me demande Mike alors que je franchis la porte du chenil avec une petite mine-

-Très drôle Sherlockonda –Dis-je en grognant avant d’aller me changer dans le vestiaire sous l’œil attentif du violâtre- Ca t’arrive souvent de me regarder me changer ?

-Je me fais du soucis pour toi –Dit-il en se posant face à moi, m’empêchant d’enfiler la tenue réglementaire du chenil-

-Ah oui ?

-Oui, tu es vraiment maigre –Dit-il en me tournant autour, fixant mon ventre que je cache de mes bras- Et pâle.

-Merci pour ces gentils compliments –Dis-je d’un ton sarcastique en enfilant la tenue-

-Tu manges suffisamment ?

-Pas plus ni moins que d’habitude –Dis-je en haussant les épaules-

-Tu devrais faire attention Kala. »

        Il soupire et me fait malgré tout un demi-sourire que je peine à lui rendre. Je ne passe pas mon temps à manger, quand on est seul les repas ne sont plus aussi important que lorsqu’on est à plusieurs et qu’on a des bouches à nourrir. Je ne mange que lorsque j’ai faim ou que j’en ai le temps. C’est ça l’avantage de vivre seule, avec mes chats. Je vis au jour le jour et à mon rythme.

*

        Ce soir je m’occupe de nettoyer la petite aire de jeu des chatons, retirant les poils accumulés sur l’espèce de moquette avec une brosse et remettant en places les jouets. Ca ne me demande pas beaucoup d’effort sauf que je dois souvent me lever puis me baisser, augmentant mes vertiges. Je n’ai pas mangé depuis deux jours je crois et bientôt je commence à me sentir mal. Je vais pour m’asseoir mais mes jambes flageolent et j’ai à peine le temps d’ouvrir ma bouche que je vois blanc, sentant mes oreilles bourdonner avant de ne plus rien entendre du tout et de sentir mon corps s’affaler lourdement au sol, ma tête évitant de justesse le rebord de l’aire de jeu des chatons.

*

        Encore et toujours ce même cauchemar, je vais finir par le connaitre par cœur sauf que cette fois-ci je ne sens pas de balle me traverser mais une odeur forte qui vient brûler mes narines et ma gorge. J’ouvre lourdement mes yeux pour faire face au visage blanchâtre de Michael, ses cheveux violets apparaissant comme une tache floue. Je cligne des yeux avant de le voir plus clairement, un large verre à la main, sous mon visage, dans lequel se trouve un liquide doré.

De l’alcool.

« - Bordel j’ai cru mourir de peur !

-Je suis désolée –Dis-je d’une voix pâteuse- Retire ce verre de sous mon nez ça pue.

-En attendant c’est le seul truc qui t’aie ramenée à toi –Dit-il inquiet en venant éponger mon visage à l’aide d’un gant humide- Ca va aller ?

-Euh ouais –Je ferme à nouveau les yeux-

-Je n’entendais plus de bruit de ton côté et tu ne me répondais plus alors je suis venu voir et je t’ai trouvée au sol –Dit-il d’une voix émue- J…J’ai cru que tu t’étais assomée ou quoi que ce soit et que tu…

-Michael j’ai juste fait un malaise –Dis-je en ouvrant un œil- Ca arrive.

-Pourquoi tu ne réalises pas que ton état de santé est grave bon sang ?!

-Parce qu’il ne l’est pas, je suis juste un peu fatiguée.

-J’ai pas envie que tu finisses à l’hôpital Kala…

-Moi non plus –Je soupire- avec la chance que j’ai ils me colleraient Ashton comme infirmier.

-Je suis sûr qu’il s’occuperait bien de toi au moins.

-Mh –Je croise les bras-

-Ouvre la bouche –Dit-il en approchant un carré de sucre de mes lèvres-

-Pas faim.

-Kala tu ouvres ta bouche ou je te le fais entrer ailleurs ! –J’écarquille mes yeux à cette phrase avant d’ouvrir la bouche- Voilà, t’es pas croyable. T’es sûre que t’as 23 ans ?

-Peut-être –Dis-je la bouche pleine de sucre-

-Bon, j’ai appellé Célia, elle va venir plus tôt.

-Pourquoi ?

-Je vais te ramener chez toi.

-Quoi ? Mais quelle heure il est ? –Dis-je surprise-

-Il n’est que minuit et demi, mais je préfère que tu rentres te coucher.

-Mais je ne suis pas fatiguée !

-Kala tu viens de me dire que ton malaise était dû à la fatigue.

-Ouais bon ok –Je grogne- mais j’ai pas envie de rentrer, laisse-moi bosser encore un peu, je me sens déjà mieux.

-Non, tu restes allongée et on attend que Célia vienne. »

        Je soupire avant de finalement fermer les yeux, appréciant le sucre qui glisse le long de ma gorge et semble tonifier petit à petit mon corps. C’est aux alentours d’une heure que Célia prend le relais, donnant le feu vert à Michael pour me ramener chez moi.

        Décidément en quatre mois où j’avais pris le tram sans parler à Ashton, on s’était vu tous les soirs mais maintenant qu’on se parlait, il ne se passait pas un soir sans qu’on ait un empêchement l’un comme l’autre.

*

        Michael prend mes affaires et grimpe à ma suite jusque dans l’appartement. Il connait le chemin, il est déjà venu, c’est bien le seul. Il pose mes affaires dans ma chambre avant de nourrir mes chats qui se sont presque tous jetés sur lui tant ils étaient content de le revoir, mais aussi de voir quelqu’un suffisamment conscient pour remplir les gamelles de croquettes.

Mes chats sont des crevards.

        Il s’active dans mon appartement alors que je reste comme un piquet dans mon petit séjour à le regarder s’activer. Il ouvre les fenêtres et refait mon lit avant d’arriver dans ma cuisine.

« Tu fais quoi Mikey ?

-Je m’occupe de toi vu que tu n’es pas capable de le faire toi-même ! –Blessée je sens mes joues virer au rouge et je me recule alors qu’il se tourne vers moi- Oh non pardon je ne voulais pas dire ça comme ça.

-C’est bon je comprends…

-Kala… »

Il s’approche de moi et m’enroule de ses bras. Je n’aime pas ça, mais c’est Michael et j’ai confiance en lui. Alors je le laisse faire et je niche ma tête dans son cou.

« Il n’y a rien dans tes placards et rien non plus dans ton frigo –Dit-il tout bas-

-Je sais…

-Kala il faut que tu manges –Dit-il en caressant mon dos- Tu vas finir par tomber gravement malade –Il se retire doucement et redresse mon visage à l’aide de son pouce- Demain je passerai te voir dans la journée et on ira faire les courses d’accord ?

-Ok –Dis-je sans conviction-

-Maintenant vas te coucher. »

        Il embrasse mon front affectueusement avant de remettre son manteau. Je le remercie avant de fermer à clé derrière lui et d’aller fermer les fenêtres. Il fait froid, mais au moins l’air semble pur. Ca me change et bien que les litières soient sur mon balcon, l’odeur des chats commençait à se faire pesante.

        Je me glisse dans mon pyjama et m’allonge dans mon lit, regardant nerveusement la couette dans laquelle je m’étais piégée ce matin. J’ai peur de fermer les yeux, peur de faire un cauchemar alors je prends un livre et commence à lire, luttant pour ne pas m’endormir.

J’ai bien trop peur.

Peur de revivre mon passé par bribes.

Quelques chats grimpent sur mon ventre et je leur fait quelques caresses, regardant à présent le plafond immaculé. Seul le silence règne.

Je suis toute seule dorénavant.

*

Quelques temps après on frappe à ma porte, c’est Michael, il a oublié son bonnet, je l’ai vu dans la cuisine. Je me lève, vêtue de mon unique pyjama et récupère le bonnet avant d’ouvrir.

« Mikey tu en as mis du t… Oh non pas toi !

-Hey Kala, Tu v… »

D’un coup sec je ferme la porte au visage décontenancé du garçon.

Comment sait-il que j’habite ici ?!

*

Ashton

23 heures, hôpital.

« Ash tu es passé voir Oli ? –Me demande Oriane qui vient à ma hauteur-

-J’en reviens justement –Dis-je en souriant avant de poser mes lèvres sur les siennes et d’entourer sa taille de mes bras- je ne savais pas que tu bossais ce soir.

-J’ai demandé à travailler pour avoir mon week end de libre, d’ailleurs tu as demandé le tiens ? –J’hausse un sourcil derrière mes lunettes- Je te rappelle qu’on est censé partir tous les deux en amoureux et…

-Oh non j’ai oublié –Dis-je catastrophé- Je vais voir pour rattraper ça.

-T’es pas possible Ash –Dit-elle en levant ses yeux noisette au ciel- demande à Moyra ou à Clarisse, au pire tu rattraperas tes jours la semaine prochaine. »

        Je souris en coin, soulagé par cette solution avant de regarder autour de nous et de tirer doucement Oriane avec moi à l’ombre d’un angle de mur. Nous n’avons pas vraiment le droit de nous montrer au boulot, c’est interdit, mais comme nous n’habitons pas ensemble j’ai l’impression que mon temps passé avec elle est réduit, alors je profite de ces petits instants.

        Moyra et Clarisse ne nous disent rien, seulement d’être discrets et de ne pas passer notre temps à batifoler dans l’hôpital. C’est ça la vie professionnelle et je suis d’accord. Seulement je n’aime pas trop être seul et la chaleur de ma copine, ses baisers, son odeur, tout ça me rassure.

Elle est la seule qui soit là pour moi.

*

        Comme prévu Moyra accepte de me laisser mon week-end en échange d’une journée de travail supplémentaire. C’est tout à fait faisable et je m’empresse de prévenir Oriane, sautillant à l’idée de passer un week-end en amoureux avec elle. Depuis plusieurs semaines nous n’arrivions plus à nous voir et nous avions décidé d’un commun-accord qu’il fallait que l’on s’en aille quelques temps, tous les deux, histoire de se retrouver.

        Je repars à mon service, un sourire figé sur mes lèvres et je m’imagine même déjà la conversation que j’aurai ce soir avec Kala. Mon sourire va l’exaspérer, mais elle me comprendra, je suis sûre qu’elle aussi apprécierait de passer un week end avec son petit ami, Michael si mes souvenirs sont bons.

*

        Comme le temps passe vite lorsqu’on est de bonne humeur. Rapidement je prends mes affaires avant d’aller prendre le tram. Oriane est déjà partie alors je ne vais pas m’éterniser. Le quai est vide comparé aux derniers jours avec l’accident et le tram aussi. Il n’y a plus la bande de petits cons, bande de Calum Hood sans aucun doute bien que lui-même n’était pas là hier soir. Quand je pense qu’ils voulaient s’en prendre à Kala.

D’ailleurs elle non plus n’est pas là.

        Ce n’est pas possible. A chaque fois que je voudrais lui parler il y a un empêchement de son côté comme du mien. A croire que c’est fait expres. Je m’assois lascivement à sa place, posant mes mains sur le chauffage tout en réfléchissant.

Est-ce une bonne idée ou non ?

Lorsque le tram indique mon arrêt je pèse le pour et le contre et finalement je reste assis, descendant à l’arrêt suivant, celui de Kala.

Je me remémore les souvenirs de la veille lorsque je l’ai raccompagnée, en me retournant j’ai vu où était sa porte d’entrée et même malgré l’épais brouillard actuel j’arrive à la localiser.

Et ma chance se confirme lorsque je remarque la porte mal fermée. Je n’aurais pas besoin de sonner à l’interphone et elle ne pourra pas m’empêcher de monter. Je souris de plus belle et regarder les boites aux lettres.

Kala-La suite semble être effacée au blanco- Hansen – Etage trois.

        Je grimpe les escaliers et arrive enfin devant la porte. Je jette un rapide coup d’œil à mon téléphone, 2h30 du matin. Si ça se trouve elle dort, mais malgré tout je frappe.

C’est bête, quelqu’un de logique aurait rebroussé chemin et serait rentré chez lui, attendant un horaire normal pour rendre une visite, mais ne pas la voir ce soir a piqué ma curiosité.

        Quelques secondes après j’entends du bruit se rapprocher et bientôt la porte s’ouvre sur cette fille aux cheveux cerise, vêtue d’un simple débardeur tellement large que je devine en rougissant sa poitrine, avec un long pantalon de sport, un bonnet à la main et suivi par ce qui semble être une armée de chats.

 « Mikey tu en as mis du t… -Dit-elle alors qu’elle pose enfin son regard sur moi, ouvrant grand ses yeux- Oh non pas toi !

-Hey Kala, Tu v… »

        Comme je m’y attendais elle me ferme la porte à la figure, me laissant là comme un con. Elle n’avait pas la tête de quelqu’un que je venais de réveiller en tout cas.

Je reste quelques minutes devant sa porte lorsqu’elle l’ouvre à la volée, me faisant sursauter.

Elle s’est changée.

~ Bonsoir :) bon je devais poster une deuxième partie mais finalement demain après-midi je vais devoir aller bosser :( je ne sais pas si j'aurais le temps de poster demain soir, sinon ce sera vendredi soir car je commence un énième TP en marketing mercredi -_-

Du coup la fin des OS est encore reportée.... J'espère que vous ne m'en voulez pas trop u_u' Vivement que je reprenne un rythme normal sur wattpad...

Sinon : En média vous trouverez une petit illustration rapide de Kala :)

Bref, merci pour tout, pour vos encouragements, pour vos implications personnelles aussi, Merci à @nikkierush et @bixbstiles d'ailleurs ;) Vraiment sans vous j'aurais arrêté Wattpad je pense ^^ alors merci d'être toujours là à me soutenir, quelle que soit l'histoire :)

Kactus