Point de vue Fabiana

Ça n'avait pas été facile, car j'avais dû être coupé à plusieurs reprises par mes sanglots, mais j'avais réussi à lui résumer toute l'histoire en prenant la peine de bien énumérer la trahison de mon père quelques années plutôt. Je m'attendais à ce qu'il réagisse en me réconfortant, mais ce ne fut pas le cas au contraire, il resta muet comme une tombe, étant donné qu'en faisant l'anecdote de mon histoire, j'avais le regard porté droit devant moi, il fallu que je me retourne afin de le regarder et je me rendis aussitôt compte que son regard s'était assombri.

_ du coup que comptes-tu faite ?

_ rien du tout ! Il n'a qu'à crever dans cet hôpital ! J'en ai rien à faire et ma mère ... Je ne lui pardonnerai jamais une telle trahison !

Un silence s'installa pour la deuxième fois. Il me regardait les sourcils froncés, la mâchoire contractée. À en déduire par les apparences, on aurait cru qu'il était contrarié contre moi... Mais ça ne devait sûrement pas être le cas.

_ tu te rends compte de ce que tu es en train dire, me demanda-t-il froidement

Sa phrase vint aussi contredire ce que je pensais, aussi étonnant que cela pouvait paraître il était contrarié contre moi.

_ tu parles de ton père et de ta mère.... Ton père et ta mère !! Te rends-tu comptes Fabiana ?!

_ oui je m'en rends compte !! Sous l'effet de la colère, j'en veux énormément à ma mère, mais mon père ... C'est beaucoup plus qu'une simple colère. Je le hais de tout mon cœur !!

À ce moment, j'avais cru qu'il allait me sauter dessus tellement, je pouvais lire la fureur dans ses yeux. Pourquoi réagissait-il de la sorte !? J'étais venue afin qu'il me console et non pour qu'il s'énerve contre moi d'autant plus qu'il n'avait aucune raison pour le faire.

_ tu es insensée de dire une telle chose ! Comment peux-tu dire de telles conneries ! Tu ne t'en rends pas compte, me hurla-t-il

_ je ne te permets pas de me parler de la sorte, rétorquai-je hors de moi en me levant, tu te prends pour qui ?! Tu sais quoi, je n'aurai jamais dû venir ici pensant que toi au moins tu serais de mon côté !

Je voulus m'en aller, mais je le sentis attraper mon bras, je me retournais furieuse et voulu lui hurler au visage les pires insultes que j'avais emmagasiné depuis mon petit parcours sur cette terre, mais en croisant son regard triste cette idée me quitta très rapidement.

_ je suis désolé Fabiana.... Je n'aurais jamais dû te parler de la sorte !

_ lâche moi Karen ! Je veux rentrer chez moi !

Je voulus me détacher de son emprise, mais il resserra sa main autour de mon bras. Il me regarda droit dans les yeux, les yeux presque larmoyants avant de dire :

_ je suis orphelin de père et de mère ... Depuis maintenant une année.

Je sentis une sensation bizarre dans mon cœur qui baissa ma température qui devait bouillante par la colère. Voyant que sa révélation avait eu un effet calmant sur moi, il me lâcha et me fit signe que l'on aille s'asseoir, je ne me fis pas prier et obéis.

_ ce n'est pas une raison pour justifié mon comportement, mais le fait de t'entendre parler de tes parents de la sorte m'a un peu chamboulé ... Tu es chanceuse d'avoir tes parents en vie Fabiana ! Il est vrai que père vous a abandonné ta mère et toi, mais ... il est de retour maintenant !

_ que veux tu que je fasse qu'il soit de retour ? Que je puisse oublier toutes ces années de douleur ? Toutes les larmes que ma mère a versées par sa faute ? Toute la peine qu'il nous a causé ? Comme ça !?

_ c'est ce que te demande la parole Fabiana ! C'est ce que Dieu veut ! Que tu pardonnes à ceux qui t'ont offensé !

Pardonner à mon père après ce qu'il avait eu à nous faire, Dieu ne pouvait pas me demander une telle chose, car il savait que c'était impossible de plus, il devait sûrement être du même avis que moi : cet homme ne méritait pas d'être pardonné, il méritait de souffrir comme nous, nous avons souffert ! J'étais sure que c'était à cause de cela qu'il avait eu cet accident. Dieu le punissait du mal qu'il avait eu à nous causer.

_ Fabiana la dernière fois quand nous étions en train de parler, tu m'avais raconté à quel point tu t'étais montré très méprisante envers Dieu au point de quasiment l'insulter, mais pourtant, il t'a pardonné... La bible dit que si nous ne pardonnons pas aux autres leurs offenses alors Dieu ne nous pardonnera pas à notre tour. Il est même relaté l'histoire d'un homme lui devait de l'argent à un roi après l'avoir supplié, le roi eut de la peine pour lui et l'acquitta de toute dette. En sortant de la maison de ce dernier, il rencontra qui a son tour lui devait de l'argent au lieu de faire de même, il jeta cet homme en prison... Quand le roi l'apprit, il fut saisi d'une grande fureur et le jeta en prison. C'est la même chose Fabiana, il est vrai que les motifs ne sont pas les mêmes, mais si Dieu t'a pardonné quand tu l'avais rejeté, tu dois aussi pardonner à ton père !

Je ne savais pas quoi dire, il m'avait retiré toute argumentation de la bouche. Dieu m'avait pardonné et voulait que je fasse de même ? J'avais réellement pris la décision de faire de mon mieux pour plaire à Dieu ? Mais pourquoi cela était si difficile ? Je ne me voyais pas pardonner ! Ni moi, ni ma mère ne pouvions faire une telle chose. D'ailleurs, en parlant d'elle, il fallait que je lui parle.

_ je vais rentrer chez moi ...

_ penses à ce que je t'ai dit Fabiana s'il te plaît...

_ je vais essayer...

*************

En rentrant à la maison, je fus accueilli par ma mère qui se jeta quasiment sur moi. Elle m'attrapa les mains le regard rempli de tristesse avant de me dire :

_ Fabiana s'il te plaît donne-moi le temps de t'expliquer ! Écoute moi !

_ d'accord...

J'étais émotionnellement épuisée, je n'avais même pas de force pour résister. J'allais simplement m'asseoir au salon, elle s'assît juste à côté de moi. Pendant plusieurs secondes, un long silence pesait dans la pièce jusqu'à se décider enfin à le briser en disant :

_ je sais comment tu te sens en ce moment ... C'est ce que je voulais éviter. Quand j'ai revu Franck pour la première fois après son départ, j'avais simplement envie de me jeter d'un balcon d'autant plus que pendant cette période, tu étais encore dans les bras de ces criminels. Ça n'a pas été facile, mais Dieu m'a énormément aidé.

_ tu lui as pardonné, la coupai-je sèchement

Elle soupira et mit sa main sur ma jambe.

_ fabi ma chérie... Ça n'a pas été facile, mais Dieu m'a énormément aidé. Ma puce ton père m'a fait du mal, je l'ai détesté à un niveau ou toi-même tu ne t'en rends pas compte, mais à quoi bon ? Cela servira à quoi si ce n'est que d'attrister Dieu ? À cause de lui, tu voudrais mettre en péril ta relation avec la seule personne qui compte réellement ?

Je sentis mes larmes coulées sur mon visage, pourquoi pleurais-je ? Je ne saurais pas répondre à cette question. Il y avait tant de sentiments contradictoires en moi que même mes émotions n'arrivaient pas à s'en remettre. La colère, la tristesse, la culpabilité, le doute, tous ses sentiments se fusionnaient dans mon être intérieur et me mettait dans une position tellement désagréable.

_ j'avais envie de te dire la vérité Fabiana, mais regarde dans quel état tu étais comment j'aurais pris le risque d'affecter ta santé en t'annonçant cela ? Quand tu t'étais enfin rétablie involontairement, tu ne cessais de me rappeler à quel point tu le détestais, je me disais à quoi bon te l'annoncer maintenant d'autant plus que quand il s'est lui rendu compte des sentiments que tu portais à son égard, il m'a demandé de ne rien te dire et à préférer s'en aller afin de ne pas chambouler la vie que nous avons si durement construite sans lui ...

_ pourquoi Dieu a permit qu'il réapparaisse ? Pourquoi ? J'avais enfin accepté le fait que mon père était un lâche que je ne reverrais plus jamais alors pourquoi a t-il fallu qu'il refasse surface ?

Ma mère vint me prendre dans ses bras et je me laissais faire, je pleurais dans ses bras alors qu'elle me caressait les cheveux.

_ souvent les voies de Dieu sont impénétrables ! Si Franck n'avait pas été là rien ne te garantit qu'on aurait pu vous sauver... Ou encore...

Elle s'arrêta et prit une expiration avant de dire :

_ ce n'est pas moi qui est payé ton opération, mais Franck s'il n'avait pas été là comment nous aurions pu faire ? Cette somme était beaucoup trop importante pour que j'accepte l'aide d'une autre personne.

_ je sais concernant l'opération, dis-je en me calmant, à plusieurs reprises, j'avais envie d'en parler, mais c'était comme si tout autour de moi m'en empêchait.

Je laissais échapper un long soupir de désespoir, car je ne savais que faire, durant toute mon enfance, j'avais fait en sorte de nourrir cette haine contre mon père et que maintenant je ne savais que faire.

_ aussi improbable que cela puisse être... Franck t'aime énormément ! Il a commis une erreur, c'est vrai, mais je t'assure qu'il en a récolté les fruits en découvrant la haine que tu avais pour lui, mais tout cela n'est que vanité ma puce. Actuellement, il est dans un lit d'hôpital Dieu seul sait si il va s'en sortir aimerais-tu que les choses se terminent ainsi ?

_ tu veux dire qu'il va mourir ? Lui demandais-je en me redressant les yeux toujours remplis de larmes

_ son cas est critique d'après ce que l'on m'a dit... Et si c'était sa dernière volonté ? Simplement voir ton visage ? Te montrerais-tu si dure Fabiana ?

Sa dernière volonté ? Alors, il risquait de mourir ? Après avoir disparu de nos vies pendant tant d'années, il refaisait surface et maintenant, on voulait me faire comprendre qu'il risquait de s'en aller et cette fois-ci définitivement.
Il était vrai que j'étais énormément remonté contre lui, je dirais même que je le détestais, mais savoir qu'il pourrait mourir me donnait une sensation étrange, j'en croirais même que cela m'affectait. Ce qui pourtant était quasiment impossible, car je détestais cet homme !

Mais pourtant en imaginant que cela puisse réellement se passer, je sentis de nouveaux un liquide chaud parcourir mes joues en suivant le chemin frayaient par les précédentes jusqu'à mon cou.

_ que décides-tu Fabiana ? Je ne t'obligerais jamais à y aller si tu n'en as pas envie !

_ toi veux-tu y aller ? Tu ne ressens donc plus aucune haine pour lui ? Du jour au lendemain, tu as oublié tout le mal qu'il t'a causé ?

_ oui...Mais je n'y suis pas arrivée toute seule Fabiana ! Il peut aussi le faire pour toi, mais si et seulement si tu le désires ...

Après sa phrase, nous passions plus de cinq minutes dans le silence. J'étais allongée sur ses jambes et elle, elle me caressait les cheveux. Seule ma respiration assez bruyante se faisait entendre dans la pièce. Seigneur, serais-je capable d'oublier toutes ses années de douleur ?

Si ! Tu peux ! Tout est possible à celui qui croit.

Alors si telle est ta volonté, comme ma mère aide moi à y arriver, car seule, j'en serais incapable.
Il me fallu une force en dessus de la mienne pour arriver à dire :

_ je veux y aller...

_ pardon, me demanda-t-elle car j'avais parlé à mi-voix

_ je veux y aller, répétai-je cette fois-ci avec une voix beaucoup plus audible

Je comprenais mieux ce verset qui disait :   Si quelqu'un veut venir après moi, qu'il renonce à lui-même. Pour suivre Dieu fallait renoncer à soi-même, renoncer à tout ce qui pouvait bien faire parti de nous avant de l'avoir connu. Ça n'allait pas être facile, mais que Dieu m'aide à renoncer à ma propre vie.

Suite ...