Chapitre 88
Changbin n'avait pas vu Chaeyoung de la journée, il avait beau avoir fait plusieurs fois le tour de la maison à sa recherche, il avait fini par se dire qu'elle avait dû sortir avec d'autres personnes. Il alla cependant jeter un dernier coup d'œil dans la buanderie avant de laisser tomber. Il n'y trouvera pas sa petite amie mais Félix, occupé à plier du linge. Dès qu'il sentit l’alpha approcher, l'oméga se figea.
— Oh excuse-moi Félix, je cherche Chaeyoung, tu ne l'aurais pas vue ?
Le concerne prit sur lui pour garder son calme et se remit à la tâche.
— Elle est sortie avec Jihyo et Jisung mais je ne sais plus pourquoi, désolé.
— Oh, d'accord merci je m'inquiétais de ne pas la voir.
Mais alors que Félix pensait qu'il allait le laisser tranquille maintenant qu'il avait obtenu l'information dont il avait besoin, Changbin s'assit sur une caisse et soupira.
— Je comprends que tu aimes passer du temps ici, c'est calme.
L'oméga pinça les lèvres, il aurait préféré que l'alpha parte sur le champ mais ça n'avait pas l'air d'être dans ses projets. Il prit une grande inspiration. Gentil, il essayait juste d'être gentil et Félix devait saluer cet effort.
— C'est vrai que c'est calme. Parfois ça fait du bien d'être un peu seul loin du bruit que font les autres. En temps normal j'irai bien prendre l'air, mais avec toute cette neige et la meute voisine qui rôde je me contente d'ici.
Il avait parlé plus que voulu mais Changbin en parut agréablement surpris.
— Je comprends et j'espère que tu ne vis pas trop mal l'arrivée de Beomgyu.
Félix haussa les épaules.
— De ce que j'ai cru comprendre, il n'a pas l'air d'avoir eu beaucoup de chance dans la vie non plus alors ça me semble normal de chercher à l'aider.
— “Non plus” ? répéta Changbin.
L'oméga se figea avant de reprendre une attitude la plus naturelle possible.
— On a tous un passif, certains moins heureux que d'autres. C'est bien de trouver des gens prêts à nous aider.
L’alpha chercha le sens caché de ses paroles, il avait toujours voulu être plus proche de Félix sans vouloir le brusquer, il voulait en apprendre plus sur lui. De cette façon, il pourrait plus facilement l'aider.
— Tu dis ça par rapport aux marques que j'ai déjà vues sur ton corps ?
— Peut-être.
— C'est des alphas qui t'ont fait ça non ? Ca ressemble beaucoup à des morsures ou…
— J’ai pas vraiment envie d’entrer dans les détails avec toi Changbin.
— Oh, excuse-moi, je ne voulais pas te mettre mal à l’aise cette fois.
Le soupir que Félix lâcha fut bien plus sonore que les précédents, il reposa brusquement le pull qu’il venait de plier et s’adressa à l’alpha sans le regarder.
— Tu n’as pas besoin de me parler de ça pour que je sois mal à l’aise Changbin. Ta simple présence suffit.
Changbin papillonna des cils, surpris que l’oméga d’ordinaire si timide et réservé se montre soudain si bavard, mais surtout si transparent en termes de ressenti.
— Pardon je… Enfin ça n’est pas dans mon intention de te mettre dans cet état tu sais, s’excusa-t-il tout penaud.
Cette fois Félix lui jeta un coup d'œil.
— Je sais. Je sais que tu essayes d’être gentil, que tu fais de ton mieux pour que je me sente rassuré en ta présence mais… ça n’est pas quelque chose que je contrôle d’accord ? Quand je te vois, je panique, mais c’est comme si mon corps était confus et que c’était la seule chose qu’il était capable d’exprimer. Dans ma tête, je sais que tu ne me veux pas de mal, mais c’est pas aussi facile que ça pour moi de…
Il s’arrêta net, réalisant qu’il parlait beaucoup trop. Ça devait d’ailleurs être la première fois qu’il parlait si longtemps en présence de Changbin. Celui-ci le fixait, les yeux ronds, également surpris de l’entendre soudainement autant. Ca n’était pas pour lui déplaire pour autant, bien au contraire, tant que Félix lui adressait la parole, il ne fuyait pas et c’était une avancée exceptionnelle.
— Bref, tout ça pour dire que j’apprécie que tu veuilles te montrer rassurant avec moi, même si je ne sais pas comment réagir autrement qu’en restant méfiant.
Changbin se contenta d’un son de gorge, il aurait voulu insister sur le fait que d'entendre ça de la bouche de l’oméga le rendait particulièrement heureux mais il craignait d’en faire trop.
— D’accord, merci de m’avoir dit ça, je vais te laisser, dit-il finalement avant de quitter la pièce.
Félix en fut surpris, il observa l’alpha s’éloigner, il aurait pensé qu’il allait insister, qu’il allait continuer la conversation ou qu’il allait vouloir se justifier un peu plus, mais non. Ca n’était pas la première fois que Changbin respectait ses limites, qu’il essayait de lui prouver à quel point il prenait son bien-être à coeur, mais Félix ne savait pas trop comment réagir à cela. Il était tellement plongé dans ses pensées qu’il n’entendit même pas Seungmin débouler dans la buanderie, presque à bout de souffle.
— Ça va ? Tout va bien ? articula-t-il entre deux respirations.
Félix déposa sa pile de longe dans un grand panier en osier.
— Oui ? Pourquoi, quelque chose ne va pas ?
— J’ai vu Changbin qui revenait d’ici et comme je savais que tu étais seul, j’ai eu peur de te trouver dans un état pas possible, tu es sûr que tout va bien ?
L’autre oméga hocha lentement la tête.
— Oui, il cherchait chaeyoung et on a parlé quelques instants, c’est tout.
— Et ça va ? Enfin tu te sens bien, tu n’as pas… Enfin…
Il se tut et prit le temps de détailler Félix des pieds à la tête, il n’avait pas l’air paniqué pour un sou, peut-être un peu pensif mais pas du tout dans l’état dans lequel Seungmin avait déjà pu le trouver par le passé après ses rencontres inopinées avec l’alpha.
— Oh d’accord, tant mieux alors. J’ai eu peur que ça se soit mal passé.
— Non tout va bien, rassure-toi Minnie. Changbin fait des efforts et j’essaye d’en faire aussi, ça rendra la vie de tout le monde plus facile.
Seungmin prit le temps de l’observer calmement afin de s’assurer qu’il ne mentait pas pour lui faire plaisir. Il avait toujours de la peine lorsqu’il pensait à ce que Félix devait ressentir. Le pauvre avait dû faire face à tant de choses, tant de changements dans sa vie et au lieu de continuer à se morfondre comme il avait pu le faire au départ, voilà qu’il faisait de son mieux pour que tout se passe du mieux possible et que la cohabitation soit agréable pour tous.
— Je t’admire beaucoup Lix.
Ce dernier hoqueta de surprise.
— Quoi ? Pourquoi ?
— Parce que, tu m’étonnes vraiment, tu prends énormément sur toi et tu supportes énormément de choses. Tu es courageux en quelque sorte.
— C’est gentil mais je ne pense pas vraiment l’être. J’essaye simplement de faire en sorte de ne pas être un fardeau pour tout le monde.
Les autres trouvaient peu à peu leur place et Félix avait envie qu’il en soit de même pour lui aussi. Il n’avait aucune idée de la place qu’il avait envie d’occuper pour le moment, mais il avait néanmoins envie de la trouver.
Seungmin lui sourit et posa la main sur son épaule.
— Je suis certain que personne ne te voit comme un fardeau.
Félix n’en était pas franchement convaincu et venant de Seungmin, il n’arrivait pas à prendre cette remarque comme étant valable pour les autres. Il appréciait néanmoins l’effort de son ami pour le rassurer.
— C’est gentil, se contenta-t-il de répondre.
“Gentil”, il voyait bien que tout le monde se montrait plus ou moins gentil avec lui, mais il avait fini par se demander si c’était réellement ce qu’il attendait de la part de ses congénères, de faire uniquement preuve de gentillesse envers lui.
Il posa doucement la main sur l’épaule de Seungmin, esquissa un sourire avant de s’éloigner, il avait besoin d’être seul, trop de choses se bousculaient dans sa tête. Son choix se porta rapidement sur la remise dans laquelle Wonpil l’avait déjà emmené. Il y serait tranquille pour réfléchir et souffler un peu, il n’était pas tard, pourtant il avait déjà l’esprit sens dessus-dessous. Pourquoi fallait-il que tout soit toujours si compliqué ? Pourquoi ne pouvait-il pas simplement vivre ? Vivre sans se soucier des autres, sans craindre qu’il puisse lui arriver quelque chose. Vivre sans constamment voir le mal partout ou sans craindre le pire à chaque instant.
Félix avait beau chercher à faire des efforts, il ne voyait pas comment il arriverait réellement un jour à laisser le passé derrière lui.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro