Gaëlle
- Va te reposer, me dit Faustine. Je vais parler à papa.
Je me sépare de son étreinte, tout en lui assurant que je vais bien et que nous allons parler à papa ensemble. Je regarde par la fenêtre. Gaëlle lit dans le jardin. Papa doit être dans le salon.
- Nous devrions y aller maintenant, dis-je.
Elle acquiesce et nous rejoignons papa, qui travaille sur son ordinateur. Avant que Faustine ne puisse parler, j'ouvre la bouche:
- Papa, on doit te parler, tu as un moment?
Mon père ferme son ordinateur. Je crois qu'il a deviné que nous allons parler de maman, ce qui signifie par la même occasion que j'avais mis Faustine au courant. Je m'excuse donc rapidement, tout en expliquant que j'ai essayé de ne rien lui dire mais que Faustine me connait trop bien et a deviné.
- Papa, dit Faustine doucement, on en a déjà parlé il y a quelques mois, mais on ne peut pas éviter. Pas après la lettre.
- Les filles, je comprends que vous vouliez savoir, mais nous devrions laisser cela de côté. On ravive un mauvais souvenir, et j'ai bien peur que c'est justement ce que votre mère veut.
- Comment ça?
- Votre mère n'est pas.. Elle n'est pas comme elle le prétend.. J'ai peur de ses intentions.. Si on reçoit une nouvelle lettre, il faudra la remettre aux autorités, et les prévenir qu'elle est dangereuse, d'accord? Je ne veux pas vous inquiéter, mais il faut être prudent.
- Je ne comprends pas, dis-je... On doit savoir pourquoi elle est partie. Mais elle ne nous l'explique pas.. Elle ne dit rien au final. Pourquoi nous ferait-elle du mal?
- Je pensais que vous vous en souveniez... Votre mère était agressive, parfois. Il est arrivé qu'elle soit violente dans ses propos, ou même qu'elle ne s'en prenne à moi. Je crois que quelque chose ne tournait pas rond chez elle.
Il attrape nos mains et nous regarde droit dans les yeux.
- Les filles... Si on en a très peu parlé, c'est parce que je voulais qu'on l'oublie au plus vite... J'espérais qu'elle ne reprenne pas contact avec nous..
Faustine le regarde avec insistance. Mon père semble terrorisé, mais a une lueur de détermination dans le regard.
- Papa... Pourquoi est-elle partie?
- Votre mère était très impulsive et spontanée. Quand elle avait une idée en tête, c'était difficile de la faire changer d'avis.. Je crois qu'elle a rencontré quelqu'un et s'est enfuie avec lui...
J'ai pendant un instant cru qu'il allait fondre en larmes, mais il semble se retenir.
- Comment tu as su qu'elle n'était pas morte? demande Faustine.
- Elle m'a laissé une lettre... Très brève... Je l'ai brûlée il y a des années.. Mais je n'ai jamais vraiment oublié.. J'aime encore Lou de tout mon cœur...
- Vous parlez de maman?
✽
Gaëlle se trouve sur le seuil de la porte. Elle est pétrifiée. Elle a sans doute entendu toute la conversation. Un million de regrets me foudroient. Elle n'aurait pas dû le savoir. Pas de cette façon..
Aucun de nous trois ne bouge de sa chaise. Je me lève la première. Je dois la prendre dans mes bras et lui expliquer. Gaëlle s'enfuit à toutes jambes. Je pars à sa poursuite.
- Gaëlle, attend!
Elle court vite mais je devine où elle veut aller. Je continue de courir à toute jambe jusqu'au bois, puis, quand je sens que je vais la rattraper, je ralentis légèrement. Je la vois assise au bord de la rivière, la tête dans ses bras. Je m'assois à côté d'elle. Elle a un mouvement de recul, mais je la serre dans mes bras et ne la lâche plus.
- Olga...
- On va t'expliquer, chérie. On va t'expliquer..
Ce que je fais avec autant de tact et de délicatesse que je peux, mais je suis trop bouleversée pour me véritablement mesurer mes paroles. Gaëlle m'écoute avec patience et intérêt. Mais elle semble aussi perdue, elle ne sait probablement pas si elle doit prendre tout ceci pour une bonne ou une mauvaise nouvelle. Je finis par dire maladroitement:
- Tout va bien, d'accord? Il n'y a aucun problème.
Et j'essaie de m'en persuader. Que tout va bien. Mais je sens que tout ne va pas bien. Quelque chose cloche. Après les aveux de mon père, j'ai peur des intentions de ma mère. Elle sait pertinemment où nous sommes. Elle pourrait venir si elle le voulait. Peut-être même nous regarde-t-elle en ce moment même...
Cette pensée me pousse à me lever et à regarder autour de moi. On doit rentrer au plus vite, mais je ne dois pas inquiéter Gaëlle.
- Viens, chérie. On rentre.
Quand elle est debout, elle fond dans mes bras. J'embrasse son front humide. Je lui promets de ne rien lui cacher.
- J'étais sûre que vous étiez là.
L'émotion m'empêche un temps de reconnaitre la voix de Faustine qui se dirige vers nous. Sans alarmer Gaëlle, j'essaie de lui faire comprendre qu'on doit rentrer par un échange de regards insistants. Elle comprend aussitôt. Nous prenons chacune une main de Gaëlle et nous dirigeons vers le sentier.
- Je ne suis pas un bébé, dit Gaëlle. Vous pouvez me dire ce genre de choses...
- On voulait te le dire, répond Faustine. On attendait le bon moment. Mais on ne te cachera plus rien.
- Promis?
- Promis, dit-on en chœur.
- Que faisons-nous, maintenant?
- On doit retrouver maman, dit Faustine. Ou au moins comprendre pourquoi elle nous écrit. Je pense avoir une idée.
- Je crois que j'ai deviné, répond-je. Tu veux parler à tante Elena?
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