Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

27. La guerre aux trois visages (1/3)

Une main froide enserre la sienne.

« Es-tu certaine de ton choix ? » murmure une voix à la surface de ses pensées.

Léonore est tout sauf certaine, mais ce qu'elle sait en revanche, c'est que sa présence mettait ses amis en danger, et même donnait des armes à leur adversaire pour les dresser les uns contre les autres. Elle-même ne craint rien – du moins physiquement. Elle est protégée par l'intention d'Eochu de l'épouser. Si elle veut tout arrêter, elle doit lutter de l'intérieur, au plus près du mal.

Peut-être Brigit parviendra-t-elle à convaincre son époux de renoncer à ses projets de conquête ?

« Je peux essayer, mais je crains qu'il ne soit au-delà de toute raison. Il a toujours été fier, et ses siècles d'errance ont creusé une soif de réparation et de domination qu'aucune rivière ne saurait étancher. »

Les mots s'accompagnent d'un frémissement nostalgique, du lent éveil d'une aspiration, d'une vague de sentiments oubliés. Léonore s'ébroue d'un mouvement de tête et observe autour d'elle sans parvenir à retenir un frisson. Elle est revenue à son point de départ, dans la vaste salle de banquet du château de Candé, éclairée d'un orgueilleux cercle de chandelles.

La fresque, immense et déroutante, étale les arches élancées d'une Tír na nÓg au faîte de sa gloire couronnant les deux figures centrales. Un souffle lui refroidit la nuque. Un agencement de chiffons, pinceaux et coupelles, soigneusement entreposés pour la nuit, n'attend plus que la dernière touche de l'artiste. Déjà, une main diligente a réparé les dégâts causés par le bâton de Florimond en s'appuyant sur le modèle d'une esquisse au fusain. Un visage encore aveugle la contemple, tel un miroir inachevé. Il ne lui manque plus qu'un regard pour s'éveiller à la vie.

Léonore se masse l'arête du nez. Comment sont-ils arrivés là ? Un manteau de brumes enveloppe ses souvenirs de l'affrontement dans la chambre du roi, comme si elle se remémorait un songe. Brigit s'exprimait à sa place, mais accepter la main tendue a été sa décision. Ensuite, ils ont basculé dans un corridor de rêve. Et maintenant ?

Le seigneur de Candé l'observe avec ce sourire trompeur qui la plonge dans un tourbillon d'émotions contradictoires. Il la répugne et, pourtant, elle l'a aimé autrefois, il y a plus longtemps que de mémoire humaine. Elle ne sait plus si elle veut s'enfuir ou embrasser ces lèvres trop froides pour leur redonner un soupçon de chaleur.

Les deux trolls grognent juste à côté. Le plus gros porte sur son épaule nauséabonde un roi aussi immobile qu'une poupée de son. D'après Brigit, le breuvage servi par Urbain l'a plongé en léthargie, mais ne met pas ses jours en danger. Elle frémit. Au moins, elle pourra veiller sur son souverain en partageant sa captivité. À la lumière des récents événements, elle comprend enfin tout le projet terrifiant d'Eochu : voler l'apparence de François de France, puis s'emparer du trône du Saint-Empire en son nom, appuyé par les armes du Codex Atlanticus. Leur intervention dans la chambre a interrompu le sordide rituel, mais que se passera-t-il après ?

« Ce n'est pas un simple glamour qu'il tisse, une illusion quelconque. C'est un ancien charme de changeling, un reflet de réel. Il a besoin de lui en vie pour maintenir le mirage. »

Même si les mots de Brigit la rassurent sur le sort du roi, elle n'ose imaginer la couronne de France, puis les rênes de l'ancien Empire romain, entre les mains de ce mégalomane. Où s'arrêtera sa soif de conquête ? Il ne tardera pas à tourner ses visées contre Henry d'Angleterre ou Charles d'Espagne. Combien périront dans le sillage de ses guerres ?

Comme un prédateur attiré par l'aura apeurée de sa proie, Eochu s'approche. Il lui relève le menton avec délicatesse, se penche à sa rencontre. Ses lèvres glacées effleurent les siennes. Un fantôme de baiser.

— Enfin, Brigit, nous nous retrouvons.

Un frisson lui remonte l'échine depuis le fond des os. Léonore refrène sa répulsion entre des poings serrés. Elle ne doit pas se trahir, elle doit endormir sa méfiance, l'inciter à savourer sa victoire. Alors, elle laisse Brigit s'exprimer, c'est plus sûr. Une sensation étrange l'enveloppe ; ses lèvres articulent des mots qu'elle n'a pas formulés.

— Renonce à cette folie, Eochu. Rejoins-moi parmi les soupirs de Tír na nÓg. Nos âmes habiteront les rues désertes et les bardes chanteront notre complainte sous les pierres moussues de souvenirs. Les humains ne veulent pas de toi, de nous. Le Voile s'épaissit entre les mondes. Ton précédent échec ne t'a-t-il donc rien appris ?

Le roi maudit se recule. Ses longs doigts glissent comme un souffle le long de son bras, jusqu'à l'extrémité de sa paume, qu'il abandonne à regret.

— Au contraire, il m'a beaucoup appris. Et j'ai eu un millénaire d'enfermement dans une mosaïque pour méditer mon retour. Je reprendrai mon dû. Déjà, la Pierre du destin m'a reconnu. N'as-tu pas entendu sa musique ?

Elle secoue la tête.

— La Lia Fáil ne chante que pour les nôtres. Les humains se lanceront à la poursuite de leur roi.

Les lèvres d'Eochu s'affinent sur une lame prête à jaillir du fourreau.

— Oh, mais j'espère bien. Je compte qu'ils saisissent ma petite invitation. Je les attends même avec impatience.

Un claquement de bottes s'élève à l'entrée de la salle.

— Tout s'est bien passé, seigneur Eochu ? interroge avec déférence une voix parfaitement humaine.

La lueur des chandelles révèle des épaules carrées, une ombre de barbe, un visage étrangement familier. Léonore le reconnaît avec un hoquet effaré : le chef des bandits qui les attendaient en embuscade près du Cloux !

— Ah, Achéric ! l'accueille Eochu avec la cordialité d'un seigneur envers son plus fidèle chevalier. Ma visite au château d'Amboise a rencontré un contretemps imprévu. Je vais devoir m'isoler dans l'atelier. Conduisez mon épouse à ses appartements et assurez-vous qu'elle ne manque de rien. Maître da Vinci terminera son portrait demain matin.

D'un signe impérieux, il invite le troll avec son royal fardeau et s'éloigne vers le fond de la pièce. L'autre monstre souffle au cou de Léonore une haleine à pâmer une jouvencelle. Cependant, elle n'est plus une frêle jeune femme innocente. Ces derniers jours l'ont endurcie des épreuves traversées. Elle relève le menton et rejoint le butor qui a déjà causé un mort et aurait tué Florimond sans une hésitation.

Il lui offre son bras avec un rictus railleur.

— Par ici, Madame. Comme nous nous retrouvons !

Elle retrousse la lèvre dans une attitude un peu éloignée de la stricte bienséance.

— Ne me touchez pas !

Il encaisse la rebuffade d'un roulement d'épaules indifférent et l'emmène entre les pierres endormies, sous l'écho de ses pas. Le troll la suit. Une escorte à la signification sans équivoque : malgré son apparente soumission, elle n'est toujours qu'une prisonnière.

Ils gagnent l'entrée du corps de logis, s'élèvent dans l'escalier d'honneur. Elle perce désormais sans mal l'illusion enveloppant les murs. Les marches se fendent de vétusté, les tapisseries s'effilochent, le lierre grimpant envahit les poutres de chêne. Seuls les portraits impavides la suivent de leur regard égal, quel que soit l'œil par lequel elle les observe.

Un battant s'ouvre sur une chambre qu'elle reconnaît. Ce haut baldaquin a abrité ses heures fiévreuses, sous la surveillance diligente de La Flèche. Les cendres refroidies tapissent encore le fond de l'âtre. Un claquement se referme derrière elle. Une clé tourne dans la serrure.

— Non !

Elle se jette sur la porte, actionne la poignée. Inutile. Eochu et son laquais ne lui accordent aucune confiance. C'est stupide. Qu'espérait-elle donc accomplir en venant ici ?

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro