Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

23. Mains qui soignent, mains qui tuent (3/3)

Cette fois, les pensées de La Flèche s'effilochent sous un soupçon de panique. Hors de question que cet assassin pose ses sales pattes sur elle ! Elle se tortille comme un nid de serpents en furie. Il lui attrape le bras et le tord dans son dos. Le mouvement, certes inconfortable, s'accompagne de l'éclair de douleur d'une collection de cloques. Son beuglement baveux s'étouffe dans les couvertures.

Il est repris l'instant d'après, de manière bien plus claironnante, par la gorge râpeuse de Collar. La Flèche relève la tête. Sur son dos, la pression se relâche ; la menace de la lame s'écarte. Elle pivote avec la vivacité d'une anguille. Sous un voile encore auréolé d'élancements cuisants, elle entraperçoit une dague dans un poing levé. Sa main jaillit et se referme en étau sur le poignet. Ses lèvres s'étirent.

Qui va saigner l'autre, maintenant ?

Le teigneux se trémousse comme s'il avait le feu aux fesses, mais n'essaie même pas de la repousser. Sans chercher à approfondir l'origine de cette surprenante chorégraphie, elle imprime un mouvement rotatoire au bras de son partenaire, quelque peu contraire à son anatomie. Les doigts s'écartent ; l'arme retombe sur le lit comme un fruit mûr à point.

Collar recule vers la porte avec une bordée de jurons ; elle plonge sur le couteau. Tandis qu'elle se redresse, les dents dénudées, il empoigne derrière lui une baudruche de poils ras dotée de quatre pattes. L'animal se décroche du morceau juteux avec un aboiement plaintif. Sous l'impulsion furibonde du briscard, il vole en travers de la pièce et s'écrase contre le mur avec un bruit mat. La Saucisse ! Sacré La Saucisse qui montait la garde !

Elle bondit du lit en souplesse, le regard vissé sur sa proie. Collar se précipite sur l'épée abandonnée près du coffre et la brandit vers son torse.

— Sale gaupe, je vais t'embrocher ! éructe-t-il.

La Flèche accueille la lame d'acier avec plus de sérénité qu'un engin bien plus court. Voilà un jeu qu'elle maîtrise sur le bout des doigts ! Les protestations de son bras droit redescendent sur un picotement supportable. Les forces sont équilibrées. Collar aura plus d'allonge, mais il est poivré. Ses réflexes seront émoussés.

Elle inspire une bouffée assassine.

— T'as aucune chance, houlier, c'est Roland qui m'a appris le métier. Tu connais Roland ? Le balafré que t'as refroidi tantôt ? Il m'a chargé d'un message posthume pour toi. Un message bien pointu que je vais me faire un plaisir de te remettre en main propre.

— Ce gargouilleux ? crache-t-il. Il n'a eu que ce qu'il méritait, à se mêler de ce qui ne le regarde pas. Et le même sort t'attend !

Dans la salle commune, des appels s'émeuvent du concert à l'étage. Le reste de la bande risque de débarquer sous peu et elle ne se sent pas d'humeur à donner une leçon d'escrime à toute une malemaisnie. Mieux vaut abréger les discours et passer à la pratique.

Elle bondit, et se recule de justesse devant la pointe qui siffle sous son nez. Pas si émoussé, le soûlard. Il la nargue d'un sourire jaune et de quelques moulinets. Elle esquive avec aisance, mais la chanson de l'acier la maintient à distance. Il ne s'emmêlera pas les pieds tout seul. Elle doit le forcer à se découvrir si elle veut passer sous sa garde.

— Alors, c'est tout ce que tu sais faire ? ricane-t-elle. T'attends que ta mère te torche le cul, peut-être ?

Une étincelle de fureur brute s'allume dans ses prunelles. Aurait-elle touché une corde sensible ? Il se rue à l'assaut avec la brutalité d'un taureau qui voit rouge. Elle pivote autour de la pointe dans un chassé-croisé osé qui lui crispe le ventre d'un doute, butte contre l'angle du coffre. L'épée siffle dans un coup de taille affamé. Elle l'accueille sur le tranchant du poignard, serre les dents. La vibration lui ébranle le bras jusqu'à l'épaule. Avant qu'il n'ait pu se désengager, elle se propulse d'une poussée contre l'obstacle.

Une soif de justice pulse dans ses veines. Rien ne l'entrave. Son arme écarte le fer, glisse jusqu'à la garde dans une chanson entraînante. Ainsi nez à nez, elle peut admirer de près la grimace teigneuse du nabot et même humer son haleine rancie. Il veut se reculer, mais elle lui saisit la manche. La danse n'est pas terminée ! Dans un dernier entrechat, elle pivote le poignet et lui enfonce cinq pouces d'acier affûté de haut en bas dans les tripes.

— Pour les juifs que t'as massacrés, et pour Roland, crève, ordure !

Il lui renvoie un regard surpris, titube. Une bulle rouge éclate à la surface de ses lèvres. Ses genoux se dérobent et il s'écroule sur le parquet dans un dernier soubresaut. Une flaque se répand sous lui.

Les jambes un peu tremblantes, encore haletante du combat, La Flèche contemple ce sang frais qui en évoque un autre. Dans son esprit, un barrage dont elle n'avait pas conscience se brise sous la pression. Une confusion de sentiments déferle dans ses veines comme un torrent grossi d'orage. Aujourd'hui, deux hommes sont morts sous ses doigts. L'un qu'elle haïssait, l'autre qu'elle aurait pu aimer. Une bouffée indéfinissable d'absence et de regrets lui pique des yeux restés trop secs. Deux filets humides glissent sur ses joues.

En bas, les cris s'alarment franchement. Elle se reprend d'un branle de la tête et s'éclaircit la vision. Depuis combien de temps n'avait-elle plus pleuré ? Ce n'est pas le moment de lâcher prise, elle n'est pas encore tirée d'affaire.

Un concert de bottes résonne dans l'étroit escalier, aussi discret qu'un troupeau de bœufs qui tenterait de marcher sur la pointe des sabots. Elle claque la porte d'une épaule et rabat le loquet. La mince tige de fer ne tiendra pas longtemps, mais c'est toujours quelques instants de gagnés !

Elle ramasse son épée, la range au fourreau, puis jette au pied du cadavre le poignard ensanglanté – sans doute celui qui a emporté Roland. Elle veut y voir une certaine justice.

Elle tâtonne son cou, frotte ses doigts poisseux. Une simple égratignure, rien de grave. En deux enjambées, elle rejoint le tas de poils gémissant qui lui a sauvé la mise et le coince sous son bras. Pourvu que ce butor ne lui ait pas rompu l'échine !

Les lourdauds de la bande s'écrasent contre le battant fermé. Un concert d'invectives donne le ton de leur humeur. Inutile de rester pour la fête, elle leur cède volontiers la place.

La Flèche plonge vers la fenêtre et se laisse tomber en contrebas. Il faut croire qu'elle est abonnée aux sorties aériennes, ces derniers temps. Un fracas de bois malmené éclate à l'étage, suivi d'un cortège d'imprécations. Les soudards ne semblent pas apprécier le cadeau laissé dans la pièce.

Elle s'enfonce dans le dédale des rues ; le crépuscule tire une cape d'ombre sur ses épaules.

Au fil des tours et des détours, la fièvre de l'affrontement déserte ses veines. La lassitude s'y déverse à sa suite. Une nuit trop courte, une marche dans les bois, un trop-plein d'émotions. Ses bottes butent sur les pavés, une buée floue grignote sa vision, une poigne lui broie les côtes. Elle ne sait plus où elle va.

Elle finit par s'arrêter sur un seuil anonyme, laisse ses fesses glisser jusque sur la pierre froide et plonge la tête entre ses mains. Elle sent l'humidité sur ses doigts. Les larmes coulent en silence, cet aveu de faiblesse. Que la vengeance est donc un plat amer ! La mort de Collar n'a rien résolu, rien soulagé, bien au contraire. Elle se retrouve face à elle-même, face à son chagrin, sans rempart illusoire pour s'en protéger. Elle ne voulait pas s'attacher, mais elle n'a fait que se mentir. La Flèche n'existe que dans ses fantasmes. Elle est toujours Rachel, aussi faible et fragile que cette fillette de huit ans qui refusait de lever la tête.

Une langue baveuse dépose une louchée de compassion sur ses doigts. Elle tend la main et se réconforte au contact rugueux de La Saucisse. Il ne semble pas avoir souffert de son coup de dent providentiel ; la constatation lui allège le cœur. Elle se rend compte qu'elle tient à ce foutu cabot qui l'a sortie autrefois de l'incendie et ne l'a plus quittée depuis. En y réfléchissant bien, elle tient aussi au sourire de lapin du broyeur de couleurs et même à sa protégée visionnaire sauvée des eaux, surtout après ce qu'ils ont affronté ensemble.

Ses pensées se remettent en branle d'un pas souffreteux. Où sont-ils maintenant ? Blaise Fayet a toutes les raisons de les rechercher. Roland et Achéric se sont battus pour une fille. S'agissait-il de Léonore ? Et le boiteux ? N'était-il pas avec elle ? Achéric s'est-il emparé d'eux pour les ramener de force au château ?

Achéric.

Elle en a appris de belles sur lui, aujourd'hui ! Sacrée histoire. Peu à peu, les pièces collectées s'assemblent sur une image encore floue. Elle bondit sur ses pieds et tente de rattraper son emballement.

Achéric, le lettré. Achéric, l'amateur de romans de chevalerie. Achéric, l'assassin d'Aymard. Achéric, au service du seigneur de Candé – lequel seigneur possédait la Torah de Salomon, dérobée par Caleb au cours d'une nuit fatidique. Caleb, éduqué pour devenir rabbin. Caleb, qui rêvait de guerroyer. Caleb, enfin, qui les a tous vendus à Aymard.

Achéric et Caleb.

Rachel cligne des paupières. Le visage d'un adolescent revêche, au menton poudré d'un duvet naissant, à la grande carcasse encore maladroite, se superpose à celui d'un solide spadassin étoffé de dix années de plus, à la barbe fournie.

La réalité vacille dans un vertige de compréhension.

Comment est-ce possible ? Pourquoi n'a-t-elle pas remarqué la ressemblance plus tôt ?

Les murs d'un château qui s'effacent, des monstres camouflés en gardes, un visage caché sous un autre. Tout n'est qu'illusion.

Une seule certitude perdure : Achéric est celui qu'elle cherche, le traître, le voleur, l'assassin. Il doit mourir !

Il les a dénoncés à Aymard, il a tué Salomon et Méira, il s'est emparé de la Torah pour la livrer à Blaise Fayet. Ce baveux lui a servi un beau plat de salades avec son histoire de seigneur de Château-Renault ! Sûrement pour l'aiguiller sur une fausse piste et la détourner de ce qui s'étalait juste sous son nez.

Mais pourquoi la mort d'Aymard ? L'ancien capitaine de la garde a-t-il fini par percer l'illusion, lui aussi ? Ou bien posait-il trop de questions ? Il ne faut sans doute pas chercher plus loin. Alors, ce pourceau l'a réduit au silence. Le même sort l'attend, à l'évidence. D'où les charmantes instructions laissées à son intention. Achéric se languit sûrement d'avoir de ses nouvelles. Ce serait malpoli de le faire attendre.

Sous la voûte encore claire piquetée des premières étoiles, elle se tourne vers l'horizon enténébré, vers l'amont du fleuve, vers les profondeurs de la forêt d'Amboise.

— Viens, La Saucisse ! Il est temps de rendre une petite visite de courtoisie au seigneur de Candé, et à son valet.

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro