Il ouvrit les yeux, il avait faim. C'était là sa seule pensée. Alors même qu'il avait peut-être dormi des siècles.

Ouvrant son cercueil, il en sortit, puis examina les autres cercueils autour de lui, plus nombreux qu'à son dernier réveil.

Il ne consulta pas les dates pour connaître l'époque, ne pensant qu'à se sustenter. Il sortit, prit une grande inspiration, faisant entrer en lui l'air frais du cimetière et s'envola dans la nuit.

Les maisons à cette époque nouvelle étaient bien étranges. D'immenses tours blanchâtres sans le moindre charme.

Il remarqua une fenêtre ouverte et s'y engouffra.

Une jeune fille dormait profondément, il s'approcha à pas feutré, retira la couverture la découvrant dans des vêtements qui le stupéfièrent.

Comment osait-elle porter un pantalon ? Et le petit haut qu'elle avait en couvrait trop peu, on voyait son ventre tout de même et ses épaules ! Pourtant c'était vraiment disgracieux des épaules. Et ses bras ! Des bras qui n'étaient même pas blanc mais plutôt bronzés. Comment pouvait-elle ne pas les couvrir enfin !

Bon il n'était pas là pour cela.

Il dégagea les cheveux de son cou pour pouvoir y mordre goulument quand elle ouvrit les yeux.

- J'y crois pas ! s'exclama-t-elle en se redressant.

Lui non plus. Se réveiller non mais quel toupet ! Sa victime devait dormir et le laisser faire ! Qu'est-ce qui lui prenait à celle-ci ! Et puis quel était ce langage.

- Un vampire ! Un vrai de vrai ! Dis-moi pas que c'est vrai !

- Pardon ? Je ne comprends guère ce que vous dites mademoiselle.

- Oh la la ! s'écria-t-elle en frappant dans ses mains. C'est pour une caméra cachée ? Je suis sûre que c'est ça.

Elle se dévissa le cou pour regarder partout. Lui se demandait si sa victime n'était pas atteinte de folie.

- Allez ! Vas-y gros ! Dis-leur que je sais que c'est pas vrai !

- Peut-être êtes-vous étrangère et parlez mal notre langue ?

Il ne voyait que cette explication à son étrange langage. Surtout qu'il n'était pas gros. Il baissa les yeux pour vérifier que pendant son sommeil il n'avait pas pris du poids. Mais non, heureusement. Quelle honte cela aurait été, un vampire avec de l'embonpoint !

Et puis pourquoi perdait-il son temps à faire la conversation. Les femmes s'effrayaient d'un rien. Elle perdrait connaissance dès qu'il se ferait menaçant et il pourrait faire sa petite affaire tranquille.

Il bondit alors rugissant en sortant ses canines. L'autre ne semblait pas s'évanouir. Elle le regardait la bouche grande ouverte, comme un poisson échoué.

Que devait-il faire alors ? Il ne donnait pas de fascicules sur comment saigner sa victime quand elle n'était pas inconsciente quand on devenait vampire. On n'avait d'ailleurs aucune explication, rien. Comment en aurait-il était autrement ? Les vampires étaient seuls, toujours.

- Oh putain ! C'est pas une blague alors ! T'es un vrai vampire ! finit par s'enthousiasmer la jeune fille.

Et pourquoi s'enthousiasmait-elle ? Il était un vampire ! La terreur de la nuit ! Une créature effroyable.

- Génial ! s'exclama-t-elle en s'asseyant en tailleur.

Quelle position indécente d'ailleurs.

- En plus t'es beau gosse ! Je devrais peut-être te prendre en photo et la partager sur Facebook, twitter et instagram ! Mais est-ce qu'on peut te prendre en photo ? Avec un filtre snap ça devrait être sympa. Et j'ai foutu quoi de ce putain de portable, demanda-t-elle en soulevant ses coussins.

Cela voulait sans doute dire qu'il était beau garçon. Même si elle semblait parler une autre langue tant les mots qu'elle utilisait n'avaient aucun sens pour lui.

Que devait-il faire ? La remercier ? Certes c'était vrai qu'il était plutôt bien fait de sa personne et cela faisait tellement longtemps qu'on ne le lui avait pas dit. Les gens avaient plus l'habitude de crier à sa vue. Ou alors faudrait-il s'offusquer qu'il était un vampire ! Il était là pour être terrifiant ! Non mais vraiment ! Est-ce qu'on disait d'un vampire qu'il était beau ? Non ! On disait qu'il était effrayant, sombre, mystérieux. On pouvait bien parfois dire qu'il était dangereusement séduisant, mais là il avait juste envie de manger pas de s'attirer les bonnes grâces d'une jeune fille pour profiter d'un moment qu'elle voulait intime en dévorant son sang. Non c'était bien trop long. Il commença à reculer. Il irait chercher une autre proie mais la jeune fille se leva affolée

- Non non ! Vient ! Mords-moi !

Elle tendait son cou. Lui trouvait cela bien étrange. Elles n'acceptaient jamais d'habitude. Peut-être devrait-il se méfier. Mais il avait faim, bien trop faim. Alors il s'approcha, l'enlaça, sentit la chaleur de son corps, son cœur qui battait doucement.

Il pencha ses canines vers son cou, sa veine palpitante qui l'attirait quand elle souffla :

- Oui fais de moi une vampire !

Cette étrange remarque le figea. Faire d'elle une vampire ? Mais ce n'était pas possible. On ne créait pas de vampire.

- Je suis navré jeune fille mais pour devenir vampire il faut avoir connu une mort particulière. Je ne suis pas capable de vous donner cela.

- Qu'est-ce que tu racontes ! dit-elle en bondissant. Mords-moi et on sera ensemble pour l'éternité c'est tout !

- Mais pas du tout enfin !

Et puis il ne voudrait pas d'elle pour l'éternité. Un vampire vivait en solitaire. Et même si ce n'était pas le cas il avait connu des femmes bien plus charmantes qu'elle, si basanée, si indécente et parlant un étrange langage.

- Ne dis pas de bêtise c'est toujours comme ça dans les films ! Tu viens de te transformer ou quoi ?

Ou quoi quoi ? Et qu'est-ce que c'était qu'un film ? Et puis non il ne venait pas de se transformer, il était vampire depuis un moment, ne sachant pas à quel date il était, il n'aurait su le dire mais à son dernier réveil il avait déjà survécut à deux siècles !

C'était assez. Elle voulait qu'il le morde. Tant mieux lui aussi. Au moins elle se tairait et fini l'incompréhension !

- Bien sûr, je vais le faire, susurra-t-il d'une voix mielleuse.

Il s'approcha, l'autre s'était de nouveau laissé faire suite à son mensonge et il enfonça ses canines en elle. Le sang coulait dans sa bouche, liqueur divine !

Il ne put s'empêcher d'espérer qu'elle se trompait et qu'il n'aurait pas à la supporter pour l'éternité.