Rencontre en boîte
Il avait eu un mauvais pressentiment dès qu'il était arrivé en vue de la salle de concert. Les spectateurs s'étant déplacé pour l'évènement ne ressemblait en rien aux amateurs d'opéra de son époque. Entre leurs longues chevelures même pour les hommes, leurs barbes touffus souvent, leurs vêtements sombres aux messages proches du satanisme il se demandait s'il était au bon endroit. Surtout que ces gens étaient déjà bien imbibés de bière et poussaient des cris rauques à glacer le sang d'un mort.
Sa mauvaise impression se confirma dans la salle de concert. Il n'y avait pas de fauteuils moelleux ici, en hauteur des fauteuils en plastique très inconfortable et en bas les gens se tenaient debout. Il s'assit en se sentant peu à sa place. Puis la musique commença et la musique qu'il entendait n'avait rien à voir avec la musique de son époque. Le chanteur hurlait, s'égosillait, sur une musique loin d'être douce. Et tous autour de lui se trémoussait au lieu d'écouter sagement, à certains moments le public chantait en cœur la chanson au lieu de laisser l'artiste faire son travail. Albert se demandait de plus en plus dans quelle époque il était tombé.
Il profita du manque de luminosité et de l'activité de la salle pour se nourrir au cou de son voisin, abandonnant l'idée de socialiser ici et repartir et marcher dans les rues.
Il se sentait si seul, si perdu dans cette époque si différente de tout ce qu'il avait connu. Que c'était-il passé pour en arriver là ? Il en avait pourtant connu des siècles, mais jamais il ne s'était senti si en décalage.
En allant son chemin il tomba sur un groupe de personnes bien habillés qui parler d'aller danser. Il songea qu'une soirée dansante cela pourrait être une bonne idée. Cela devait ressembler plus ou moins à n'importe quelle soirée dansante. Probablement de nouveau pas, allant en accord avec leur nouvelle musique, mais il saurait vite apprendre.
Et c'est ainsi que notre vampire débarqua dans une discothèque sans trop s'étonner de la musique. Le videur avait bien rit en le voyant arriver et lui avait préciser que ce n'était pas un bal costumé mais face au pouvoir hypnotique du vampire il l'avait laissé entrer.
La musique ne l'avait donc pas paru spécialement déplacé, après ce qu'il venait d'entendre les paroles plutôt simples l'amusèrent. Ces couples bien trop proches, bien trop collés-serrés l'avaient bien un peu gêné mais il s'était repris. Il commençait à comprendre qu'à cette époque ce genre de choses étaient monnaie communs, bien qu'il trouvait cela ridicule. Ces gens ne connaissaient vraiment pas l'intimité entre une telle attitude et des vêtements en dévoilant autant ?
L'odeur de l'alcool était très forte, la musique assourdissante, cela le gênait un peu. Comment faire connaissance avec quelqu'un si on en pouvait entendre ce que votre interlocuteur vous disiez ? Et comment séduire dans un tel contexte ? Pourtant les gens sur la piste de danse semblaient y parvenir sans souci.
Il les observa, tentant de comprendre le pas de base de leurs danses mais il ne semblait pas en avoir, les danseurs semblant juste se tortiller. Cela n'avait rien d'harmonieux, rien de beau à regarder. Il faudrait peut-être apprendre à ces gens à quel point c'était beau de voir un groupe entier suivre les même mouvements au même instant, et à quel point il était agréable d'être dans ce même groupe, avec une charmante personne qui répondait parfaitement au moindre de vos pas et avec qui vous pouviez avoir des discussions amusantes ou même profonde.
Perdu dans ses pensées il ne remarqua la jeune femme qui se placa à ses côtés que quand elle le questionna :
- Bonsoir ! J'adore votre tenue ! Ça change un peu de tous ces moutons ici !
Il se retourna sur la charmante créature qui l'avait abordée. Elle portait quelque chose qui pouvait passer pour une parodie de robe de deuil d'une époque qu'il connaissait, avec corset, dentelle et du volume, sauf qu'elle était bien moins stricte, dévoilant sa gorge et ses bras, et même ses jambes qu'elle avait néanmoins couvert d'autres vêtements et n'étaient pas entièrement noire ayant des pointes de violet. Son maquillage lui-même un peu trop outrancier était plutôt sombre.
Néanmoins un grand plaisir s'empara de lui devant elle, pas seulement parce qu'il aurait été si facile de planter ses crocs dans sa gorge dévêtue mais parce qu'elle au moins porter une tenue presque familière.
- La vôtre est très bien aussi ! commenta-t-il.
- Merci. La plupart des gens n'aime pas ça, et je ne pensais pas trouver quelqu'un comme moi ici. C'est mon amie Bethany qui m'a traînée et je pensais que la nuit aller à être longue. Mais peut-être pas finalement. Je vous offre un verre ?
- Laissez-moi vous l'offrir plutôt !
- Je vois ! Vous êtes du genre galant ? Alors qu'est-ce que vous faites ici ?
- Je me suis égaré.
- Ca je veux bien le croire. Au fait moi c'est Carmina !
- Enchanté ! déclara-t-il en lui faisant un baise main. Je suis Albert Ernest Gustave Morville comte de Soisson !
Les joues rouges, Carmina s'esclaffa :
- Alors on va le boire ce verre ?
Carmina était d'une compagnie agréable, elle aussi trouvait les danseurs ridicules, tout comme ce genre d'endroit. Il lui parla du concert auquel il avait assisté, de ce qu'était devenu la musique et absolument fascinée elle hochait la tête. Elle ne le lâchait pas du regard, tout en tentant d'attirer son attention en jouant avec ses cheveux, en le complimentant et en posant sa main sur lui. Il était un peu gêné par tant d'audace et cette proximité, mais il ne se plaignit pas, ayant enfin trouvé une proie intéressante, avec qui il pourrait jouer des jours durant.
Toute à son attention sur lui, elle remarqua qu'il arrivait à ne rien payer, comme il semblait perdu aussi, son ignorance de choses aussi simple que ce qu'était un bus et surtout qu'il ne touchait pas à sa boisson. Ses manières et sa façon de parler étaient d'ailleurs clairement désuètes.
Elle se décida donc à l'interroger un peu plus sur lui-même et son passé pour tirer cette histoire au clair. Mais ses réponses étaient terriblement imprécises quand il ne détournait pas l'attention de sa question. Parce qu'il semblait avoir l'habitude, l'habitude de séduire, de rester évasif. Elle ne pouvait pas savoir qu'il avait des siècles d'expériences derrière lui et que pour la première fois depuis son réveil il se sentait en terrain connu.
- Albert je sens bien que quelque chose n'est pas normal avec vous ! insista-t-elle.
- Vous me vexez !
- Ne le soyez pas ! J'adore les marginaux, les gens différents ! Mais je veux que vous soyez honnêtes. Vous ne savez pas ce que c'est qu'un bus, n'avez pas de portable, si vous ne parliez pas aussi bien le français j'aurais pu croire que vous veniez de loin mais vous le parlez mieux que la plupart des gens et sans aucun accent. Alors dites-moi la vérité ! Qu'est-ce que vous cachez ?
Il eut un sourire mystérieux.
- Mes secrets font mon charme.
- Vous n'en avez pas besoin pour être charmant et je n'abandonnerais pas tant que je ne saurais pas la vérité.
- Vous ne le devinerez jamais.
Il avait raison, elle avait bien quelques idées mais elles étaient bien trop fantaisistes. Néanmoins elle passait vraiment un bon moment avec lui et elle le trouvait fascinant. Alors elle lui proposa de finir la soirée chez elle. Ce qu'il accepta, sans savoir ce que les gens de cette époque entendaient derrière ce genre de proposition.
Elle l'amena alors à son petit studio. Lui qui avait l'habitude du luxe et de l'espace des manoirs et château fut un peu surpris. Déjà sa première victime avait une petite chambre, mais cette pièce-là aurait presque pu la contenir en entière. Il n'eut pas le temps d'y réfléchir qu'elle se jeta sur ses lèvres en le poussant sur le lit. Il ne sut comment réagir à une telle attitude si différente de celle des demoiselles qu'il avait pu côtoyer. Et vu la manière dont elle se pressait contre lui, le fait qu'elle le déshabillait en déposant des baiser sur son corps, il était clair qu'elle voulait de lui quelque chose qu'il ne pouvait lui offrir. Son corps n'était pas capable de faire ce genre de choses et n'en avait même pas envie, mais une telle proximité avec le corps d'un autre, plein de vie, au cœur battant, distribuant du sang à chaque veine à l'intérieur de cet être charmant ravivait son appétit. Ses canines jaillirent et quand elle pressa ses lèvres à nouveau contre les siennes, qu'elle glissa sa langue dans sa bouche elle les sentit immédiatement et bondit aussitôt loin de lui.
- Tu es un vampire ! s'exclama-t-elle.
Cela pouvait sembler fou mais collait parfaitement avec tout. Néanmoins elle s'attendait à ce qu'il s'esclaffe et lui assure que non. Au lieu de cela il sourit avec gourmandise :
- Oui.
Il se leva vers elle, la prit dans ses bras et elle l'arrêta :
- Attends ! Qu'est-ce que tu vas me faire ?
Quelle étrange question ! C'était pourtant limpide ! Vraiment les victimes à cette époque n'étaient pas facile. Il tenta de se reprendre, de faire bonne figure en prenant un air mystérieux, terrifiant quand elle recula :
- J'ai dit qu'est-ce que tu vas me faire ?
- Eh bien c'est clair non ? Je vais me nourrir ?
- Et tout ira bien pour moi ? Parce que figurez-vous que j'ai pas très envie de mourir mais j'ai des croix ici et même de l'ail dans ma cuisine.
Et voilà qu'en plus elle le menaçait. Pourquoi ses victimes ne se laisser pas faire tout simplement ? C'était pourtant pas difficile, cela faisait des siècles que les autres jeunes femmes avaient su se laisser tuer sans rien dire !
- Bon Albert je t'aime bien, et bon sang tu es un vampire ! C'est incroyable ! Je ne savais même pas que ça existait. Alors si on négociait ?
- Tu ne vas pas utiliser une croix ou de l'ail sur moi ?
- Non. En échanges je t'aide un peu. Je t'explique l'époque, te trouve des vêtements plus discrets. Et si tu veux bien me parler un peu plus des vampires, j'accepte même de t'aider à trouver des victimes.
Albert n'avait pas le choix. Il n'avait pas envie de rencontrer une croix ou de l'ail. Et puis il appréciait Carmina, il n'aurait pas aimé la tuer alors qu'elle était la première avec qui il nouait un lien à cette époque. Enfin sa proposition était terriblement alléchante.
- J'accepte ! Veux-tu que je te prête serment ou que je signe un contrat ?
Elle semblait amusée à cette idée :
- Déjà plus personne ne prête serment de nos jours. Un contrat ça fait très, trop professionnel. Ta parole me suffira ! Maintenant reviens demain ! T'as l'air d'avoir trop faim pour rester dans la même pièce que moi.
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