" Je suis certain que la personne derrière le grillage est Nicolas. "

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- Raconte moi, me demanda calmement Carter, sans une once de jugement dans la voix, ce qui m'aida à me confier.

Sa présence était tellement apaisante que je m'étais déjà calmée de ma semi crise de panique qui s'était produite quelques minutes plus tôt. Je le regardai un instant et il me répondit par un sourire.

- Je vois les morts durant la journée. Je les entends me parler et je les sens me toucher. Je deviens folle, répétai-je.

J'observai sa réaction mais en guise de réponse, il me serra dans ses bras. Il avait dû percevoir à quel point cela me terrifiait et il tentait de me réconforter à l'aide de son contact. Et pour être honnête, cela fonctionnait. Carter était le meilleur remède pour tous les maux.

- Tu es sûre que cette capacité n'est pas liée à ton pouvoir de Tezca quelque chose ?

Je n'y avais même pas pensé. J'avais seulement pensé à mes possibles troubles psychiatriques alors que ce qu'il disait avait du sens.

- Si les morts pouvaient te rendre visite en rêve, pourquoi ne pourrait-il pas te rendre visite lorsque tu es éveillée ?

Il avait raison, c'était l'explication la plus cohérente. Cela voudrait dire que je devais en parler avec Andrew. Tout ce qui me concernait de nouveau, je devais le signaler à Andrew. Carter proposa de changer de sujet et j'approuvai l'idée.

Il resta toute la soirée à parler de tout et de rien, comme on en avait l'habitude autrefois. Cela me changea les idées et les fantômes étaient à présent de l'histoire ancienne. Je jouais avec sa main pendant qu'il me racontait une anecdote de son enfance. 

Je ne cesserai de m'émerveiller devant le fait qu'il était de nouveau parmi nous, en pleine forme, sain et sauf. Je pourrai l'écouter parler pendant des heures tellement le son de sa voix m'avait manqué.

Au bout de quelques heures, il décida qu'il était temps pour lui d'aller se coucher et j'acquiesçai. Il s'en alla par la fenêtre, comme il en avait pris l'habitude auparavant.

Je m'allongeai dans mon lit et je me mis à réfléchir. Et si j'arrivais réellement à voir les morts grâce à mes pouvoirs ? Cela signifierait qu'ils n'étaient pas le fruit de mon imagination mais que j'avais la capacité de les invoquer. Je pourrais alors invoquer ma mère ou Hannah autant de fois que je le voudrai. L'idée de pouvoir revoir ma mère et mon amie m'emplit de joie et je m'endormis paisiblement.

*****

- Réveille toi, chuchota quelqu'un à mon oreille.

Je n'émergeai cependant pas à mon sommeil. Le visage d'Hannah apparut alors brusquement dans mon esprit pour me crier de me réveiller, ce que je fis en sursaut. Ces fantômes devenaient de plus en plus oppressants. Si même Hannah se mettait à me faire peur, j'allais réellement devenir folle. Zara me suffisait amplement pour booster mon adrénaline dès que je la voyais.

Pourquoi devais-je me réveiller ? L'image d'Hannah apparut furtivement au niveau de ma fenêtre et je m'en approchai, pour tenter de comprendre ce qu'elle essayait de me dire. Je distinguai au loin un garçon, ça devait être un élève de l'école, cependant, il avait l'air de se cacher derrière un arbre. Pourquoi se cachait-il ?

Je tentai de voir ce qu'il était en train d'espionner, et je manquais de m'étouffer en voyant un autre garçon, de dos, en train de discuter avec quelqu'un à travers la grille de l'école. Était-ce le traître ?

J'essayai d'entrer dans la tête du garçon qui parlait mais il était bien trop loin pour que je puisse entendre quoi que ce soit. Je tentais alors la même chose avec le garçon qui se cachait et je réussis à entendre ses pensées, bien qu'il me fallut un énorme effort de concentration.

"Je suis certain que la personne derrière le grillage est Nicolas. Il a cet anneau noir autour de l'oeil. Mais qui est la personne en face de lui ? Il a des cheveux noirs mais c'est tout ce que j'arrive à distinguer, il est de dos et trop loin pour que je puisse l'identifier. Il faudrait que je me rapproche mais Nicolas va me remarquer, il me tuerait sur le champ."

Je n'eus pas besoin d'en entendre plus pour savoir qu'il s'agissait du traître qui informait régulièrement Nicolas. Il fallait que j'aille voir qui c'était. Je sortis en trombe de ma chambre. Il devait être deux heures du matin d'après le positionnement de la lune. Il faisait encore nuit. Il y avait un pleine lune et c'était pour cette raison que j'avais pu distinguer les silhouettes au loin.

Je descendis les escaliers sans faire attention au bruit que je pouvais faire, plus préoccupée par ce traître que j'allais démasquer plutôt que par le fait de réveiller l'ensemble des élèves et professeurs qui devaient dormir pronfondément à l'heure qu'il était. Je sortis alors dans l'air frais de la nuit et je me mis à courir jusqu'au grillage de l'école mais il était trop tard, il n'y avait plus personne, j'avais mis trop de temps.

Je jurai intérieurement, j'avais raté une chance inouïe de démasquer la taupe. Je bouillonnai de rage. Il fallait que je retrouve le garçon qui s'était caché pour lire tous les souvenirs qu'il avait pu avoir de cette soirée, tous les indices.

Je retournai dans ma chambre, bredouille. Hannah m'avait tout de même aidé. J'étais certaine qu'elle savait qui était le traître, alors pourquoi ne me le disait-elle pas directement ?

- Hannah ! Si tu m'entends, dis moi qui est le traître !

Aucun son ne se fit entendre, elle avait pris le large. Lorsque je perdis espoir, un bruit se fit entendre derrière moi et je me retournai brusquement. Ma mère me faisait face. Elle n'avait plus sa gorge tranchée comme dans mes rêves. Elle était normale, comme je l'avais toujours connu.

Je ne pus empêcher les larmes de couler le long de mes joues. J'étais censée aller la voir aujourd'hui, au cimetière, pour tendre un piège au traître qui semblait avoir mordu d'après ce que j'avais vu cette nuit.

Je la pris dans mes bras et je remerciai ma magie de pouvoir la sentir comme si elle était réellement présente dans ma chambre.

- Les plus grosses trahisons viennent des personnes en qui nous avons totale confiance, de ceux que nous aimons, de ce que nous soupçonnerons jamais, prononça ma mère en caressant mes cheveux. Fais attention à toi Aly.

Alors que j'allais la questionner davantage, elle disparut sans prévenir, comme si elle n'avait été qu'une illusion. Ou peut-être était-ce le cas. Plutôt que de me recoucher, je décidai d'étudier un peu. Étudier me semblait être la seule chose normale que j'avais gardé de ma vie antérieure suite à la découverte de mes pouvoirs.

Je savais que je n'allais pas fermer l'oeil du reste de la nuit, j'aurai cogité encore et encore sur cette personne que j'avais vu et sur la phrase de ma mère, typique des rêves que j'avais l'habitude de faire auparavant.

*****

Le soleil se leva rapidement car nous nous rapprochions de l'été alors les journées commençaient plus tôt. On avait rendez-vous dans le bureau d'Andrew pour aller visiter ma mère.

À l'heure convenue, je descendis donc pour rejoindre ceux qui m'accompagneraient durant cette expédition. Carter et Armande étaient déjà présents dans la pièce. Andrew expliqua quelques consignes de sécurité comme ne jamais rester seul et toujours garder un oeil sur ma personne mais cela allait de soi.

On s'en alla ensuite à bord d'une voiture, Andrew au volant, et il démarra. Je ne savais pas d'où il pouvait sortir cet engin mais je me retenus de poser des questions. Les grilles s'ouvrirent à notre passage pour la première fois depuis des lustres, cette même grille où le traître avait communiqué avec Nicolas quelques heures plus tôt. 

Gabriel nous accompagnait aussi, assis sur le siège passager. La voiture était remplie et j'étais en sandwich entre Carter à ma droite et Armande à ma gauche.

On mit plusieurs heures à atteindre la ville de mon enfance où ma mère avait été enterrée. Durant le trajet, j'avais mis au courant le groupe de ce qui s'était passé cette nuit. Nicolas était sûrement au courant que j'allais me rendre là-bas alors on devait être doublement vigilants. 

Mais on devait être sûr qu'il se pointerait pour affirmer que le traître faisait partie des cours du soir alors j'étais obligée d'aller au cimetière pour l'appater.

Le cimetière apparut dans le champ de la vitre. Nous étions arrivés. Je pris une grande inspiration et je descendis du véhicule lorsqu'il fut arrêté. Andrew s'était renseigné pour savoir où ma mère avait été enterré. Il me tendit alors le morceau de papier où était inscrit le numéro de sa tombe.

Je traversai les différentes allées et je finis devant l'endroit où reposait son corps. Je m'agenouillai pour me recueillir, bien qua je savais que son âme ne reposait pas ici étant donné qu'elle pouvait se déplacer jusque dans ma chambre pour me parler. 

On n'eut pas à attendre bien longtemps avant que des sbires de Nicolas entrèrent à leur tour dans le cimetière. Il fallait croire que mon géniteur n'était pas très futé. Il tombait dans tous les pièges.

Je me relevai alors. En réalité, je n'avais pas besoin de me recueillir car je pouvais lui demander de venir me voir quand je le souhaitais grâce à mes pouvoirs. J'étais plutôt détendue, contrairement à ce que j'avais imaginé. La nouvelle que je pouvais invoquer les morts avec qui j'étais proche en était une bonne pour une fois. Les deux groupes se firent face rapidement.

- Que faites-vous ici ? demanda Andrew, bien qu'il connaissait pertinemment la réponse.

- Pour la fille, répondit un des cinq hommes.

Nous étions à nombre égal. Un des sbires de Nicolas attaqua en premier en lançant un sortilège, pas vraiment effrayant, ressemblant aux boules de magie que je lançais. Armande riposta et l'homme qui avait eu l'affront d'attaquer brûla sur place. Nicolas avait-il envoyé les mages les moins compétents de son armée ?

Je vis alors une dizaine d'hommes sortir de la lisière de la forêt qui bordait le cimetière. Je retirai ce que j'avais dit. Andrew attaqua les quatre membres restant en face de nous avant que l'autre groupe n'arrive.

C'était la première fois que je le voyais utiliser la magie. Je ne savais même pas quel Dieu lui était attribué. Mais lorsque des éclairs jaillirent de ses mains, je devinais rapidement qu'il était lié à Zeus. Cela ne m'étonnait pas, c'était le Dieu qui lui convenait le plus.

Sinon, nous avions la certitude que le traître faisait partie des cours du soir. Le laps de temps était trop court pour que l'information se soit propagée entre les élèves car on avait fait l'annonce la veille, à la fin du cours du soir, donc quand tous les autres élèves dormaient.

Mon idée avait fonctionné, on avait restreint le champ de recherche. Mais je ne savais pas si cette information me plaisait ou non. J'étais heureuse d'avoir pu restreindre les possibilités mais je ne l'étais pas car s'il faisait partie des cours du soir, il allait être compliqué de monter un plan d'attaque sans qu'il soit au courant.

Je repris mes esprits. Le combat faisait rage autour de moi mais je savais qu'ils n'avaient pas besoin de moi. J'avais autour de moi les personnes les plus entraînés de l'école. Je me savais en sécurité avec eux à mes côtés. Ma mère m'apparut alors encore, comme une douce hallucination. Je regardai mes amis mais ils n'avaient définitivement pas besoin de mon aide, ils avaient l'avantage.

Ma mère me faisait signe de la suivre alors je le fis. Elle me fit traverser les allées du cimetière, slalomant entre les tombes jusqu'à un coin reculé où je ne voyais plus le combat. Elle pointa du doigt une tombe particulière. La pierre avait noirci, elle devait être vieille.

Je me penchais sur l'écriteau inscrit sur la pierre. "Athanatos Kostas XXX-666". J'écarquillai les yeux et je regardai ma mère incrédule. Que faisait sa tombe dans ma ville de naissance ? Était-ce une simple coïncidence ? Je ne comprenais rien. 

Comment était-ce possible ? N'avait-il pas vécu toute sa vie en Grèce ? Je ne connaissais pas tous les détails car c'était Rosalie qui m'avait fait un bref résumé de ce qu'il y avait écrit dans le journal. J'avais du passer à côté d'informations capitales.

- Ouvre la.

Mes yeux s'agrandirent encore plus. Pourquoi ma mère me demandait-elle d'ouvrir une tombe ? C'était immoral. Il méritait d'être en paix. Elle me pressa de le faire et je m'exécutais. Si ma mère, fantôme, me disait de le faire, il y avait une bonne raison, je lui faisais confiance. 

Je mis donc mon sens moral de côté, pris donc mon courage à deux mains et je déplaçai le couvercle de la pierre tombale pour ouvrir la tombe. Mon Dieu, qu'étais-je en train de faire ? Cet acte n'est-il pas puni par la loi ? Je tombais sur un cercueil en bois en très mauvais état. Je l'ouvris à nouveau et je tombais sur un tas de poussière.

- Salut Athanatos, je suis Alyssia. Je suis désolée de te déranger dans ton profond sommeil, mais il parait que je dois regarder ta tombe.

J'utilisais ma magie pour éclairer au mieux l'intérieur du cercueil. Quelque chose apparut alors soudainement, comme les fantômes, cela ressemblait à une illusion. Un arc était posé au-dessus du tas de poussière. Il semblait être tout fait d'or. Il étincelait sous ma magie.

Je regardai ma mère, incrédule, et elle me fit signe de le prendre. Je ne me fis pas prier. C'était comme si cette arme m'appelait à elle. Elle était magnifique et étincelait de mille feux. Je refermais sûrement la tombe d'Athanatos après m'être excusée une nouvelle fois.

Je retournai sur le champ de bataille et je remarquai que le combat n'était pas fini. Les sbires de Nicolas étaient peut-être un peu plus résistants que ce que je pensais. Les attaques continuaient de fuser de toute part, il ne restait que six hommes debout dans le camp adverse. C'était le moment d'essayer ma nouvelle arme.

Je plaçai l'arc dans mes mains et il sembla épouser parfaitement mes doigts, comme s'il avait été fait sur mesure, comme s'il avait attendu pendant tous ces siècles sous terre que je vienne le chercher. Mais après rapide réflexion, il devait s'adapter à ceux possédant sa magie. Il devait être modifiable, sans pour autant perdre de son efficacité.

Cet arc avait quelque chose de spécial, je le savais. J'invoquais une flèche qui se transforma en flèche dorée dès l'instant où je la positionnais sur l'arc, pour s'assortir avec, comme si elle avait acquis les pouvoirs de l'arc en le touchant. Cette arme était merveilleuse.

Je visais calmement, comme me l'avait appris Carter quelques mois auparavant. J'étais en retrait, personne ne faisait attention à moi. Lorsque je fus prête, je lâchais la corde que j'avais tendu et la flèche partir à une vitesse incroyable. Elle se divisa en six flèches après avoir parcouru quelques mètres et ces six flèches allèrent tout droit se loger dans le coeur des six ennemis qui s'écroulèrent sur le sol.

L'arme que j'avais trouvé dans la tombe d'Athanatos était donc une de ces armes dont nous avions parlé en cours : une arme qui était capable de décupler mes pouvoirs. J'avais abandonné l'idée d'en trouver une car ma magie était bien trop rare mais visiblement, Athanatos avait réussi à en fabriquer une.

J'avais un nouvel avantage contre Nicolas. Nous allions gagner cette guerre, j'en étais certaine, les Dieux étaient avec moi.