Il la dévisagea un instant avant de se décider à lui parler, elle était assise seule dans le foyer. Elle se tenait de travers et ne semblait pas s'en soucier. Elle dégageait cette impression de nonchalance, elle était désinvolte et n'avait pas honte de ne rien faire, plantée sur une chaise pas droite. Il se dirigea donc vers elle parce que lui s'ennuyait et qu'il la trouvait assez décalée pour mériter son attention. Ce qui l'étonna fut qu'elle attendit qu'il dise quelque chose sans jamais lui lancer de regards interrogateurs, elle patientait, calme.

– Je parie que tu ne devineras jamais comment je m'appelle, lâcha-t-il d'un ton charmeur.

– C'est cliché comme technique de drague.

Elle le fixa des ses yeux noirs. C'était assez impressionnant, on ne pouvait distinguer ses pupilles de ses iris sombres et cela rendait la lecture de son âme difficile. Cachait-elle un horrible secret ou rien d'autre qu'une incroyable répartie ?

– Qui a dit que je te draguais ? Tu m'intrigue c'est tout. Si tu es séduite, c'est ton problème, ajouta-t-il haussant les épaules.

Elle secoua la tête et se leva pour être à sa hauteur.

– J'apprécie ta franchise. Alors qu'ai-je fait de si particulier à ton avis ? Est-ce parce que je ressemble à une sorcière ?

Gaïus fronça les sourcils confus. Elle désigna alors sa chevelure de feu, lui assurant qu'on lui avait déjà fait le coup plusieurs fois, avant de reprendre la parole :

– Je vais sûrement te décevoir mais il n'y a rien de surprenant me concernant, désolée Gaïus.

– Je suis sûr que tu...

Il marqua un temps d'arrêt, réfléchissant à ses mots, puis souffla, subjugué :

– Attends, comment t'as trouvé ?

– T'es le seul élève de terminal, voire même du lycée et de la ville toute entière à porter un prénom aussi moche, expliqua-t-elle comme si c'était évident.

C'était bien évidemment faux. Il ne connaissait pas tout le monde mais il avait cette habitude de soutenir ceux qui essuyaient autant de moqueries et de regard en biais que lui, comme maudis par leurs propres parents. Il aimait les noms étranges qu'avaient par exemple Rhéane, Achille, Aliénor ou encore Mélodie se demandant pourquoi on critiquait de toutes parts ces êtres uniques autant par leurs personnalités que leurs appellations. Il se sentait moins banal parce qu'il n'y avait que sur son nom que l'on s'attardait, hésitait. Hors de question d'être un vulgaire Lucas, Victor ou Mathieu !

Aussi, cela avait ses avantages. Il avait parfois l'impression de former une sorte de club tacite avec ceux qui portaient le même fardeau, s'échangeant des sourires compréhensifs dans les couloirs, si bien que s'il l'avait souhaité, il aurait pu lui lister une bonne liste de ses connaissances en contre-exemple.

N'ayant pas l'envie de perdre pour la énième fois son temps à expliquer son point de vue sur le sujet, il laissa glisser la remarque lâchant tout de même une de ses répliques légendaires :

– Et toi donc, avec ton prénom masculin ! Franchement, t'es bien la seule à bouffer ces saloperies de cookies diaboliques, Alexis.

Elle croqua provocante dans un de ses gâteau aux raisins secs accompagnant ce geste d'un petit miam sonore. Elle lécha ensuite la commisire de ses lèvres pour en retirer les miettes qui s'y étaient déposées.

– Je n'aime pas vraiment le chocolat.

– Okay, je rectifie ce que j'ai dis: est-ce que t'es une sorcière ?