
Deux
Il retrouva Alexis à sa place habituelle en train de colorer les carrés de sa copie double au stabilo. Il avait d'abord pensé qu'elle possédait un talent inouï pour le dessin et que c'était ce qui la penchait, concentrée, sur cette feuille, cependant, à part si l'on considérait ses gribouillages comme de l'art abstrait, elle ne faisait rien de plus qu'une fresque digne des plus assidus maternelles. Cette activité enfantine lui arracha un sourire et il se positionna face à elle prêt à commencer une conversation hors-norme.
– Pourquoi de toutes les chaises qui existent tu choisis toujours celle qui est bancale ?
– Bonjour à toi aussi.
Il mit ses mains sur ses hanches ce qui était signe qu'il ne plaisantait pas et attendait une réponse. Ce comportement puérile la fit plus glousser qu'autre chose.
– C'est injuste de la rejeter seulement parce qu'elle est handicapée. Le physique ne fait pas tout ! s'indigna-t-elle faussement.
– Elle te donne l'air idiote et terriblement mal à l'aise, affirma-t-il toujours dans la même position ridicule.
– Et maintenant tu critiques mes déficiences mentales... J'en suis outrée ! s'écria-t-elle d'un air dramatique.
Il explosa de rire puis s'installa à sa table et souleva la feuille de coloriages sur laquelle le nom Alexis Thomas ornait la marge. Il supposa qu'elle avait prévu de travailler avant de se mettre à remplir son devoir de couleurs fluorescentes. Il se tourna un instant vers elle, un sourire narquois sur le visage.
– Excuse-moi, j'admets que tu n'en avais certainement aucune jusque là malgré ton étrange façon de... travailler ? Quoique je comprends que tu aies du mal à te concentrer puisque tu ne penses qu'au magnifique spécimen que je suis depuis qu'on s'est rencontrés.
Il lui adressa un clin d'œil ravageur, fier de lui tandis qu'elle soupirait.
– Tu veux dire un mec plutôt...
– Pas mal ? Magnifique ? Canon ?
– Je pensais à potable mais si ça te fait plaisir.
La bouche de Gaïus se mua en une moue boudeuse destinée à le rendre irrésistible... ce qui n'eut évidement pas l'effet escompté.
– On dirait un babouin, répliqua-t-elle seulement, c'est moche.
Il s'apprêtait à se lever déçu, amusé et fasciné à la fois par les réactions de celle qu'il pouvait appeler sa crush, lorsqu'elle agrippa son poignet et se pencha vers lui pour lui chuchoter à l'oreille :
– Je t'ai déjà dit que je rêvais de passer mon après-midi avec un hybride mi-beau-gosse-au prénom-bizarre, mi-singe ?
Est-ce que cela signifiait qu'il plaisait assez à Alexis pour qu'elle lui propose un rencard ? Avant qu'il ne puisse répondre quoique ce soit, elle précisa:
– On se retrouve au conservatoire à quatorze heures sept, si t'arrive à huit saches que tu rateras une délicieuse minute à me regarder souffler dans une trompette.
– Je ne manquerai ça pour rien au monde, et si je viens plus tôt ?
– Je peux te confier un secret ?
Il acquiesça devant l'air sérieux de la rousse.
– Je m'en fiche, par contre ne t'avise pas de me poser un lapin.
Il se promit mentalement qu'il ne le ferait pas, elle l'avait convaincu si facilement de lui donner sa chance. On lui avait pourtant dit que les relations étaient compliquées, que l'Homme même détruisait et brisant tout sur son passage. Il paraîtrait qu'on pouvait même y perdre son cœur. Pourtant, lui ne voyait aucun problème la concernant et il voulait essayer. Le fait qu'elle soit aussi parfaite en apparence était bon signe, non ? Sa paranoïa l'envahit un instant, puis ses doutes s'estompèrent. Il avait passé trop de temps à observer les autres, et voilà qu'enfin venait son tour. Il était décidé à se lancer pour le meilleur et peut être qu'il saurait éviter le pire.
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