Chapitre 35 (partie 2) : Et maths
Soudain, un « pop » retentit dans le bureau. Drago fit volte face, faisant automatiquement pivoter Hermione derrière son dos. Mais, à son grand regret, cette dernière revint se placer à sa hauteur, baguette tendue. C'est alors que son cœur loupa un battement quand il aperçut le Mangemort qui venait de transplaner.
- Ah... sourit-elle en les fixant. J'ai trouvé nos tourtereaux, les amis...
A peine eut-elle fini sa phrase que cinq autres Mangemort transplanèrent dans la pièce. Seulement, Drago ne s'attendait pas à ce que deux d'entre eux apparaissent dans le dos d'Hermione. Il eut tout juste le temps d'entendre son cri de surprise avant qu'elle ne s'évapore d'un seul coup, emmenée par les Mangemorts qui avaient de nouveau transplané.
- Où est-elle ? s'écria alors Drago, perdant soudain tout contrôle. Ramenez-là tout de suite !
- Doucement, mon mignon petit Drago, chantonna Bellatrix en s'approchant gracieusement.
Elle posa alors une main douce sur la joue du jeune homme dont la mâchoire ne cessait de se contracter de colère.
- Que tu es devenu beau, mon cher neveu, s'émerveilla-t-elle. Dommage que ce soit cette Sang-de-Bourbe qui en profite, par contre. Surtout quand on sait qu'elle a autrefois fait bobo à ton petit cœur, n'est-ce pas ?
Drago attrapa la main étrangère et ce fut à son tour d'approcher dangereusement.
- C'est moi qui ferais mal au tien si tu touches à un seul de ses cheveux, chère tante...
Celle-ci tira un rictus amusé. Drago savait qu'il ne pouvait rien tenter tant qu'ils détenaient Hermione, et ce sentiment d'impuissance le rendait malade.
- Je croyais qu'on était en trêve, dit-il alors.
- Pour les ennemis, oui, répondit-elle moins aimablement. Pas pour les traîtres. Apporte-nous le collier, Drago, et on te rend ta petite copine Granger.
- Vous n'obtiendrez absolument rien de moi tant que je ne serai pas sûr qu'elle est saine et sauve, trancha-t-il.
- Elle mourra si tu n'obéis pas, insista-t-elle en se regardant négligemment les ongles.
- Et je n'aurai alors plus aucune raison de vous donner le collier, répliqua-t-il sur le même ton.
Elle le toisa du regard un instant, puis tira un énième sourire.
- Ta mère faisait preuve de la même détermination lorsqu'il s'agissait de ta protection. Je regrette beaucoup sa mort, tu sais. Mais toi et moi savons parfaitement qui en est le coupable, n'est-ce pas ?
Une boule se coinça en travers de la gorge de Drago, tandis qu'il regardait sans un mot Bellatrix faire un signe au Mangemort. Ce dernier transplana, puis réapparut quelques secondes plus tard avec Hermione. Drago sentit aussitôt son cœur redémarrer à plein moteur, et il fit un pas en avant. Mais Bellatrix s'interposa.
- Non, non, non... chanta-t-elle en balançant sa tête de droite à gauche comme une enfant. Toi, tu viens avec tantine...
- Ne leur donne pas ! s'écria alors Hermione. Ne leur donne surtout pas, Drago !
Une forte gifle la fit taire, et Drago reçut le sortilège doloris aussitôt qu'il tenta d'approcher.
- Tu es si mignon ! s'extasia Bellatrix en lui adressant un regard doux. Dommage que tu n'aies pas attaché autant d'importance à la protection de ton ami Blaise...
Elle s'avança alors vers Hermione et lui sourit gentiment, avant de frôler son index le long de la joue de la jeune femme.
- Mais, une fois de plus, poursuivit-elle, nous savons tous deux à qui revient la faute...
- Ne la touche pas ! cracha-t-il malgré la douleur.
- Laissez-là s'en aller, dit alors Bellatrix.
Les Mangemorts obéirent, et lâchèrent Hermione qui s'empressa de courir vers Drago allongé au sol. Mais elle fut tirée en arrière au moment où elle allait toucher le jeune homme.
- Ne t'en fais pas pour lui, dit la voix grave du Mangemort qui la mit dehors. On va en prendre soin...
Elle cessa alors de se débattre, et, contre toute attente, s'enfuit même en courant.
- Mieux vaut pour elle qu'elle ne tente rien de stupide, la pauvre petite, soupira Bellatrix. Tu ne pourras pas nous reprocher de ne pas avoir essayer de la tenir à l'écart.
La douleur cessa, et Drago fut contraint de se relever. Il n'avait plus d'autres choix que de les suivre, à présent, car toute tentative de fuite mettrait aussitôt Hermione en danger, où qu'elle soit. Il fit donc tout ce qu'on lui ordonna de faire, en commençant par donner sa baguette magique. Quelques minutes plus tard, il transplanait avec Bellatrix à l'extérieur, entouré de trois autres Mangemorts. Ils avaient atterri près de la cabane d'Hagrid, et marchaient à présent en direction de la Forêt Interdite. La nuit était définitivement tombée, plus sombre que jamais, et il était maintenant difficile d'apercevoir les alentours.
Drago était bien conscient de ne jamais ressortir de cet forêt vivant, et aussi surprenant que cela pouvait paraître, il avait peur... Cinq nouveaux Mangemorts transplanèrent pour l'escorter jusque dans les bois, et Drago fut presque flatté de nécessiter autant de précaution.
Alors qu'ils allaient tous pénétrer la lisière de la forêt, une secousse fit trembler la terre. Puis une autre. Les Mangemorts se stoppèrent, prudents. Encore une vibration dans le sol, plus proche. C'est alors que des voix mélodieuses se mirent à chanter, promenant leur symphonie à travers l'immense enceinte de Poudlard. Tandis que les sirènes maintenait leur musique, les pas de Géants continuaient de marteler le sol comme des tremblement de terre, se rapprochant chaque fois un peu plus de la forêt.
- Mais qu'est-ce qu'il se passe, bon sang ! s'énerva un Mangemort dont la voix trahissait la panique naissante.
Apparut alors les trois énormes Géants de Russie survivants qui se dirigeaient vers eux. Tous les Mangemorts plissèrent les yeux pour mieux distinguer ce qu'était la longue et large masse noire qui marchait aux côtés des monstres. Le chant des sirènes devenait de plus en plus aigu à l'oreille au fur et à mesure que la distance entre les deux camps diminuait.
- Ce sont eux, souffla alors Bellatrix. C'est l'Ordre...
Drago les discerna à son tour : des centaines de sorciers et sorcières, tous survivants et combattants pour l'Ordre du Phoenix, avançaient aux côtés des Géants, leur patronus en éclaireur. La centaine d'animaux argentée qui entourait la véritable armée créait une lumière presque angélique dans la nuit noire, et laissait entrevoir les visages déterminés des sorciers. A leur tête, Hermione. Sa voix s'éleva, claire et ferme :
- Nous sommes prêts à nous battre !
Les Mangemorts s'échangèrent des regards incertains, puis l'un d'entre eux finit par répondre :
- Nos clans sont en paix pour une heure entière, et elle n'est pas terminée ! Si vous décidez de vous en prendre à l'un des nôtres, sachez que vous mettez fin à la trêve et que les combats reprendront !
Ce ne fut pas Hermione qui répondit, cette fois, mais une voix tout aussi familière.
- Oh, mais nous n'avons rien décidé du tout ! lança Arthur Weasley. Il se trouve que c'est vous qui avez mis fin à la trêve en vous en prenant à l'un des nôtres !
Drago sentit aussitôt les regard étonnés des Mangemorts se poser sur lui. Même Bellatrix ne cachait pas sa surprise. Quant à Drago, il était le plus le stupéfait de tous.
- Rendez-nous Drago Malefoy ! cria la voix sèche du professeur McGonagall. Ou bien c'est nous qui venons le chercher !
Drago comprit aisément l'embarras des Mangemorts ; leur Maitre avait ordonné une trêve, et eux, ses propres sujets, avaient raté l'enlèvement censé rester discret, entrainant non seulement la reprise de la guerre, mais aussi l'humiliation du Lord Noir qui s'était un peu plus tôt prétendu juste et clément.
- Que fait-on, Bella ? pressa l'un.
- Peut-être devrions-nous rendre le garçon ? proposa un autre.
- Bien sûr que non, pauvre abruti ! rétorqua Bellatrix. Ça ne ferait rien de plus que repousser la guerre de toute façon inévitable ! Et le Maitre doit connaître notre erreur ! N'as-tu donc aucun respect envers sa grande personne pour songer à lui mentir ainsi ? Non seulement nous allons nous battre, mais nous allons garder Drago et ramener le collier !
En même temps qu'elle prononçait ces paroles de guerre, des pairs d'yeux s'animèrent à l'orée des bois, et des grognements sourds s'élevèrent. L'armée de Voldemort, vraisemblablement impatiente de reprendre le combat, se tenait dans l'ombre, juste à la frontière de la Forêt Interdite, parée à bondir au moindre signal.
La tension entre des les deux armées étaient palpable. Seule la complainte aigüe des êtres de l'eau résonnait dans la nuit noire, tel un chant funèbre prédisant le retour proche de la Mort qui observait patiemment son œuvre se poursuivre.
Les Mangemorts n'eurent pas besoin d'annoncer leur refus de céder, tout comme l'Ordre n'eut pas besoin d'une réponse pour comprendre que la guerre venait d'être officiellement déclarée réouverte. Et c'est dans un même et grand mouvement d'ensemble que les deux légions chargèrent à l'ennemi ; les loups surgirent des fourrés dans un concert d'aboiements terrifiants, suivis de près par les centaures qui galopaient tout en brandissant leurs arcs aux flèches tranchantes. Les harpies jaillirent brusquement dans les airs, déployant leurs ailes de façon menaçante, prêtes à décimer tous ceux qui se trouveraient sur leur chemin. Quant aux Trolls, ils n'étaient plus que quatre survivants et ratatinaient le sol de leurs puissants pieds, marchant aux côtés des Gobelins et araignées qui avaient vite compris l'avantage de combattre aux côtés de tels monstres. Enfin, les Détraqueurs qui n'avaient pas pris la fuite fasse à l'armée de patronus survolaient lentement le sol en espérant installer un climat aussi froid que possible, leur lourde cagoule noire rabattue sur leur visage inexistant.
L'Ordre du Phoenix, principalement composé de sorciers, courait à toute allure vers la forêt, baguette tendue en avant, et poussant des cris de guerre. Ces créatures ne leur faisaient pas peur, ni même les Mangemorts, d'ailleurs. Oui, leur armée avait été littéralement anéantie, oui, ils n'avaient quasiment aucune chance de l'emporter sur l'ennemi, et oui, chacun savait parfaitement que ce n'était qu'une question de temps avant qu'ils ne finissent par tomber. Oui, ils allaient mourir. Mais ils avaient leur fierté qui courait à leur côté, leur honneur ainsi que leur dignité qui les accompagnaient fidèlement jusque dans les antres de la mort. Et ça, c'étaient des valeurs qui méritaient qu'on se batte, qu'on sacrifie sa vie pour la conquête d'une liberté qui devenait accessible aussitôt qu'on réalisait que la prison n'était rien d'autre que sa propre peur. Même si la victoire du bien était ici illusoire, la tentative d'y parvenir restait elle, gravée à jamais dans l'histoire.
La rencontre des deux clans provoqua comme une onde de choc qui fit gronder la terre. Les griffes écorchèrent, les crocs se plantèrent, les sortilèges explosèrent, les coups s'échangèrent et la douce mélodie des sirène fissurait l'air froid de la nuit.
- Couvrez Drago ! hurla Bellatrix aux Mangemorts tandis qu'elle se faisait assaillir par les aurors.
Impuissant sans sa baguette magique, Drago tenta tout de même de repousser à coups de poings les deux Mangemorts qui s'approchèrent. Si le premier reçut une droite en pleine mâchoire, le second, en revanche, prit ses précautions et utilisa la pire des magies pour le maîtriser :
- Impero !
Aussitôt, le regard de Drago devint complètement vide. Attentif aux moindres instructions, il restait planté là, à peine conscient de ce qui se passait autour de lui.
- Approche !
Drago obéit sans réfléchir, ses jambes désormais à l'écoute d'un autre maître que lui.
- Maintenant suis-moi ! On va aller donner le collier au Maître, t'as compris ? Dépêche-toi !
Les pupilles du jeune homme vrillèrent l'espace d'une seconde presque imperceptible. Drago avança à pas lents vers le Mangemort, tel un zombi. C'est alors que la voix alarmante de Bellatrix s'écria :
- Aucune magie n'est possible sur le collier, sombre idiot ! Recule-toi, il joue la comédie !
Le visage du Mangemort se décomposa, et il eut tout juste le temps d'apercevoir un sourire en coin s'étirer avant de tomber sous la puissance du poing. Par chance, c'était ce Mangemort qui gardait sa baguette magique, et Drago la récupéra vivement. Bellatrix tenta de l'en empêcher, mais trop tard. Le Serpentard, qui avait repris le contrôle de ses pensées à l'instant même où le mot « collier » avait été prononcé, repoussa le stupefix qu'elle lui lança. Lorsqu'il voulu attaquer à son tour, elle avait transplané.
- Tu ne t'en tireras pas comme ça ! fulmina Drago, fermement décidé à la traquer.
Il s'enfonça dans les bois malgré les appels d'Hermione qu'il venait d'entendre. Bellatrix était quelque part, dans la forêt, et elle l'attendait. Il le savait. Drago continua de courir, sourd aux avertissements d'Hermione qui le suppliait de revenir. Il l'entendait même courir derrière lui, mais ne s'arrêta pas. Il avait quelque chose à terminer, et personne ne l'en empêcherait. Il fallait qu'elle arrête de le suivre, ce n'était pas son combat et c'était trop dangereux pour elle. Mais, évidemment, elle ne l'écouterait pas et il se contenta donc de continuer à courir en espérant la semer. Une fois qu'il se fut suffisamment enfoncé dans les bois, tant que la couche des arbres ne laissait même plus entrevoir la moindre étoile, Drago s'arrêta, la respiration courte. Il était difficile de percevoir autre chose que les ombres immenses des arbres, mais Drago comptait bien plus sur son sens de l'ouïe en cet instant. D'ailleurs, il constata avec satisfaction qu'Hermione ne le suivait plus. Il espérait qu'elle ne se soit pas perdue, bien que lui-même fut incapable d'évaluer la distance parcourue.
- Bellatrix ! rugit-il alors, sentant sa baguette lui démanger les doigts. Bellatrix ! Montre-toi ! Ou bien alors es-tu partie te réfugier sous la cape de ton cher Maître ?
Un rire excentrique résonna autour de lui. Drago pivotait sur lui-même, essayant de repérer précisément l'endroit d'où ça venait.
- Alors quoi, ma tante ? appela-t-il d'un ton froid. Tu as peur de te mesurer à ton neveu adoré ?
L'éclat de rire s'intensifia, terrifiant. La voix de Bellatrix s'éleva alors de nulle part, résonnant toujours en écho.
- Je crains plutôt de lui faire du mal... Ta mère n'aurait pas apprécié que je m'en prenne à son petit amour.
- Laisse-là en dehors de ça ! s'emporta Drago. Elle n'est plus là pour en juger, et ça à cause de vous tous ! Sors de ta cachette, à présent !
Il sentit soudain sa présence, et se retourna prudemment. Elle se tenait là, la peau blanche éclatante dans l'obscurité, et un sourire démoniaque étirant ses lèvres. Étrangement, elle ne tenait pas sa baguette ; les deux mains jointes derrière le dos, elle se balançait paresseusement de droite à gauche à la façon d'une petite fille timide.
- Je suis là, souffla-t-elle. Tue-moi.
Drago ne se le fit pas dire deux fois, et envoya un sortilège mortel sans attendre. L'éclair vert traversa sa cible et vint s'exploser contre l'arbre juste derrière. L'illusion de Bellatrix se mit à rire de plus bel avant de disparaître en fumée. Elle réapparut quelques mètres plus loin, mais le même phénomène se produisit lorsqu'il tenta de l'atteindre avec un nouveau sortilège.
- Arrête ce petit jeu, Bella ! vociféra Drago, hors de lui.
- Tu l'aimais bien pourtant, à l'époque, ce petit jeu... Tu ne te souviens pas ?
Drago se retourna pour la énième fois et fit face à une autre illusion.
- De quoi parles-tu ? cracha-t-il.
- Allons, creuse un peu ta mémoire, sourit-elle. Tu n'avais que cinq ans que tu étais déjà avide d'apprendre. Tu venais chez moi tous les dimanche, quand tu étais tout petit, pour voir Tata Bella. Mais je ne t'emmenais pas jouer au parc avec les autres enfants, comme le croyait naïvement ma chère sœur. Je t'emmenais jouer à un tout autre jeu, un jeu pour les plus grands. Comment crois-tu en connaître autant sur la magie noire, Drago ? Je te montrais tellement de choses, chaque nouvelle après midi que tu passais avec moi ! Et tu adorais ce jeu en particulier, celui où je faisais apparaître et disparaître des mirages. Oh oui, tu as très vite appris sur le sortilège de l'illusion. Mais tu as surtout très vite appris le pouvoir du mensonge...
La fausse Bellatrix, qui paraissait pourtant si réelle, s'avança lentement vers Drago dont les souvenirs déferlaient dans la mémoire.
- « Oui, maman, je me suis beaucoup amusé au parc, aujourd'hui », imita Bellatrix, empruntant une voix d'enfant. « J'aimerais y retourner la semaine prochaine ! ». Cinq ans, Drago. Cinq ans, et tu mentais déjà comme un vrai roi. A ta propre mère. Ton père et moi n'avions même pas besoin de te dicter tes paroles, tu comprenais déjà tout seul ce qu'il te restait à faire pour continuer nos après-midi magiques que tu aimais tant. Ton âme était déjà si noire... Tu es l'un des nôtres, Drago. Tu essais de te convaincre de ta différence parce que tu sais que c'est ce qu'elle veut de toi, mais, au fond, tu n'as jamais changé. Tu ne le peux pas, car c'est ce que tu es au plus profond de toi, ta nature véritable : un Malefoy, et un Mangemort.
Drago envoya valser un sortilège en poussant un cri de rage. L'illusion disparut de nouveau en un ricanement sonore. Fatigué de cette fuite permanente, il projeta une pluie d'éclairs verts à travers la forêt, espérant atteindre la véritable Bellatrix. Mais son rire insupportable et perçant ne cessait de s'intensifier à chaque nouvel effort qu'il faisait pour la faire taire.
Tout à coup, alors qu'il lançait un dernier sort, le rire s'interrompit subitement tandis que le bruit d'un corps qui tombe résonna avant l'arrivée angoissante du silence. Plein d'espoir, Drago avança prudemment vers la forme allongée au sol, un peu plus loin. Ses pieds écrasaient lentement les feuilles mortes, tandis que tous ses sens restaient consciencieusement en alerte. Il s'agenouilla près du corps, avant de le faire délicatement rouler vers lui.
Ses yeux s'écarquillèrent d'horreur, et son cœur cessa tout bonnement de battre.
Hermione.
Le rire aigu de Bellatrix déchira le silence, pendant que Drago regardait, accablé, l'expression figée du visage qu'il aimait tant. Il approcha lentement ses doigts tremblants vers cette vision d'horreur, et traversa tristement la joue du mirage.
- C'est ce qui lui arrivera à elle aussi, souffla alors la voix de sa tante juste à son oreille.
Drago savait que c'était bel et bien Bellatrix cette fois, car il n'aurait pu sentir le souffle d'une illusion lui effleurer le cou. Toutefois, il ne bougea pas, trop absorbé par la vision d'Hermione étendue au sol, les yeux grands ouverts.
- Non, murmura-t-il avec force malgré la boule en travers de sa gorge. Je ne la perdrai pas. Pas elle. Je saurai la protéger.
- Oh, oui... Tu la protégeras. Comme tu as essayé de protéger ton ami Blaise des ennuis qui n'appartenaient pourtant qu'à toi. Elle finira comme lui et ta mère, et tu le sais. Parce que les gens que tu aimes meurent autour de toi, Drago. Ton père est mort à cause de ton égoïsme, mais cela t'importe bien peu tant toi tu es heureux, n'est-ce pas ?
Sentant une présence, Drago leva les yeux, et comprit alors le piège. Il comprit que sa tante le tenait immobile avec des paroles blessantes, pendant qu'il devenait sagement la cible de l'intrus, caché dans les bois.
En une fraction de seconde, Drago s'était vivement retourné et avait saisi Bellatrix par les épaules, avant de la faire pivoter devant lui en bouclier. La flèche vint donc achever sa course dans le dos de la mauvaise cible, mortelle. Pris de panique, le centaure s'enfuit au galop. Drago, le visage impassible, tenait le corps de sa tante dans les bras, celle-ci s'accrochant désespérément à son tee-shirt. Le poison des flèches des centaures était redoutable ; rapide et mortel, il infiltrait son venin noir dans les veines et arrêtait le cœur en quelques minutes.
- Ça ne t'es jamais venu à l'idée, dit alors Drago dont la voix glaciale était dénuée de toute émotion, que, peut-être, la Magie Noire ne m'avait jamais attiré pour son côté assassin ? Tu n'as jamais envisagé que, peut-être, j'étais fasciné par la porte de sortie que sa puissance m'offrait ? Je n'ai jamais voulu apprendre la Magie Noire pour une autre raison que celle d'être un jour assez fort pour m'éloigner de vous sans risque.
Les veines de Bellatrix étaient noires, à présent, et ressortaient visiblement comme si sa peau avait vieilli de plusieurs années. Drago allongea son corps, et croisa une dernière fois les yeux suppliants du dernier membre de sa famille, avant de tourner les talons.
Plus il se rapprochait de la lisière, plus les grondements de la guerre se faisaient entendre. Lorsqu'il émergea de la forêt, le spectacle restait le même entre les deux camps, à la seule différence que le nombre des membres de l'Ordre faiblissait à vue d'œil. Il survola le champ de bataille du regard avant que ses yeux ne se posent finalement sur celle qu'il cherchait. Sans même prendre garde à ce qu'il se passait autour de lui, Drago se dirigea d'un pas ferme vers Hermione, tua le loup-garou contre lequel elle luttait, puis la tira contre lui et la serra dans ses bras comme jamais il ne l'avait fait avant. Devant tant de force, Hermione n'aurait pu se dégager même si elle l'avait voulu.
- Je ne te perdrai pas, souffla-t-il alors, plus à lui même qu'à elle.
Hermione resserra son étreinte, inquiète.
- Bien sûr que non, répondit-elle sur le même ton.
Il la laissa enfin respirer, puis prit son visage entre les deux mains pour mieux la contempler, et sourit. Elle était sacrément belle.
- Je suis heureuse que tu l'ais remporté, devina-t-elle.
- J'ai vaincu, admit Drago, mais je reste le perdant. Bellatrix avait gagné depuis déjà bien longtemps, et elle le savait.
Hermione hocha la tête de droite à gauche.
- Oh que non, contredit-elle. C'est toi qui a triomphé d'eux tous depuis bien longtemps, crois-moi.
- Comment as-tu convaincu tout le monde de mon innocence ? demanda-t-il alors, se rappelant la mobilisation touchante de l'Ordre.
- J'ai clamé de l'aide où j'ai pu, et je suis tombée par chance sur monsieur Weasley qui m'a dit croire en toi, et a aussitôt demandé aux autres de le suivre. Les fantômes ont transmit l'appel à l'aide à une vitesse impressionnante, et beaucoup de sorciers ont alors avoué t'avoir vu tuer un grand nombre de Mangemorts, ce qui a fait pencher la balance en ta faveur.
- Content d'apprendre que je n'ai pas risqué ma vie pour rien, dit-il en tirant un petit sourire.
- Les mauvaises actions ont peut-être des conséquences, mais les bonnes actions ont elles aussi leurs répercussions. Il ne faut jamais penser qu'aider les autres est une perte de temps, car le résultat ne passe pas inaperçu. Tu en as la preuve, maintenant.
Drago essaya de sourire, mais ne parvint à afficher qu'une sorte de grimace gênée. Était-elle en train de tenter de le convertir à la secte des gens biens qui sauvent le monde ? Tout ce qu'il faisait, il le faisait pour elle, et en aucun cas pour entrer dans le club des héros inconnus qui se contentent de la paix comme trophée de gloire. Il n'était pas le fils prodigue de Merlin, il n'était pas un Gryffondor, et il était encore moins quelqu'un de bien. Pourvu qu'Hermione le sache, ça lui éviterait des déceptions.
Il vit alors les yeux de la jeune femme s'agrandir de stupeur, et comprit qu'un danger était derrière lui. Mais, avant même qu'il ne puisse réagir, Hermione avait déjà tracé un long trait horizontal avec sa baguette. Drago se retourna pour découvrir un Mangemort dont la tête coupée roulait à présent au sol pour disparaître dans l'obscurité de la nuit.
- Tu as réussi ! s'exclama-t-il.
- Je le désirais vraiment, cette fois, répondit-elle fièrement. Et je n'ai pas eu le temps de réfléchir.
Il s'apprêtait à la féliciter lorsqu'eux tous deux aperçurent Potter courir vers le château à la hâte.
- Harry ! appela-t-elle.
Celui-ci s'arrêta un instant. Drago remarqua qu'il tenait une petite fiole dans la main, dont le liquide blanchâtre était clairement reconnaissable comme un souvenir.
- Je n'ai pas le temps de t'expliquer, Hermione ! dit-il précipitamment. Ne t'en fais pas pour moi !
Et il repartit en direction du château avant de disparaître à l'intérieur des grandes portes de Poudlard.
- Laisse-le faire, prévint Drago qui la sentait hésitante. Il doit savoir ce qu'il fait.
Hermione tira un sourire avant de répondre :
- Tu apprendras qu'Harry est le genre de personne à t'assurer que tout va toujours très bien lorsque tout va mal, et ça dans le seul but de ne pas t'inquiéter ! Tiens, un peu comme toi, quand on y pense !
- Je t'ai déjà dit de ne pas me comparer à Potter, soupira-t-il.
- Il vous arrive pourtant d'agir de la même façon, constata-t-elle.
- Je n'ai absolument rien en commun avec lui, point final, mentit Drago.
Il y avait des comparaisons qui, en dépit de leur vérité, n'étaient pas à relever lorsqu'on avait un minimum d'honneur à conserver. Heureusement, la soudaine attaque d'un Mangemort mit fin à leur conversation, et tous deux repartirent au combat. Tout en lançant des sortilèges à droite à gauche, Drago ne pouvait s'empêcher de jeter des coups d'œil furtifs à Hermione, et fut heureux de voir qu'elle faisait de même. Leur attirance l'un vers l'autre restait magnétique, tandis que leurs deux sourires s'étiraient sans limite, ineffaçables.
- A ta gauche, ma petite lionne ! lança-t-il alors en abattant une araignée.
Hermione pivota à gauche et évita le sortilège d'un Mangemort, avant de lui renvoyer le même sort. Touché, l'homme s'effondra.
- Je l'avais vu, je te signale ! répliqua-t-elle ensuite.
- C'est ça ! ricana-t-il.
- Ne me cherche pas, Malefoy, sourit-elle.
Ce dernier stupefixia alors le Gobelin qui était devenu le nouvel adversaire de la jeune femme.
- Eh ! s'offusqua-t-elle en fronçant les sourcils. C'était le mien ! Occupe-toi de tes propres ennemis !
Il s'avança vers elle et lui déposa un rapide baiser sur la joue.
- Désolé, dit-il sans la moindre trace de regret. Et si je me faisais pardonner en partageant ma future cible avec toi ?
- Tuer des personnes est loin d'être un jeu, Drago, répliqua-t-elle plus sérieusement.
- Que dis-tu du Troll, là-bas ? enchaina-t-il en ignorant sa remarque.
Hermione jeta un coup d'œil au monstre énorme qui envoyait valser ses victimes à coups de massue. En voyant son regard s'assombrir devant tant un tel massacre, Drago sut qu'il avait gagné.
- Trop facile, dit-elle alors.
- Ne sois pas prétentieuse, Granger, lança-t-il en partant à la rencontre du Troll. Le premier qui le met à terre a gagné !
Hermione leva les yeux au ciel, puis finit par courir pour le rattraper.
- Si c'est moi qui l'emporte, dit-elle, une fois arrivée à sa hauteur, tu dois arrêter de me prendre mes adversaires et c'est chacun de son côté.
- D'accord, répondit-il, ravi qu'elle participe. En revanche, lorsque je gagnerai, ce qui va sans dire, tu auras le devoir de ne pas t'éloigner de moi à plus de cinq mètres !
- Quoi ? Je ne supporterai jamais pareille torture, Malefoy !
- Dans ce cas, mieux vaut pour toi que tu gagnes !
Et il s'élança vers le monstre, tandis qu'Hermione faisait de même. La faiblesse physique de la créature était, encore une fois, bien trop facile. Sa peau dure et sèche faisait bouclier aux sortilèges, mais la partie qui couvrait son crâne était, elle, fine et sensible. Un simple sort à travers le cerveau, et la bête s'écroulait. Du gâteau ! Drago ricana intérieurement en imaginant à l'avance la tête que ferait Hermione. Cette dernière s'était dirigée vers les pieds du Troll, ce qui était une tactique inutile et ridicule. Quant à lui, il pointa sa baguette vers ses propres pieds et, comme un peu plus tôt, lança le sortilège d'enjambée :
- Elasticus !
Il bondit en l'air et atterrit directement sur la tête du Troll. Une fois solidement accroché, Drago pointa sa baguette sur le crâne où quelques poils noirs se battaient en duel. Mais, alors qu'il s'apprêtait à prononcer la formule, le Troll poussa un rugissement, puis Drago se sentit soudain glisser sur le côté, tandis que l'énorme musculature vacillait dangereusement. En quelques secondes, la créature s'effondrait à terre dans un nuage de poussière. Drago, qui s'était jeté au sol juste avant, regardait, ahuri, l'œuvre d'Hermione.
Celle-ci s'avança vers lui, sourire aux lèvres.
- Alors, monsieur je-suis-le-plus-fort ? se moqua-t-elle.
- Simple coup de chance, je suppose, maugréa-t-il.
- Tu pourrais au moins reconnaître ta défaite ! s'indigna-t-elle.
- Comment être sûr que tu n'as pas triché ?
Elle le regarda avec des yeux ronds.
- Incroyable ! pouffa-t-elle de rire. Et, si tu veux tout savoir, je m'en suis prise à l'autre partie, beaucoup plus sensible, du Troll. Eh oui, mon cher Drago ! Ces créatures restent des mâles avant toute chose !
Drago ne put s'empêcher de rire à son tour.
- D'accord, championne, soupira-t-il enfin. C'est toi qui a gagné...
- Merci !
Elle prit alors le menton du jeune homme entre le pouce et l'index, et approcha son visage pour l'embrasser rapidement.
- Hors de ma vue, maintenant, souffla-t-elle ensuite.
Drago s'éloigna à contre cœur. Cependant, il attendit qu'elle ait tourné le dos pour se rapprocher discrètement. Si elle croyait vraiment qu'il allait respecter ce stupide pacte, elle le connaissait mal ! Il était hors de question qu'elle sorte de son champ de vision juste à cause d'un jeu minable ! Alors, en prenant bien soin de ne pas se faire voir, Drago reprit ses combats en s'assurant qu'il pouvait garder un œil sur Hermione.
Quelques minutes plus tard, alors que Drago achevait la dernière des araignées avec un immense sentiment de bonheur et de triomphe, il aperçut de nouveau Harry Potter. Il ne courait pas cette fois, il marchait. Il traversait le parc à pas lents, ignorant les massacres de la bataille autour de lui. Son visage était fermé, les traits inexpressifs. Son être entier ne semblait même pas marcher sur le même monde que les autres, complètement cloisonné dans une bulle où la guerre n'avait pas accès, désormais préoccupation des autres.
Avant même qu'Hermione ne le vît à son tour, Drago avait compris ce que le Gryffondor s'apprêtait à faire. Hermione n'allait pas tarder à deviner, elle aussi, et il se précipita vers elle pour la retenir à temps. Comme il l'avait pensé, la jeune femme se mit soudain à hurler le nom de son ami. Celui-ci, bien qu'il l'ait forcément entendue, ne répondit pas, cette fois, et continuait d'avancer vers la forêt interdite, le pas plus pressant.
- Harry ! cria Hermione qui voulut s'élancer à sa suite.
Mais deux mains bloquèrent fermement ses épaules.
- Si tu y vas, tu vas te faire tuer aussi ! lui dit Drago.
- Lâche-moi ! rugit-elle en se débattant, ses yeux exorbités suivant la marche de Potter, bientôt arrivé à la lisière des bois.
Toutefois, Drago résista. Il n'allait pas la lâcher, parce qu'il n'allait pas la perdre à cause de l'imprudence de Potter. Il allait se rendre, c'était une évidence. Quelques soient ses raisons, il n'en avait pas fait part à Hermione, et désirait donc qu'elle reste en dehors de ça. Tant mieux, parce que lui aussi. Potter ne ressortirait pas de cette forêt vivant, et Hermione non plus si elle faisait l'erreur de l'accompagner. Alors, il resserra sa prise autour d'elle malgré ses gesticulations enragées et ses cris hystériques.
- Harry ! Reviens ! Je t'en supplie ! Laisse-moi aller le rejoindre, Drago ! Il faut que je l'en empêche ! Harry !
Tout à coup, un sortilège les sépara en les expulsant tous deux loin l'un de l'autre. Drago redressa aussitôt sa tête vers Hermione, mais, comme il le redoutait, cette dernière s'était déjà relevée et se précipitait maintenant vers la forêt.
- Non ! lui hurla Drago en se relevant à son tour.
Mais un nouveau sortilège le remit à terre. Franchement agacé, il jeta un regard à son agresseur, et resta troublé l'espace d'un instant.
- Londubat ? s'étonna-t-il, tandis que celui-ci faisait apparaître des cordes de sa baguette magique.
Figé de surprise, Drago ne réalisa que trop tard son nouveau statu de prisonnier. Cependant, l'identité de son attaquant était bien différente, cette fois.
- Qu'est-ce que tu fiches ? lui lança-t-il, décontenancé.
- Je protège Hermione, répondit-il calmement.
- Tu la protège de quoi ? s'énerva-t-il, connaissant malheureusement la réponse.
- De toi. Harry m'a fait juré de te garder à distance d'Hermione après son départ.
Calme-toi, Drago. Respire un grand coup. Contrôle ta colère, c'est la meilleure façon pour qu'il t'écoute.
- Hermione est en danger, articula-t-il en choisissant ses mots avec soin. Si tu veux vraiment la protéger, libère-moi plutôt et j'irai l'aider !
- Harry m'a dit que tu dirais ça.
Respire encore, oui voilà, comme ça. Inspire, expire lentement. Non, tu ne veux pas insulter cet abruti de gros plein de soupe, ce serait mal et inutile.
- Ne comprends-tu donc pas qu'Hermione est sur le point de se faire tuer ? Je suis de ton côté, Londubat ! Je ne suis pas l'un de ces Mangemorts, combien de fois vais-je devoir le prouver ?
- Harry m'a dit que tu dirais ça aussi.
- Eh bien Potter a tort ! s'écria-t-il, essayant désespérément de se libérer de l'étreinte serrée des cordes.
C'était inutile de se fatiguer à convaincre cet imbécile ; il était l'un des grands fans de Potter et se jetterait dans la gueule d'un Dragon si son Dieu lui demandait. Alors qu'il commençait à perdre espoir, un sortilège de pétrification atteint Londubat en plein dans le dos, et son corps s'écroula lourdement dans l'herbe. Drago leva la tête vers son sauveur, et retint une exclamation de stupeur.
- Pansy ?
C'était la première fois de sa vie qu'il était heureux de la voir. La jeune brune s'approcha, mais ne le libéra pas. A la place, Drago reçut une gifle magistrale.
- Comment as-tu pu ? rugit-elle alors. Comment as-tu pu disparaître autant de temps sans donner de nouvelles après tout ce qu'on a vécu, toi et moi ?
Drago fouilla vaguement sa mémoire à la recherche de ce qu'ils avaient bien pu vivre un jour, avant de se souvenir que, oui, en effet, elle avait été sa distraction pendant une longue période. Cependant, quelque chose lui disait que lui remettre les idées à leur place ne se révèlerait pas le meilleur moyen de s'échapper. Non, s'il voulait avoir une chance qu'elle le libère, il allait devoir se mettre de son côté et la berner, ce qui n'avait jamais été une grande difficulté avec elle. Le seul problème restait de savoir de quel côté elle se trouvait. Il se contenta de lui demander, sachant très bien qu'elle n'y décèlerait pas la trace d'un piège :
- Avec qui te bas-tu, Parkin...Pansy ? se rattrapa-t-il.
- Avec l'Ordre du Phoenix, quelle question ! J'en ai assez de devoir dépendre de supérieurs ! Tu m'as fait comprendre à quel point s'acharner à servir pour faire plaisir ne rapportait pas un grain de gratitude en retour !
- Ravi de t'avoir enseigné la base de ma devise, dit-il sincèrement, mais sache que je n'ai jamais oublié tout ce que tu as fait pour moi !
L'expression de Pansy sembla soudain se radoucir.
- Ah oui ? espéra-t-elle.
- Bien sûr ! mentit Drago. Tu crois vraiment que j'oublierais toutes ces années durant lesquelles tu as toujours soutenu chacune de mes opinions ?
Simplement dû au fait qu'elle n'avait jamais aucune opinion si ce n'était la même que lui.
- Toutes ces fois tu as fait les devoirs à ma place, poursuivit-il, penses-tu vraiment que je n'appréciais pas la valeur de ce geste ?
Surtout lorsqu'il découvrait avec horreur la note de son devoir le lendemain !
- Je ne montrais pas ma reconnaissance parce que c'est ma nature, Pansy, voilà tout.
Cette dernière semblait être sur le point de fondre en larme devant une telle déclaration. Déclaration qui, au passage, était la pire que Drago ait jamais faite.
- Oh, mon Drago ! s'exclama-t-elle alors en s'abaissant vers lui. Je l'ai toujours su, au fond ! J'ai tellement attendu ces mots !
Et elle plongea son affreuse bouche vers lui, entamant un baiser qui était loin d'être partagé. Retenant son envie vomir, Drago jura à Merlin qu'il lui revaudrait sa cruelle persécution un jour. Il ne sut si ce dernier entendit la menace, mais Pansy lui fut soudain arrachée en arrière, poussant un cri de douleur. Apparemment, Merlin avait encore quelques surprises pour lui : tenant fermement Pansy par les cheveux, Lisa Scrimgeour la tirait vers l'arrière, furieuse.
- Pour qui tu te prends, espèce de grosse truie ! criait-elle à Pansy. Personne n'embrasse mon Drago !
Les yeux de Pansy lancèrent soudain des éclairs face à la concurrence, et elle s'extirpa de la poigne de Lisa.
- Comment ça, ton Drago ? s'indigna-t-elle.
Ce dernier regarda, désespéré, les deux filles se battre à coups de claques et de cheveux arrachés. Cependant, Lisa prit rapidement le dessus, et stupefixia Pansy qui tomba aux côtés de Neville. Après s'être brièvement recoiffée, Lisa s'avança à son tour vers Drago. Une deuxième gifle vint alors s'abattre sur sa joue déjà rouge.
- C'est qui, celle-là ? aboya-t-elle en désignant le corps de Parkinson d'un coup de tête.
Fatigué, Drago ne se sentit pas d'humeur à jouer encore la comédie, et déballa d'un coup :
- Qui elle est n'a pas d'importance, Lisa. Et tu n'en as pas plus à mes yeux. Hermione est la seule qui compte, et elle est danger à l'heure qu'il est. Si tu veux me tuer, fais-le, mais réfléchis bien à ce que t'y gagnes, parce que ça ne changera jamais rien à ce que j'éprouve pour elle. Quoi que tu fasses, de toute façon, n'y changera jamais rien.
La jeune femme demeura interdite un instant, digérant les paroles blessantes et humiliantes reçues en pleine figure. Elles durent faire vraiment mal, songea Drago, car Lisa ne parut même pas avoir la force de s'énerver, et se contenta d'hocher la tête pour dire qu'elle avait compris. Drago ne sut d'où lui vint cet élan de compassion, mais il souffla un léger « désolé ». Sûrement ne comprenait-il que trop bien la douleur qu'était de réaliser que la personne dont on croyait être aimé ne faisait en fait que vous utiliser.
- Tous ces moments passés ensemble, à Poudlard... commença-t-elle alors, la gorge serrée. Toutes ces affections, tous ces sourires...
- M'ont simplement fait réaliser que ce n'était pas avec toi que je voulais partager tout ça... acheva Drago.
Une fois de plus, elle hocha la tête en silence, écoutant le craquèlement de son cœur dont les fissures creusaient de profondes crevasses.
- Tu es monstrueux... murmura-t-elle alors.
Elle leva sa baguette et la pointa droit sur lui. Le cœur battant la chamade, Drago pria de toutes ses forces, refusant de mourir ainsi.
- Diffindo !
Le jeune homme sentit ses cordes se desserrer pour finalement disparaître complètement. Il regarda Lisa sans vraiment comprendre.
- Mais moi j'ai fait bien pire, ajouta-t-elle sans croiser son regard.
Un long cri strident retentit depuis la forêt interdite.
- Hermione ! lâcha Drago dans un souffle de panique.
- Tu devrais te dépêcher d'aller la sauver, dit alors Lisa d'un air absent. Elle n'en a plus pour longtemps.
Drago sortit sa baguette, fit quelques pas vers la jeune brune, puis lui déposa un doux baiser sur la joue. Cette dernière ferma les yeux à son contact, tandis qu'une larme de renoncement prenait naissance. Elle le regarda ensuite s'élancer vers la forêt, réalisant qu'elle n'était pas vraiment en train de le perdre, puisqu'il n'avait jamais été à elle...
Un éclair illumina le ciel. Le grondement sourd du tonnerre s'en suivit, tandis qu'une averse de pluie s'abattait sur le champ de bataille.
Drago éprouva un sentiment d'écœurement en retrouvant l'obscurité glaciale de la forêt ; il n'y était allé que trop de fois durant les dernières heures, et jamais rien de bon n'en ressortait. D'ailleurs, rien n'en ressortirait du tout, cette fois. Drago était pleinement conscient que chaque nouveau mètre avalé était un pas de plus vers les gorges de la mort, mais il ne ferait demi-tour pour rien au monde. Pas sans elle. S'il devait sortir de cette forêt vivant, ce serait avec Hermione. S'il devait y mourir, ce serait avec elle également.
Tandis qu'il courait toujours plus vite dans les profondeurs des bois, Drago essayait vainement de se concentrer sur sa trajectoire, car il n'y avait pas une seule autre pensée qui n'était pas dirigée vers Hermione, imaginant chaque fois le pire ; et s'il arrivait trop tard ? Et si Voldemort s'était déjà chargé d'elle ? Pourquoi n'entendait-il plus rien ?
A ce moment là, un rire s'éleva. Drago s'arrêta de courir, ses membres soudain paralysés de peur. Car il connaissait ce rire. Et il n'était autre que celui de Voldemort, froid et inquiétant. C'était un rire de joie, un rire de victoire...
La voix s'intensifia, jubilant de plus en plus fort. Drago sentit un frisson gelé lui parcourir l'échine, avant qu'il ne se mette à courir de nouveau, aussi rapidement que lui permettaient ses jambes exténuées. La pluie avait déjà transformé le sol en terre boueuse, et il avait l'impression que ses pieds s'y enfonçaient profondément, comme dans ce genre de mauvais rêve où la course est ralentie contre notre volonté.
Guidé par l'éclat de rire de Voldemort, il se dirigea vers l'ouest et arriva enfin à l'endroit où Hermione devait se trouver. Il implora Merlin pour ne pas y découvrir la vision qu'il redoutait tant : celle d'un corps sans vie.
C'était un autre champ, beaucoup plus petit, et les arbres y étaient dénués de feuilles, laissant ainsi pénétrer l'éclat de la lune à travers les branches mortes. Drago regarda aussitôt autour de lui, et retint sa respiration. Il y avait bel et bien un corps allongé et sans vie, mais ce n'était pas celui d'Hermione. Non, c'était celui de Potter. L'homme mort étendu au sol était Harry Potter. La lumière étincelante et maternelle de la lune l'enveloppait tout entier de son drap blanc, couvrant sa peau d'un voile encore plus pâle qu'elle ne l'était déjà.
Hermione, elle, se trouvait à ses côtés, toute tremblante et larmoyante, secouant le corps de son ami de toutes ses forces, espérant qu'il se réveille. Drago non plus, ne pouvait pas y croire. C'était impossible. Pas lui, pas Harry Potter, le survivant à la légende ancrée dans l'histoire, le héros qui avait autrefois anéanti Lord Voldemort. Mais, par dessus tout, celui qui était destiné à le vaincre définitivement. Car, bien que Drago n'ait jamais apprécié aucune des qualités sois-disant héroïques du jeune homme, il savait en revanche que lui seul était capable de se mesurer au Mage Noir. Il ignorait exactement quoi, mais quelque chose chez ce sorcier était spécial, une sorte de force protectrice qui lui avait permis maintes fois d'échapper à Voldemort, et qui lui donnait également la faculté de sortir vainqueur à jamais du combat censé les opposer.
C'est pourquoi, en cet instant, découvrir Harry Potter sans vie n'avait juste aucun sens. Où était passé le duel du bien contre le mal qui devait marquer un tournant dans l'histoire ? Que devenait la légende de la prophétie dont Voldemort avait expliqué les propriétés à ses adeptes, fut un temps ? Celle où l'un des deux devait mourir pour que l'autre vive ?
Malgré son peu de confiance envers Potter, Drago avait toujours eu ce petit fond d'espoir en lui, l'espoir de le voir l'emporter sur le Seigneur des Ténèbres, le jour venu. Mais voilà, ce jour était arrivé, et il lui rappelait à quel point il avait été illusoire de croire Potter capable de vaincre Voldemort. Le mal avait gagné, et il n'y avait désormais personne d'autre pour s'y opposer, car la seule étincelle d'espérance venait de s'éteindre aux pieds du nouveau Maître du monde.
Ce dernier, la capuche laissée en arrière pour la première fois depuis, savourait sa victoire, ignorant Hermione qui continuait désespérément d'appeler Harry, agenouillée auprès de lui. Drago sentait d'ici le souffle froid de son rire, devenu plus grave, lui traverser et lui geler les entrailles, empêchant son cœur figé de reprendre de la vitesse. Il remarqua alors que Voldemort tenait une coupe entre les mains. Cette coupe même qu'Hermione avait offerte en échange de sa vie à lui. Il avait compris que l'objet était en rapport avec le collier qui se trouvait en ce moment même dans sa poche, et savait également d'après Hermione que Voldemort ne devait jamais s'en emparer, au risque assuré de lui donner le pouvoir éternel. Ce dernier ne l'avait pas encore vu, pourtant planté à quelques mètres de lui, encore trop occupé à déguster le fruit de la vengeance.
La meilleure chose à faire aurait donc été de reculer discrètement, de mettre le plus de distance possible entre le cœur et la coupe, évitant ainsi de gâcher tous les efforts des Gryffondor pour nuire à Voldemort. Mais Hermione était là, et, en dépit de l'intérêt du monde magique, il ne partirait pas d'ici. Car son intérêt à lui, c'était elle. Rien d'autre. L'égoïsme était plus un trait de sa personnalité qu'un simple défaut ; il était né avec cet état d'esprit, et la culpabilité qui en découlait ne l'avait jamais vraiment affecté, quelles qu'en soient les circonstances. Depuis tout petit déjà, il faisait passer ses vœux avant ceux des autres, et bien que ceux d'Hermione étaient ensuite devenus prioritaires aux siens, il restait des désirs qu'il ne négligeait pas. Et son plus profond désir, en cet instant, était de voir Hermione s'en sortir saine et sauve. Et puis, le collier ne risquait rien, après tout, puisque personne d'autre que lui n'était en mesure de le toucher. Il n'y avait donc rien à craindre ?
C'est ainsi que Drago s'avança. Tandis qu'il approchait doucement d'Hermione, il nota le soudain silence de Voldemort, dont le rire avait stoppé. Cependant, il se remit à ricaner quelques secondes plus tard.
- Eh bien... mumura-t-il de sa voix aigüe. Pourquoi m'être donné tant d'efforts lorsque que mes convoitises viennent toutes se rendre d'elles-mêmes en quelques minutes ?
En entendant ces paroles, Hermione tourna soudain ses yeux rougis vers Drago. Seulement, alors, elle sembla reprendre conscience du danger. Pourtant, elle ne bougea pas. Drago devinait parfaitement ce qui se passait dans sa tête, ce sentiment d'abandon qui vous persuade que plus rien n'a d'importance, que, de toute façon, ceux qu'on aime finissent toujours par disparaître et que se battre n'apporte aucune victoire. Oui, Drago observait en silence la jeune femme baisser les bras. Mais lui ne pouvait pas se le permettre. Il avait beaucoup trop à perdre en renonçant, et Hermione allait devoir surmonter son chagrin pour l'aider un minimum, quelle que soit l'ampleur insurmontable des efforts à fournir.
Il se mit à réfléchir rapidement au meilleur moyen de la protéger, et ferma son esprit aussitôt qu'il sentit celui de Voldemort essayer de s'y incruster. Il était dur de se concentrer sur les deux choses à la fois, et la seule idée qui lui paraissait la plus réalisable pour éloigner Hermione d'ici était de l'expulser le plus loin possible, quitte à lui faire mal. Elle n'était pas en état de se battre, et transplaner n'était même pas envisageable, au risque de se faire tuer dans la seconde. De plus, il avait beau la chercher des yeux, la baguette magique de la jeune femme n'était pas là, probablement enlevée par les soins de Voldemort.
Cependant, l'idée de mettre Hermione hors de vue – tentative en elle-même déjà ridicule et sûrement peu efficace – venait d'être réduite à néant par l'arrivée silencieuse des Mangemorts aux abords du champ. Et ils n'étaient pas seuls ; l'armée entière s'approchait maintenant de la scène finale, avide de spectacle. Pire encore, l'armée de l'Ordre du Phoenix se trouvait là, elle aussi, mais en tant que prisonnière. Il fallait croire qu'ils étaient devenus trop faibles et trop peu nombreux pour pouvoir rivaliser avec les forces du mal, désormais, car les sorciers se laissaient guider à la façon d'esclaves soumis, un air de défaite ou de colère peint sur leur visage. Mais, par dessus tout, le nombre irréductible des harpies garantissait la victoire à Voldemort.
Devant si peu d'espoir, Drago tenta malgré tout d'adopter une posture assurée, ses traits ne laissant transparaitre rien d'autre que le défi. Il sentit alors une main douce se glisser dans la sienne, et constata qu'Hermione s'était maintenant redressée et se tenait à ses côtés, affichant le même air courageux. Drago ressentit comme une onde de force nouvelle le parcourir, et il releva un peu plus fièrement la tête, prêt à faire face au destin, peu importe ce qu'il lui réservait. Car il la sentait prête à affronter la mort également, et leur amour l'un pour l'autre réuni contre l'ennemi, aussi invulnérable soit-il, renforçait sa confiance en lui. En elle.
- Regardez donc ça... susurra Voldemort en penchant légèrement sa tête de serpent. Regardons tous cette jeunesse défier prétentieusement la mort du regard. Car c'est ce qu'ils veulent, n'est-ce pas ? Que l'on acclame leur bravoure jusqu'au bout ? Ça se croit fière, ça se croit fort, ça se croit invincible...
Il survola lentement le sol vers Drago et Hermione.
- ... Mais c'est si faible, acheva-t-il en arrachant l'étreinte de leurs mains d'un coup de baguette.
Malgré tous ses efforts, Drago ne parvint plus à toucher Hermione, bloqué par une sorte de mur invisible.
- La force protectrice que vous vous acharnez à voir en l'amour n'est rien d'autre que le poison qui prend avantage de votre aveuglement ! Et en voici la preuve !
Il fit léviter le corps d'Harry Potter dans les airs, et s'amusa à le faire tourner comme un vieux pantin, avant de le laisser retomber par terre. Des cris d'indignation s'élevèrent de part et d'autre des prisonniers, refusant de voir leur héros être traité ainsi, même après sa mort.
- Stupide et naïf, siffla Voldemort de sa voix menaçante en regardant tout autour de lui. Tous autant que vous êtes. Avoir cru possible de vaincre l'armée du puissant Lord Voldemort ! Avoir refusé sa clémence qui vous offrait une chance de se joindre à lui ! Vous payez désormais le prix de votre impertinence...
Et il se mit à rire de sa gloire, bientôt suivi par le ricanement des adeptes.
- Vous n'avez pas vaincu ! contredit alors Hermione avec force en s'avançant.
Drago voulut la retenir aussitôt, mais le champ invisible était toujours là et rendait impossible tout contact. Il dut se résoudre à observer l'une des fameuses impulsions justicières de la Gryffondor, ainsi que les pupilles du Seigneur des Ténèbres s'agrandir d'excitation devant l'opportunité d'exercer une fois de plus son autorité.
- Vous n'avez pas vaincu, répéta Hermione, le corps tremblotant mais la voix ferme. Tous ici, nous sommes encore debout. Stupides et naïfs, ce serait plutôt votre présomption à croire que tout est fini. Car c'est loin d'être le cas. Des milliers d'autres sorciers sur Terre sont encore debout également, face à vous. Prêts à se battre. Vous n'avez gagné qu'une petite bataille, Lord. Pas la guerre.
Le sourire tordu de Voldemort s'étira.
- Pauvre petite sotte que tu es, Hermione Granger, dit-il. Tu sembles avoir oublié que j'ai désormais en ma possession l'éternité, et cela grâce à toi. Car, oui, annonçons-le à tous ici, la brillante Sang-de-Bourbe m'a offert de plein gré cette coupe, objet qui rendra mon règne immortel !
L'Ordre du Phoenix regardait alternativement Voldemort et Hermione sans vouloir y croire. Cette dernière avait baissé les yeux, le teint empourpré. Drago, qui refusait de voir leur image être salie ainsi avant leur mort après tous les risques qu'ils avaient pris dans l'intérêt du monde magique, vint à son secours en s'en prenant à la fierté de Voldemort :
- Si vous êtes si puissant, nargua-t-il, sûr de le mettre en colère, comment se fait-il que vous ne soyez même pas capable de vous emparer d'un misérable collier ?
Sur ces paroles, Drago sortit de sa poche la longue chaîne en argent et brandit le cœur de Bulborbus devant ses yeux.
- Drago, non ! entendit-il Hermione s'horrifier.
Mais il tourna vers elle un regard rassurant. Il n'y avait aucun moyen que Voldemort s'en empare, ou bien alors il aurait déjà réussi depuis longtemps. Non, le collier était en sécurité entre ses mains, et c'était quelque chose qui rendrait fou le Seigneur des Ténèbres.
Curieusement, ce dernier n'éleva pas la voix, comme Drago s'y était attendu. Il n'envoya pas non plus des Mangemorts se charger de lui, comme il ne proféra aucune menace. Au contraire, le fente qui lui servait de bouche s'étira un peu plus. Tout le monde le regarda alors plonger sa main à l'intérieur de la coupe aux contours rectangulaires, puis la ressortir quelques secondes plus tard, couverte d'un liquide épais et argenté semblable au sang de Licorne. La substance avait formé comme un gant autour de sa main squelettique, et aucune goutte ne coula le long du poignet, ancrées dans la peau telle de la glu. Le Mage Noir approcha ensuite de Drago dont les traits avaient perdu de leur assurance, et c'est dans un silence où toutes les respirations étaient retenues, qu'il referma ses longs doigts argenté autour du petit cœur violet qui pendait au bout de la chaîne.
- Merci... souffla Voldemort en récupérant le bijoux devant les yeux épouvantés du jeune homme. A vous deux, vous venez de concrétiser mes projets. Pour des sorciers qui aiment à se prétendre des héros, vous iriez bien mieux dans le rôle des bouffons grotesques.
Les Mangemorts s'esclaffèrent. Encore sous le choque, Drago jeta un œil à Hermione. Celle-ci avait la tête enfouie entre les deux mains, affligée.
Soudain, une douleur le saisit à la poitrine, et Drago lutta pour rester debout malgré la brûlure intense qui semblait lui grignoter les côtes une par une.
- Qu'est-ce que vous lui faites ! entendit-il la voix d'Hermione s'affoler.
Mais elle reçut le même sortilège qui lui tira un cri de souffrance. Contrairement à Drago, ses genoux s'affaissèrent et cognèrent le sol.
- Et maintenant, s'amusa Voldemort, je vous laisse choisir lequel de vous deux verra l'autre mourir en premier...
Drago s'étonna d'avoir toujours sa baguette magique, mais elle s'envola vers Voldemort pile à ce moment-là.
- Et pas de triche, ajouta-t-il.
Drago pria de toute ses forces pour disparaître le premier, bien qu'il savait Hermione désirer partir avant.
- Pas de volontaire ? s'étonna faussement Voldemort. Je me vois donc obligé d'y intégrer l'opinion d'une tiers-personne... Tiens, qu'en dis la plus jeune des Weasley ?
Voldemort se tourna vers Ginny, cette dernière fermement maintenue par les griffes d'un loup-garou. Ses yeux étaient inondés de larmes, ne pouvant se détacher du corps allongé de son petit ami. En choisissant Weasley comme arbitre, la volonté de Voldemort était très bien transmise : Drago devait mourir le premier.
Drago vit les yeux de la jeune rousse croiser les siens, et une expression de haine défigura son visage. Potter avait dû lui dire qui était l'assassin de son frère, aucune doute là-dessus.
- Lui ! cracha-t-elle.
Drago aurait presque souris pour la remercier, mais l'interprétation qu'elle en ferait ne pourrait qu'être fausse en ces circonstances.
- Non ! s'écria alors la voix de Lisa.
Surgissant de nulle part, elle se jeta sur lui et l'enlaça de ses bras comme pour le protéger.
- Vous ne pouvez pas lui faire de mal ! dit-elle. Vous avez promis !
Pendant qu'elle parlait, Drago sentit quelque chose de dur et fin glisser à l'intérieur de sa poche arrière.
- Je t'aime, lui murmura-t-elle dans un ton d'adieu.
Puis, elle se retourna vers le Seigneur des Ténèbres.
- Je n'ai pas oublié notre petit arrangement, dit posément celui-ci. J'attendais justement ta venue, Lisa. De tous les fidèles que j'ai bien pu avoir, tu m'auras été le plus inutile de tous.
Et, d'un geste de main détaché, transmit sa volonté à l'un des Mangemorts présents. Celui-ci agita sa baguette, et un éclair vert atteignit la poitrine de Lisa qui s'écroula dans les bras de Drago. Horrifié, il déposa délicatement le corps au sol, avant de fermer les paupières du regard bleu azur à jamais éteint. Une exclamation de douleur le fit aussitôt lever la tête vers Hermione ; toujours agenouillée, elle se tenait le poignet d'où un filet de sang s'échappait. Plus étonnant encore, le même phénomène arriva à Voldemort, sauf que celui-ci sembla apprécier chaque goutte rouge échappée de sa peau grisâtre.
- Libre... murmura-t-il en inspirant profondément. Je n'ai plus aucune raison de résister à mon désir ardent de t'éliminer, Drago Malefoy.
Confus, le jeune homme ne cessait de virer son regard entre Hermione et Voldemort, tous deux lié au même phénomène dû à la mort de Lisa. La situation aurait pu faire penser aux conséquences d'un Serment Inviolable, principalement à cause d'une douleur à l'endroit du poignet, mais Drago chassa bien vite cette supposition ridicule et improbable.
- Ah, mon pauvre Drago, ricanait Voldemort. Si sûr de toi. Tu es trop prétentieux, ne te l'ais-je donc pas assez répété ? Mais tu n'apprends pas, non, tu n'apprends pas de tes erreurs. Et dire que tu as cru si longtemps que je ne te tuais pas parce que je te voulais... Insultant. Tellement insultant. J'avais besoin de toi pour que tu récupère le cœur de Bulborbus, comme je te l'ai dit, mais la principale raison pour laquelle tu restais en vie était à cause du Serment Inviolable que j'avais fait avec cette idiote de Scrimgeour. Je ne pouvais pas toucher à un seul de tes cheveux blonds, c'était la condition à ce qu'elle effectue ce qu'elle seule pouvait faire sans que tu ne te doutes de rien. Crois bien que ça été dur de te regarder vivre alors que mon seul sentiment envers toi se résumait à la mort pour m'avoir infligé une telle humiliation le jour de tes seize ans. Alors imagine l'outrage ressenti lorsque tu es venu me voir, quelques mois plutôt, prétendant désirer la mort de ton être aimé. Me mentir ainsi, de plein front, sans l'once de la moindre peur.
Drago ne parvint plus à rester impassible aux paroles du Lord. Était-ce possible qu'il ait toujours su qu'il était un traître ? Savait-il déjà qu'il mentait le jour même de leur entretient ? Mais comment aurait-il pu comprendre ? Son esprit était complètement fermé ce jour-là, il en était sûr.
- Oh oui... dit Voldemort qui lisait probablement dans ses pensées. Ton esprit était si cloisonné qu'il n'était pas difficile de comprendre à quel point tu désirais garder tes pensées traîtresses pour toi. Mais ceci n'est pas la raison qui fait que je connaissais tes intentions, car je les connaissais avant même que tu ne franchisse le pas du manoir.
Drago baissa les yeux vers le sol, le cerveau tournant à tout allure pour essayer de trouver une explication plausible au fait d'avoir été démasqué si tôt. C'est alors que, l'espace d'une fraction de seconde, il croisa son regard vert émeraude. Si son corps n'avait pas été si endolori, Drago aurait probablement sursauté de surprise. Mais ses yeux étaient de nouveau clos, ses lunettes tordues perchées au bout de son nez. Il avait dû rêver. Harry Potter était mort, et pour de bon. Il n'avait pas survécu, cette fois. Ça serait vraiment trop exagéré comme force protectrice. Il reporta son attention sur le Mage Noir, continuant malgré tout à jeter de fréquents coups d'œil en direction du Gryffondor.
- Je te revois, poursuivait Voldemort, marcher vers moi avec assurance et m'annoncer qu'Hermione Granger devait mourir de ta baguette. J'en avais presque des frissons meurtriers de devoir rester impassible devant toi, de devoir te regarder me mentir avec arrogance sans pouvoir te faire payer. Car j'avais besoin de tes services, j'avais besoin de ta main propre pour me rapporter le pendentif ! Alors je me contentais de t'écouter raconter à quel point cette vengeance devait être la tienne. Mais tu n'éprouvais pas la haine que tu me décrivais, comme tu n'éprouvais pas le besoin de te venger. Et tu sais pourquoi j'en était si sûr, Drago ?
- Il n'a pas besoin d'entendre tout ça ! le coupa alors la voix énervée et paniquée d'Hermione.
- Oh, je crois que si, au contraire, miss Granger. Il faut qu'il apprenne avant de mourir à quel point tous ses efforts pour te protéger ont été vains, aussi vains que d'essayer de tromper Lord Voldemort. Car, vois-tu, Drago, il se trouve que Merlin devait te mépriser autant que moi pour t'affliger une Sang-de-Bourbe comme âme sœur.
Un frisson de surprise agita la foule. Drago, lui, ne réagit pas. Ce que disait Voldemort n'arrivait tout simplement pas à prendre sens dans sa tête.
- Eh oui, souffla-t-il. Hermione Granger est la deuxième moitié de ton être. Et, de ce fait, il t'est impossible de ressentir un quelconque sentiment de haine ou de malveillance envers elle. Une fois ton âme sœur trouvée, tout ce que à quoi ta vie se résume n'est rien d'autre qu'une peur permanente de perdre l'autre, car c'est une partie de toi-même que tu tentes de protéger. C'est navrant d'en être réduit à ce point par l'amour, n'est-ce pas ? Je t'avoue avoir été cependant surpris d'apprendre la mort de Ronald Weasley. Je ne m'attendais pas à ce que tu ailles jusqu'à lui ôter la vie d'un être cher pour la protéger et me convaincre, comme tu voulais me le faire croire, d'un profond sentiment de colère et d'indifférence à la fois. Par ce geste, tout ce que tu me transmettait, Drago, était, au contraire, ta volonté ardente de sauver la vie de Granger et non de la lui prendre. Et cela par tous les moyens nécessaires, y compris le meurtre de son meilleur ami. Meurtre organisé, si je ne me trompe pas ? Quelle autre raison aurait eu Weasley de faire appel à toi, alors que le peu de vie qu'il lui restait touchait à sa fin ? Il savait qu'il allait être tué de toute façon, voilà tout, et a juste rendu sa mort utile pour sauver la fille.
Drago n'écoutait plus que vaguement. Qu'est-ce que c'était que cette histoire d'âme sœur ? Il avait beau réfléchir, il ne trouvait aucune raison à Voldemort de lui mentir à ce sujet. De plus, Hermione semblait parfaitement au courant, à en juger par son manque de réaction, et Drago ne put empêcher la colère de naître lentement au creux de son estomac. Combien de choses encore ignorait-il qu'elle savait ? Et puis, cette histoire de haine impossible ne collait qu'à moitié. Non seulement Hermione et lui s'étaient détestés pendant plus de sept ans, mais elle en était même allée jusqu'à le faire souffrir par pure vengeance. Il ne put s'empêcher de faire la remarque :
- Si on ne peut éprouver ni haine, ni rancune envers l'autre, dit-il alors, comment décririez-vous le sentiment qui a poussé Hermione à me faire si mal, l'hiver dernier, hein ?
Voldemort sourit, mais ne répondit pas. Il chercha une réponse du côté d'Hermione, mais son regard restait constamment fixé vers le sol, comme effrayée de ce qui allait suivre. Drago commença sérieusement à s'énerver, ne supportant plus cette situation d'ignorance. Pourquoi ne lui répondait-on pas, à la fin ? La raison en était-elle si évidente pour qu'on la lui refuse ainsi ?
Oui. Si évidente qu'elle était là, flottant devant ses yeux, attendant simplement qu'il accepte de la voir.
La réponse à ses interrogations était en fait à portée de main car elle ne l'avait jamais quitté. Depuis le début, depuis le tout premier jour où Hermione avait prétendu être une autre, la certitude qu'elle mentait n'avait jamais disparue. Elle s'était cachée loin, profondément dissimulée derrière la réalité qu'on le forçait à accepter, mais elle était restée présente. Quelque part dans un coin reculé de son esprit, l'évidente vérité avait simplement patienté tout ce temps qu'il réalise que son cœur, à lui seul, n'aurait jamais été capable de battre avec tant de force et autant de temps. L'évidente vérité avait simplement attendu qu'il reprenne assez confiance en lui pour sentir que les battements d'un cœur étranger se mêlaient constamment aux siens. Déguisée sous forme de puzzle aux pièces manquantes qui ne collaient pas avec le reste de l'histoire, la réponse du pourquoi avait refusé d'être chassée entièrement par les interprétations rapides d'un chagrin oppressif et destructeur.
Oui, il avait toujours su, mais avait accepté de croire.
Et il voulait continuer de croire à ce mensonge. Il était hors de question de déterrer les doutes et les souffrances du passé qu'il s'était tant acharné à égarer. Il avait enduré un an de torture douloureuse pour obliger son corps à cesser de réclamer la chaleur d'Hermione, pour forcer son esprit à effacer les souvenirs de son sourire, et il n'était pas prêt à gâcher tous ces efforts maintenant. La fille dont il était tombé amoureux à Poudlard n'avait jamais été vraie, on le lui avait bien fait comprendre. Comment pouvait-on à présent lui demander d'y croire de nouveau ? De faire revivre cette femme, ainsi que tous les souvenirs qui lui étaient liée ? C'était comme s'essayer à prétendre que Blaise était encore en vie ; faux, inutile, et d'une insupportable douleur.
- Tu as compris, n'est-ce pas ? résonna la voix de Voldemort. Ce n'est pas elle qui s'est joué de toi, c'est moi. J'ai ordonné à ce qu'on vous sépare.
Le voile de brume qui s'obstinait à maintenir la vérité invisible finit par se dissiper entièrement. Désormais, Drago ne pouvait plus rester abrité par l'erreur, ni empêcher les questions d'inonder son cerveau, car Voldemort venait de rendre les choses soudainement très claires : tout était son œuvre. Évidemment. Qui d'autre ? Quelle autre âme que la sienne aurait sinon été assez puissante pour détruire un an de sa vie ? Il était derrière tout ça depuis tout ce temps, et il aurait dû le deviner.
- Tu penses bien, riait Voldemort, qu'en apprenant ta liaison avec cette Sang-de-Bourbes, je m'y suis penché de près. Après ton refus de porter la marque, j'ai tout de même décidé de te laisser une chance de revenir vers moi à la fin de l'année, car Lord Voldemort sait pardonner. Mais lorsque Lisa m'a rapporté ta nouvelle fréquentation, j'ai eu peur qu'elle influence ton choix. J'aurais pu faire tuer la fille, mais quel intérêt ? Ça ne t'aurait pas fait revenir. Non, j'avais besoin que tu t'éloigne d'elle, et que tu ne sois pas tenté de t'y accrocher. La meilleure façon restait donc de te la faire détester, et ça a été drôlement facile. Je te connaissais assez pour savoir que l'humiliation restait une corde sensible, et je comptais sur ta colère pour te rallier à mon camp. Aussi, pour mettre toutes les chances de mon côté, j'ai manigancé moi-même ton arrestation au ministère, en ordonnant à l'un de mes espions de donner ton nom. Je te sauvais du baiser du Détraqueur, et Granger acceptait de te laisser partir. C'était notre petit pacte.
Drago tourna un regard incompris vers Hermione. Elle fermait les yeux, des larmes s'écoulant silencieusement le long de ses joues.
- Malheureusement, reprit Voldemort, je n'avais pas prévu que tu t'accroches désespérément à cette Sang-de-Bourbe... Je ne comprenais pas, malgré tous mes efforts, la raison qui te poussait à aller jusqu'à renier la dette que tu avais envers moi. Et puis, j'ai découvert l'existence de ce lien qui vous unissait. Il m'apparaissait très clair, par la suite, que ce phénomène d'une rareté extrême t'empêchait de faire les bons choix. Je n'avais plus qu'à me débarrasser de toi, car tu n'étais alors rien d'autre qu'une nouvelle victime de l'amour, faible et piteuse. Mais la nature d'un objet si rare m'attirait, et je lui ai vite trouvé l'utilité parfaite. Le problème, c'est que j'allais avoir besoin de toi. Je savais que tu refuserais, mais j'ai tout de même tenté de te faire chanter en tuant les êtres que tu aimais. Comme je m'y attendais, tu as persisté à me fuir et à tuer mes précieux fidèles. Je dois t'avouer avoir songé à renoncer au cœur de Bulborbus pendant un moment, et avoir envisagé de simplement vous éliminer tous les deux, elle la première. C'est ce moment-là que Weasley a choisi pour s'échapper... L'heure suivante, tu venais toi-même m'offrir la solution sur un plateau en or.
Le rire de Voldemort s'éleva de plus bel. Chacun des mots qu'il prononçait regorgeait de victoire, de fierté, d'excitation. Drago se sentait malade. Plus rien ne semblait avoir de sens, autour de lui. Il passait d'un monde d'illusion à celui de la réalité avec une telle vitesse que le voyage lui donnait envie de vomir. Devait-il être heureux d'apprendre que ce qu'il avait vécu avec Hermione n'avait jamais été de la comédie, où au contraire détruit plus encore en réalisant quelle vulgaire marionnette il avait été du début à la fin ? Il était si dur de croire à ce qui ne semblait être qu'un cauchemar étranger, si difficile de revenir à une époque aussi lointaine que les tourments de Poudlard. Drago n'était pas sûr de vouloir risquer d'espérer de nouveau : et s'il faisait une seconde chute ? Et si, alors qu'il finissait par accepter la vérité, on lui apprenait finalement que tout avait bel et bien été mensonge ? Jamais il ne survivrait une autre révélation de ce genre, jamais. La période sombre qui avait suivi Poudlard l'avait presque anéanti à mort, et il lui avait fallu toutes les forces du monde pour se reconstruire. S'il venait à être détruit de nouveau, il n'y avait aucune chance que les morceaux se recollent, cette fois.
Mais, alors que Voldemort continuait de se délecter de sa confusion, Drago trouva tout ça bien superflu, tout à coup. Pourquoi se faire du mal à comprendre maintenant ? Il allait mourir, Hermione aussi, et tous les membres de l'Ordre qui observaient en silence allaient être tués également. Drago en vint même à penser que, peut-être, il aurait été mieux de mourir sans savoir la vérité. Oui, peut-être aurait-ce été moins pénible à endurer.
- Et maintenant, dit Voldemort, la voix pétillante d'excitation, je veux que tu regardes ton pitoyable échec en face, Drago. Je veux que tu regardes mourir ce que tu t'es vainement acharné à garder en vie. Je veux voir ton cœur se déchirer lamentablement en deux morceaux lorsqu'elle rendra son dernier souffle.
Il leva sa baguette et Hermione fut soudain élevée dans les airs, au dessus de tous. Malgré la hauteur à laquelle se trouvait son corps, l'éclat de la lune rendait clairement visible son expression assurée et courageuse, faisant ressortir pour la dernière fois son caractère brave de Gryffondor que la mort n'effrayait pas. Ses cheveux trempés dégoulinaient le long de son visage, et ses jambes révélaient beaucoup d'égratignures plus ou moins profondes.
C'était à lui qu'elle abandonnait son ultime regard, et Drago le soutint du mieux qu'il put, redoutant de le voir s'éteindre à chaque nouvelle seconde.
- Vos dernières paroles, miss Granger ? invita aimablement le Lord Noir.
Cette dernière continuait de fixer intensément Drago. Puis, puisant tout ce qui lui restait de force et de volonté, ouvrit légèrement la bouche, et lâcha ces quelques mots :
- C'est l'histoire d'une fille qui trouvait un Serpentard bien trop prétentieux et arrogant à son goût...
Cette simple phrase déclencha un véritable retour dans le passé, et Drago se revit alors sur l'estrade de la Grande Salle, un an auparavant. Comme à présent, toutes les têtes étaient tournées vers Hermione, et chacun écoutait avec attention les paroles de la Gryffondor. Paroles qui avaient détruit sa vie un soir d'hiver, et qu'il n'avait au grand jamais oubliées...
- Il se moquait souvent d'elle, continuait Hermione, la gorge nouée. Il l'insultait, la ridiculisait, elle et sa famille. Mais, malgré toute cette humiliation, la fille n'a jamais ressentit le besoin de se venger. La fille n'a jamais, jamais eu l'intention de la lui faire payer en retour. Sans vraiment s'en rendre compte, elle a même fini par tomber follement amoureuse du Serpentard. Tellement amoureuse qu'elle a sacrifié son amour en échange de la vie du garçon. Voilà la véritable histoire d'Hermione et Drago. Celle que j'aurais dû raconter un an plus tôt.
Elle ferma les yeux, et une énième larme dévala la courbe de sa joue, se mélangeant aux gouttes de pluie. Lorsqu'elle les réouvrit, ils ne virent encore une fois que le bleu intense du jeune homme.
- Je n'ai jamais eu à jouer la comédie lorsqu'il s'agissait de t'aimer, Drago, dit-elle alors. Le seul et unique rôle que j'ai joué, c'est celui de la fille qui ne t'aimait pas. C'était cette Hermione là qui était fausse.
Et Drago la revit. Telle qu'elle était à Poudlard, à l'époque où il découvrait le bonheur d'être amoureux. Oui, c'était bien cette Hermione là qui se tenait devant lui, avec ce même regard, ces mêmes traits... Comment avait-il pu croire une seule seconde qu'elle eût été différente de la femme avec laquelle il avait passé les trois derniers jours ? Bien sûr qu'elles n'étaient qu'une seule et même personne. Maintenant qu'il le savait, il en réalisait l'évidence. Il en réalisait sa naïveté. Malheureusement, c'était bien trop tard.
- Avada...
Drago referma discrètement ses doigts autour du petit bâton de bois glissé un peu plus tôt dans sa poche par Lisa. Mais il n'eut pas à s'en servir.
Voldemort s'interrompit de lui-même. Personne ne le regardait. Personne ne l'écoutait. Comment osaient-ils prêter ainsi si peu d'attention à sa gloire ? Cependant, lorsqu'il vit que même ses propres partisans avaient les yeux tournés vers le ciel, il se résolut à faire de même. Que pouvait-il bien y avoir de plus important que lui, le nouveau maître du monde ?
Tous observaient à présent l'imposant nuage rouge qui illuminait le ciel d'encre. Comme si la nuit froide tirait sur elle une couverture, la nuée d'étoiles filantes recouvrit le ciel au dessus de leurs têtes en quelques secondes, plongeant la forêt dans un halo rougeâtre. Drago vit Hermione sourire de toutes ses dents. Et c'est dans un grondement de tonnerre que le déluge d'étoiles fondit droit sur eux, vif et tranchant.
Tout se passa très vite. Drago eut tout juste le temps d'apercevoir Hermione se faire brutalement emportée dans la course du vampire, tandis que le sortilège fatal de Voldemort fouettait l'air vide. La seconde d'après, l'armée de vampires dévastait la forêt à la façon d'un bombardement assourdissant. Générant une véritable panique dans la foule, la vague rouge rasa les bois en faisant tomber les Mangemorts au passage comme de vulgaires dominos.
- Hermione ! cria Drago dans l'agitation.
L'Ordre du Phoenix ignorait la nature des nouveaux arrivants, et, de ce fait, continuait de pousser des cris d'affolement et de courir dans tous les sens. Drago se fit bousculé à droite à gauche, avant de finalement apercevoir Hermione un peu plus loin, saine et sauve. A ses côtés, Leeyame.
- C'est à mon tour de te sauver la vie, Hermione Granger, l'entendait-il dire malgré le vacarme. Ma dette est payée.
- Qu'est-ce qui vous a décidé à venir ? demanda Hermione.
- Le Seigneur des Ténèbres détient quelque chose qui appartient à mon peuple, et nous sommes venus le récupérer de droit. De toute façon, je n'ai pas eu le choix d'envoyer mon armée se battre à vos côtés ; Soane et Orience n'en ont fait qu'à leur tête et ont convaincu leurs frères et sœurs de vous porter de l'aide.
Elle avait dit ça avec un petit sourire amusé qui laissait deviner qu'elle approuvait leur comportement en dépit de la touche d'impudence. Sûrement avait-elle été trop heureuse de revoir les deux membres qu'elle chérissait revenir vers elle.
La panique n'émanait désormais que du camp de Voldemort, car l'Ordre du Phoenix avait réalisé qu'on leur portait secours et s'était alors remis au combat avec une joie infinie. En effet, un parfum d'espoir embaumait de nouveau l'atmosphère, car les harpies avaient enfin trouvé adversaire à leur taille. Ces effrayantes créatures ailées que l'on croyait invincibles dégringolaient du ciel les unes après les autres, une morsure décorant leur cou sanglant. Les vampires possédaient une vitesse que les femmes-oiseaux n'avaient pas, et leurs serres acérées devenaient alors bien inutiles face aux dents aiguisées de l'ennemi.
Soudain, la foule se figea. Seuls les combats vampires-harpies poursuivaient leur cours dans les airs, indifférents au garçon à la cicatrice en forme d'éclair qui se tenait debout au milieu de tous.
- Non... souffla Voldemort dont les pupilles se réduisirent à la taille de deux fentes. C'est impossible... Tu ne peux pas être encore en vie !
- Tu vois, Tom, disait Harry Potter avec un petit sourire, ton aversion pour l'amour t'a rendu aveugle de sa puissance, et tu subis maintenant les conséquences de ton échec.
- Je n'ai pas échoué ! rugit Voldemort. Je n'échoue jamais, tu m'entends ? Tu es mon seul échec jusqu'à présent, mais plus pour longtemps ! Avada Kedavra !
- Expelliarmus ! lança en même temps Potter.
C'est alors que le même phénomène qu'il y a dix-huit ans se produisit : les deux sortilèges se rencontrèrent, mais celui de Voldemort se retourna ensuite contre lui. Le corps frêle du Mage Noir s'effondra au sol aux yeux de tous. Mort.
C'était fini.
Ses iris rouges ne pétillaient plus de cruauté. Son regard si terrifiant était maintenant vide de vie. Il emportait à jamais le mal avec lui, dans les entres de l'Enfer. Silencieux, chacun observait sans y croire la forme grisâtre étendue au sol.
C'était fini.
Drago croisa les yeux émeraude du Survivant. Ce dernier lui adressa un signe de tête amical. Bien qu'il s'était toujours moqué de l'opinion de Potter vis à vis de lui, Drago ne pouvait s'empêcher de se sentir plus léger maintenant que le Gryffondor le savait innocent. Lors du récit de Voldemort, Potter était déjà en vie, et avait alors sûrement tout écouté. Tout le monde avait écouté d'ailleurs, et il ne serait désormais plus considéré comme un assassin.
Il vit Ginny Weasley se jeter littéralement sur son petit ami ressuscité, et ses pensées se retournèrent vers Hermione. La jeune femme se tenait là, à quelques pas, et elle le fixait. Drago ne bougea pas. La pluie continuait de tomber en averse, créant comme une sorte de rideau d'eau entre leurs deux regards.
Elle s'avança enfin vers lui à pas lents. Et, alors qu'elle arrivait à sa hauteur, Drago la repoussa doucement en arrière. Mais elle revint. Drago la repoussa de nouveau. Hermione insista, revenant vers lui comme un aimant, mais il continuait de la refuser, la repoussant chaque fois avec un peu plus de fermeté.
- Prends-moi dans tes bras, dit-elle en revenant.
- Non, répondit Drago en la poussant encore.
- Prends-moi dans tes bras ! hurla-t-elle alors en éclatant en sanglots.
Drago sentait ses yeux le piquer atrocement. Heureusement, la pluie dissimulerait ses larmes si l'une d'elle parvenait à s'échapper.
- Pourquoi n'es-tu pas venue ? demanda-t-il alors, la voix tremblante.
Noyée dans ses larmes de regret, la jeune femme ne parvint à sortir le moindre son, et se contenta de s'accrocher au tee-shirt de Drago. Celui-ci les lui ôta aussitôt.
- Pourquoi tu n'es jamais venue ! s'écria-t-il alors, se sentant exploser. Je t'attendais ! Je t'attendais, Hermione ! Mais tu es restée dans le train ! Tu ne m'as pas rejoint !
- Si... l'entendit-il souffler.
- Quoi ? aboya-t-il.
- Je suis venue, Drago, dit-elle en levant ses yeux tristes vers lui. Mais tu étais déjà parti. J'ai crié ton nom si fort. J'ai crié ton nom si longtemps...
Elle s'interrompit, la respiration bruyante. Drago n'arrivait pas y croire. L'avait-elle vraiment rejoint à la tour d'astronomie, ce jour-là ? Était-ce sa voix qu'il avait entendu en écho, alors qu'il partait avec Blaise ?
- Je suis désolée, lâcha-t-elle.
- Comment as-tu pu ?
Drago ne parvenait pas à se calmer. La colère faisait bouillir son sang, et il sentait ses mâchoires lui faire mal à force d'être contractées en permanence. Les révélations s'enchainaient trop vite, et elles étaient toutes bien trop dures à digérer d'un seul coup.
- Comment as-tu pu me mentir si longtemps ! s'écria-t-il. As-tu la moindre idée de ce que j'ai vécu ? Me faire croire que tu ne m'aimais pas !
- Et moi, hein ? s'écria-t-elle à son tour. Tu crois que c'était une partie de plaisir que de renoncer ainsi à toi ?
- Ne te pose pas en victime, Hermione ! Ce n'est pas toi qui a passé chaque jour à essayer de te convaincre que tu n'étais pas folle ! J'ai passé l'été en enfer ! J'ai souffert comme tu ne peux même pas ima...
La gifle qui l'interrompit fut si violente qu'elle lui fit mal. Les yeux de la jeune femme semblaient lancer des éclairs.
- Comment oses-tu... siffla-t-elle. Comment oses-tu prétendre que je n'ai pas souffert ? Que j'ignore le mal que je t'ai fait ? Je t'interdis de croire que j'ai été moins affectée que toi ! Tu m'entends Drago ? Je te l'interdis ! Que crois-tu que j'ai ressenti en te torturant ainsi, hein ? Que crois-tu que l'on ressent lorsqu'on doit dire à l'être qu'on aime le plus au monde qu'on ne l'a jamais aimé ? Ça m'a mangé de l'intérieur jusqu'à la pourriture...
- Tu n'aurais jamais dû accepter un tel pacte ! relança-t-il alors.
- Je n'avais pas le choix !
- Bien sûr que si ! Tu aurais pu me dire la vérité !
- Tu allais mourir ! rugit-elle en le poussant à son tour, hors d'elle.
- J'aurais pris la fuite ! mentit-il.
- Tu sais très bien que tu ne pouvais pas quitter Poudlard sans risque ! Pas à dix-sept ans ! Pas avec le ministère et Voldemort à tes trousses ! Ta vie aurait simplement tourné en cauchemar ! Je voulais juste te sauver de la mort ! Pourquoi ne comprends-tu donc pas ? Tu...
Elle fut coupée dans sa tirade par les lèvres de Drago qui, sans prévenir, avaient plongé sur les siennes. Encore emportée dans son élan de rage, Hermione se débattit, mais le jeune homme maintenait ses lèvres fermement pressées contre celles de la Gryffondor. Elle était si belle quand elle s'énervait ainsi.
Hermione finit par cesser de résister et s'abandonna alors au baiser avec fougue, comme si elle espérait rattraper le temps perdu. Drago la serrait contre lui avec cette même force, pour l'ancrer à jamais en lui, la posséder tout entière et pour toujours. Plus rien n'avait d'importance, désormais. Le passé était derrière lui, et l'avenir était avec elle. Il embrassait en ce moment-même la fille dont il était tombé amoureux à Poudlard, mais aussi celle qui avait su le faire fondre plus encore, durant les derniers jours. Oui, Hermione Granger n'était qu'une seule et même personne, et il était, lui, Drago Malefoy, son autre moitié. Ils étaient fait l'un pour l'autre, et plus rien ne pourrait jamais les séparer.
Lorsque leurs bouches se décollèrent enfin, Drago colla son front contre celui d'Hermione, appréciant encore le goût délicieux d'un échange véritable. Autour d'eux, les Mangemorts prenaient la fuite, leur Maître ayant rendu l'âme. Les sorciers continuaient de chasser les derniers résistants, le cœur en joie.
- Plus jamais de mensonge, souffla Drago.
- Plus jamais, assura-t-elle en hochant la tête.
Il lui caressa la joue.
- On va être heureux, maintenant, sourit-il. Tous les deux, ensemble. Pour toujours.
- Oui, sourit-elle.
Drago sentit le corps de la jeune femme tressaillir l'espace d'un court instant. Il regarda son visage ; elle ne souriait plus. Ses traits étaient figés d'une drôle de manière. Avant même qu'il ne comprenne quoi que ce soit, Hermione s'écroula lourdement dans ses bras.
Drago vit alors la flèche plantée dans son dos.
Il ne réagit pas. Ses bras retenaient le corps lourd, figés. Ses membres étaient paralysés de surprise, ses yeux bleus exorbités d'horreur. Il entendait les gens s'agiter autour de lui, il sentait qu'on lui enlevait Hermione pour l'allonger au sol. Il ne voulait pas regarder, non. Il refusait de revoir ce visage crispé, ce corps frêle et mourant.
Son regard croisa alors celui de l'assassin. L'arc encore tendu droit devant lui, le centaure se tint immobile encore quelques secondes, puis déguerpit soudainement, ressentant la colère dangereuse de l'humain. Drago détala à son tour, ignorant les voix qui l'appelaient. Plus rien n'occupait son esprit que les bruits de galop qu'il se devait de rattraper. La créature mourrait. Elle pouvait fuir autant qu'elle le souhaitait, Drago la rattraperait, et la tuerait.
Mais le centaure était bien plus rapide. Tout à coup, il sentit deux mains le soulever, et se retrouva alors à cheval sur un autre centaure. Il le reconnut comme l'un des résistants qui se battait contre son propre peuple, et il venait à présent en aide à Drago. Il était si rapide que le jeune homme lutta pour s'accrocher. Les branches de la forêt lui fouettaient le visage et lui éraflaient les jambes, mais il ne s'en soucia pas, car l'arrière-train de sa proie venait de réapparaitre, quelques mètres devant eux. Sans demander son avis, Drago s'empara de l'arc de son allié, et tira sur la corde. Un œil fermé au niveau de la flèche, il relâcha ses doigts. Le fin morceau de bois vint se planter profondément dans les côtes de la créatures dont les sabots trébuchèrent, l'entrainant dans une chute turbulente. Drago sauta de sa monture et avança à pas rapides vers la créature agonisante au sol. L'arc toujours en main, il décocha une autre flèche, aperçut l'œil terrorisé du centaure, puis tira dans la tête. Ses doigts se refermèrent sur une troisième flèche, et il tira encore. Mais peu importe le nombre de flèche qu'il tirait, sa colère ne s'apaisait pas.
Une main glaciale se posa sur son épaule. Drago fit volte-face et pointa son arc en direction du vampire qui ne tressaillit pas d'un centimètre.
- Elle veut te voir, dit Soane d'une voix calme. Il ne te reste plus beaucoup de temps.
Drago abaissa lentement son arc, revenant à la réalité avec douleur. Il accepta la main que le vampire lui tendit, et transplana en quelques secondes à l'endroit où il avait laissé le corps. Une foule de sorciers était amassée autour, cachant à sa vue ce qu'il ne désirait de toute façon pas voir. Il s'approcha lentement, tandis que chacun s'écartait sur son passage, l'accompagnant de regards désolés. Potter fut le dernier à s'effacer, le visage décomposé par le chagrin.
Lorsqu'il la vit enfin, étendue par terre, le teint livide, les traits tirés, les yeux à demi-clos, Drago se figea. Il ne voulait pas aller plus loin, car ce serait donner raison à Bellatrix. La vision de sa bien aimée sans vie qu'il avait vu dans la forêt venait de prendre réalité. « Parce que les gens que tu aimes meurent autour de toi, Drago ».
Il chassa la voix de sa tête, et laissa tomber ses genoux auprès d'Hermione. Cette dernière tourna avec difficulté sa tête vers lui. Elle semblait paralysée, tandis que le venin la détruisait de l'intérieur un peu plus chaque seconde.
- Faites quelque chose, ordonna Drago à la foule d'une voix froide.
- On ne peut rien contre les flèches de centaures, répondit quelqu'un qu'il ne connaissait pas, probablement un médecin de St Mangouste. Elles sont mortelles. Je suis désolé.
- Essayez quand même ! s'énerva-t-il. Quelque chose, n'importe quoi ! Mais ne restez pas là sans rien faire !
Personne ne bougea, se contentant d'observer le pauvre garçon qui ne réalisait pas encore que c'était la fin pour elle. Drago s'adressa alors à Hermione sur le même ton glacial.
- Relève-toi.
Voyant qu'elle ne réagissait pas, il se mit à la secouer brutalement.
- Relève-toi ! hurla-t-il. Bas-toi, bon sang !
Des mains tentèrent de l'écarter du corps qu'il agitait avec force, mais il les repoussa violemment.
- Debout, Hermione ! s'écria-t-il de sa voix brisée par les larmes. Tu as promis ! Tu m'as promis d'être toujours là avec ce collier ! Respecte ta promesse, maintenant ! Lève-toi !
Il n'entendait plus que vaguement les voix autour de lui qui tentaient vainement de le raisonner, et sentait à peine les bras, pourtant puissants, qui essayaient de le séparer d'elle. Fermement collée à Hermione, il transplana.
Loin de l'agitation de la forêt, le silence du lac noir près duquel il avait atterri apaisa sa colère. Une odeur de mort régnait autour du château, mais Drago ne jeta même pas un coup d'œil au champ de bataille. Ses yeux regardaient le visage blafard d'Hermione, éclairé par la lune. Il la vit alors essayer de parler, et approcha son oreille de sa bouche pour lui faciliter la tâche.
- Je... je suis partie... parce que j'avais peur...
Il devina qu'elle parlait du soir, après le bal, où ils avaient dansé à cet endroit même.
- Peur de quoi ? murmura-t-il.
Elle tourna vers lui ses yeux presque éteints et pourtant encore si chaleureux.
- Peur de ce que je ressentais... J'ai su que j'étais... tombée amoureuse... ce soir-là. Et il était effrayant... d'aimer le beau Drago... Malefoy.
Elle essaya de sourire, mais ne parvint qu'à rendre une grimace de douleur. Drago posa délicatement ses lèvres sur les siennes, lui offrant son dernier baiser. Le cœur atrocement lancinant, il s'allongea à ses côtés, et posa sa tête sur sa poitrine. Il écouta ainsi les battements de son cœur ralentir, et attendrait jusqu'à qu'il n'entende plus rien. La peau de la jeune femme était glaciale, et ses veines étaient devenues noires. Puisqu'il était impuissant à la sauver, il lui fallait accepter rapidement l'évidence pour pouvoir profiter de ses derniers instants avec elle. Il souffrirait plus tard. Il avait toute la vie pour mourir de chagrin. Car il savait très bien qu'elle ne souhaitait pas qu'il mette fin à ses jours. Alors il vivrait pour elle, bien que son être entier était en train de périr avec sa moitié.
Drago allait fermer les yeux, lorsqu'un éclat argenté lui attira l'œil. Il releva légèrement la tête, et aperçut alors la chaîne autour du cou d'Hermione. Le petit cœur de Bulborbus reposait paisiblement sur sa poitrine qui ne s'élevait plus que très faiblement.
Le flash qui surgit brusquement du passé s'empara de lui si rapidement que la tête lui tourna. Il revoyait exactement la même scène, alors qu'ils étaient encore étudiants. Hermione était allongée sur le lit de l'infirmerie, son corps haché d'entailles magiques et probablement fatales. Il se souvint avoir aperçu ce même petit éclat autour de son cou, et se rappela la douleur éprouvée au contact du pendentif, sa peau qui le brûlait ardemment. Tout ce dont il se souvenait ensuite, c'était de s'être réveillé sur un lit d'hôpital à son tour, et Hermione saine et sauve. Il ne sut jamais ce qu'il s'était passé, car seule la santé de la jeune femme l'avait alors préoccupé.
Il en était de même ce soir. Il ignorait d'où lui venait cette attraction envers le collier, mais il savait ce qui lui restait à faire. Peu importait les conséquences sur lui, il sentait qu'il devait tenter de la sauver par ce moyen magique.
Espérant qu'il ne soit pas trop tard, Drago se redressa d'un bond et approcha ses doigts du petit cœur violet. « Faites que ça marche, Merlin, faites que ça marche ! » pria-t-il.
A peine eut-il effleurer l'objet que sa peau rentra d'elle-même en contact avec le pendentif. Il vit alors le cœur prendre une teinte rouge vif, tandis que la chaleur lui brûlait les doigts, ces derniers fermement collés au pendentif. Son cœur se mit soudain à lui faire mal, comme si deux mains s'amusaient à l'écrabouiller de toute leur force. Il pouvait sentir le poison traverser le corps d'Hermione jusque dans le sien, ses veines s'obscurcirent et doubler de volume. La respiration coupée, ses poumons semblaient sur le point d'exploser à force de lutter pour se gonfler d'air.
Secoué de violents spasmes, Drago s'écroula aux côtés de la jeune femme. Puis, son corps se relâcha d'un coup, vidé d'énergie. Ses paupières étaient si lourdes qu'il était dur de les maintenir ouvertes, mais il trouva la force de tourner la tête vers Hermione. Son visage, à quelques centimètres du sien, était désormais paisible et reposé. Il la vit alors ouvrir ses yeux avec une extrême lenteur, comme si elle émergeait d'un doux rêve. En croisant son regard, elle lui sourit tendrement.
Elle ne savait pas encore. Elle ignorait que Drago allait fermer les yeux à son tour, et pour toujours. Tant mieux, elle était heureuse en cet instant.
Il voulut sourire en retour, mais les muscles de son visage ne répondaient plus. Alors, avec un soupire de satisfaction, il laissa ses paupières replonger dans un sommeil serein et éternel.
Six Ans Plus tard, Poudlard.
Hermione resserra un peu plus son gilet sur sa poitrine. L'hiver n'avait jamais été aussi froid. Ses pieds écrasaient les feuilles mortes dans la neige, et le vent lui glaçait son visage aux joues rougies.
Comme à chaque fois, elle s'empêchait de regarder autour d'elle les centaines de noms qui attiraient son regard, et se contentait d'avancer à pas rapides vers la tombe principale, la plus belle de toutes. Le cimetière dédié aux combattants de l'Ordre du Phoenix avait été installé derrière le château, pour ne pas imposer au paysage une atmosphère trop lugubre.
Elle se posta face à l'immense et majestueuse pierre qui dominait toutes les autres par sa hauteur, avant d'effleurer de ses doigts le nom gravé en italique.
- Bonsoir, souffla-t-elle.
Elle pinça ses lèvres un peu gercées par le froid. Elle ne pleurerait pas cette fois-ci, pas ce soir. C'était une belle nuit étoilée, et une date spéciale.
- Je n'ai pas pu venir le mois dernier, s'excusa-t-elle en posant le bouquet de fleur blanches au pied de la pierre tombale. Mon travail m'a pris pas mal de temps. Tu sais, je t'ai parlé de cette nouvelle génération de sorciers qui refusent d'aller à l'école ? Eh bien, la situation empire, car de plus en plus de jeunes se rallient à ces groupes et apprennent la magie par eux-même. Le problème, c'est que la magie qui en sort est d'une nature toute nouvelle, car elle est inventée et modifiée, ce qui peut se révéler dangereux.
Elle s'interrompit un instant, puis reprit :
- Peu importe, je ne vais pas te parler de mon travail au ministère, aujourd'hui. Tu sais que c'est l'anniversaire de Leïla, n'est-ce pas ? Elle grandit vite, tu verrais ! Et elle te ressemble tellement...
Sa gorge se noua. Hermione ravala ses larmes, puis sourit.
- Ses cheveux sont aussi clairs que les tiens, maintenant. Parfois, j'ai l'impression de te voir à travers elle. Tu me manques. Tu me manques tellement...
Elle jeta un œil au château, puis reposa son regard sur la pierre.
- Je ne peux pas rester plus longtemps, cette fois, dit-elle. Je reçois du monde à diner. J'ai fait ton plat préféré, et Leïla l'adore aussi.
La jeune femme se pencha en avant et déposa un baiser sur la pierre froide.
- Je t'aime, murmura-t-elle. A bientôt.
Puis, elle tourna les talons, et transplana au manoir. Elle n'aimait pas le silence de cet endroit, c'était trop vaste et pas assez chaleureux. Après avoir traversé l'immense hall d'entrée, elle pénétra dans la cuisine et sortit le rôti du four. Les autres ne devraient pas tarder.
- Charlie ! appela-t-elle.
Des bruits de pas précipités dévalèrent aussitôt les escaliers. Une jolie jeune femme aux yeux vert jade apparut dans l'encadrement de la porte.
- Oui ?
- Peux-tu mettre la table, s'il te plaît ? demanda Hermione en parsemant les pommes de terre de fromage.
Charlie s'exécuta. Elle était devenue si belle, songea Hermione. Elle se rappela alors, quelques années auparavant, lorsque, dans l'espoir d'en apprendre un peu plus, elle avait fait des recherches sur sa mère et son passé. Les archives moldues n'avaient rien donné de plus que ce qu'elle ne savait déjà. Ce fut quand elle eut l'idée de faire un tour du côté du monde magique qu'elle tomba sur son véritable arbre généalogique. « Alena Mason », de son véritable nom « Agatha », sans nom de famille spécifié, se trouvait être la descendante très lointaine d'Agalophonos, l'une des sirènes aux légendes répandues dans les vieux livres mythologiques. Dès lors, la magie qui coulait dans les veines de son fils n'était plus surprenante, tout comme l'évidente beauté de Charlie et sa voix au son mélodieux qui avait d'ailleurs fait sa popularité dans les petits bars londoniens.
- Tu as fait le gâteau d'anniversaire ? demanda Hermione.
- Oui, répondit fièrement Charlie. Celui à l'ananas, comme tu le voulais.
- Merci, c'est une bonne chose de faite. Tu as oublié deux assiettes.
- Ah bon ? s'étonna-t-elle en regardant la longue table de bois verni. Qui d'autre ?
- Orience et Soane.
Le visage de la jeune femme se décomposa.
- Quoi ? explosa-t-elle. Tu as invité cet idiot ? J'y crois pas, ça ! Est-ce que tu le fait exprès pour m'embêter ou quoi ?
Hermione soupira. Le caractère bien trempé de Charlie lui rappelait ses nombreuses crises d'adolescence, et c'est une époque qu'elle était heureuse d'avoir derrière elle, malgré ses occasionnels caprices comme celui-ci.
- C'est un ami de la famille, que tu le veuilles ou non, répondit Hermione d'un ton las. Vos chamailleries ne me regardent pas.
- Tu ne penses vraiment qu'à toi pour te soucier si peu de ce que je ressens ! lança-t-elle en laissant tomber brusquement deux nouvelles assiettes à table.
Heureusement, la sonnette retentit à ce moment-là, et elle n'eut pas besoin de se disputer.
- Tu veux bien aller ouvrir ?
Charlie sortit de la cuisine en grognant.
- Je te préviens que si c'est lui, je referme la porte ! lança-t-elle depuis le hall.
Hermione fut contente d'entendre la voix d'Harry, et se recoiffa rapidement avant de le rejoindre. Elle enlaça son ami et le dirigea vers la cuisine. Un peu plus tard, Neville et Luna arrivaient.
- Qu'est-ce que c'est ? demanda Hermione en essayant de masquer son dégoût devant le « gâteau » qu'avait amené Luna.
Ça ressemblait plutôt à une mousse noirâtre dont les morceaux verts parsemés un peu partout donnait l'impression qu'un Troll avait éternué dedans. Le tout dégageait une odeur acide insupportable.
- C'est une recette de ma grand-mère, répondit-elle fièrement. C'est à base Lyllon et de chocolat.
- Oh, et, heu... qu'est-ce c'est le... Lyllon ?
- C'était ce qu'utilisaient les sorciers il y a bien longtemps pour soigner les maux d'estomac. C'est très bon pour la santé !
- Alors, c'est une sorte de plante ? devina Hermione en lui prenant le plat des mains.
- Oh non, le Lyllon est un moustique d'Asie.
Hermione s'empressa de détourner la tête pour masquer son horreur, avant de donner le plat à Charlie. Cette dernière allait protester, mais Hermione lui fit les gros yeux et la jeune fille se résigna à se taire.
- Alors, madame la ministre ? sourit Harry. Comment le Ministère se porte-t-il face à la jeunesse révolutionnaire ?
- Parlons d'autre chose, si tu veux bien, maugréa-t-elle. Où est Ginny ?
- Elle ne devrait pas tarder à nous rejoindre. Comment se passe la première année de Jaffrey à Poudlard ?
- Mal ! avoua-t-elle franchement. J'ai reçu une lettre, hier.
- Encore ?
- Oui. L'école n'a commencé que depuis quatre mois, et il en est à sa vingt-quatrième lettre d'avertissement. Je craque.
Harry lâcha un petit rire.
- A quoi servent les Serpentard à part créer des ennuis, hein ?
Tout le monde s'installa à table en riant.
- A rappeler aux idiots de Gryffondor qu'il y aura toujours plus fort qu'eux, s'éleva une voix grave.
Les têtes se tournèrent vers l'homme à la chevelure or qui venait d'arriver dans la cuisine.
- Tu veux que je te prouve le contraire en duel, Malefoy ? répondit Harry avec un petit sourire.
Drago s'approcha d'Hermione qui était assise en bout de table.
- Laisse-moi embrasser ma femme d'abord et je te règle ton compte après, Potter.
Il s'abaissa vers Hermione qui lui adressait un grand sourire, et lui déposa un baiser sur le front.
- Ne me parlez pas de duel ! s'épouvanta Neville. J'en entends assez parlé toute la journée avec mes élèves qui s'amusent à faire affronter mes différentes plantes carnivores entre elles. Il me faut des vacances.
- Moi aussi, soupira Drago en se laissant tomber sur une chaise. Ma classe est de moins en moins attentive à l'approche de Noël. Ils n'ont pas l'air de réaliser que les buses de Défense Contre les Forces du Mal sont difficiles à obtenir.
- En parlant d'élèves perturbés, dit Hermione avec une pointe d'agacement, sais-tu que Jaffrey et son groupe d'amis se sont amusés à lancer des sortilèges de déplumage aux hiboux de l'école ? Et devine lequel d'entre eux a encore mené les autres ?
Drago éclata de rire.
- Ce n'est pas drôle, répliqua-t-elle en faisant passer les plats. La volière est temporairement inutilisable. Les pauvres volatiles ressemblent à des poulets roses, maintenant. Qu'est-ce qu'on va faire de lui ?
- Tu te fais trop de soucis pour rien, Hermione, répondit Drago. Il découvre la magie et s'amuse, voilà tout.
- C'est facile à dire, pour toi ! dit alors Neville. Ce n'est pas dans ton cours qu'il fait des nœuds aux tiges de mes plantes ! Il ne bouge pas d'un centimètre, lorsqu'il est dans ta classe !
Drago ne répondit pas, et un silence de gêne s'installa. Personne n'ignorait la relation difficile entre les deux garçons. Jaffrey n'avait jamais accepté Drago dans sa vie, et si son étonnant silence dans la classe de son beau-père était considéré comme de la chance par les autres professeurs, Drago, lui, savait parfaitement que ce n'était qu'une question de temps. Il sentait son regard noir le transpercer depuis l'autre bout de la classe, il voyait son petit sourire qui le défiait clairement de le punir malgré son manque évident de travail dans cette matière. Oui, Drago savait parfaitement que le jeune Serpentard n'osait pas encore le défier directement, mais, lorsqu'il grandirait et gagnerait en confiance, les choses ne se dérouleraient plus aussi calmement. Et, ce jour-là, Drago serait prêt à affronter Jaffrey, autant de fois qu'il le faudrait pour maintenir son autorité. Jusqu'au jour où, peut-être, ce sorcier au visage d'ange l'emporterait, obligeant Drago à se retirer du jeu, et reconnaître sa défaite.
Il fut parcourut d'un frisson imperceptible. Il n'aimait pas penser à ça. Tant que l'enfant restait loin de la magie noire, il n'y avait pas de soucis à se faire. Heureusement, Hermione voulut détendre l'atmosphère et changea de sujet.
- Je suis allée voir Ron, tout à l'heure.
- Moi aussi, hier, sourit Luna. Car je ne pourrais plus le faire avant un bout de temps avec tous les préparatifs du mariage.
- Où est ton mari, d'ailleurs ? demanda Neville.
- Réunion de travail. Il s'excuse de ne pas venir, Hermione.
Cette dernière allait répondre que ce n'était rien, mais la sonnette retentit plusieurs fois d'affilée.
- Ça, c'est Soane qui s'amuse avec le bouton, soupira-t-elle en se levant.
- Tu vois que c'est un abruti ! ne put s'empêcher de lancer Charlie.
- Toi, sois polie ! prévint-elle avant de partir ouvrir.
Elle fut ravie de revoir les vampires qui ne s'étaient pas montrés depuis un bout de temps. Cachés sous leur robe noire, tous deux dégageaient toujours autant de beauté et de jeunesse. Ils saluèrent tout le monde et prirent place à table, tandis qu'Hermione s'assurait que la cuisine fut assez sombre.
- Qui a éternué dans la mousse au chocolat ? s'esclaffa alors Soane.
- Tiens, on a encore sonné ! s'empressa de dire Hermione pour rattraper la maladresse de Soane.
En effet, Ginny et sa fille arrivèrent à leur tour.
- Bon anniversaire, ma Leïla ! dit joyeusement Hermione en soulevant l'enfant dans ses bras, avant de lui déposer un bisou sur la joue. T'es grande maintenant, hein ?
La petite rousse hocha timidement la tête, puis montra deux doigts à Hermione avant de courir se réfugier dans les bras de son père.
- Je sors, ce soir, annonça alors Charlie.
- Où et avec qui ? demanda aussitôt Drago.
Hermione ne put s'empêcher de sourire. Si Jaffrey et Drago ne s'étaient jamais appréciés, avec Charlie, en revanche, s'était développé une relation plutôt proche et très étonnante lorsqu'on songeait au caractère solitaire de ces deux-là.
- Il y a une soirée chez Amy. J'y vais avec Samuel.
Un rire mauvais s'éleva depuis l'autre bout de la table.
- Tu as quelque chose à dire ? lança-t-elle alors à Soane.
- Pas du tout, dit-il innocemment. Après tout, c'est ton choix de te montrer avec un crétin comme cet humain.
Le teint de la jeune femme vira au rouge.
- Comme tu le dis, c'est mon choix, dit-elle en parvenant à se contrôler. Et c'est loin d'être un crétin, figure-toi. Il est l'un des premiers élèves de sa faculté !
- Oh, impressionnant ! dit-il d'un ton sarcastique. A vous deux, vous ferez un joli petit couple de génies, pas vrai ?
- Non mais c'est quoi ton problème ? explosa Charlie en se levant d'un bond de sa chaise.
- Charlie ! intervint Hermione. Pas aujourd'hui !
- Ce n'est pas ma faute s'il me cherche comme ça ! se défendit-elle.
- Je ne fais que t'ouvrir les yeux sur tes goûts détestables ! s'énerva à son tour le vampire.
- Pour une fois on est d'accord ! rugit Charlie. Parce que ça me rappelle que j'ai été assez stupide pour t'emmener à l'une de mes soirées !
- Mais je n'avais rien fait !
- Justement ! hurla-t-elle.
Soane se tut, comme tout le monde, d'ailleurs. La jeune femme respirait bruyamment, consciente de s'être laissée emporter.
- Lui, au moins, il m'invite à danser au lieu de regarder les autres couples sur la piste, reprit-elle d'une voix plus calme, mais d'où perçait les sanglots.
- Tu m'as dit toi-même que tu n'aimais pas danser et que les filles ressemblaient tous à des vaches en tutu !
- Eh bah peut-être que j'ai menti, tu vois, souffla-t-elle en lui lançant un regard noir. Peut-être que, ce soir-là, j'avais envie d'être une vache en tutu, moi aussi. Peut-être que, ce soir-là, j'avais enfin le cavalier avec qui je voyais les choses différemment...
Et elle sortit de la cuisine sans un regard en arrière pour les invités. Même à vingt et un an, songea Hermione, Charlie avait encore un peu à apprendre sur l'éducation ; notamment qu'on ne pouvait agir en présence d'invités comme on le faisait en famille.
- Excusez-moi, dit alors Drago poliment avant de sortir de table pour la rejoindre.
Tous les regards évitèrent de se poser sur Soane pour ne pas le gêner, et Ginny entama une conversation sur la nouvelle saison de Quidditch qui commençait. Le vampire resta silencieux jusqu'à la fin du repas, puis fut le premier à quitter le manoir avec sa sœur.
- Pardonne mon frère, lui avait dit cette dernière avant de transplaner. Il ne grandit pas dans sa tête, et peut se montrer vraiment enfantin, parfois.
- Tout comme Charlie, avait-elle soupiré. Il y a des fois, elle me rappelle l'adolescente de quinze ans dont j'ai dû supporter les sauts d'humeur !
Puis, elles s'étaient enlacées, Orience ayant fini par s'habituer aux étreintes humaines qu'elle avait tout d'abord trouvées gênantes. Neville et Luna furent les suivant à partir, une heure plus tard, après que les bougies aient été soufflées. Suite à une longue discussion avec Drago dont rien, comme d'habitude, n'en parviendrait à l'oreille d'Hermione, Charlie était finalement allée se coucher, refusant de se montrer à la soirée avec des yeux rouges et gonflés par les pleurs.
- Tu lui as dit ? demanda alors Ginny qui était restée dans la cuisine avec Hermione pour débarrasser, tandis qu'Harry était parti ramener sa fille qui s'était endormie dans ses bras.
- Quoi donc ? demanda innocemment Hermione.
- Tu sais très bien de quoi je parle, répondit-elle avec ce ton raisonnable qu'Hermione n'aimait pas.
- Non, pas encore, soupira-t-elle. Il n'est pas prêt à l'entendre.
Ginny ricana.
- Les hommes ne sont jamais prêt à entendre ce genre de chose. D'ailleurs, même quand ils le savent, ils n'arrivent pas à s'y préparer. Harry s'est montré rassurant, quand je lui ai annoncé, mais il a fait des cauchemars les trois nuits qui ont suivi !
- Drago n'est pas Harry, dit sombrement Hermione.
- Merlin merci ! plaisanta-t-elle.
Les deux amis éclatèrent de rire.
- N'attends pas trop, ou il pourrait t'en vouloir de lui avoir caché, reprit Ginny plus sérieusement. De toute façon, il finira par s'en apercevoir.
- Tu trouves que j'ai grossi ? paniqua Hermione en se regardant de profil dans le reflet de la fenêtre.
- Une vraie baleine, grimaça son amie.
Hermione lui envoya le torchon à la figure.
- Pourquoi t'obstines-tu à utiliser les moyens moldus ? demanda alors Ginny en regardant la vaisselle qu'il restait à essuyer. C'est si long !
- Je te l'ai dit, je ne veux pas que Charlie se sente mal à l'aise. Aussi longtemps qu'elle vivra sous ce toit, nous agirons comme le font les moldus. D'où cette insupportable sonnette, d'ailleurs.
La jeune rousse ne répondit pas, mais il était clair qu'elle pensait Charlie assez mâture pour supporter sa différence, ce qui n'était pas du tout l'avis d'Hermione qui la connaissait assez bien pour savoir qu'elle renfermait beaucoup plus que ce qu'elle ne laissait paraître.
Sur le pas de la porte, Ginny embrassa Hermione et souhaita une bonne soirée à Drago. Malgré toutes ces années, Harry et Ginny restaient d'une politesse courtoise envers le Serpentard, mais guère plus. Et, de ce qu'elle en jugeait, ce comportement convenait parfaitement à Drago.
- Quand est-ce que vous allez enfin vous appeler par vos prénoms ? avait-elle dit un jour, lors d'un autre diner.
Harry, Ginny, et Drago s'étaient échangé des regards surpris, avant de pouffer de rire sur ce qu'ils croyaient être une blague. Elle n'avait plus jamais insisté.
Hermione se glissa dans les draps où Drago se trouvait déjà.
- Comment va Charlie ? interrogea-t-elle en posant sa tête contre son torse.
- Elle s'en remettra, assura-t-il. Soane est vraiment un idiot.
Il avait dit ça sur un ton d'humour, mais le fond de sa voix laisser transparaitre qu'il le pensait.
- Pourquoi ? sourit-elle. Parce qu'il ne voit pas qu'il plait à Charlie ?
- Parce qu'il ne se rend même pas compte qu'elle lui plait aussi !
Hermione ne put s'empêcher d'éclater de rire.
- Dans le genre idiot qui met du temps à réaliser qu'une fille est follement amoureuse de lui, tu n'es pas mal non plus !
Il roula vers elle et l'enlaça tout entière, avant de parsemer son cou de petits baisers.
- Si la fille en question avait passé plus de temps dans ma chambre que dans ses fichus bouquins, peut-être que j'aurais pigé plus vite.
- Ta chambre était toujours occupée, je te rappelle, dit-elle, sarcastique.
- Tu ne me le pardonneras jamais, hein ?
- Quoi donc ?
- D'être le plus bel homme de Poudlard ?
- Tu ne l'es plus, mon cher.
- J'enseigne là-bas, non ? Je reste donc le plus beau de Poudlard. D'ailleurs, mes élèves filles sont bien meilleures que les garçons.
- J'espère qu'elles savent que leur professeur est a non seulement une âme sœur, mais y est en plus marié !
Il rigolèrent et éteignirent la lumière. Les yeux fixés au plafond, Hermione sentait son cœur battre d'anxiété.
- Drago ? appela-t-elle.
- Hum ? répondit-il, déjà à moitié endormi.
- Tu les aimes tes élèves, n'est-ce pas ?
- Non.
- Oh, arrête. Je sais très bien que tu tiens à eux.
- Où tu veux en venir, Hermione ?
Cette dernière ne répondit pas tout de suite.
- Je me demandais simplement si... hésita-t-elle enfin, si ton travail avait changé ton opinion sur les enfants ? Je veux dire, est-ce que tu les détestes toujours autant ?
Elle le sentit hausser les épaules.
- Je suppose que non, répondit-il après un moment. Mais si t'es en train de penser à avoir un môme, je t'arrête tout de suite ! Entre les deux têtes de mule qu'on a déjà à la maison et mes élèves toute la journée, je n'ai pas besoin d'un autre monstre !
Et il se mit à rire. Hermione l'imita, mais son rire sonnait faux. Elle se retourna vers son côté du lit, et fixa la table de nuit. Drago vint se loger contre elle, et elle sentit son souffle régulier lui effleurer l'épaule. Discrètement, la jeune femme posa une main sur son ventre et en caressa la courbe légèrement gonflée.
Encore un nouveau problème qu'elle allait devoir surmonter, et rapidement. Les soucis la quitteraient-elle seulement un jour ?
Mais bon, elle était heureuse. La plus heureuse des femmes, même.
Et puis, franchement, Hermione Granger avait affronté pire dans la vie, non ?
FIN
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Voilà c'est la fin de cette magnifique histoire j'espère qu'elle vous a plu ! Je suis ravie de vous l'avoir fait découvrir :) L'auteur à écrire d'autre fictions Dramione donc n'hésitez pas à allé jeter un coup d'œil sur son profil : Malfoy Heartless sur le site fanfiction.net
N'hésitez pas aussi à partager vos réactions, ressentis et avis sur cette fiction dans les commentaires ;)
À plus mes petits sorciers.
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