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Chapitre 17


« Tu as l'air triste, Manaphy. J'aimerais pourtant te voir sourire. »

Le légendaire regardait la mer au loin en soupirant. La phrase que Phione avait prononcé en lui rendant visite lui revenait en mémoire, avec l'intonation parfaite de sa consœur. Ses souvenirs lui permettaient de revoir parfaitement la déesse des marées, dans son corps d'enfant d'une dizaine d'années, avec ses longs cheveux bleus comme le ciel nocturne et ses yeux de la même couleur mais beaucoup plu clair. Elle portait une robe d'un vert prairie, s'agitant au gré du vent grâce à des volants blancs cousus dans le bas. Phione respirait la joie de vivre et quand elle venait lui rendre visite, le dieu de la pureté ne pouvait nier que cela lui mettait du baume au cœur.

Lui-même n'avait pas l'air tellement plus vieux. Son corps s'apparentait à celui d'un adolescent, de petite taille, comme pour se lier à son apparence légendaire microscopique. Ses cheveux gris courts n'étaient jamais coiffés et il avait cessé de s'en préoccuper, malgré les nombreuses remarques de Phione. Dans ses yeux verts, il n'y avait aucune joie, pas plus que sur son visage relativement peu expressif. Son regard rappelait le vide intersidéral. Manaphy ne le niait pas : sa vie ne l'enchantait plus tellement et ce depuis un long moment.

Phione lui rendait régulièrement visite et cela lui procurait une grande joie. Elle lui parlait de Littorella, sa ville plus au Sud, de sa mairesse Rhaenna avec qui elle s'entendait correctement et de ses voyages sur les mers toutes proches. La déesse des marées aimait s'amuser avec les pokémons aquatiques et ne s'en privait pas. Si elle n'allait pas forcément loin, chaque histoire semblait incroyable. Manaphy adorait écouter ses récits et il rêvait lui aussi de quitter ses quartiers pour respirer l'air du grand large, pour vivre une aventure et retrouver la joie de vivre d'il y a quelques années.

« Mais non. Tu t'es imposé des règles. »

Le dieu de la pureté ne quittait pas sa ville, parce qu'il en était un symbole fort, un peu comme un porte-bonheur. Le maire lui avait répété maintes fois que cela effraierait les habitants de le voir s'en aller sans raison valable. S'amuser, se vider la tête, se divertir, pour l'homme, cela ne comptait pas. Manaphy aurait pu se rebeller et lui dire qu'il était un dieu, qu'il n'avait pas d'ordre à recevoir d'un simple mortel. Phione lui avait conseillé de réagir ainsi lors de sa dernière visite, refusant de le brusquer mais refusant aussi de voir son ami dépérir de la sorte. Comme il aurait voulu avoir la force mentale de réaliser ce vœu, mais hélas, il se sentait prisonnier mentalement de Joliberges.

« Je suis navré de vous déranger, grand dieu. »

La voix mielleuse dans son dos lui donna un frisson et il se retourna beaucoup trop vite. Pourquoi cet homme lui faisait-il peur ? Manaphy ne savait pas très bien. Ereben possédait un nez retroussé qui lui donnait pourtant un air ridicule, mais sa haute taille et sa musculature compensait cette affliction. Ce rouquin disposait de belles rouflaquettes qu'il entretenait avec un grand soin, fier comme un Tauros. Derrière ses yeux bleus, les idées semblaient filer à toute vitesse et entrer en collision dans une explosion furieuse. Sous ses ordres, un rhinastoc écrasait ses adversaires. Heureusement pour Manaphy, il ne se trouvait pas là. Le petit dieu n'avait pas besoin d'avoir davantage peur.

« - Ce n'est rien, mentit le dieu, contrarié de cette intrusion.

- Tant mieux. Je venais voir comment vous vous portiez.

- Comme d'habitude, Ereben. Tu n'es pas obligé de t'enquérir de ma santé ainsi.

- Je m'inquiète un peu, grand dieu. Dame Phione est venue vous rendre visite récemment et elle m'a accusé de vous garder en prison. »

Il voulait donc aborder le sujet. Manaphy sentit un nouveau frisson parcourir sa peau. Au moins, le sujet allait être exposé au grand jour, sans possibilité de sous-entendus. Allait-il trouver une solution pour se dédouaner de cette accusation ? Le dieu de la pureté attendait de voir comment le maire de Joliberges comptait se justifier. Nul doute qu'il possédait une parade préparée à l'avance. La divinité prépara ses oreilles ainsi que son esprit à entendre cette argumentation.

« - Je sais que ce que je fais doit vous sembler injuste, minauda le rouquin.

- Cependant, souffla mentalement Manaphy, prêt.

- Cependant, je le fais uniquement pour le bien de notre ville et de ses habitants. Dans un tel contexte, nous avons besoin de croire en quelque chose. Quoi de mieux qu'un dieu ?

- Je n'ai pourtant pas un grand rôle à Joliberges.

- Ne jamais sous-estimer le symbolisme. C'est un pouvoir terrible. Je suis certain que les habitants de notre belle ville seraient prêts à vous suivre jusqu'au bout, à mourir pour vous.

- Je ne veux pas qu'ils meurent pour moi.

- Alors, protégez-les, seigneur. Devenez leur véritable protecteur en cas d'attaque.

- Encore faudrait-il que quelqu'un vienne se perdre dans notre ville.

- Ce n'est pas impossible. Sinnoh est le berceau d'Arceus à ce qu'on dit, un lieu indubitablement stratégique. Le dieu Giratina s'y trouve...

- Nous ne devrions peut-être pas nous trouver dans son camp, argua Manaphy.

- Nous devrions prendre le temps d'écouter ce que chacun veut dire, grand dieu. Puis... Nous pouvons rester dans notre coin. Vous pourrez nous protéger. Mais Giratina me semble la meilleure option. »

Lorsque le dieu de la pureté se retrouva enfin seul, des larmes coulèrent le long de ses joues. Sa vie ne lui plaisait plus, la charge sur ses épaules lui était devenue insupportable. Il n'en pouvait plus d'être un dieu aussi inutile que faible. Jamais il ne pourrait sauver son village et ses habitants. De toute façon, son maire ne le laisserait jamais avoir trop d'influence. Il le gardait comme un trophée, profitant que la divinité éprouve une crainte irrationnelle à son égard. Ereben souriait fourbement dans le moindre de ses souvenirs et il sentait l'angoisse l'envahir, se resserrant autour de sa gorge.

« Stop ! »

D'où venait cette voix dans son esprit ? Il n'en savait rien. Une petite flamme s'alluma en lui et son envie de partir revint, plus forte que jamais. Pourquoi restait-il là ? Pourquoi se morfondait-il sur son sort alors que la vie l'attendait dehors ? Reprenant sa forme légendaire, puis sa forme humaine dans un moment d'indécision, Il ne sut plus que faire. Manaphy respirait très fort et il essayait de se calmer par tous les moyens. Son échange avec Phione lui revint en mémoire.

« - Tu as l'air triste, Manaphy. J'aimerais pourtant te voir sourire.

- Je ne suis pas triste, juste un peu fatigué.

- Je suis certaine que cette fatigue passerait si tu quittais cet endroit.

- Je ne peux pas, Phione, c'est...

- Réponds à ma question. Tu ne peux pas ou tu ne veux pas ? »

La réalisation qui traversa son esprit lui donna la clairvoyance nécessaire. Phione avait raison : il avait besoin de partir, de quitter Joliberges, cette magnifique ville devenue sa prison. Tout ce dont il avait besoin, c'était d'un peu d'air frais, mais ce n'était pas tout. Son statut de légendaire lui pesait lourdement sur les épaules, encore davantage maintenant. Tout ce qu'il voulait, c'était d'en être débarrassé, même pour seulement quelques jours. Son esprit cogitait, bouillonnait et son cœur battait plus fort que jamais. Alors, la solution lui vint, aussi simple qu'un lever de soleil.

« Et si... Si j'arrêtais un peu d'être un dieu ? »

La divinité de la pureté sut au fond de son âme que c'était ce qu'il désirait. La volonté d'Ereben ne le retiendrait pas cette fois. Le légendaire prit des vêtements au hasard en fouillant dans ses affaires, afin de pouvoir passer pour un humain ordinaire. Puis, dans la fraicheur nocturne, Manaphy s'enfuit de Joliberges et prit la route vers l'ouest. Il ne savait pas encore ce qu'il allait y trouver, mais le dieu était certain d'avoir fait le bon choix. La liberté lui donnait littéralement des ailes.

Dans un autre recoin de la région de Sinnoh, Cresselia avançait secrètement, sous sa forme légendaire. Elle se montrait vive, sachant parfaitement qu'elle se trouvait très proche du fief de Giratina. La déesse des rêves le redoutait terriblement, lui qui pouvait tout détruire d'un simple mouvement de sa forme légendaire. Elle aurait pu prendre sa forme humaine afin de passer plus facilement inaperçue, mais elle détestait plus que tout cette apparence disgracieuse à ses yeux. Cresselia détestait se sentir aussi faible et vulnérable, alors que son apparence de divinité la rassurait considérablement.

« Faites attention à vous, dame des songes. »

Son maire Francis s'inquiétait toujours dès qu'elle quittait Unionpolis, d'autant plus avec la période actuelle. Il ne doutait pas de sa force, mais l'homme savait qu'elle n'était pas la seule divinité des alentours. La déesse avait su l'apaiser en lui expliquant qu'elle n'allait pas très loin puisqu'elle ne quittait même pas la région en vérité. Ses pas la menaient tout droit vers Voilaroc, une cité un peu plus à l'ouest, moins grande que sa propre ville mais tout à fait charmante et accueillante. La légendaire ne voulait pas attendre, elle devait absolument y rencontrer quelqu'un.

La déesse des rêves possédait naturellement une alter ego : la déesse des cauchemars. On aurait pu les penser ennemies et pourtant, elles s'entendaient bien. L'un s'avérait extravertie tandis que l'autre était clairement introvertie, mais chacune à leur manière appréciait la compagnie de l'autre. Avec la situation actuelle, Cresselia avait besoin de savoir où se situait Darkrai. Sa consœur pouvait aisément se laisser convaincre de sombrer de l'autre côté, alors la divinité des rêves voulait s'assurer que son moral allait dans le bon sens. Personne ne devait pouvoir l'abuser.

En pénétrant dans Voilaroc, Cresselia se résolut à reprendre sa forme humaine, se cachant sous un grand manteau à capuche noir. Elle détestait cette couleur mais pour passer inaperçue, il n'y avait pas trente-six solutions. Ses cheveux bruns dépassaient légèrement et ses yeux bleus brillaient comme deux pierres précieuses dans la nuit. La déesse portait également une belle robe aux couleurs de sa forme légendaire mais le vêtement demeurait invisible sous le manteau, fort heureusement pour elle. Ses pas la menèrent naturellement dans la plus grande demeure des environs. Cresselia connaissait les lieux et pénétra sans l'aide d'humains. Elle était attendue.

Dans un petit salon, sa consœur légendaire discutait avec le maire de la ville. Darkrai se trouvait presque toujours sous forme humaine. On racontait que son apparence de légendaire l'effrayait et la déesse des rêves ignorait à quel point cette information était véridique. La longue chevelure blond pâle de la déesse des cauchemars tombait souplement sur ses épaules et une fleur venait même l'agrémenter. Darkrai portait une robe d'un vert ravissant, tranchant avec l'image qu'on pouvait se faire d'elle. La déesse paraissait bien grande en comparaison de son maire, le petit Kern. Ce dernier arborait son éternel sourire de petit vieux et une aura chaleureuse irradiait de son être. L'homme possédait une sagesse acquise avec des années d'expérience, ce qui le rendait intéressant. Même les dieux pouvaient trouver de la sagesse dans ses paroles. Lorsqu'ils la virent arriver, le duo s'inclina profondément. Cresselia fit de même, avec un large sourire, dégrafant son manteau. Kern s'en alla après les salutations, ne voulant pas interrompre les retrouvailles des deux amies divines. Cresselia lui en fut gré, car elle se sentirait plus à l'aise sans sa présence.

« - Tu es venue alors, murmura Darkrai.

- Je n'allais pas trahir ma promesse, mon amie.

- Tu aurais pu avoir d'autres impératifs. Je sais que je peux te faire confiance, Cresselia, mais... J'ai du mal à imaginer que je puisse faire partie de tes priorités. »

Avec la déesse des cauchemars, c'était toujours pareil. Peut-être à cause de son caractère effacé, Darkrai ne parvenait pas à se persuader qu'elle pouvait avoir la moindre importance pour les autres. Même son amant Cobaltium éprouvait des difficultés pour la rassurer sur ses sentiments. Pourtant, même de l'extérieur, cela se voyait que le dieu de la justice la regardait comme aucune autre. En amitié, ce n'était guère plus évident. La divinité de Voilaroc possédait ainsi peu d'amitiés, mais même si elle ne s'en rendait pas compte, il s'agissait de liens très solides.

« - Tu es mon amie et forcément une priorité, Darkrai.

- C'est vraiment gentil de me dire ça.

- Ce n'est pas gentil, c'est vrai. Enfin, nous ne sommes pas là pour parler de mon amitié, puisqu'elle t'est acquise. Je voulais savoir si tout va bien pour toi.

- Comment ça ?

- Ne fais pas semblant, Darkrai. Tu étais là à Rosalia. Tu sais. Pour Giratina.

- Ne prononce pas son nom si fort. »

Une porte claqua quelque part dans la maison et pourtant, il n'y avait aucun courant d'air. Cresselia ne put empêcher un frisson de la parcourir, d'autant plus lorsqu'elle vit la peur qui se lisait dans les yeux de Darkrai et s'emparait peu à peu de son visage. Ce que redoutait la déesse des rêves avait donc bien dû se produire. Ne brusquant pas l'autre légendaire, elle attendit patiemment que son calme revienne afin de la divinité des cauchemars puisse lui raconter ce qui s'était produit. Il y avait forcément une histoire, un événement justifiant une telle réaction de sa part.

« - Il... Il est venu me rendre visite, souffla finalement Darkrai. Il n'était que l'ombre de lui-même, rien qu'une tâche noire sur le mur, mais...

- Cela ne l'empêche pas d'être puissant.

- J'avais oublié à quel point le dieu de l'autre-monde l'était.

- Que voulait-il ? reprit Cresselia, croisant les bras.

- Ma puissance. Il voulait mon pouvoir à ses côtés et... J'ai refusé mais... Quand je l'écoutais... J'avais l'impression qu'il y avait une part de vérité dans ses paroles. J'ai failli accepter.

- C'est ce qui le rend si puissant. Il sait trouver au fond de notre âme notre point faible.

- Son pouvoir va bien au-delà de ça, Cress.

- C'est pour cela que je suis venue. Je veux que tu saches que quoi qu'il arrive, je te soutiendrai. Et je ne suis pas la seule, Darkrai. Tu as des alliés dans le camp de Rayquaza.

- C'est très aimable. Mais dis-moi, il... Il n'est pas venu te voir ?

- Qui ça ? Giratina ? Non. Je doute qu'il vienne un jour à ma rencontre.

- Mais pourquoi moi et pas toi alors ? Pourquoi tu ne l'intéresses pas ?

- Parce ce ne sont pas des rêves qu'il veut apporter aux humains. Ce sont des cauchemars. »

Darkrai arrêta de parler un moment, on sentait que le poids de son statut lui pesait sur les épaules. Elle aurait aimé échanger sa place de déesse de cauchemars contre un élément qui n'attirerait pas le maléfique Giratina. Dans un sens, elle jalousait la divinité d'Unionpolis. Cresselia comprenait toute la difficulté de la situation, mais elle se promit de faire face. Darkrai ne devait pas tomber dans un accès de faiblesse aux mains de l'ennemi. Ce n'était pas envisageable. Les deux légendaires se connaissaient depuis toujours et ce n'était pas aujourd'hui que leur amitié tomberait.

« Je te protègerai, Darkrai. J'en trouverai la force. »

Cresselia savait parfaitement qu'elle ne serait pas seule. Si la déesse de cauchemars n'était pas populaire, elle n'était pas seule pour autant. Tout le camp de Rayquaza viendrait la défendre en cas de besoin, c'était certain. Rien que Cobaltium son chevalier servant comptait pour cent. Les pensées de la légendaire ne purent s'empêcher de dévier vers Mewtwo. Lui aussi viendrait la sauver au moindre danger, même si en toute franchise, Cresselia ignorait l'étendue totale de sa force.

Zekrom savourait son verre de vin avec délice, laissant le liquide couler lentement dans sa gorge. C'était un bon cru, le légendaire savait les choisir. Dans sa tour au cœur de Volucité, il se sentait inattaquable. La ville tentaculaire grandissait de jour en jour, s'imposant comme la capitale économique d'Unys. Autrefois, il avait existé un lieu bien plus vaste et plus riche, mais il n'en restait qu'un désert désormais. Zekrom ignorait pourquoi ce château en ruines le rendait aussi nostalgique. Pour chasser cette pensée, il passa sa main dans sa crinière bleutée en bataille.

De l'autre côté de la table où il était assis, une ombre occupait la chaise et l'observait fixement, incapable de consommer le doux breuvage. Pour parler franc, cela importait peu le dieu de l'idéal. Tant que lui-même pouvait boire, rien d'autre ne comptait. Pourtant, le maître des lieux ne se serait jamais permis de prendre de haut son invité. Giratina avait beau se trouver en majorité prisonnier d'une autre dimension, le peu de lui qui se trouvait en ce monde suffisait largement à effrayer d'autres divinités. Même les puissants comme le patron de Volucité faisaient profil bas face à lui.

« - Je suis ravi que tu sois de mon côté, déclara subitement Giratina.

- Bah, je te l'ai dit, Rayquaza ne pourrait pas m'apporter ce que je recherche.

- Ce qu'il te manque... Sais-tu au moins ce que c'est ?

- Pas exactement. Plus nous y pensons avec Reshiram, plus nous supposons que c'est un souvenir. Nous savons que nous ne sommes pas des légendaires anciens.

- Effectivement, vous avez été créés après mon bannissement.

- Et tu dis qu'il y avait un grand royaume dans le désert ?

- Oui, souffla le dieu de l'autre-monde. Ce n'était pas un désert d'ailleurs, mais je suppose qu'ils ont dû déplaire à Arceus aussi. C'est toujours cher payé de ne pas marcher dans ses traces. »

Un sourire apparut sur l'ombre et Zekrom décida d'arrêter de poser des questions sur le sujet, même s'il en avait envie. De toute évidence, Giratina ne connaissait pas la raison de la disparition du royaume du désert Délassant, il se trouvait déjà dans l'autre dimension à l'époque. En revanche, le dieu déchu pouvait peut-être forcer les plus anciens à répondre, comme cette maudite Kyurem. Voilà pourquoi la divinité de la réalité avait proposé son aide au maudit : afin de connaître enfin la vérité. Il devrait en parler à Reshiram mais sa chère et tendre le suivrait certainement. Zekrom et elle se trouvaient liés d'un amour plus profond et plus ancien qu'ils ne pouvaient imaginer.

« - Changeons de sujet. Tu fais bouger tes pions dans le sud de ma région. Ne me mens pas. Je le sais.

- Ta région. Comme c'est intéressant, cette formulation.

- Ce n'est pas le problème. Qu'est-ce que tu fais exactement ?

- Je suis simplement mon plan, Zekrom. Je dois faire tomber certaines pièces dans notre camp. Je suis certain que tu me pardonnera, en tant qu'allié.

- Je ne portais pas spécialement Genesect dans mon cœur... Dire que des humains ont pu tuer un dieu.

- Des humains lourdement armés, cela va sans dire. Mais leur armée s'arrêtera à Ogoesse.

- C'est donc la petite Meloetta que vous voulez.

- Tout à fait. Tu la connais ? C'est ton amie ?

- Je la connais, mais je n'ai pas d'amis. La seule personne qui compte dans ma vie, c'est Reshiram. »

Zekrom s'en voulut d'avoir laissé apparaître une telle faiblesse. Giratina ne manquerait pas de l'exploiter si cela se révélait utile pour lui. En tout cas, c'était la stricte vérité : Meloetta ne représentait rien pour lui. Le dieu de l'idéal la connaissait, ce qui était obligatoire puisqu'il vivait dans la même région, à peu de distance. La déesse du chant possédait un prodigieux pouvoir à ce qu'on racontait, capable de décupler les forces de ses alliés. Le dieu de l'autre monde voulait évidemment s'en emparer et il détruisait ainsi le sud-est d'Unys pour atteindre son objectif.

« - Tant que l'armée ne remonte pas détruire ma ville, ça me va.

- Pourquoi détruirais-je ta ville, Zekrom ? Nous sommes alliés.

- Le monde a connu des trahisons plus improbables que cela.

- Tout de même, je suis déçu de ton manque de confiance. Que dois-je faire pour que tu arrêtes de me regarder avec méfiance ?

- Je crois que c'est une partie de moi qui ne s'éteindra jamais.

- Et si j'essaie de retrouver ce trou manquant dans ton passé ?

- Ce serait aimable mais je ne sais même pas ce que c'est exactement.

- Tu sais pourtant que c'est lié au désert Délassant.

- Hum, oui, je le ressens ainsi. Mais peut-être que je me trompe.

- Dans ce cas, je te propose de te servir pour cette tâche. Ainsi, nous nous aiderons, comme des amis. »

Le rire de Giratina voulait tout dire. Zekrom se força à le suivre et continua à discuter un peu avec lui de ses plans futurs. Le dieu de l'autre-monde souhaitait s'emparer de Meloetta, mais ce n'était qu'un début. D'autres légendaires tomberaient sous sa coupe ou seraient littéralement balayés de la carte. Le banni ne pouvait se permettre de laisser certaines puissances dans le camp ennemi. Giratina évoqua également la prophétie, celle qui le poursuivait encore et encore. Il prétendait avoir une piste et être bientôt en mesure de détruire le dernier espoir d'Arceus.

« - Ce Scar est d'une grande utilité. Le propre maire d'Illumis, la ville de Xerneas, tombé sous mes ordres, quelle douce ironie.

- C'est à se demander comment c'est possible, minauda Zekrom.

- Je sais me montrer persuasif quand il le faut. Et ce n'est que le début.

- Je suppose que l'objectif ultime est la chute de Rayquaza.

- Plus encore. Ce que je veux, c'est faire tomber le Créateur. »

La lueur qui brillait dans ses yeux glaça même l'âme sombre de Zekrom. Il dut patienter encore un peu, avant que Giratina ait décidé enfin de disparaître et de retourner dans sa région originaire. Peut-être rendait-il visite à Démétéros, a priori son allié également. Cela importait peu le dieu de l'idéal. Les histoires de copinage, cela l'intéressait pas. Il ne s'entendait pas trop mal avec la divinité de la fertilité, mais il ne l'appréciait pas particulièrement non plus. Leurs caractères ne cohabitaient pas ensemble, surtout lorsque Démétéros se rapprochait un peu trop de Reshiram.

« S'il la touche, je le démolis. »

Zekrom but un autre verre, puis un autre, et prit finalement la bouteille. Ses pensées tourbillonnaient dans son esprit, il essayait de se calmer. Sans comprendre exactement pourquoi, Giratina avait réussi à éveiller une colère sourde en lui, qu'il soupçonnait liée à ce qui manquait au fond de son âme. Pour en avoir longuement parlé avec sa chère et tendre, ils supposaient qu'ils s'agissaient d'un pan entier de leur mémoire, disparu il y a bien longtemps. Le dieu de l'idéal se sentait lié au désert, sans savoir pourquoi. Une pensée ravageuse s'empara de lui.

« Kyurem nous cache quelque chose. Ou Démétéros. Ou les deux. »

La bouteille valsa à travers la pièce, se brisant avec violence contre un mur. Cela fit rire Zekrom. Il avait beau être un dieu, il était totalement capable de se laisser dominer par ses émotions. Dans le fond, cela ne le dérangeait pas. Le verre sur la table attira son œil. Oui, la divinité de Volucité avait des envies de destruction et elle comptait bien les assouvir avec tous les objets qui lui tomberaient sous la main. Peut-être que lorsqu'il serait plus calme, l'envie lui prendrait de monter dans le nord afin de rendre visite à la merveilleuse Reshiram. Oui, ce plan le tentait bien.

Puisque Giratina voyageait à droite à gauche, Cipher avait décidé de prendre des vacances à son tour. Ses pas le menèrent à différents endroits du monde, tandis qu'il errait sur toute la planète. Ses yeux voyaient les humains et les pokémons sombraient peu à peu dans la guerre. Cela le faisait sourire. Son maître paraissait bien près de réaliser ses rêves. Non pas que cela lui importait vraiment mais cette histoire l'intéressait. Cipher se plaisait de voir les dieux et les mortels se déchirer. Le chaos qui allait en découler serait probablement incroyable et ferait trembler l'univers tout entier. Rien qu'à cette idée, l'homme se réjouissait. Tant d'événements allaient se produire en peu de temps !

« Pourtant... Mes congés auront un autre objectif. »

Son but ultime était toujours de retrouver sa mémoire, de découvrir ce qui se trouvait derrière le trou noir de son passé. Habituellement, ses pas le menaient vers les ruines du château du désert délassant, puisque c'était là qu'il avait repris connaissance. Cette fois, son instinct l'entraîna dans une région totalement différente, puisqu'il s'agissait d'Alola. L'archipel était la zone du monde la plus épargnée par la guerre, mais cela n'empêchait pas les îles de posséder leurs propres problèmes. Cela intéressait peu Cipher. Il flairait simplement quelque chose d'inhabituel en ces lieux, une odeur de mystère qui l'intriguait et lui donnait envie de s'attarder dans cette partie du monde.

L'inconnu à la belle chevelure claire débarqua à Ekaeka, une petite ville perdue de l'île Mele-mele. Contrairement à d'autres, la cité ne bénéficiait pas de la présence d'un légendaire, même si les habitants vénéraient les divinités habituelles, comme Solgaleo du soleil et Lunaala de la lune. Cipher se sentait étouffé par cette fervente croyance dans les puissances supérieures. Comment pouvait-on être aussi crédule ? La question le tourmentait et il décida de passer un peu de temps à les observer. Si cela ne lui apportait rien, cela ferait au moins passer le temps.

« Ils sont vraiment trop bizarres. »

Bien que mal placé pour dire cela, Cipher ne pouvait s'empêcher de le penser. Il rencontra même le maire d'Ekaeka, Ickor, un homme très charismatique. Faisant également office de prêtre des lieux, ses yeux violets intriguaient quiconque plongeait son regard dedans. Toujours habillé chaudement malgré la chaleur d'Alola, sa taille moyenne le rendait facilement abordable car il n'avait pas l'air intimidant et sa coiffure grise au carré lui donnait une figure aimable. Un sourire fleurissait régulièrement sur ses lèvres, doux et frais comme une brise estivale. Cet homme respirait la bonté.

Un type pareil aurait dû répugner Cipher. Le serviteur de Giratina détestait les personnes comme ça, trop gentilles, trop naïves, trop pures pour ce monde. Toutefois, Ickor ne rentrait pas dans ces qualificatifs. Certes, sa bonté se retrouvait dans chacun de ses gestes, mais il se montrait réaliste. Sa croyance dans les divinités venait d'une profonde passion pour les histoires. Des légendes, il en avait à raconter, à foison, et c'est ce qui attira l'attention de Cipher. Sans bien comprendre pourquoi, l'homme sans passé se découvrit un intérêt pour les contes du maire d'Ekaeka.

« - C'est curieux, je ne t'avais jamais vu dans le coin, Cipher. Tu viens d'où ?

- Aucune importance, je suis simplement un voyageur. Vous avez d'autres histoires ? »

Le maire souriait et se faisait un plaisir de satisfaire sa curiosité. De nombreuses légendes tournaient autour des dieux d'Alola, expliquant leurs pouvoirs. C'était intéressant pour Cipher de voir d'où venaient les croyances des humains. Ickor possédait une foi puissante en Arceus mais il savait se montrer pragmatique. Les histoires le passionnaient mais elles n'étaient là que pour divertir, voire pour émerveiller. Ainsi, Cipher découvrit la vision des humains sur de nombreuses divinités, ce qui lui parut bien plus intéressant que prévu. Il ne savait pas qu'il appréciait autant les vieux contes. Sa rencontre avec Ickor se montra donc très enrichissante et il put lui donner des nouvelles d'autres régions en échange. Tout se passait pour le mieux entre eux, ils formaient un duo étonnant.

« - Tu es bien attentif, Cipher. Un véritable érudit en quête de savoir.

- Quel savoir peut-on trouver dans de vieux contes ? Ça m'amuse, c'est tout !

- Hum, je pense qu'on peut trouver de la sagesse partout, il suffit d'ouvrir les yeux.

- Les miens doivent avoir encore trop de sable alors.

- Ha ha. Dis-moi, Cipher, connais-tu la légende du Grand Radieux ? »

Cela fit tiquer l'homme sans passé. Le Grand Radieux ? Cela ne lui disait absolument rien. Aucune divinité ne correspondait à cette description. Aussitôt, Cipher supposa qu'il s'agissait d'un énième surnom d'Arceus, mais quand Ickor lui annonça que ce n'était pas le cas, il tiqua. Une légende sur un dieu inconnu ? Voilà qui tiraillait sa curiosité. Cela éveillait en lui une intense soif de savoir qu'il ne pensait pas posséder. D'où venait cet engouement ? Il n'en savait absolument rien. Le maire accepta avec bienveillance de lui conter cette histoire qui lui venait de son propre père.

« On raconte qu'autrefois, dans une ville lointaine, vivait un être si lumineux qu'on l'appelait le Grand Radieux. Il apportait la lumière à tous et c'était un dieu puissant, qui donnait volontiers son énergie à ceux qui en avaient besoin. Il s'agissait d'un légendaire bénéfique que tous aimaient.

Hélas, un jour, des êtres mineurs, peut-être des humains, essayèrent de lui dérober son énergie pendant son sommeil. En réalité, ils parvinrent à dépouiller le Grand Radieux d'une grande partie de son pouvoir. Alors, le dieu lumineux explosa en un millier d'étoiles qui se répandirent sur le monde et de lui ne restait plus qu'un être chétif et sombre.

On raconte que le Grand Radieux s'endormit alors, avec le peu qu'il lui restait de pouvoir, trop faible pour continuer. Cependant, le jour où il s'éveillera, il cherchera à récupérer son pouvoir, à se venger de ceux qui l'ont trahi. Voilà pourquoi dès que je trouve une pierre brillante, je la dépose sur l'autel du Grand Radieux, afin d'apaiser sa colère et de lui rendre sa puissance. »

Ickor semblait tellement passionné par cette légende que Cipher aurait pu l'écouter en parler pendant des heures. Il ne savait pas pourquoi, mais il avait l'impression d'avoir déjà entendu cette histoire. Elle résonnait en lui avec force. Pouvait-il avoir un lieu quelconque avec ce Grand Radieux ? Cela semblait peu probable. La légende de l'être lumineux n'existait qu'à Alola, tandis qu'il venait d'Unys. On racontait que le jour de son réveil, une pluie d'étoiles filantes tombait du ciel.

« Et si... »

Et si son éveil coïncidait avec l'événement de la légende ? Peut-être que le Grand Radieux n'était qu'un prétexte, mais qu'il s'était réellement produit quelque chose ce jour-là ? La curiosité de Cipher s'était éveillée. Derrière son apparente banalité, cette histoire cachait peut-être un indice sur son origine. Ses pas avaient su le conduire sur le bon chemin, après toutes ces années. Et son pouvoir de résurrection ? Le mystérieux jeune homme sentait que bientôt, il finirait enfin par trouver la réponse à sa question existentielle. Il suffisait de persévérer un petit peu, encore et encore.

« Je découvrirai qui je suis ! » hurla-t-il au ciel, un soir de solitude.

Et le ciel l'entendit.

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