Pour Lili, caramel beurre-salé
J'ai écrit à Zacharia, l'homme qui me rappelait tant Warren à l'époque. Puis, c'est naturellement vers ce dernier que je me suis tourné. De fil en aiguille, je l'ai relié à une autre personne qui fut chère à mon cœur, Naomi, qui me l'avait présenté. Mme Rahbi fut celle qui n'intervenu pas, voire empirait les choses quand Naomi était harcelée. Puis, elle est devenue ma première source de souffrance à mon tour, avec Nathan... Mais loin de tout ce fatras, il y a elle, à une époque plus reculée encore, faite que d'insouciance et de bonheur rugueux.
La dernière lettre, voilà, nous y sommes.... Lili, ma tendre, c'est pour toi cette fois... Je reste à distance de toi parce que tu seras toujours ma seule véritable meilleure amie que je ne puisse avoir. Cette distance fut d'abord involontaire, je le reconnais ; mais c'est mieux comme ça car ainsi, je t'ai maintenue loin de la souillure, loin d'eux. J'ai fait en sorte tu n'entendes jamais parler d'eux, que tu ne connaisses pas leur existence et surtout, que tu ne les rencontres jamais.
Je suis stupide, je t'assure... La seule chose que je pourrais regretter, c'est de ne pas pouvoir te faire rencontrer David. Toutefois, je ne m'en veux pas. Cela restera une idée impossible à concrétiser mais qui me réchauffera, dans un coin de mon cœur. Je ne suis pas seul puisque vos lumières m'illuminent. Je ne te vois plus, mais je ne suis pas perdu dans la pénombre. Je sais que tu es là – ou du moins que tu l'es peut-être encore. Le principale, c'est que tu as vécu là, dans ce monde-ci. Il est si précieux à mes yeux...
* * *
Timéo GLAS
16 rue de l'évolution
00004 EUPHORIA
bonheurfé[email protected]
03/01/0001
Lili GUILLAUMARD
05 boulevard de la magnificence
00004 EUPHORIA
Salut, Lili.
Ça me fait tellement étrange de t'adresser ces mots. Tant de jours, de mois – que dis-je – d'années se sont écoulées ! Aujourd'hui, nos noms respectifs ne sont pour chacun plus qu'un souvenir lointain. Nous ne sommes plus que des inconnus et c'est justement ça qui rend étrange le fait de te contacter.
Au plus profond de mon cœur, tout ce que j'aimerais te dire c'est que si je suis partie, sans laisser de trace, c'est parce que nous venions tout juste de nous réconcilier. Contrairement à moi, tu avais des amis, une vie sociale autre que moi. Nous avions été en froid trop longtemps pour que je ne puisse me permettre de rester en contacter avec toi... Et j'aurais eu peur, peur que pour la seconde fois, tu ne me répondes pas. Je te l'accorde, je l'avais mérité. Enfin, pour l'époque car aujourd'hui, cela doit nous sembler à tout deux dérisoire : ce n'était ni plus ni moins que des disputes de gosses.
Tu sais, j'espère que la petite fille que tu as été me pardonnera d'avoir fait preuve d'un esprit étriqué. Je ne voyais pas la bulle autour de nous. Il y avait toi, et il y avait moi. Je ne voyais juste pas l'intérêt de regarder plus loin et de s'ouvrir alors qu'ensemble, nous pouvions dominer le monde.
Tout était chaleureux tant que tu étais là. Jamais, l'espace d'un instant, je ne me serais douté que tu puisses avoir d'autres amis avant que je n'entende parler de cette Alicia. Je te voyais comme moi j'étais. En quelque sorte, je peux dire que le bain de lumière dans lequel tu m'as baigné m'a aveuglé sur mon égoïsme. Forcément, une seule personne au monde et qui, par-dessus de le marché, commence à fauter, ça ne peut pas suffire à une âme et à une vie.
J'étais également égoïste dans ma façon de définir notre relation. Je ne sais pas si je faisais réellement preuve de la possessivité que je ressentais... En fait, je suis sûr que très peu, mais elle n'avait quand même pas lieu d'être de cette façon. Quoique, qu'on se l'avoue, c'est quand même plutôt mignon que quelqu'un tienne autant à son amie, non ?
Tout ce que j'aurais voulu te proposer, si je t'aurais recontacté un jour (comme celui-ci, c'est d'être ma correspondante. Et de, peut-être un jour, se revoir juste pour le fun et par curiosité. Mais finalement, je ne sais pas tellement ce que tu en dirais... En tout cas, je suppose que si cette perspective te botte, je le saurais de par ta réponse.
Cependant, une autre part de moi aurait aimé te dire de ne pas faire ça. Et si les images que nous avions gravé d'antan se déformaient ? Et si, plutôt que de découvrir une nouvelle personne, nous avions affaire à un hideux individu, indigne de l'image que l'on espère retrouver ? Nos attentes ne collent pas à la réalité. Et même lorsque l'on n'a pas d'attente particulière, les choses ne seraient plus jamais pareilles. L'histoire de nos deux noms en contacts se remodifierait.
Et c'est pour ça que cette lettre qui t'est adressée et toutes les autres rédigés pour autrui resteront à jamais confiné. Je ne veux pas contaminer le passé avec le présent. Il est derrière après tout, et nous n'avons qu'un chemin face à nous, qu'une possibilité. Ton absence est salé et ton souvenir si sucré... C'est un charme et une saveur qu'il faut savoir apprécier. Tu es mon caramel beurre-salé.
Je ne t'embêterais pas beaucoup plus longtemps car j'en viens à la chose finale de ce que j'aurais aimé te dire. C'est que... Je nourris ma passion, certes. Mais mon art – mes poteries et sculptures – je veux qui tu puisses les voir signé de mon nom et en magasin. Je veux que mon nom soit reconnu, pour que tu saches que je n'ai jamais renoncé. Et que je ne renoncerai jamais. C'est ma vocation, mais c'est aussi en ton nom, Lili...
Timéo Glas, ni plus ni moins.
* * *
A présent, je dois reposer ma plume. Ces lettres resteront terrés aux tréfonds de mon âme et loin dans mon cœur. Je scelle tous ces sentiments. Lili, je te promets que je n'abandonnerais jamais, malgré les Warren, Brigitte ou les Nathan, et malgré les tentations à l'euphorie comme les Naomi. Pourtant, je le sais... Je sais pertinemment que mes sculptures de glace fonderont avant de n'avoir pu rencontrer le succès et que mes poteries seront brisées avant que tu ne puisses revoir mon nom. J'expirerai comme j'ai vécu : dans l'anonymat. Mais je le fais pour toi.
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