VANESSA : D'après Nora, avoir conscience de ses défauts les excuse. C'est comme le « Mais j'en souffre. » Le « Mais j'en ai conscience » : deuxième arme de Nora pour effacer toute culpabilité après nous avoir si honnêtement dévoilé, les larmes aux yeux, la faille de caractère qu'elle vient de mettre à jour en elle.

EMILE : Faute avouée, à demi pardonnée.

VANESSA : Qu'elle dit ! Qu'elle croit ! Mais moi je n'y crois pas une seconde. Pour moi ça rend la chose encore pire. Elle a conscience que c'est mal et ça suffit à l'excuser ? C'est trop facile ! Celui qui fait du mal sans en avoir conscience est un ignorant. Celui qui fait du mal volontairement est un méchant. Aussi simple que ça.

EMILE : Mais Nora ne fait pas de mal.

VANESSA : La logique est la même.

FLORIAN : Pour moi la règle est simple. Si elle en a conscience et qu'elle fait quelque chose pour changer, sa conscience est sauve. Si elle en a conscience et ne fait rien pour changer, alors là les cornes deviennent une possibilité.

EMILE : Donc on n'a pas le droit d'avoir des défauts ? Mais on a le droit d'en avoir si on se voile la face en prétendant les ignorer ?

ROSE : Dans ce cas à la poubelle l'acceptation de soi tel que l'on est ! Impossible ! Interdit ! Moi je crois que la conscience ne change rien. Je pense que Nora se voit parfaite : elle aime ses défauts, elle ne voit pas qu'il s'agit de défauts. Enfin, elle va peut-être te dire que ce sont des défauts, elle sait que ce sont des défauts aux yeux d'à peu près n'importe qui. Mais tu parles deux minutes avec elle et elle aura trouvé quinze excuses pour te prouver par A plus B que le défaut en question est plutôt une qualité ou au moins la face cachée d'une qualité. Elle va le lier à des avantages, à des raisons, à d'autres traits... Elle n'a aucune conscience qu'on peut avoir cette conversation là, la voir comme on la voit. L'idée qu'on puisse la considérer comme une méchante ne lui effleurerait jamais l'esprit.

EMILE : Peut-être tout simplement parce qu'elle n'a rien d'une méchante ! Encore une fois, qui décide de coller l'étiquette « Méchante sorcière » ou « Princesse » ? C'est trop facile ! Il n'y a aucune vérité ; nulle part. C'est juste les termes que vous employez, le jugement que vous portez. Nora a besoin d'être appréciée, comme n'importe quel être humain. Et il vous suffit de dire plutôt qu'elle « recherche l'admiration » pour que ça devienne une caractéristique soi-disant toxique. Nora a besoin de s'estimer, encore une fois comme n'importe quel être humain. Mais juste parce qu'elle y réussit un peu mieux que toi, Rose, tu nous présentes sa confiance en elle comme de la prétention. Si Nora s'auto-analyse, c'est une égocentrique. Si à l'inverse elle fait attention aux autres, elle est en train de collectionner leurs âmes. Elle fait des efforts pour changer, lutter contre ses penchants négatifs, essayer d'être quelqu'un de bien. Et d'après Vanessa, tout ça n'est rien d'autre qu'une recherche de supériorité morale. Laissez-moi rire ! C'est un procès sans argument. Je ne peux même pas vous contredire : tous les faits que vous avancez sont véridiques. C'est juste un concours de rhétorique ? Je te mets au défi Rose : prends n'importe quel compte de fées et raconte-le nous en faisant en sorte qu'on réalise que la princesse est en réalité la méchante dans l'histoire. Je suis prêt à parier que tu réussirais.

FLORIAN : Et Emile vient de choisir son prochain projet littéraire.