JULES : Moi, je ne suis pas du tout angoissé.

NORA : Je ne suis pas angoissée ! Enfin pas par rapport à toi, au fait de t'épouser. C'est pas comme si j'avais des doutes ou quoi. Dans ma tête ça fait déjà trois ans qu'on est mariés. Mais c'est la fête qui m'angoisse. Tu vois le problème c'est qu'on doit penser à tout le monde. Et forcément on ne peut pas satisfaire tout le monde. Il y aura nécessairement des choses qui vont mal se passer. Il y aura toujours quelqu'un pour ne pas aimer le menu, ou la musique. Il y aura toujours quelqu'un qui ne connaît pas grand monde et se sentira seul. Ainsi de suite. Moi j'ai juste envie que ce soit parfait ! Mais je sais bien que c'est pas possible ! Alors voilà je pense à la fête ; je ne peux pas m'en empêcher. Et j'ai pas envie de penser à la fête ! J'ai envie de penser au fait qu'on va être mariés, parce que c'est ça qui compte. Mais en fait je ne vois pas vraiment ce que ça va changer, d'être mariée. Est-ce que je suis horrible de ressentir ça ? De ne rien ressentir ?

JULES : Je n'ai pas du tout l'impression que tu ne ressens rien.

NORA : Mais, tu sais, je voudrais juste ressentir ce que je ressentais le jour où tu m'as demandée en mariage, il y a trois ans. Je ne devrais pas ressentir ça ?

JULES : Tu ne peux pas réclamer double ration de sentiment : tu as déjà eu ta part, tu l'as juste prise en avance.

NORA : Ça ne t'embête pas que je ne ressente rien ?

JULES : Non. Moi je ne sais pas vraiment ce que je ressens. Je suppose que je me sens plus heureux maintenant qu'il y a trois ans. C'est comme si maintenant ça allait devenir réel.

NORA : Parce que pour toi c'était pas réel à ce moment là ?

JULES : Ah bah maintenant, à t'entendre, c'est moi qui devrait me sentir horrible ? Si, c'était réel. Dans le sens où j'étais sincère et où à partir du moment où tu as répondu «oui», on commençait à construire une vie ensemble. Mais je ne sais pas, c'était moins certain. Tu pouvais encore changer d'avis.

NORA : Quoi ??!? J'ai vécu dans le mensonge pendant trois ans ? Parce que, pour moi, à partir du moment où tu me demandais ça, tu ne pouvais plus changer d'avis.

JULES : J'ai dit que toi tu pouvais changer d'avis, pas que moi je pouvais.

NORA : Non je suis désolée. Des fiançailles c'est un engagement des deux côtés. Je ne vois pas pourquoi ça serait asymétrique.

JULES : Je suppose que tu as as raison. Mais quand même, ça semble plus réel maintenant.

NORA : En fait, il faut croire que finalement tu ne connais pas toutes mes idées.

JULES : Si, je le savais. Bien sûr que je le savais que tu considérais les choses ainsi, que tu te sentais engagée et que je l'étais moi aussi. Mais ça semble plus réel maintenant, c'est tout. Pour moi en tout cas. Mais c'est pas grave que ça soit pas le cas pour toi : c'était plus réel pour toi dès le départ.