La démarche chancelante, Anya parvint toutefois à regagner l'appartement où son oncle et elle habitaient depuis qu'elle avait dû s'éloigner de sa famille, pour sa propre sécurité. En descendant du bus, elle avait vu trouble et avait failli tomber tête la première sur le goudron. Parvenue devant l'entrée de l'immeuble, elle avait failli percuter de plein fouet la porte vitrée et y laisser quelques traces de son ADN. Heureusement pour elle, personne ne se trouvait là et ne la vit se ridiculiser. Toutefois, lorsqu'elle parvint au premier étage, elle tomba sur leur voisine de l'appartement se trouvant en-dessous du leur. Elle ne la remarqua même pas, alors que la gentille mamie lui demandait si elle allait bien, intriguée par son teint livide. Anya passa devant elle sans même la voir, ni l'entendre. 

Une fois devant la porte de l'appartement, elle eut toutes les difficultés du monde à insérer la clef dans la serrure et dû s'y reprendre à plusieurs fois. Elle lâcha un grognement agacé. Pourquoi le monde était sens dessus dessous tout autour d'elle ? Pourquoi avait-elle l'impression d'avoir pris une cuite, alors que cela ne lui était jamais arrivé de toute sa vie ? Même si ses pensées étaient sacrément embrouillées, Anya se rendait bien compte que son état était loin d'être normal. 

C'est en titubant qu'elle pénétra dans le hall d'entrée de l'appartement. Sans chercher à savoir si son oncle était arrivé, elle se dirigea vers sa chambre d'un pas lourd, suant désormais à grosses gouttes. Ses yeux se fermaient tout seuls, et il lui fallut déployer un effort surhumain pour parvenir jusqu'à sa chambre. Ne pouvant pas se maintenir debout plus longtemps, elle s'effondra sur son lit, les jambes flageolantes. Sa joue s'écrasa contre la douce couette sentant le propre, tandis que ses pieds pendaient dans le vide. Assez rapidement, ses yeux se fermèrent, et elle sombra dans le sommeil. 

Un sommeil bien loin d'être reposant... Un sommeil agité, qui la fit se réveiller plusieurs fois, avant de sombrer de nouveau, aussi rapidement qu'elle avait ouvert les yeux. Elle avait froid. Elle avait chaud. De nouveau froid. Elle grelottait. Elle cherchait un peu de fraîcheur en changeant de position. Elle remuait. Elle haletait. Elle était perdue. Et apeurée. Le néant. 

     Les rayons du soleil couchant finirent par la réveiller. Lentement, ses paupières s'ouvrirent. Hébétée, elle resta quelques instants immobile, à fixer son armoire, placée sur le mur opposé à son lit. Que s'était-il passé ? Elle se rappelait vaguement son mal être, cette fièvre et ces maux de tête qui l'avaient subitement prise. Lentement, elle bougea ses doigts, ses jambes, pour finir par se redresser en position assise. Elle constata alors que quelqu'un l'avait déplacée, pour l'installer confortablement sous les couvertures. À moins qu'elle ne s'y soit elle-même glissée, alors qu'elle grelottait à s'en faire claquer les dents... 

À pas prudents, elle se dirigea vers la salle de bains, évitant tout mouvement brusque. Ce n'était pas parce que sa sensation de nausée avait disparue qu'il fallait courir dans tous les sens dans l'appartement. Elle devait laisser du temps à son corps pour se remettre. Pourtant, quelque chose clochait. Loin d'être affaiblie par les derniers événements, elle se sentait au contraire revigorée. Comme après une bonne nuit de sommeil. Ce qui n'avait absolument pas été le cas. À moins qu'elle n'ait rêvé tout cela... 

Sentant un nouveau mal de crâne percer en raison de toutes ces questions qui tournoyaient dans sa tête sans trouver de réponses, Anya fouilla dans le petit placard se trouvant au-dessus du lavabo, à la recherche de paracétamol. Une fois qu'elle eut trouvé le précieux cachet, elle le plaça sur sa langue et se pencha pour boire. Elle en profita pour se passer de l'eau sur le visage, ce qui la réveilla pour de bon.

Alors qu'elle coupait l'eau, son regard se posa sur le mystérieux tatouage qu'elle portait à l'avant-bras depuis quelques jours. Ce tatouage d'un bleu électrique, en forme d'araignée, dessinée de façon si artistique qu'elle-même n'aurait pas eu une telle idée. Elle l'effleura du bout des doigts, en se demandant si ce qui venait de lui arriver était lié à sa mort et à sa rencontre avec Miguel, le sorcier ténébreux. Miguel. Seul cet homme, qui l'avait ramenée à la vie, pourrait certainement répondre à ses nombreuses questions. 

D'un pas décidé, elle retourna dans sa chambre et fouilla dans les poches de sa veste, qu'elle portait le soir du drame. Ses doigts attrapèrent délicatement le petit bout de papier soigneusement plié qu'elle avait glissé là, et le déplièrent avec empressement. Son regard parcourut le numéro de téléphone, inscrit sur le morceau de feuille. Sans le quitter des yeux, comme par peur qu'il ne disparaisse subitement, elle tâtonna sa couette, jusqu'à ce que ses doigts ne se referment sur son téléphone. Elle le déverrouilla et se rendit sur ses contacts, où elle enregistra le numéro de Miguel, avant de lui envoyer un message : 

« Salut, c'est Anya. Tu sais, la fille un peu suicidaire à laquelle tu as sauvé la vie, sur le pont... Il m'est arrivé quelque chose. »

La réponse du sorcier ne tarda pas à lui parvenir. 

« Je me souviens de toi. Rejoins-moi à l'adresse que je vais t'envoyer, dans une demi-heure. »

Quelques secondes plus tard, elle recevait l'adresse, qu'elle entra sur son téléphone. Elle allait quitter sa chambre lorsque trois petits coups frappés contre sa fenêtre l'arrêtèrent dans un sursaut. Elle se retourna, pour découvrir alors la dernière personne qu'elle voulait voir en ce moment. Peter. Enfin, Spider-Man. Elle resta quelques instants debout devant sa porte, à le dévisager en silence, jusqu'à ce que le justicier masqué ne désigne du bout du doigt la poignée de la fenêtre. Dans un soupir résigné, Anya alla lui ouvrir, puis s'écarta pour le laisser entrer. Le héros du Queens se glissa agilement dans sa chambre, puis referma la fenêtre derrière lui. 

Anya détourna le regard, gênée. Elle ne savait pas quoi dire, ou quoi faire... Leur situation était ambiguë, et même si extérieurement, elle voulait lui montrer qu'elle lui en voulait, au plus profond de son cœur, elle voulait lui pardonner et retrouver leur amitié d'antan. Dans son costume rouge et bleu, Spider-Man se tourna pour lui faire face. Elle releva la tête et ils restèrent ainsi une longue minute, à se regarder sans rien dire. Ce n'est que lorsque Peter retira son masque, dévoilant un visage inquiet et des cheveux tout ébouriffés, qu'elle craqua et se jeta dans ses bras. Le jeune homme, bien qu'au départ surpris, referma assez rapidement ses bras autour de son corps mince, la serrant contre lui en une étreinte réconfortante. Anya resta ainsi quelques temps, rassurée et soulagée, avant de finalement se détacher de lui. Un énorme poids venait de se retirer de ses épaules. 

- Hum... ça... ça va ? demanda Peter en gardant une main posée sur sa taille.

- Pas vraiment...

Les deux adolescents s'assirent sur le lit de la jeune mexicaine, qui entreprit de lui raconter ce qu'elle venait de vivre. Passant une main nerveuse dans ses cheveux, elle chercha longuement ses mots, ne sachant par où commencer. Peter resta silencieux, lui laissant respectueusement tout le temps dont elle avait besoin. Finalement, dans un soupir, Anya se lança. 

- Je... Je ne comprends pas ce qui s'est passé, avoua-t-elle. Je pense que c'est lié à mon... retour à la vie. Je n'en suis pas encore sûre, mais cela me semble être l'hypothèse la plus probable. Quand on était en cours, et que j'ai dû résoudre cette équation de maths... Ma tête s'est mise à tourner. Et avant de revenir à ma place, j'ai eu l'impression que le feutre que je tenais m'était resté dans la main, je n'arrivais plus à le lâcher... Ce qui est complètement absurde et insensé...

- Ce n'est pas insensé, et encore moins absurde, la coupa Peter. Anya, je ne sais pas si je devrais te le dire, parce que ce n'est pas forcément une bonne nouvelle mais...

- Mais quoi, Peter ? Si tu sais quelque chose, dis-le moi. Parce que je n'ai jamais été aussi dépassée de toute ma vie...

En prononçant ces paroles, elle sentit les larmes lui monter aux yeux. En fait, si. Elle s'était déjà retrouvée dépassée par les événements, une fois. Il y a plusieurs années de cela. Lorsqu'elle avait dû dire adieu à son père et quitter sa famille, à cause d'histoires de super-héros. Et à ce moment-là, elle s'était fait la promesse de ne plus jamais rester impuissante. Or, à l'heure actuelle, c'était ce sentiment précis qu'elle ressentait, une fois de plus, une fois de trop : de l'impuissance. 

En voyant ses yeux briller, Peter sentit son cœur se serrer. Anya n'était pas vraiment du genre à laisser ses émotions prendre le dessus sur sa raison. Pourtant, en cet instant, il percevait clairement toute sa détresse. Et cela lui faisait aussi mal que si c'était lui qui s'était retrouvé dans cette situation. Avec douceur, il prit sa main dans la sienne, et la pressa. Son regard se plongea dans celui d'Anya, et il lui adressa un petit sourire qui se voulait réconfortant. 

- Il y a un peu plus d'un an, avant que toi et moi on ne se rencontre, il m'est arrivé la même chose. À quelques détails près. J'avais dû sécher les cours plusieurs jours, presque une semaine, parce que j'avais été gravement malade. Comme toi, j'avais des maux de tête, je ne tenais plus sur mes jambes, la tête qui tournait... Et quand je me suis réveillé, quelques jours plus tard... Je me sentais prêt à faire le tour du quartier en sprint.

C'était exactement cette sensation qu'avait éprouvé Anya lorsqu'elle s'était réveillée. Un sentiment de... puissance ? 

- Ce n'est que lorsque je me suis réveillé en pleine nuit et retrouvé la tête en bas, collé au plafond de ma chambre, que j'ai compris ce qui m'arrivait. Enfin, à moitié... Et puis, il y a cette sortie, qui m'est revenue en tête. Celle aux laboratoires Oscorp. À un moment, on avait pu observer des araignées radioactives. J'allais quitter la pièce, en dernier, lorsque j'ai senti quelque chose dans ma nuque. C'était en fait l'une de ces araignées, qui venait de me mordre. Je n'en savais rien sur le moment, mais... C'est elle qui m'a donné mes pouvoirs.

C'est ainsi que Peter acheva son récit, sa main toujours placée dans celle de la jeune fille, dont le cerveau tournait à plein régime. Les sourcils froncés, elle tentait d'assimiler toutes les informations que Peter venait de lui transmettre, et de les raccrocher à sa propre expérience, similaire à la sienne. Son regard brun revint se planter dans celui, tout aussi sombre, de son meilleur ami. 

- Tu crois que... Je suis devenue une sorte de Spider-Woman ?

- En quelque sorte. Ça sonne plutôt bien.

- Une sorte de... Mygale-Woman ?

- Là, ça sonne tout de suite moins bien. C'est même plutôt effrayant.

Cette réponse arracha un petit rire à Anya. Elle ne se rappelait plus de la dernière fois où elle avait ri, surtout avec Peter. Cela lui avait manqué plus qu'elle ne le laissait paraître jusqu'à maintenant. Heureux de la voir sourire et d'entendre ce son si mélodieux s'échapper de sa bouche, Peter rit à son tour, tout en pressant sa main dans la sienne. 

- Pourtant, je n'ai visité aucun élevage d'araignées radioactives. Je te le jure. Ça me révulse beaucoup trop... Si ça avait été le cas, je m'en serai rappelé : l'araignée aurait fini écrasée sous ma chaussure.

- Ce n'est pas méchant, une araignée, s'amusa Peter dans un rire.

- Ça dépend lesquelles...

Peter se renfrogna et grimaça. Avant qu'Anya n'ait pu lui dire qu'elle plaisantait, il la devança : 

- Je suis vraiment désolé de t'avoir caché la vérité... Je pensais bien faire. J'avais peur que tu me repousses et que tu ne t'éloignes...

- Je sais, Peter. Ce n'est rien.

Pour confirmer ses paroles, elle lui adressa un sourire chaleureux, qui irradia le cœur du brun. À son tour, un poids s'enleva de ses épaules. Ils venaient de se réconcilier. Il ne pouvait pas être plus soulagé et heureux qu'en cet instant. 

- Après tout, tu as raison. L'araignée du quartier est plutôt sympa. Bien qu'un peu tête de pioche.

Un nouveau rire franchit la barrière de leurs lèvres. Ils se fixèrent un long moment, dans le plus grand des silences. Jusqu'à ce qu'une exclamation, suivie d'une ribambelle de jurons, ne suive, les faisant tous deux sursauter. 

- Nom d'un Captain... Ma nièce traîne avec Spider-Man.

D'un même mouvement, Peter et Anya tournèrent la tête vers la porte de la chambre et lâchèrent précipitamment la main de l'autre. Peter rougit jusqu'aux oreilles et remit tellement vite son masque qu'il se retrouva avec les yeux en face du nez. Mais il était trop tard. Gil Corazon connaissait son identité.

Hey mes petites araignées ! 🕷

J'espère que vous allez bien. Je suis contente de revenir ici :) j'ai eu une envie soudaine d'écrire sur cette histoire et... me revoilà ! J'espère juste que mon absence n'a pas été trop longue et que vous vous souvenez d'à peu près tout...

Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? L'état d'Anya ? Sa discussion avec Peter et leur réconciliation ? L'arrivée impromptue de Gil ? x)

Au cas où vous l'auriez oublié, je rappelle que Miguel avait donné son numéro de téléphone à Anya avant qu'ils ne se quittent. D'après vous, va-t-il l'aider ? Lui révéler de nouvelles choses ? Comment Anya va réagir suite à l'acquisition de ses nouveaux pouvoirs ? (Qu'elle n'a pas encore eu l'occasion de découvrir).

J'espère revenir vite pour vous poster le prochain chapitre. Et j'espère vous retrouver ahah ^^ à bientôt !