Chapitre 4
TW: Validisme
Toute cette histoire au lycée commençait sérieusement à me titiller... Comparé à ce que j'espérais, la situation ne s'améliorait pas, bien au contraire. Selon les conseils d'Ophélia et de Célestin, je devais en parler à un adulte. Sauf que le corps enseignant et administratif du lycée n'était pas réellement disponible, ou en tout cas, à l'écoute. Il y a deux ans, un jeune garçon s'était fait harcelé. Il avait parlé aux responsables de l'établissement, qui n'ont malheureusement rien fait pour l'aider, le laissant mettre fin à ses jours. Cette histoire avait été le sujet des bruits de couloir pendant quelques semaines avant de disparaitre et que plus personne n'en parle, comme si l'élève n'avait jamais existé. Donc dans ces conditions, il ne me restait qu'une option : mes parents. Ô Youpi, joie, allégresse et bonne humeur. Je suis ra-vi
Tous les deux étaient assis sur la petite table du balcon, buvant leur café tranquillement comme chaque samedi. Alors que je sortais et m'installais sur une chaise, ma mère releva la tête.
-Oh, Bonjour ma chérie ! Tu as bien dormi ? Si mon père restait froid suite à notre conversation au sujet de mon orientation, ma mère, elle, semblait être dans une sorte de déni, refusant de voir la vérité en face et continuant de me genrer au féminin.
-J'ai... J'ai bien dormi merci. J'aimerais vous parler d'un truc.
-De quoi ? Cette fois tu vas nous annoncer que t'es vraiment PD ? Renchérit mon père sur son ton tranchant en soupirant.
-Euh... Non. Pour être honnête, j'avoue que je vais pas très bien en ce moment... Beaucoup d'élèves se moquent de moi pour un rien et puisque ça dure depuis plus d'une semaine, on peut considérer ça comme du harcèlement et Mélania est bizarre avec moi ces derniers temps...
-Et ? Si t'étais un peu plus normal ils n'agiraient pas comme ça, ta meilleure amie comme tes camarades. Au lieu de rejeter la faute sur les autres, essaye de faire un travail sur toi et voir ce qui cloche avec qui tu es. Même ma mère parut surprise par les propos que tenaient mon géniteur. Cependant, elle opta pour le silence pour éviter de ramasser les miettes de sa colère à mon égard. Une famille vivant sous le système du patriarcat par définition.
-On parle de ma santé mentale là ! J'ai jamais choisi d'être comme je suis et c'est pas à cause de quelque chose qui n'est pas de mon ressort que je mérite d'être traité de la sorte ! Que ce soit par d'autres élèves ou par ma propre famille... Répliquai-je un mélange d'angoisse et de frustration montant en moi. J'avais baissé le ton sur ma dernière phrase, sans raison apparente, comme par instinct.
-Toi, toi, toi ! Y'en a toujours que pour toi ! Et puis arrêtes avec ta « santé mentale » à la noix ! C'est un mythe pour que les gosses comme toi arrêtiez de vous plaindre à tout bout de champ ! Si tu es victime de brimades, c'est ta faute, point ! Suite à ces paroles, un silence pesant s'installa entre nous trois. Ma mère nous regardait tour à tour, ne sachant comment réagir. Voyant que personne ne le contrait, mon père continua en disant que je n'avais qu'à ne pas être différentE, il a bel et bien parlé de moi au féminin en toute conscience. Que je n'avais qu'à être une personne cis et hétéro. Voyant que je ne réagissais plus, il continuait d'hausser le ton, comme si j'étais une moins que rien. Je sentis les larmes me monter aux yeux. Il fallait à tous prix que je les réfrène, que j'intériorise, que je fasse comme si ses mots ne m'atteignaient pas. Pourtant...J'ai peur... J'ai peur. J'ai réellement peur. Je ne me sens même plus en sécurité chez moi. Je me sens oppressée comme jamais. Un poids m'empêche de respirer. Il ne faut pas que ma panique soit visible. J'ai peur. Il me faut une issue. J'ai peur. Mon rythme cardiaque s'accélère. J'ai peur. Je veux partir... J'ai peur. Faites que ça s'arrête, par pitié ! J'ai peur. Je n'entends même plus la voix de mon père. J'ai peur... Ces trois mots tournent en boucle dans ma tête et obstrue toutes mes autres pensées. J'ai peur... Je tremble... J'ai peur... J'ai peur... J'ai... Au secours...
Une main se posa sur mon épaule, me sortant de ma torpeur. Ma mère me regardait, inquiète comme elle ne l'avait pas été à mon égard depuis un moment. Je continuais de trembler un peu. Mon très cher géniteur, quant à lui, continuait de me fixer avec froideur et... Colère ? Dégout ? S'en était trop pour moi. Je me levai brusquement et me dirigeai vers ma chambre. J'avais une idée claire en tête. Je préparais rapidement mon sac, prenant quelques affaires avant d'aller vers la salle de bain pour compléter le tout. Après ça, je me dirigeais vers la porte d'entrée. Il était hors de question que je passe une minute de plus ici. Mon père m'interpella, encore énervé. Pour toute réponse je lui fis mon plus beau majeur sans même lui adresser un regard, puis je sortis et verrouillai la porte derrière moi. Je me précipitais vers le bas de l'immeuble, m'assurant de ne pas tomber dans les escaliers, téléphone contre l'oreille.
Après avoir demandé à Ophélia si je pouvais séjourner chez elle pendant quelques jours, celle-ci eut l'accord de ses parents et je me dirigeai à présent vers son domicile d'un pas résolu. Ma copine m'accueillit en me serrant dans ces bras et me dirigea vite vers sa chambre pour que nous discutions de ce qui venait de se passer. Alors que je vidais mon sac et fondais en larme, elle me fit un câlin en me caressant les cheveux, dans l'espoir que ca m'apaise ne serait-ce qu'un peu. Sa mère entra quelques instants plus tard pour nous apporter à manger, cette dernière s'étant douté qu'il se passait quelque chose de grave. Elle m'adressa un sourire compatissant avant de sortir et de nous laisser à nouveau seules.
Ophélia passa la soirée à m'écouter, à me réconforter et à essayer de me changer les idées. Puis, quand après qu'on est décidés d'éteindre, je m'endormis dans ses bras.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro