14 - Aéphyra
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- NITH-HAIAH - L'ange de la magie divine
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Devant moi, une créature aux ailes translucides papillonne, ne laissant que son ombre effleurer le sol. En capturant l'instant de son vol gracieux qui remplit l'air de magie, le temps paraît s'être arrêté.
Dans sa robe légère, tel un voile de dentelle posé délicatement sur sa peau blanche, elle semble flotter avec grâce. Cette tenue aérienne et raffinée met en valeur sa silhouette élancée. Ses yeux verts rappellent la couleur de l'herbe au printemps, ajoutant une touche de nature et de fraîcheur à sa beauté.
Elle pose ses pieds nus délicatement sur l'herbe froide et se rapproche de moi, m'observant de très près et en me reniflant partout.
- Qu'est-ce que vous faites ? Et qui êtes-vous ?, demandé-je en m'éloignant d'elle d'un pas.
Elle se redresse puis s'incline devant moi de façon majestueuse.
- Je me présente, je suis Aéphyra, reine et mère des Selphies.
Elle me regarde dans les yeux profondément.
- Je sens en toi quelque chose... Un pouvoir divin.
- C'est sans doute parce que je suis un ange. Ça me fait bizarre de le dire en parlant de moi.
- Un ange pur, que c'est étrange, voilà bien trop longtemps que je n'ai pas senti d'ange pur dans ce monde.
En l'observant je remarque qu'elle n'a pas cligner une seule fois des yeux.
- Comment t'appelle-tu petit ange pur ?
- Je m'appelle Marie Gaby, répondé-je en lui faisant ma révérence de la même façon qu'elle.
Des petites étincelles sortent de derrière un tronc d'arbre et s'approchent de nous. Ceux-ci flottent près de l'oreille de la Selphie. Je n'entends pas leurs voix comme avec Aéphyra, mais des petits sifflements de petits oisillons qui me rappellent ceux que j'entendais tous les matins à mon réveil dans mon monde.
- Mes enfants viennent de me dire qu'elles t'ont déjà vu près d'un jardin avec un autre personnage. Est-tu une alliée de ces créatures ?
- Qui ça ? Hayden ? Il a son caractère, mais reste une gentille personne. Pourquoi ?
- Tu dois faire attention angelesse, ce que tu penses être ne l'est pas et ce que tu ne vois pas est réel.
- Qu'est-ce que cela veut dire ? Et pourquoi je n'entends pas tes enfants ?
- Car je suis la mère gardienne du vent, j'ai assez de pouvoir pour parler à ceux qui ont en peu.
Elle se rapproche à nouveau, scrutant mes iris tellement fort qu'elle se plonge au fin fond, frôlant mon âme à travers.
- Je sens une évolution prochainement dans l'air, petit ange, ne te mélange pas aux autres créatures et surtout évite les démons qui t'utiliseraient, car si un jour ils le font, ce sera la fin des mondes.
Je reste silencieuse, absorbée par la douceur de sa voix, ne voulant pas qu'elle cesse de parler. Soudain, un craquement au loin derrière les bois me fait brusquement me retourner.
Mon dos fait maintenant face à Aéphyra, quand les lumières étincelantes s'évanouissent. Je vérifie rapidement, confirmant qu'elles ont disparu. Sur mes gardes, je scrute attentivement, cherchant à découvrir ce qui a bien pu terrifier les créatures magiques de la forêt.
- Qui est là ?, crié-je.
Prenant les devants, je commence à scruter les alentours à la recherche d'un moyen de me défendre, au cas où. Mes yeux se posent sur un gros morceau de bois, parfait pour être utilisé comme une batte de baseball improvisée. Je le saisis fermement, prête à faire face à l'inconnu qui a semé la peur.
- Ce n'est que moi.
- Hayden ?
L'ombre se rapproche lentement, révélant une silhouette de plus en plus distincte, et je discerne clairement un reflet blond qui me fait réaliser de qui il s'agit. Mon cœur commence à ralentir de battre et je remarque à quel moment il a commencé à s'emballer.
- Hadrien, dis-je en gardant le bâton dans la main, plissant les yeux, m'assurant de ne pas me tromper.
- Oui, c'est moi. Que fais-tu toute seule dans la forêt, dans le noir, sans personne pour t'accompagner ?
- Je... Je me suis perdu, n'avance pas plus.
Je peux discerner ses traits familiers, le blond de ses cheveux et l'expression de son visage. Les souvenirs me reviennent, et je ressens une pointe de méfiance mêlée de curiosité.
À cinq mètres environ de moi, je ne veux pas qu'il s'approche plus, surtout après ce qu'il s'est passé lors de notre première rencontre.
- D'accord, je ne bouge plus. As-tu peur de moi ?
- Peur, pff, non.
- Alors pourquoi tu n'a toujours pas lâché ce bout de bois.
Je baisse ma tête et vois qu'effectivement, mon poing est resté fermé sur la prise sans m'en rendre compte.
- Tu n'es pas censé te reposer suite à tes blessures ?
- Oh, je vois que l'Angelesse s'inquiète pour moi, dit-il d'un sourire en coin.
- Non, aucunement.
- C'est toi qui me blesses là, lâchant un petit rire à la fin de sa phrase et en posant sa main sur sa poitrine, fessant semblant d'attraper une flèche qui aurait transpercé son cœur.
Alors que l'idée me traverse l'esprit, je décide de prendre son chemin à l'envers. Je me met tout de suite en route, frôlant nos épaules au passage.
J'espère trouver ce foutu sentier qui me ramènera au dortoir.
- Où vas-tu, Angelesse ?
- Je rentre.
- Ce n'est pas par là !
Je continue de marcher silencieusement, ignorant ce qu'il me dit, entendant seulement les bruits des craquements de branches sous mes pieds et de ceux d'Hadrien, qui me suit toujours à cinq mètres de distance derrière moi.
Après un moment, j'ai l'impression que mon esprit est pris dans un labyrinthe et me rends compte que je tourne en rond, ne parvenant pas à retrouver le bon chemin.
Soudain, je m'arrête et je perçois qu'il miroite avec ce geste. Je lui lance un regard glacial, refusant de lui accorder la victoire de la raison. Son sourire hautain me laisse perplexe, réalisant qu'il se délecte de me voir lutter depuis un moment.
- Pourquoi souris-tu ? Ça te fait rire de me voir échouer ?, demandé-je les sourcils baissés.
- Oui, c'est assez amusant je dois dire, répond-il, souriant de toutes ces dents.
- D'ailleurs, pourquoi me suivre ? Tu as des ailes, toi, tu peux t'envoler et rentrer facilement.
- Oui, j'aurais pu en temps normal, mais pendant l'invasion des démons, je me suis fait dépouiller de toute mes plumes. L'as-tu oublié ?
Pendant qu'il parle ces coins de lèvres qui étaient vers le haut, descendent doucement et son maintenant en parallèle à ce qu'ils étaient au début.
Sa doit lui toucher profondément ce qu'il lui arrive.
- Ça veut dire que tu ne pourras plus voler ? Demandé-je délicatement.
Malgré sa façade impassible, je devine une lueur de peine dans ses yeux ténébreux, cachée derrière son masque d'indifférence.
- Non !
Pourquoi je ressens de la peine pour lui en ce moment-même ?
- Désolé pour toi, dis-je sincèrement.
En un éclair, il parvient à saisir mon bras, me tirant derrière lui et nous entrainant dans une autre direction. Sa force me surprend, et je me retrouve emporté malgré moi, sans pouvoir résister.
- Aïe, tu me fais mal, lâche-moi.
D'un geste vif, je brandis mon bras droit, tenant toujours le morceau de bois et tente de le frapper pour qu'il me lâche, mais en vain. Il parvient à me l'arracher des mains avant même que je puisse l'utiliser, et d'un mouvement brusque il le jette loin en le faisant traverser plusieurs branches, les brisant violemment sur son passage.
- Reste calme, crie-t-il tout en continuant sa marche, toujours agripper à moi.
Je ne veux pas le suivre, il ne faut pas que je le suive. Ma voix intérieure me répète cette phrase en boucle depuis qu'il m'a attrapé mon poignet.
J'essaye de nous ralentir en traînant des pieds, mais cette effort est inutile. Les larmes de douleur commencent à monter en voyant mes doigts qui commence à devenir violets.
- STOP !, crié-je enfin.
Il s'arrête net et au moment où il se retourne, il prend une grande inspiration pour commencer à parler. Cependant, en voyant mon visage crispé de douleur et les larmes qui coulent encore le long de mes joues, il se détend d'un coup et sa colère disparaît de son visage.
Il observe nos mains un moment avant de comprendre ce qu'il m'a mis dans cet état, puis me relâche aussitôt.
Dès que ma main est libérée, je la replie immédiatement vers moi, reprenant une expiration de soulagement et la garde sur ma poitrine, attendant que la couleur de ma main redevienne normale. Quand c'est le cas, je remarque l'empreinte de sa main qui, en revanche ne semble pas s'atténuer. Levant ma tête prête à l'engueuler pour ça, je m'aperçois ne pas pouvoir... il a disparu.
- Hadrien ?
Dans un murmure imperceptible, les branches des arbres semblant retenir leur souffle, suspendues dans un moment presque figé. Les ombres dansent timidement, capturant l'éclat d'une lune complice. Le silence enveloppe chaque frisson, laissant place à un monde sans vie.
- Je suis là.
Il réapparaît san d'un bruit derrière moi, comme un voleur marchant sur la pointe des pieds afin de ne pas se faire prendre.
- Tu m'a fait peur, crié-je en sursautant le cœur palpitant.
- N'abuse pas. Je suis aller te chercher sa.
Il me montre une plante qu'il me tend et la prend avec ma main qui ne m'endolorie pas.
- Qu'est-ce que c'est ? Un trèfle ?
- Un trèfle ? Non, c'est une Felse.
Sa ressemble vraiment à un trèfle à quatre feuille.
- Une Felse ? Pourquoi me donnes-tu cette fleur ? Enfin, plutôt cette plante verte.
Hadrien se met à éclater de rire comme si mes paroles ont involontairement déclenché une réaction comique.
- Mais tu es... Comment dit- on déjà quand les gens ne voient pas les mêmes couleurs que les autres ?, demande-t-il en coupant son rire.
- Tu veux dire, daltonien ?
- Oui, voilà, affirme-t-il en reprenant son rire.
- C'est cette pensée qui te fait rire ?
- Non, petite imbécile, c'est toi qui me fais rire la daltonienne. C'est une plante de couleur jaune.
- Jaune ?
Je rapproche la plante devant mes yeux, l'observant sous différents angles, et enfin, je remarque sa teinte jaune. Timidement, je lui avoue cette découverte.
- Ah oui, ce n'est pas de ma faute, c'est le contraste des rayons lunaire bleutés sous les arbres et la couleur de la plante qui m'ont donné l'illusion qu'elle était verte, dis-je pour me défendre.
- Oui, d'accord, daltonienne, continue-t-il, ne croyant pas une seconde à mon excuse. Maintenant, mange-la !
- Comment ça, mange-la, répété-je, perplexe par sa demande.
- Tu es daltonienne et en plus sourde ?
Recommençant à contempler la plante sous mes yeux, la tenant délicatement entre mon pouce et mon index. Mon regard se pose ensuite sur lui, cherchant à percer le sérieux de sa demande. Je me mets à la sentir et découvre une odeur particulièrement sucrée me faisant penser au miel.
Hadrien perdant patience, m'arrache la plante des mains avant de maintenir ma mâchoire pour l'y déposer à l'intérieur.
- Que...
- Mâche et avale, ça va t'aider.
Les yeux clos, surprise par le goût qui ne ressemble en aucun cas au miel sucré mais plutôt à une cuillerée de sel, j'essaye de l'avaler difficilement sans le recracher.
- C'est tellement amer, beurk.
- Les meilleurs remèdes sont amers.
- Alors c'est un remède, mais pourquoi ?
Je continue avaler ma salive, essayant de m'habituer au goût dans ma bouche.
- Pour... ton bras, répond-il en baissant les yeux sur mon poignet toujours plié et posé sur ma poitrine immobile.
Après cette rencontre désastreuse, et ce qu'il s'en ai suivi, je ne m'attendais pas qu'il ai un côté sympathique.
Il n'est pas qu'un pervers, je l'ai mal juger.
- Aller avance maintenant, il est super tard et je suis mort de fatigue.
- Oh, d'accord.
***
Arrivant dans la chambre, je constate que toutes les filles sont déjà profondément endormies, à l'exception d'une.
Le lit d'Elise est vide et bien rangé, elle n'a probablement pas dû revenir.
Dans la pénombre de la salle de bain, alors que l'eau froide glisse sur ma peau pour apaiser la douleur, je vois mieux les marques de sa poigne qui se dessinent mieux sous la lumière crue de l'ampoule. Les teintes jaunâtres et violettes évoquent le début d'un hématome qui ravivent les souvenirs de cette douleur intense où j'ai craint que mon poignet ne se brise sous la pression.
Il me fait encore mal, mais moins que tout à l'heure, sûrement grâce à la plante jaune, la Felse.
Après ma douche j'enfilant un pyjama et je remarque que les couleurs sur ma peau ont disparu. En remuant doucement mon poignet je constate également qu'il n'y a plus aucune douleur, comme si la souffrance s'était dissoute dans l'eau.
Cette plante est vraiment magique, je devrais en prendre avec moi quand je rentrerai dans mon monde. Enfin, si un jour... je rentre.
Allonger sous la couette, mes paupières se ferment et je me laisse envelopper par les bras du sommeil, plongeant dans les profondeurs insaisissables de l'inconscient.
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