
32 - Une volonté inébranlable
Équinoxe marchait droit vers le Gondor.
Rien ne le déviait de sa voie, il créait son propre chemin.
Portant fièrement Eomer, il marchait en tête à côté du Roi Théoden, la course n'étant plus possible sur ce terrain accidenté.
Eomer le mena alors sur une bute où ils avaient une bonne vue sur l'horizon. La voie était libre.
Équinoxe regarda alors la longue colonne de cavaliers qui avançaient inlassablement vers le Gondor.
Soudain parmi la multitude de chevaux, l'un attira son attention.
Un petit cheval isabelle qui portait deux cavaliers dont un de petite taille. Aussitôt Equinoxe comprit. Eowyn et Merry étaient aussi de la partie.
Il ignorait si cela était une bonne ou une mauvaise chose et au fond ce n'était pas à lui d'en décider. Si Isil avait choisi de les aider, il devait respecter cette décision et préserver leur anonymat.
Pensez à Isil réveilla son angoisse. Il avait peur pour elle mais il devait tenir cela loin de son cœur, les autres chevaux avaient besoin de sa confiance et de sa détermination. Ils devaient avancer contre tout bon sens vers les Ténèbres et il devait les soutenir. Il avait promis.
Rien ne l'arrêterait. Isil lui avait confié une mission et il comptait bien la tenir, jusqu'à son dernier souffle si cela devait être le cas.
Équinoxe se redressa, courbant l'encolure et frappant ses lourds sabots au sol.
Eomer lui flatta l'encolure puis ensemble ils scrutèrent les Ténèbres qui recouvraient à présent le Gondor. Leur destination.
***
Elrohir était dans le noir.
Il ne voyait rien, pas même sa lame dans sa main serrée. Il entendait son frère à ses côtés mais la noirceur était trop dense, sa vision bloquée par le maléfice des morts.
Il craignait pour Isil. Il savait que sa colère la rendait hermétique à la peur mais ce n'était pas son cas, et elle était en première ligne.
Soudain une lueur perça, attirant le regard de l'Elfe.
Rapidement une vive lumière en émana, formant un étrange ovale. La peur enserra le cœur d'Elrohir, cela ressemblait étrangement à un œil.
L'oeil de Sauron ?
L'Elfe referma sa prise sur la garde de son épée puis il remarqua que bien qu'ardente, la lumière était douce, rassurante...
Isil.
La noirceur recula, dévoilant la jeune Elfe debout et irradiante, tenant les Ténèbres à distance de leurs cœurs. Brillant quand tout n'est que néant, c'était dans les Ténèbres les plus dense qu'Isil se révélait.
Son aura s'agrandit, les enveloppant, les protégeant.
Le Ward était couché aux pieds de la jeune Elfe, Aragorn semblait le plus confiant, Legolas concentré et Gimli, bien que remplié sur lui-même, paré au combat. Ils étaient là, avec elle.
Elladan s'avança alors et Elrohir le suivit.
– Vous n'approcherez pas plus, souffla Isil d'une voix voilée.
Aragorn tira alors son épée, scellant leur destin.
– Qui pénètre dans mon domaine ? Gronda le Roi fantôme.
– Une personne à qui vous devez allégeance, répondit Aragorn.
– Les morts ne tolèrent pas que les vivants passent.
– Vous me tolérerez moi !
Le Roi fantôme eut un rire moqueur tandis que l'armée restait immobile à les observer.
– La voie est close, reprit le Roi fantôme. Elle fut faite par ceux qui sont morts et les morts la gardent.
L'armée avança obligeant Isil à puiser plus profond dans son don. Elrohir la fixait tandis que les premiers signes de fatigue apparaissaient.
– La voie est close, maintenant vous allez mourir.
D'un geste vif, Legolas décocha une flèche mais elle traversa le Roi sans encombre. Isil émit un râle et les feux vacillèrent un instant avant de redoubler à nouveau. Inquiet, Elrohir la regarda se redresser, la respiration saccadée.
– Je vous sommes d'accomplir votre serment, s'écria Aragorn conscient qu'Isil ne tiendrait plus bien longtemps.
– Il n'y a que le Roi du Gondor qui puisse me l'ordonner, se moqua le Roi fantôme.
D'un bond, il attaqua Aragorn qui parvint à parer avec Anduril.
– La lame a été brisée !
Aragorn attrapa le Roi fantôme par le cou.
– Il a été reforgée.
Le Roi fantôme recula prestement mais l'armée maintenait sa pression. Les feux les plus lointain s'éteignirent et Elrohir comprit ce qu''Isil faisait : elle concentrait sa puissance sur les feux essentiels.
Elle n'allait plus tenir bien longtemps. Déjà elle fléchissait les genoux, semblant souffrir de plus en plus. Le temps était compté.
– Tiens-toi prêt à la récupérer, souffla Elladan.
Elrohir hocha la tête et s'approcha d'Isil tandis qu'Aragorn et le Roi fantôme se toisaient, silencieux.
– Battez-vous pour nous et regagnez votre honneur, reprit Aragorn. Que dîtes-vous ?
Aragorn jeta un rapide coup d'œil à Isil qui commençait à replier ses bras sous la pression. Il se déplaça alors parmi les morts mais aucun ne bougea. Ils attendaient la décision de leur Roi.
– Que dîtes-vous ?!
Aucune réponse, les morts demeuraient silencieux. Elrohir regardait Isil lutter, les yeux clos et la respiration haletante.
– Vous perdez votre temps, Aragorn, gronda Gimli. Ils n'ont pas eu d'honneur dans la vie, ils n'en auront pas plus dans la mort !
– Je suis l'héritier d'Isildur. Battez-vous pour moi et je considérai votre serment comme
accompli. Que dîtes-vous ?!
Soudain un rire s'éleva. Le Roi fantôme se moquait à nouveau d'eux. Elrohir s'apprêtait à soutenir Isil qui ployait sous la pression de l'armée quand celle-ci, sans raison apparente, recula.
– Vous avez ma parole ! S'écria Aragorn. Battez-vous et je vous libérerai du monde des morts-vivants ! Que dîtes-vous ?
Brusquement les morts disparurent. Isil baissa les bras puis chancela en arrière. Elrohir la récupéra contre lui et vit qu'elle saignait du nez.
– Ils... Ils sont partis, fit-elle à bout de souffle.
– Restez là, traitre ! Hurla Gimli en agitant sa hache.
Elrohir balaya l'esplanade du regard mais il n'y avait plus rien. Les morts étaient partis.
Avaient-ils échoué ?
***
Heureusement qu'Elrohir me tient car je pense que je serais lamentablement tombé au sol.
Je suis épuisée. Jamais je n'ai dû puiser si loin dans mes ressources mais c'était vital. Ils voulaient vraiment nous tuer...
Mes bras me brûlent et mes jambes me semblent de coton.
– Merci, soufflé-je à Elrohir en tentant de me redresser.
Il m'aide à me remettre sur pied mais je peine à garder l'équilibre.
– Vous pouvez marcher ? S'enquit Legolas.
Soudain un bruit sourd résonne puis le sol se met à trembler. Des volutes de poussière envahissent la cavité tandis que des blocs de pierres commencent à tomber.
– Je ne vais pas avoir trop le choix ! M'exclamai-je tandis que des os tombent en masse derrière le trône.
Je mets un temps à comprend qu'il s'agit de crânes humains, des centaines de crânes...
Comme si ce n'est pas suffisant, un pan de mur entier s'effondre et des milliers de crânes en jaillissent comme de l'eau d'une source.
– Partons ! Vite !
Le hurlement d'Aragorn me fait bondir sur mes pieds et on détalle comme des lapins en fuite. On court aussi vite que possible mais la marée de crânes nous heurte. Elrohir m'empoigne par les épaules pour que je ne me fasse pas emporter, je n'ai pas la carrure de mes compagnons.
Je titube, nageant à moitié dans les ossements et n'en voyant pas la fin.
Soudain Le Warg devant moi se fait happer et glisse sur le côté, vers le ravin.
– Le Warg !!
Aussitôt Aragorn se retourne puis, sans plus y réfléchir, plonge vers le ravin. Extremis, il parvient à attraper Le Warg mais ils sont trop lourd pour que notre futur-roi arrive à se redresser. Legolas et Gimli accourent à leur aide et arrivent à les hisser sur le restant du chemin qui disparaît sous les ossements qui continuent à se déverser.
Dès qu'il est sur pattes, Le Warg bondit en avant, détalant à toutes enjambées.
– On est plus très loin de la sortie, avertis-je en le voyant au travers de son regard.
On hâte autant que possible le pas sous le grondement funeste.
Je ne sais pas trop comment mais on parvient à sortir de la montagne, juste à temps. On arrive en trombe dans une plaine illuminée par un doux soleil, étrange contraste avec la mort qu'on vient de frôler.
– Pourquoi on sort toujours en catastrophe des montagnes ? Lancé-je haletante. Je ne veux plus jamais entrer dans un tunnel...
Les autres s'arrêtent un peu plus loin, seul Elrohir reste tout près de moi.
– Les morts semblent avoir refusé, relève Gimli perplexe. Que fessons-nous à présent ?
Sans blague ?
Épuisée, je me laisse tomber au sol.
– Ça va ? S'enquit Elrohir.
– Non...
Il sourit avant de m'effleurer la joue.
– Reposez-vous un peu. Vous nous avez sorti des Ténèbres, ce n'est pas rien.
Je ne peux qu'acquiescer, je suis trop lasse pour répondre. J'ai tant usé de mon feu que mon corps tout entier me brûle.
– Quels sont ces feux en contre-bas ? Fait alors Elladan.
Je tourne la tête pour voir des colonnes de fumée noires dans le lointain. Elrohir s'avance à son tour.
– Ce sont des villages, répond t'il. Des villages en feu... Il y a aussi des navires sur le fleuve. Des pirates d'Umbar ?
Soudain Aragorn se laisse tomber à genou, comme terrassé par cette défaite. Legolas vient le soutenir même si c'est vain. Sans l'aide des morts tout est perdu. Le Rohan court vers sa ruine, nous ne serons jamais assez nombreux.
– Soyez maudit à jamais, soupiré-je las.
Qu'allons-nous faire ?
Nous n'avons aucun autre plan sur lequel nous rabattre. Nous... nous avons échoué.
Éreintée, je laisse les larmes envahir mes yeux. Tout est perdu...
Tout à coup, j'ai froid. Un froid perçant qui semble enserrer mes os et comprimer mon cœur. Ma colère s'étant consumé, la peur revient en maître, mais ce froid n'est pas normal. Je tente d'appeler à l'aide mais je m'engourdis et ma vision perd en netteté. Je lutte pour ne pas prendre connaissance mais alors, et sans action de ma part, je me relève. Je me vois me mettre à genoux puis me redresser.
Soudain je reconnais cette sensation de spectateur de son propre corps : je suis possédé !
Je me débat avec moi-même mais je ne peux rien et j'avance vers mes amis qui me tournent le dos. Ils ne se doutent de rien et je n'ai aucun moyen de les prévenir !
Je suis le danger qui les approche.
Je lutte de toutes mes forces mais je ne ressens que du froid. Horrifiée, je m'approche d'Elrohir qui regarde toujours vers le fleuve, inconscient de ce qui se trame.
La panique est à son comble quand soudain, comme alerté par un sixième sens, Le Warg tourne brusquement la tête. Assis à côté d'Aragorn, il me dévisage un instant avant de bondir en avant. Il aboie avec fureur, ses puissantes mâchoires claquantes comme autant de menaces.
Alarmés, les autres se retournent aussi puis, comprenant que quelque chose cloche, tirent leurs armes.
– Relâchez la ! Hurle Aragorn hors de lui.
Il lève son épée et la peur me rend un peu de lucidité, il ne va quand même pas me frapper ?
Elrohir se glisse alors dans mon dos et me bloque les bras, rendant mes lames inaccessibles mais je garde mon feu. Un étrange rire franchit alors mes lèvres.
Furieux, Aragorn me prend la tête entre ses mains.
– Relâchez la immédiatement !
Soudain quelque chose jaillit de mon corps. Je bascule en arrière mais Elrohir me rattrape sans mal tandis que le Roi fantôme se tient devant Aragorn. Ils se toisent une seconde puis le mort rit de nouveau.
– Nous sommes d'accord. On se battra !
La colère m'envahit à nouveau. Il était obligé de faire ça ?!
Trop las pour répliquer, je me contente de soupirer puis je repose la tête contre Elrohir qui me sourit.
Pourquoi ça n'arrive qu'à moi ?
Le soulagement envahit immédiatement notre petit groupe. Nous avons une armée à mener aux combats. Nous avons une chance de réussir. Nous devons réussir.
***
– Nous ne sommes plus très loin, fit Hàma. Les éclaireurs disent que l'armée toute entière est tournée vers la muraille de Minas Tirith.
– Nous n'avons pas été repéré ? Demanda Eomer.
– Pour l'instant rien ne laisse présager cela.
– Restons tout de même sur nos gardes, répondit Théoden. L'ennemi a bien d'autres atouts que
de simples Orques ou Trolls.
Tous acquiescèrent.
Équinoxe, tout concentré à sa mission, leva la tête pour scruter les cieux. Il n'avait jamais vu la créature mais la peur qu'elle avait fait naître dans le cœur d'Isil l'inquiétait.
Soudain il sentit son étoile luire. Elle brillait telle une Lune au cœur de la nuit, comme rarement elle le faisait.
Le cœur d'Équinoxe s'agita. Avait-elle des problèmes ?
Certainement... et ne pas être à ses côtés ajouta de la frustration dans le maelstrom des émotions qui se bousculaient en lui.
Il refoulait tout cela au plus profond de son cœur quand soudain un cri retentit. La terreur tomba sur eux tel un violent orage. Tous connaissaient ce hurlement funeste : un Nazgûl.
Les cavaliers s'arrêtèrent brusquement, la panique brouillant leurs rangs.
– Restez en position ! S'écria Hama. Gardez vos positions !
– Nous voilà donc repéré, souffla Théoden tandis que le cri retenti plus proche.
Eomer pesta quand tout à coup une grande ombre plongea l'armée dans une obscurité temporaire. Les Hommes plièrent l'échine tandis que les chevaux s'agitaient, apeurés.
L'immonde créature refit un passage, semant la panique dans les rangs. Les gémissements des Hommes se mêlèrent aux hennissements des chevaux, l'armée était en déroute malgré les ordres criés.
Rien n'arrivait à vaincre la terreur.
Équinoxe s'avança alors de son pas lourd, chassant la peur de son cœur comme si elle n'était qu'un nuisible. Il se figea avant de se cabrer de toute sa hauteur puis laissa sa masse retomber au sol. Le bruit de ses sabots impactant la terre fut aussi sourd qu'un énorme coup de tambour dont l'onde se propagea dans le sol.
Aussitôt les chevaux se calmèrent et le silence retomba dans l'armée.
Équinoxe poussa alors un hennissement, rassurant les cœurs tremblants, mais la créature lui répondit avant de le survoler.
Malgré la vision d'horreur, Équinoxe ne broncha pas. Il fixa l'immonde engeance, il n'était pas cheval à plier l'encolure face cette erreur de la nature.
La chose se plaça juste devant le cheval, les battements de ses ailes nécrosées projetant une odeur de pourriture, mais Équinoxe demeura tête haute.
Eomer resserra sa prise sur les rênes, l'être jonché sur la créature les jaugeait. Soudain Equinoxe fit mine de charger puis poussa un hennissement de colère.
Le Nazgul siffla puis la créature reprit de l'attitude avant de partir droit vers Minas Tirith.
– Ta bravoure est impressionnante, souffla Eomer en se détendant.
Équinoxe tourna la tête pour frotter son front contre la jambe du Rohirrim. Comprenant son geste apaisant, Eomer lui flatta l'encolure avant de se tourner vers Théoden.
– Ils connaissent à présent nos positions et nos forces, nous devons nous hâter !
Acquiesçant les paroles de son Roi, Eomer talonna Équinoxe pour reprendre leur marche.
L'armée se remit en mouvement, le cœur plus serein.
Equinoxe se secoua avant de partir en tête, il mènerait l'assaut.
Pour Isil.
Pour Fangorn.
Fin du chapitre
Le restant de la Communauté sort du chemin des Morts indemne et accompagné d'une véritable armée fantôme tandis qu'Équinoxe mène les chevaux du Rohan au champ de bataille.
L'heure des combats approche, la guerre est sur le point d'éclater...
Qu'adviendra t'il de chacun ?
Qui brillera, qui s'éteindra ?
Vos avis en commentaire ^_^
PS : Désolée du retard dans la publication, j'ai eu un petit soucis.
Pour ceux que ça intéresse je l'expliquerai dans mon livre "Conseils d'écriture made in Souffle du Vent" ^_^
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