// ... Chapitre onze ... //
"I always wanted you back" - Letherette
Nous avons commencé à avancer lentement à travers les bois. Le calme était revenu dans nos cœurs, je suppose.
- Arrêtons-nous là pour la nuit. Propose Gandalf en s'asseyant sur une pierre.
- Bofur allume un feu, je meurs de faim. s'exclame Dwalin.
Ils se sont tous activés à faire un camp de fortune pour la nuit, je suis restée à regarder les alentours, les orcs nous poursuivent toujours. Je le sens, et je sais qu'ils finiront par nous rattraper.
- Vous avez l'air anxieuse Maliha.
Je me tourne pour voir le magicien s'approcher de moi.
- Ils finiront par nous rattraper.
- Certes, mais nous avons une bonne longueur d'avance sur eux, nous serons tranquilles quelques jours.
- Quelle est notre route ?
- Nous allons rejoindre les bois de Mirkwood, passer par le chemin des elfes pour rejoindre la rivière afin d'atteindre la montagne.
- Les bois de Mirkwood, Gandalf, pensez-vous que les elfes nous laisseront passer ?
- Ils ne nous verront pas, nous nous tiendrons éloignés de leur royaume.
- Très bien.
Nous avons mangé, je dois admettre que les nains sont une race atypique. Ces petits hommes ont une personnalité démesurée et brute de décoffrage. Le changement avec les elfes est radical, là où ma normalité était d'être proche de la perfection, les nains semblent en être l'exact opposé, c'est à celui qui aura la plus grande "gueule".
- Alors comme ça vous êtes un titan Madame ? lance Balin d'un coup.
- Et bien oui, je souris gêné.
- Les contes et légendes racontent que les anciens titans étaient des hommes et cela convenait très bien. Une femme dans cette position, c'est du jamais vu. rétorque Dwalin en finissant sa soupe.
- Sachez messieurs que les Valars ont toujours appelé une femme en premier lieu, mais que aucune d'elles n'a accepté avant Maliha, lance Gandalf d'un air malicieux.
- Est-ce vrai ? je demande.
- Et bien oui, la mission des titans leur a sans doute toujours fait peur, il rit de bon cœur, vous êtes très courageuse.
- On dit que les titans sont arrachés de leur monde, est-ce vrai madame ? Venez-vous d'un monde différent du nôtre ? demande Fili.
- J'ai été appelé en effet, et de ce fait, j'ai quitté mon monde pour le vôtre.
- Comment était votre monde ?
Je n'avais pas forcément envie de rentrer dans cette discussion, mais si je voulais m'intégrer, je n'avais pas vraiment le choix.
- Et bien... Très différent, j'ai eu beaucoup de mal à m'acclimater ici au début.
- Pourquoi ? demande Bilbon.
- Tout est différent, l'air est différent, je n'ai jamais croisé de nains, d'elfes ou de Hobbit dans mon monde, cela n'existe pas. Les coutumes, le paysage, la nature, la technologie, j'ai dû réapprendre à vivre selon vos normes. C'était très compliqué pour moi.
Ils se sont regardés légèrement dubitatifs.
- Aviez-vous une famille ?
- J'ai quitté mes parents et mes amis.
- N'étiez-vous pas mariée ? Des enfants ? lance un autre une fois ma réponse dite.
- Non, rien de cela, je vivais seule.
- Une si belle femme, vivre seuel ? s'exclame Gloin.
- Je ne suis pas si jolie vous savez, et je n'ai rien retouché alors...
- Retoucher ? dit Gandalf d'un seul coup.
Je me suis maudite... Mais pourquoi avais-je dit ça !
- Oui... Les femmes de mon monde retouchent beaucoup leur corps ou leur visage, pour être plus jolie, il est rare de ne pas trouver une femme "originelle".
- Mais retoucher quoi exactement ?
- Le nez, la bouche, les oreilles, la couleur des yeux, la forme du visage... Nous pouvons modifier à peu prêt tout, même la taille.
- Grand dieu... Et vous ?
- Rien, je n'ai jamais été attiré par ça.
- J'ai du mal à imaginer comment on peut faire ce genre de choses.
- Je vous assure qu'il vaut mieux ne pas savoir.
Il y eu un long silence et j'en profitais pour boire ma soupe en quittant leurs yeux.
- Pourquoi avez-vous fait le choix de rester ici et d'accepter le rôle de titan ? demande Bilbon. Votre monde semble surréaliste, alors pourquoi vous attarder ici ?
J'ai réfléchi quelques minutes avant de répondre. Me souvenant de mon air ébahi devant les forêts, de la sensation de mes premiers pas dans la neige et du goût de la nourriture. Je ne crois pas que j'aurai les mots justes pour qualifier le changement qui s'était produit en moi à la vue de toutes ces choses nouvelles et de l'influence qu'elles ont eu sur moi.
- Peut-être parce que justement, j'avais besoin de retrouver la simplicité. Et quand je vois la nature environnante, je me rends compte que c'est ça l'important, la simplicité. Vous et toutes les races qui forment les peuples libres, respectez les lois de la nature et vous les préserver depuis des milliers d'années. Je trouve votre culture beaucoup plus noble que la mienne et j'ai décidé de consacrer ma vie à vous protéger. C'était plus juste que de finir ma vie dans un monde qui n'avait rien de tout cela, qui n'avait plus de valeurs ni de limites. De plus, étant immortelle, je me dis que je pourrais sans doute continuer à préserver cette façon de vivre, faire en sorte que vous ne deveniez pas comme nous, car la notre n'était pas la bonne solution.
Encore un silence... Je ne sais pas si j'avais eu les mots justes, mais Gandalf m'a regardé en étirant les lèvres.
- Votre combat est très noble Maliha, murmure Gandalf.
Noble ? Je vois plus ça comme une dette qui doit être payée... Même si nos mondes ne sont pas les mêmes et qu'ils n'ont aucune influence l'un sur l'autre (hormis moi, bien entendu), ma terre m'a nourrie et donnée la vie. Alors si je peux me racheter en protégeant celle-ci... Non ce n'est pas une tâche, mais bien une dette, que je me dois de payer.
- C'est votre combat contre le mal qui est noble Gandalf, votre combat pour récupérer votre héritage perdu, dis-je en me tournant vers les nains. Je vous protégerai dans votre quête, soyez-en certain.
Nous avons encore bavardé longtemps, de tout et de rien. Ils se sont ouverts à moi un peu plus chaque jour, dévoilant leur personnalité. Thorin était un leader dans l'âme, un mental d'acier, mais je pouvais sentir une sensibilité profonde et un attachement pour son peuple qui faisait de lui un roi. Je pouvais lire la même passion chez ses neuves Fili et Kili, bien que Kili soit beaucoup plus tête brûlée que son frère, son visage était doux et son regard plein de malice.
Je me suis également rapprochée de Bilbon, j'ai appris beaucoup de choses sur les hobbits. D'après les enseignements d'Elrond, c'était une race discrète et reculée. Aimant se faire oublier du monde et des autres races, alors que pouvait-il bien faire ici ?
- Les hobbits sont très attachés à leur terre, vous savez. Nous aimons les choses simples et une vie routinière et bien rodée.
- Je vois et pourquoi vous êtes vous entraîné dans cette quête si vous êtes tant attaché à vos habitudes ? je lui demande en marchant à ses côtés.
- Surement pour la même raison qui vous a poussé à accepter votre contrat. Changer ma vie et envi d'explorer le monde autour de moi. J'étais réticent à me lancer dans cette aventure vous savez, mais j'ai fini par accepter, car il était vrai que ma vie était devenue monotone, qu'il me manquait quelque chose.
- Alors peut-être y avait-il des bancs de poissons perdus dans leur bocal ici aussi, je me suis dit en souriant.
- Êtes-vous heureux d'être ici ?
- Je ne regrette rien, je me suis attaché aux nains et à leur cause. Avez-vous déjà visité la Conté Maliha ?
- Non, mais ce que vous m'avez raconté me donne envi. Je dois admettre qu'un endroit calme et reposant me ferait le plus grand bien quelques fois.
- Si vous avez envi de vous ressourcer, n'hésitez pas à me rendre visite une fois que nous serons rentrés.
Je lui ai souri avant de continuer à marcher à ses côtés en parlant de tout et de rien. "Une fois que nous serons rentrés". Valars, j'espère que rien ne mettra en doute les paroles de Bilbon, que rien ne viendra perturber sa volonté de rentrer chez lui. Le combat a changé mon cœur et il continuera de le faire, je le sais, j'espère juste que le sien restera pur.
L'aube du cinquième jour de marche se lève et nous repartons à travers les sapins. Nous progressons aisément et pour l'instant aucun Warg à l'horizon. Je suis montée sur un rocher pour observer le levé du soleil, Valars que la terre du milieu est belle ; les sapins envahissent les montagnes à perte de vue, passe mon regard sur la neige des sommets, elle est d'un blanc immaculé et brille sous les premiers rayons du soleil.
- Vos yeux sont toujours pétillants quand ils regardent le monde Maliha.
Je me retourne pour voir Gandalf.
- Tout est tellement beau.
- Quel projet avez-vous pour l'avenir ? Les mages bleus m'ont confié que vous souhaitiez rester auprès des hommes pour les guider tout au long de leur développement. Est-ce la seule chose qui vous anime ?
Alors voilà venir le sujet que je redoute tant. Celui que je n'aime pas aborder, l'avenir. Les souvenirs de ma discussion avec Elrond font irruption un instant et je sens de nouveau le poids de ma destinée toute tracée.
- Que voulez-vous dire, Gandalf ?
- Et bien n'avez-vous pas d'autre envi que d'observer ? Ne voulez-vous pas autre chose ?
Je soupire, devrais-je être sincère ? Je connais peu Gandalf, même si ses traits m'inspirent une confiance aveugle...
- Il faut dire que les possibilités sont limitées.
- Et pourquoi ça ?
Je me tourne vers lui pour me plonger dans ses yeux gris qui semblent flamber dans le soleil du matin.
- Je suis immortelle... L'avenir n'est malheureusement pas très glorieux pour moi. Je sais que je peux aller sur les terres immortelles, mais je ne veux pas que la terre du milieu devienne peu à peu comme chez moi. Alors oui, je vais juste rester là et guider les hommes, mes connaissances me le permettent.
- Il ne faut pas perdre de vue que vous êtes une personne Maliha. Le bonheur peut aussi vous attendre.
- Je serais heureuse si les hommes respectent la nature Gandalf. Je n'ai besoin de rien d'autre... Il m'a fallu longtemps pour comprendre que justement, c'est cette façon individualiste de regarder le monde qui fait que l'on ne le respecte pas... En venant ici, j'ai décidé de ne plus être comme ça, que le monde n'était pas d'un seul point de vue, qu'il fallait le voir dans sa globalité.
- Oui, je comprends ce que vous voulez dire, mais vous pouvez toujours avoir cette vision et cette façon de penser en n'étant pas seule pour autant.
J'ai soupiré en détournant les yeux et croise les bras pour me fermer dans ma décision.
- Si vous me parlez d'amour, je vous arrête, je vous l'ai dit, je suis immortelle, je ne supporterai pas de voir ceux que j'aime mourir de vieillesse avant moi et surtout pas mes enfants. Et les elfes n'apprécient pas vraiment les hommes, c'est arrivé par le passé, Glorfindel se tue à me dire que rien n'est impossible, mais je préfère me voir seule parcourir le monde et pour l'instant, je l'ai accepté.
- Je suis d'accord avec le seigneur Glorfindel.
- Je n'en doute pas... Vous tous m'encouragez à voir que je peux avoir un avenir aux côtés de quelqu'un, mais que je vous rassure, j'ai accepté l'idée de vivre en solitaire et je l'ai toujours fait...
- Nous verrons ça dans plusieurs années ma chère amie.
Il est parti en riant dans sa barbe, j'ai esquissé un sourire en l'entendant. Pourquoi l'amour était-il une chose si belle ici ? J'ai déjà aimé dans mon monde, même si mes histoires ont été courtes, certaines ont été très fortes et je m'en souviendrai comme les seules fois où j'ai ouvert mon cœur. Ici l'amour est sacré, je ne comprends pas cette façon de voir l'amour comme un miracle, peut-être parce qu'il y a une part de mystère encore ici avec les rapports charnels, je ne sais pas... Et je ne comprendrai certainement jamais en ayant déjà découvert tout ça... L'amour n'a plus de secret pour moi, ça va et ça vient, comme n'importe quel autre sentiment.
Glorfindel m'a fait part de la façon d'aimer des elfes, un amour unique et éternel... Si je possède la clairvoyance des elfes, cela veut-il dire que mon amour sera le même ? J'ai souri en ne croyant pas un seul instant à l'idée.
oOo
Nous courons depuis plusieurs jours maintenant à travers les roches de la montagne. Les Wargs sont toujours à nos trousses et Gandalf nous a pressés. Les nains n'allaient pas vraiment vite, mais par contre leur endurance est impressionnante pour de si petites jambes. Le cinquième jour, on a commencé à entendre les loups et le voyage qui prenait habituellement la journée a été poursuivi la nuit dans la plus grande discrétion.
- La horde est proche ? demande Thorin à Bilbon sous la lumière de la lune.
- Trop proche à deux lieux, pas plus. Mais ce n'est pas le pire, dit-il.
Il semblait essoufflé en se tenant les côtés.
- Les Wargs ont flairé notre odeur ? Demande Dwalin.
- Non pas encore, mais ça viendra, nous avons un autre problème.
- Quoi ? Ils vous ont vu ? Ils l'ont vu ! dit Gandalf.
- Non ce n'est pas ça.
- Ah, je vous disais, aussi discret qu'une souris, l'étoffe d'un cambrioleur. a ajouté le magicien.
- Écoutez-moi...
Pourquoi faut-il qu'ils parlent toujours tous en même temps ? Les nains sont vraiment impossibles. Ils sont attachants, je dois l'avouer, mais tellement nerveux, vifs, grossier et grincheux. Ma patiente était mise à rude épreuve jour après jour.
- Laissez le parler. Dis-je doucement. Qu'avez-vous vu ?
- Il y a autre chose là-haut.
- Quelle forme cela avait-il ? Comme un ours ? demande Gandalf gravement.
- Ou... Oui. Mais beaucoup plus gros.
Gandalf reste dubitatif et pensif, pinçant les lèvres. Un ours... Pourquoi un ours nous suivrait ? Gandalf a l'air de réfléchir, son air est grave, mais ses yeux malicieux me disent qu'il en sait beaucoup plus.
- Vous savez ce qu'est cette chose, je me trompe ? lui dis-je.
Il se retourne vers moi et acquiesce d'un coup de tête, il ne veut pas révéler ce qu'il sait. Sommes-nous en danger aussi avec cet ours ? Les nains commencent à raconter n'importe quoi autour de moi quand je m'avance vers Gandalf pour demander plus ample information. Il papillonne en peignant sa barbe d'un air penseur que je n'aime pas vraiment.
- Gandalf. Que devons-nous faire ?
- Il y a une maison. Pas très loin d'ici, nous pourrions trouver refuge.
- La maison de qui Gandalf ? Je demande
- D'un ami ou d'un ennemi ? Fini Thorin.
- Ni l'un, ni l'autre. Il nous aidera, ou, il nous tuera.
- Quel choix avons-nous ? Je demande.
Un grand cri retentit dans la nuit. Un cri énorme et puissant qui me glace le sang. En effet, c'est largement plus gros qu'un simple ours.
- Aucun, dit finalement le magicien.
- Alors allons-y, ne nous attardons pas ici ! dis-je
- Et s'il nous tue vraiment ? demande Bofur.
- J'en fait mon affaire, je murmure.
oOo
Nous reprenons la course, courant à en perdre haleine. À travers les plaines et les forêts de sapins. Les orcs étaient toujours plus proches, je sentais dans mon dos leur yeux et même leur souffle.
- Dépêchez-vous ! nous cria Gandalf
- Allez Bofur ! je l'encourage, le voyant à la traîne.
Après plusieurs longues minutes à courir entre les arbres et les racines, je l'ai entendu. Le grognement proche de l'ours et le hurlement plaintif des loups. C'était beaucoup trop proche... Nous sortons finalement d'un bois, Bofur me dépasse à toute vitesse et c'est à cet instant que j'ai su que la fin était proche. Ça valait la peine de se traîner tout le long et maintenant de dépasser tout le monde ! Je me retourne et vois l'ours noir immense sortir du bois, arrachant les branches au passage. Je n'ai jamais vu un ours de ma vie, mais je peux assurer que celui-ci est beaucoup trop gros. Ses yeux semblent luires dans la nuit et la masse musculaire bouge d'une puissance inouïe à chacun de ses pas.
- Gandalf ! Plus vite ! je hurle.
- À la maison vite !
Chaque mètre me semble d'une lenteur infinie alors que je sens presque l'odeur animale derrière moi. Finalement je la vois, la maison entourée d'un muret, mais elle est toujours trop loin. Dans un ultime effort, nous nous précipitons vers l'entrée de la cour intérieure. Je m'arrête aux côtés de Gandalf en sortant une arme. Si je dois faire quelque chose c'est maintenant.
- Vous n'arriverez à rien avec ça. Allez vite rentrer ! dit-il.
L'ours galope vers nous à grande vitesse, il est vraiment gigantesque, beaucoup plus grand qu'un Warg, un mètre soixante de haut au garrot, un pelage noir, des crocs immenses qui me ptranspercerai le bras en une seule bouchée. Je pousse Gandalf dans la cour en le voyant se rapprocher de plus en plus vite.
- Ouvrez la porte ! crie-t-il.
Ils restent tous agglutinés devant la porte sans pouvoir l'ouvrir.
- Mais ouvrez cette porte, non de dieu ! Le loquet ! Levez le loquet ! J'hurle à mon tour.
Les nains ouvrent finalement la porte et nous entrons au moment où l'ours franchit l'entrée de la cour. Je la ferme d'un cou sec, mais l'ours est sur moi, sa tête passe celle-ci dans un grognement de rage. Sa mâchoire s'ouvre de haine et dévoile ses crocs remplis de bave. L'odeur animale me prend le nez, pousse de toutes mes forces et finit par parvenir à le faire sortir d'un coup sur le museau.
- Aidez- moi ! Placer quelque chose sur la porte !
- Bofur, une planche ! hurle Thorin.
- Une planche, une planche... murmure le nain en regardant de tous les côtés.
- Dépêchez-vous, je ne vais pas tenir longtemps, il a une sacré force l'animal ! je peste.
- J'ai ! crie Dwalin.
Les nains passent la planche de fermeture et nous soufflons de soulagement. J'ai laissé glisser mon corps le long de la porte en reprenant mon souffle. L'ours grogne encore derrière l'épaisseur de bois encore quelques secondes avant de finalement s'éloigner.
- C'est quoi ça ? demande un nain.
- Ça, c'est notre hôte, répond Gandalf.
Il y eut un silence d'acceptation et de fortes respirations. L'information a eu du mal à prendre forme dans mon esprit, mais finalement l'idée m'a sauté à la poitrine.
- Vous êtes sérieux ? dis-je.
- Il s'appelle Beorn et c'est un changeur de peau, il continue.
- Hein ? C'est quoi ça, un changeur de peau ? je demande.
- Parfois c'est un animal, parfois c'est un homme grand et fort. L'ours est imprévisible, mais l'homme peut entendre raison. Cependant, c'est quelqu'un qui n'aime pas beaucoup les nains.
- Et bien, il manquait plus que ça... Un mec qui se métamorphose en ours... Mon Dieu j'aurai tout vu, je murmure.
- Il s'éloigne, dit Ori.
- Écarte-toi de là, ce n'est pas naturel, rien ne l'est, ça crève les yeux, il est soumis à un maléfice, lance Dori.
- Je crois qu'il a surtout un problème... dis-je en levant un sourcil.
- Ne dites pas de bêtises, il est soumis qu'à son propre enchantement. Bien à présent, tâchez de dormir. Vous tous ne craignez rien ici cette nuit. Du moins je l'espère.
oOo
Je me suis réveillée plusieurs fois dans la nuit, les grognements se sont terminés, mais je n'étais pas tranquille pour autant. Les ronflements des nains résonnaient autour de moi et j'ai décidé de me lever pour boire un coup. Gandalf était assis à la table, réveillé lui aussi. Après tout, la situation était plus que délicate. Si le maître des lieux ne nous prêtait pas son aide, nous ne pourrions aller nulle part. Je me vois mal affronter un ours et une dizaine de Warg en même temps.
Il fumait sa pipe en regardant la lune par la petite fenêtre, je me suis approchée discrètement en évitant de marcher sur un nain au passage.
- Vous semblez inquiet Mithrandir...
- Oh Maliha, vous ne dormez pas ?
- Non, je ne suis pas tranquille.
- Moi non plus... dit-il dans un murmure.
- Par où allons nous passer ensuite ? je demande à Gandalf en me dirigeant vers lui.
Je soupire en prenant une chaise et m'installe en face de lui.
- Je pensais passer par la Forêt Noire en prenant le chemin des elfes comme prévu. Mais ça va être très compliqué, autant pour y accéder, que pour la traverser. Nous verrons si Beorn nous offre son aide ou non pour nous escorter jusque-là au moins.
- Vous pensez vraiment qu'il acceptera de nous aider ? Il a déjà essayer de nous bouffer...
- Oh, Beorn n'aime pas les nains, c'est vrai, mais il aime encore moins les orcs, alors nous avons notre chance.
- Admettons, mais la Forêt Noire, Gandalf, si nous tombons sur les elfes cela risque d'être compliqué avec treize nains. Même si nous suivons le chemin des elfes loin du royaume de Thranduil comme vous l'avez dit, si nous tombons sur eux...
- Je le sais bien, surtout ces nains, avec ces elfes là... Vous venez de Fondcombe, nous avons une chance.
- Une chance ?
- Thranduil ne risquera pas un incident diplomatique...
- Si vous le dites...
- Mais...
Il marque une pause en soupirant, son regard est inquiet tout à coup en se posant sur moi et semble choisir ses mots.
- Mais il vaudrait mieux traverser sans les croiser. Et je dois vous prévenir d'une chose...
Il tape ses doigts sur la table rapidement.
- Oui ?
- Ne dites pas qui vous êtes, ne donnez votre nom qu'en dernier recours.. Dites juste que vous êtes envoyée par le Seigneur Elrond pour protéger cette compagnie. Je me débrouillerai pour que l'on vous pose le moins de question possible, mais surtout pas votre nom, pas au complet. Vous m'avez compris ?
- Pourquoi ?
- M'avez-vous compris ? il insiste.
Il n'y avait visiblement aucun moyen de savoir pourquoi je ne devais pas donner mon nom au complet... Les yeux du magicien étaient inquiets et me gênait au plus haut point. Un goût amer passe dans ma bouche sans vraiment en connaître la raison, mais j'acquiesce.
- Très bien..
La réaction de Gandalf est vraiment bizarre, mais le connaissant il ne me dira rien, si cela n'est pas important à savoir. S'il a le choix il ne dira rien, pas la peine d'insister, et puis de toute façon il connaît plus les elfes de la forêt noire que moi... Nous verrons bien.
oOo
Le reste de la nuit passa sans problème, les lueurs de l'aube me réveillent calmement.
- Je ne fuis devant personne, j'entends râler Dwalin.
Je me lève et vois la troupe de nains rassemblée devant la porte.
- Il est inutile de discuter, nous ne pouvons pas traverser ces terres sans Beorn.
- Que se passe-t-il ? je demande en venant à leur rencontre.
Les nains me regardent avec un regard implorant.
- Ah Maliha, le changeur de peau est dehors et monsieur Gandalf veut que l'on se montre... Pour demander de l'aide à ce, cette chose, tremble Dori
- C'est de la folie de lui demander de l'aide... grogne Thorin en empoignant sa hache.
- Nous serons traqués et tués avant d'arriver à la forêt, c'est certain, je finis en m'accoudant à la porte. Gandalf à raison, nous devons essayer de le convaincre de nous aider, mais Gandalf comment voulez-vous faire ?
- Ceci va demander beaucoup de doigté, venez avec moi madame, votre présence l'apaisera peut-être. Nous devons procéder en douceur. La dernière personne à l'avoir effarouché a été réduite en lambeaux. Nous irons en premier, ah et Bilbon, venez aussi avec nous, dit Gandalf.
- Euh, est-ce vraiment une bonne idée ? demande Bilbon perdu.
- Oui, vous autres, vous attendrez ici, vous ne sortez pas avant que j'en donne le signal.
- D'accord, dit Bofur. On attend le signal.
- Pas de gestes brusques, pas de bruit ou de cris et ne l'envahissez pas, vous ne sortez que deux par deux, hein ? Euh non enfaite Bombur, vous comptez pour deux donc vous sortirez seul.
Je ris légèrement en voyant le nain s'empiffrer. Je ne sais pas vraiment si le plan du magicien fonctionnera, j'ai placé Nordeline dans mon dos au cas où la situation tournerait mal.
- Bien, n'oubliez pas ! Attendez le signal.
- Oui le signal, valide Bofur.
Nous sortons finalement d'un pas hésitant avant de nous tourner sur la gauche pour nous retrouver face à un homme, il est immense, il coupe une bûche en deux d'un seul coup et je sursaute. Il doit faire dans les deux mètres de haut, ses bras ne sont pas si épais que ça, mais ses muscles sont sculptés et secs, je les voyais rouler sous sa peau brune. Ses yeux ressemblent à ceux d'un animal, beaucoup de sentiments les traversent, on pourrait facilement le lire en lui.
- Vous êtes anxieux, dit Bilbon à Gandalf.
- Anxieux quelle sottise. Bonjour ! lance Gandalf avec un grand sourire.
Il tranche une dernière bûche d'un seul et unique coup avant de s'arrêter. En même temps, c'est un ours quand il est de mauvaise humeur, alors trancher une bûche en un seul coup doit être un jeu d'enfant. Il nous dévisage de haut en bas, je ne sais pas vraiment s'il me fait peur, l'ours était plus impressionnant, je ne lis pas de haine dans ses yeux.
- Qui êtes-vous ? dit-il avec un léger accent, plutôt cool d'ailleurs.
- Je suis Gandalf le Gris, répond le Magicien à toute vitesse.
- Je n'en ai jamais entendu parler.
Ça commence bien... Je lève un sourcil.
- Je suis un Magicien, peut-être connaissez-vous mon confrère Radagaste le Brun, il réside à la lisière sud de la forêt noire...
- Qu'est-ce que vous voulez ? le coupe-t-il.
- Oh seulement vous remercier de votre hospitalité, vous avez dû voir que nous avons trouvé refuge dans votre demeure hier soir.
- Qui est ce petit individu et cette femme derrière vous ?
Comment il ne peut pas relever que nous avons dormi chez lui toute la nuit, c'est un comble ? Ou bien est-il normal de dormir chez des gens comme ça sans rien laisser paraître en terre du milieu ?
- Oh et bien, voici Mr Sacquet de la Comté et Maliha fille d'Illuviné venue de Fondcombe.
- Ce n'est pas un nain n'est-ce pas ? il demande en pointant le hobbit.
- Oh non, non, c'est un hobbit de bonne famille et de réputation irréprochable.
- Un semi-homme, un titan et un magicien, que faites-vous dans le coin ?
Il se trouve que nous avons passé un mauvais quart d'heure euh, avec les gobelins dans les montagnes.
- Pourquoi avez-vous approché les gobelins, c'est stupide ?
Je ne comprends pas trop la logique du type quand même, mais il a tout de même un air attachant, quelque chose me dit qu'il ne nous fera rien. Qu'il joue juste un peu de sa position de changeur de peau pour nous effrayer.
- Vous avez parfaitement raison, dit Gandalf avec un geste de la main.
Il lève vivement sa grande hache d'un coup. Mon bras va directement sur le pommeau de Nordeline derrière moi. Peut-être que ce n'est pas finalement que pour nous effrayer...
- Dwalin et Balin. Dirent deux voix derrière nous.
Je me retourne, mortifiée, sur les deux nains qui viennent de sortir.
- Euh, je dois avouer que quelques-uns dans notre groupe sont, se sont... des nains...
- Parce que pour vous deux... C'est quelque uns ?
- Oh non, puisque vous l'évoquez, euh... oui enfin ils sont sans doute plus de deux...
Je ris doucement face à la situation, reposant mon bras le long de mon corps. Surtout en voyant Gandalf compter sur ses doigts. C'est tellement drôle de le voir dépassé par les événements, pour une fois. Deux autres nains sortent encore, Gloin et Oin faisant une révérence.
- Euh voici deux autres membres de notre joyeuse troupe, dit Gandalf se retournant.
- Et vous appelez six une troupe.
Gandalf rigole, gêné. Je me retourne ne pouvant plus cacher mes rires.
- Une troupe donc ?
Je fonds encore plus en voyant Dori et Ori sortir, cette situation est tellement incongrue et divinement humoristique que j'en perds ma logique.
- Pour vous servir, fini Dori.
- Je ne veux pas de vos services, grogne Beorn.
- Et c'est tout à fait compréhensible, répond Gandalf en s'inclinant.
Bilbon me tape le bras pour attirer mon attention, je baisse les yeux en retenant un nouveau rire.
- Il le prend bien non ? il me demande.
- Oui, c'est clair, je ris.
- Oh et Fili et Kili, j'avais oublié, oui et Nori, Bofur, Bifur et Bombur.
- Ils sont tous là ? demande Beorn. Ou il y en a d'autres.
Apparaît maintenant Thorin.
- Nous sommes au complet, lance Gandalf dans un soupir soulagé.
- Et bien, c'est une belle troupe en effet. Vous vous doutez bien que vous allez devoir me donner des explications, une bande de nains, un semi-homme et un titan... Oui une bonne explication.
Il regarde Thorin, sans rien ajouter pendant plusieurs secondes. Il doit le connaître, car son air change, ses traits se sont détendus.
- Venez prendre le petit déjeuner, finit-il par dire en lâchant sa hache.
Nous rentrons et nous plaçons autour de la grande table.
- Ça s'est plutôt bien passé, je ris en m'adressant à Gandalf.
- Oui, on peut dire cela.
Beorn nous sert du lait et du pain. S'ensuivit une discussion sur Thorin et la quête des nains. Il n'a pas réagi à la nouvelle et semble ne pas vraiment s'en soucier. Peut-être ne s'occupe-t-il plus des histoires du monde... Il nous apprend qu'il est le dernier de sa race. Tous les autres ont été tués par Azog, ou mis en esclavage. C'est peut-être pour cette raison d'ailleurs. Je suis dans le même cas que lui, unique en mon genre, mais lui a vu son peuple mourir de la main des orcs, je ne peux imaginer ce qu'il a dû vivre toute ces années seul. C'est horrible, décimer une espèce entière. Enfin, je dis ça, mais c'est quand même vaguement familier pour moi. Un souvenir amer me vient, combien d'articles ai-je lus sur l'extinction des espèces ? Plus le temps passe et plus je me rends compte que « mon humanité » était plus proche du « mal » que du « bien ».
- Le temps va vous manquer, dit Beorn, me sortant de mes réflexions.
- C'est pourquoi nous souhaitons traverser la forêt noire, déclare Gandalf.
- Un mal est à l'œuvre dans cette forêt, sous ses arbres se cachent des créatures féroces. Il y a une alliance entre les orcs de la Moria et le Nécromancien de Dol Guldur.
Je regarde Gandalf à l'entente de ce nom, il est grave et semble inquiet. Une alliance ? Mais pourquoi les elfes ne font-ils rien ? C'est bien leur territoire ? Je sais que la forêt Noire est grande, mais quand même...
- La mal grandit et votre venue confirme les nombreuses rumeurs qui planent par ici, dit-il en me regardant.
- Nous ne savons encore rien du mal dont vous parlez, ce ne sont encore que des rumeurs comme vous dites, dis-je.
- Nous prendrons la route des elfes, ce chemin est encore sûr, lance Gandalf.
- Sûr ? Les elfes de la forêt noire ne sont pas comme leur semblable, ils sont moins subtils et plus dangereux. Mais ça n'a pas d'importance.
- Que voulez-vous dire ? je demande en croisant les bras.
- Ces terres sont infestées d'orc, même pour vous titan, il sera compliqué de protéger cette compagnie. Leur nombre ne cesse d'augmenter, et vous êtes à pied, vous n'atteindrez jamais la forêt noire vivants.
- Et que proposez-vous ? demande Thorin.
- Je vous aiderai à atteindre la forêt, je n'aime pas les nains, mais les orcs, je les hais plus encore.
Je ne le pensais pas si sage, ses paroles sont simples, mais elles sont justes. Je n'arrive pas à lui donner un âge et je peux sentir sa sagesse. Nous avons terminé notre petit déjeuner en silence avant de refaire nos bagages.
- Partez tant qu'il fait encore jour, ceux qui vous traquent ne sont pas très loin.
Il a tendu à Gandalf plusieurs sacs remplis de vivres avant de nous conduire dehors pour rejoindre des poneys.
- Ces poneys vous permettront d'atteindre la forêt plus vite qu'à pied, mais tâchez de les laisser revenir ici une fois arriver. Faite bien attention une fois sur le chemin des elfes, la forêt est empoisonnée, ne vous laissez pas distraire.
oOo
Nous remercions Beorn encore pour son hospitalité et son aide avant de sceller les poneys. Une fois tout en place et toute la compagnie en selle, nous sommes partie au grand galop, il n'y avait aucun ennemi en vue, mais je pouvais nous sentir observé. L'ours nous suivait à bonne distance, sa présence devait dissuader les orcs d'approcher. Nous galopons une journée entière, le soir venu, nous arrivons devant la porte des elfes de la forêt noire sans encombre.
- C'est ici que commence le sentier qui traverse la forêt, dit Gandalf.
- Aucun signe des orcs, la chance est avec nous, ajoute Dwalin
- J'espère qu'elle durera, dis-je.
- Libérez les poneys, qu'ils retournent à leur maître, crie Gandalf.
- Cette forêt semble malade, dit Bilbon en s'approchant de la porte.
Je n'entends pas le reste, la porte ne me dit rien qui vaille, l'atmosphère est lourde d'un coup. Les arbres sont grisonnants et leur feuille rousse comme en automne. L'air est chaud et épuisant. Mon cœur se serre d'inquiétude. Je passe la porte en suivant Gandalf.
- Gandalf... Je murmure.
Il ne me répond pas et retire les branches d'une statue, révélant une marque rouge sang qui forme un œil. Mon cœur bondit d'effroi, m'obligeant à faire un pas en arrière. Gandalf paraît totalement perdu et ne décroche pas un mot avant plusieurs minutes.
- Les monts du Rhudaur, dit-il finalement. S'il le faut...
- Gandalf ?
Il se retourne doucement, semblant réfléchir en baissant les yeux au sol mais les pose sur moi quelques instants plus tard, déterminé.
- Maliha, je dois partir.
- Quoi ?! Pour aller où ?
- Je dois, je dois vérifier quelque chose, veilliez sur les nains, guidez-les à travers la forêt. Ne sortez pas du sentier, me dit-il en posant sa main sur mon épaule.
Il commence à se diriger vers l'extérieur de la forêt d'un pas pressé.
- Mais Gandalf, où allez-vous ? Vous ne pouvez pas nous laisser ici comme ça.
- Je vous l'ai dit, je dois vérifier quelque chose, c'est très important. Je ne peux pas vous prendre avec moi, vous devez protéger les nains. Nous nous reverrons, je serai devant Erebor au soir du jour de Durin. Faites-moi confiance, mon enfant.
Je lui faisais confiance, une confiance aveugle même, mais je devais savoir.
- Cela a-t-il un rapport avec le conseil à Fondcombe ?
- Oui... Je dois vérifier la provenance de la lame... Les signes ici ne peuvent signifier qu'une seule chose...
- Quoi ?
Il hésite un instant.
- Je ne le dirai que si j'en ai le cœur net, mais pour cela je dois partir Maliha.
Son regard est dur, rempli d'inquiétude, mais surtout de peur. S'il doit partir c'est surement qu'il n'a pas le choix. Je me sens perdue, comment vais-je faire sans lui ? Il semble voir mon mal et pose une main certaine sur mon épaule.
- Je sais que vous pouvez le faire Maliha, vous n'avez pas besoin de moi pour continuer. Suivez la compagnie, protégez-les c'est tout. N'oubliez pas, ne dites rien de votre identité.
J'ai froncé les sourcils à la remarque. Je dois protéger les nains, c'est ma tâche et je le ferai avec ou sans Gandalf. Qu'il en soit ainsi, comme dirait Elrond.
- Très bien, dis-je à contrecœur.
Il expliqua son départ aux nains en préparant son cheval. Je les entends râler quelques minutes, mais finissent par me rejoindre après la porte.
- Dans cette forêt, l'air lui-même est chargé d'illusion, il vous troublera l'esprit et tentera de vous fourvoyer, avertit Gandalf.
- Comment-ça ? demande Bilbon.
- Restez sur le sentier, ne le quittez pas, si vous le quittez, vous ne le retrouverez jamais. Restez sur le sentier quoi qu'il arrive. Maliha, je compte sur vous pour les protéger !
Je baisse la tête en signe d'approbation. Il partit au grand galop à travers la plaine. Je le regarde s'éloigner, j'ai un mauvais pressentiment. Ça pue comme situation, je le sais très bien. Je regarde encore le cheval s'éloigner à l'horizon, pleins de scénarios possible s'offrent à nous, croiser des orcs, perdre le sentier, croiser les elfes...
- Maliha ! On y va ! crie Kili.
Je rentre finalement à mon tour dans la forêt. Les arbres sont immenses, leurs formes sont bizarres, ils sont tous biscornus et entremêlés les uns aux autres. Je n'avais jamais vu une forêt pareille, pas que j'ai de grande expérience en forêt, mais je n'avais jamais vu des arbres comme ceux-là. Plus nous avançons, plus les arbres sont immenses, repoussant l'imaginaire, ils deviennent étrangers aux livres, aux images que je me faisais des arbres. Les feuilles dansent et s'illuminent d'une couleur violette, brune et orange, les branches s'enfoncent dans la terre pour sortir un peu plus loin et continuer leur route sur plusieurs mètres. Je ne vois pas le ciel, juste le chemin devant nous qui passe aux travers des arbres, ou d'un seul, je n'arrive plus à distinguer ou l'un s'arrête et où un autre commence, tout se mélange.
L'air est tellement lourd, je ne m'en étais pas rendu compte, mais j'ai du mal à respirer, c'est comme l'humidité des tropiques, chaude et moite. Les branches craques, je suis aux aguets à chaque détour du sentier, me sentant observer de plus en plus. Je vois les branches bouger sans sentir le moindre courant d'air, tout devient plus imaginaire que ça ne l'était déjà. Nous marchons depuis plusieurs heures maintenant, il fait de plus en plus sombre.
- De l'air, j'étouffe.
- J'ai la tête qui tourne ! crie Oin. Qu'est-ce qui m'arrive ?
- Avancez, Lance Thorin.
Nous continuons encore et encore sur le sentier, je vois les pavés sous mes pieds. Il faut juste que je regarde les pavés, ne pas les perdre de vue. Nous passons un pont délabré pour tomber sur un sentier mais sans les pavés habituels, mais on peut voir distinctement qu'il s'agit encore d'un sentier. Je soupire en essayant de respirer normalement mais je me sens tellement lourde... Mais il n'y a plus de pavé...
- Thorin, suivons-nous encore le sentier ? je demande dans un murmure.
- Nori, pourquoi t'arrêtes-tu ?
- Le sentier ! Nous avons perdu le sentier.
- Ce n'est pas vrai... dis-je perdue. Cherchez-le !
L'air est encore plus lourd, des insectes volent doucement autour de nous d'une manière fantastique. Tout me semble illusion, la tête me tourne, tout se ressemble, chaque branche, chaque arbre. Les nains avancent, mais titubent autant que moi, je vois Bilbon perdu dans ses pensées et je le pousse doucement pour continuer.
- Il faut continuer Bilbon, ne vous arrêtez pas, suivez bien les nains.
Et nous marchons encore, les insectes sont devant mes yeux et dansent lentement. Je les chasse, mais le geste est tellement dur... Je regarde autour de moi, nous sommes déjà passés par ici, non ? Je me tourne et regarde encore en chassant de nouveau les insectes, ma vue est trouble, comme si j'avais trop bu....
- Nous tournons en rond, je dis faiblement.
- Il est forcément là ! dit un nain.
- Quelle heure est-il ? Demande un autre.
Les mots tournent dans ma tête sans que je puisse les analyser... Ils passent juste dans ma conscience sans que je puisse me concentrer.
- Quel jour sommes-nous ?
- Cette maudite forêt n'a-t-elle pas de fin ! hurle Thorin.
Je m'assied et prends ma tête dans mes mains, je dois me calmer, faire le vide, comme me l'a appris Glorfindel. Réfléchir calmement, ressentir les choses autour de moi.
- Il y a des nains alors dans cette forêt.
Quoi ? Je vois Bofur avec un étui à tabac dans les mains. Comment ? Mais je n'arrive pas à réfléchir... On tourne en rond, mais je n'ai pas la force de leur faire comprendre ce que je ne comprends pas moi-même... Faire le vide...
- On tourne en rond, Bilbon dite leur, je n'ai plus la force, dis-je en levant mon bras.
- C'est la vôtre ! On tourne en rond, vous ne comprenez pas ? dit-il à Bofur.
- On continue vers l'est, où est le soleil ? lance Balin.
Le soleil, mais oui, le soleil c'est évident. Les nains se battent entre eux, peine perdue pour leur faire comprendre quelque chose. Si nous arrivons à voir la position du soleil, nous saurons quelle direction prendre, mais je n'ai pas la force de grimper... Nordeline est trop lourde dans mon dos, mon corps aussi.
- Bilbon, grimpez, dites nous où est le soleil. Je vous en prie, dis-je.
- Bonne idée, j'y vais.
Je le vois monter doucement le long du tronc. Un bruit retentit derrière moi, je me retourne mais ne voit rien, je suis épuisée. Avais-je bien entendu ?
- Je vois un lac, avec une rivière ! m'décrit Bilbon d'en haut.
Je m'accroche à sa voix, me concentre pour me focaliser uniquement sur ses mots, ne pas perdre pied.
- Et la montagne solitaire !
Un autre bruit de branches cassées. Cette fois-ci je n'ai pas rêvé, je me lève d'un bon, chancelante.
- Je n'entends rien qu'est-ce qu'il dit bon dieu ! cri Dwalin.
- Oh de toute façon, on n'entend rien, il nous le dira bien en descendant.
- Nous sommes perdus, on va tous mourir dans cette forêt immonde.
- Chut ! je crie aux nains qui stoppent leur dispute.
- Vous m'entendez ! Je sais...
La voix de Bilbon s'évanouit quand je vois arriver une énorme araignée à toute vitesse vers nous !
- Nous sommes attaqués ! Je crie.
Il y en a partout, mais ma vue est embrumée, mes mouvements sont flous. Je prends Nordeline, mais mon bras est lourd, mes jambes flanchent. J'arrive à la lever devant moi et à la planter dans une créature sur ma gauche. Le mouvement m'a coûté tant d'énergie que je m'affaisse sur la bête sous moi avant de retirer ma lame. Les nains sont encerclés, ils se battent comme ils peuvent mais bientôt je les vois tomber les uns après les autres. Je n'ai plus de force, mais je dois tenir encore. L'araignée s'approche, je lève ma lame lourdement et l'abaisse sur elle pour lui trancher une pâte, le sang vert clair se déverse sur mes mains, ses yeux noirs me regardent avant de me saisir le bras avec ses horribles mandibules velues. Je me débats mais je suis tellement fatiguée, une autre l'aide, je tombe sans pouvoir me relever, le trou noir.
oOo
Je me sens traînée sur le sol, enfin je crois, je sens la terre passer dans mon dos, les racines passer sous ma colonne vertébrale. Après un effort surhumain pour sortir de la brume de mon esprit, j'arrive à bouger un bras, puis une jambe, mais je suis bloquée. Quelque chose m'entoure, m'empêchant tout mouvement et il fait noir de plomb. Je touche la prison qui m'entoure pour réaliser avec effrois de quoi elle est faite. Mon Dieu, je suis entourée de toile ! Je vais me faire bouffer ! Je sors un bras à travers d'un geste brusque pour atteindre Nordeline dans mon dos. La retire du fourreau et coupe la toile complètement affolée.
L'araignée qui me traînait commence à se jeter sur moi, je bloque ses mandibules avec les mains et la pousse violemment contre un arbre à l'aide de mes jambes. Me lève et plante Nordeline dans son corps d'un son horrible.
Me lève essoufflée et reste les bras sur mes genoux le temps de reprendre mes esprits, ma tête tournait encore un peu. Lève la tête et regarde autour de moi, Bilbon est en train de détacher les nains des toiles les uns après les autres discrètement.
- Bilbon ! Je m'exclame, soulagée.
Il se retourne et me regarde.
- Chut, elles vont nous entendre. Venez m'aider.
Je saute sur une branche et l'aide à mon tour. Nous sommes dans ce qui semble être un nid, un nid entier ou des centaines de cadavres sont pendus par les pieds, enfermés dans les prisons de toile. Le spectacle est insoutenable. Nous coupons le plus rapidement possible les toiles de nos amis qui tombent tour à tour au sol et commençons à les retirer autour d'eux. Valars, ils sont vivants...
- Où sont Bilbon et Maliha ? lance Thorin.
- Nous sommes là en haut, crie Bilbon.
Une araignée apparaît d'un coup en face de lui, je m'élance pour lui porter secours quand une autre m'arrive dessus. Je lui tranche les pattes et la coupe en deux d'un mouvement vertical violent.
- Bilbon ! je crie.
Mais je ne le vois plus. Mon cœur s'emballe à nouveau.
- Mon Dieu Bilbon où êtes-vous ?!
Elles arrivent de tous les côtés, je découpe les pattes les faisant tomber, saute de branches en branches suivant la compagnie qui commence à prendre la route à toutes jambes en bas.
- Thorin, j'ai perdu Bilbon ! Est-il en bas ? je demande.
- Non Maliha, mais il faut avancer, elles sont trop nombreuses, on ne peut pas rester là !
Je tue encore une araignée sur la droite dans une pirouette, aspergeant de sang vert le tronc d'un arbre. Horrible, si j'avais cru que des araignées pouvaient être aussi grandes... Mon point s'enfonce dans une autre, déglutis pour ne pas vomir en agitant ma main pleine de sang gluant après sa chute.
- Maliha, empêchez-les de descendre, nous sommes cernés en bas !
- Je sais, mais il y en a trop ! Je fais ce que je peux !
Nordeline tournoie, giclant le sang autour de moi, les pattes volent, les yeux percés, j'avance en sautant d'arbre en arbre, tenir le rythme le plus longtemps possible.
- Dépêchons ! On avance ! crie Thorin.
Une autre arrive en face de moi, une autre descend vers la compagnie.
- Thorin, attention ! je crie.
Je coupe celle en face de moi en deux d'un bond. Vois une forme en posant un genou sur une nouvelle branche, cela n'a rien à voir avec une araignée, mais je n'arrive pas à voir exactement, ça se déplace beaucoup trop vite. Ça court vers nous, agrippe un fil et descend à vive allure d'un geste élégant. Je reste figée, regardant la personne atterrir à terre, parce que c'est une personne, glisser sur l'araignée et mettre en joug Thorin d'une flèche. Je me suis accroupie, arrêtant ma course pour rester discrète sachant très bien à quoi nous avions à faire.
- Je pourrais te tuer Nain, n'en doute pas, et avec grand plaisir.
Je courbe un sourcil face à la remarque. Charmant... La voix était dure, mais chaude je dois l'avouer, un léger accent qui m'était jusqu'alors inconnu. Plisse les yeux pour voir un peu mieux le nouvel arrivant.
- Kili ! crie Fili.
Je me retourne pour voir Kili plus loin à terre et en mauvaise posture. Il est finalement aidé et fait prisonnier à son tour. Je regarde plus en détail la scène, bientôt nous sommes cernés, ils en arrivent de tous les côtés et les araignées sont tuées les unes après les autres sans résistance. Je presse mon dos contre le tronc pour ne pas être vue et commence à observer la scène avec effroi.
Des elfes, ce sont des elfes, ça ne pouvait pas être pire... Pourquoi maintenant...
oOo
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