// ... Chapitre dix-sept ... //
"Psycho" - Lucille Croft, Swarn
- Maliha debout.
Hein ...?
- Debout !
- Quoi ? Quoi ?
- Levez-vous, l'armée est partie. Allez, dépêchez-vous, l'endormie! lance Gandalf.
- Ok, ok, je me grouille.
J'avais vraiment très bien dormi, d'un sommeil sans rêve, une merveille. J'ignore depuis combien de temps je n'avais pas dormi aussi bien, mais mon sommeil fut coupé par les hurlements du magicien. Je me lève et enfile le bustier de cuir sous le regard pressé de Gandalf et fixe le fourreau de Nordeline en vitesse.
- Rejoignez-moi aux portes, le temps de vous débarbouiller, vous avez encore la marque de l'oreiller.
Il rit en sortant, marmonnant des paroles que je n'ai pas comprises. C'est en tendant la main vers la lame que mon cœur tressaillit de peur. C'est aujourd'hui que je devais me montrer forte. Quand l'armée serait-elle là ?
Au fond de moi, j'aimerais que Gandalf ait eu tort et qu'aucune armée ne menace Erebor. En serais-je vraiment capable ? Je soupire en pensant à cette idée et sort de la tente.
Les idées noires me gagnent à chacun de mes pas. Enfin des idées noires... J'espère juste que les Valars ne se sont pas trompés à mon sujet. Peut-être le moment venu, une nouvelle partie de moi surgira. Cette idée me fait particulièrement peur...
J'aperçois Gandalf devant les portes, regardant la grande armée elfe s'étendre dans la plaine. Ils sont nombreux. Combien, je ne saurai le dire, des centaines peut-être... Je ne peux pas m'empêcher de trouver cette armée belle, en quelque sorte. Les rangs sont parfaits, des rangées dorées et brillantes sous le soleil.
- Alors nous y sommes, je murmure au magicien.
- Tâchons déjà d'éviter un conflit entre les peuples... me dit Gandalf.
- Oui...
En nous approchant, nous remarquons Bard et Thranduil, se tenant devant les remparts de la mine. Gandalf presse le pas à côté de moi et courons finalement entre les rangs des elfes pour arriver à notre tour.
- Jetez-le des remparts ! hurle Thorin.
Thorin... C'était la voix de Thorin. Je lève le nez en continuant de courir. J'aperçois Bilbon entouré des nains. Alors, il le lui avait dit...
- Je vais le faire moi-même ! Soyez maudit, vous et le magicien qui vous a affecté à cette compagnie !
- Si vous n'aimez pas mon cambrioleur, tonne Gandalf, ne l'abîmez pas, renvoyez-le-moi, je vous prie !
Nous arrivons devant les remparts. Thorin tient Bilbon entre ses mains, prêt à le pousser dans le vide. Mon cœur est en panique face à la scène, tout ceci est irréaliste et inconcevable... Aux dires de Bilbon, je savais qu'il avait changé, mais peut-être avais-je de l'espoir. Ou bien, je me voilais la face... Gandalf me tient le bras pour éviter toute initiative et je serre la mâchoire en me sentant impuissante. Thorin s'arrête et nous regarde d'un air médisant. Son regard est froid et une lueur que je n'avais vu s'en dégage. Je ne reconnais en rien le nain devant moi.
- Vous donnez une bien piètre image du roi sous la montagne, Thorin fil de Thrain, lance Gandalf d'une voix souple.
Il lâche finalement ma main et s'avance doucement pour se placer entre Thranduil et Bard. Je fais un pas en avant en voyant le nain lâcher Bilbon qui en profite pour s'enfuir.
- Je ne veux plus jamais avoir affaire aux magiciens ou aux traîtres de la Comté !
Bofur me fait signe de venir pour récupérer le hobbit, descendant le long des remparts. Après une descente pleine de panique, je le prends dans mes bras et le pose au sol.
- Bilbon... Tout va bien ?
- Oui, oui, enfin je crois... J'ai cru que... Qu'il... dit-il encore sous le choc.
- Il n'est plus lui-même... C'est terminé, vous êtes en sécurité maintenant.
Il me fait un signe pour approuver et commençons à marcher pour rejoindre Gandalf et les autres.
- Sommes-nous d'accord, lance Bard, l'Arkenstone en échange de ce qui nous a été promis ?
Je lève les yeux, attendant en suspend la décision de Thorin.
- Pourquoi devrais-je acheter ce qui m'appartient de droit !
Mon dieu... Je ferme les yeux... Mais pourquoi ne cède-t-il pas ? Le nain que j'ai connu n'avait qu'une parole et jamais il ne l'aurait trahie.
- Gardez la pierre, vendez-la... Ecthelion du Gondor vous en donnera un très bon prix, lance Thranduil à Bard.
- Je vous tuerai ! J'en fais le serment ! Je vous tuerai tous !
- Vos serments ne valent rien ! gronde l'elfe excédé. J'en ai assez entendu...
Pour une fois, j'étais d'accord avec lui. Il s'est détourné pour faire face à son armée.
- Aux armes, tenez-vous prêt ! il hurle soudain.
Non, non... C'est impossible, on ne peut pas en arriver là. Je ferme les yeux de stupeur.
- Je ne veux pas voir ça... je murmure.
Bilbon prend mon poignet et le serre en signe de compassion.
- Vous ne pouvez rien faire ? me demande-t-il.
- Non... Je ne peux rien faire. Ma tâche est de protéger contre le mal. Pas de prendre parti... Je suis impuissante... Je n'ai aucun rôle à jouer, je suis désolée...
- Ne le soyez pas. Je comprends et cela doit-être dur pour vous.
- En effet, mais je suis aussi exaspérée par leur comportement, donc en même temps, je suis contente de ne pas en faire partie, j'avoue doucement.
Il ne répondit rien en me montrant un regard compatissant.
- Thorin ! Déposez les armes, ouvrez ces portes, ce trésor vous mènera au tombeau... fini le magicien.
Je le vois hésiter. C'est pourtant évident, il va sacrifier sa famille et les nains qui lui sont le plus fidèle, pour de l'or. La colère monte en moi, sans que je puisse la contrôler, me rappelant trop de souvenirs.
- Quelle est votre réponse ? demande Bard. Voulez-vous la paix... ou la guerre ?
Un cordeau crie et vole jusqu'à la montagne. Il se place sur les remparts et ma respiration se coupe. Je ferme les yeux... Le sol tremble sous mes pieds et un frisson froid me traverse le dos.
- Je veux la guerre, lance Thorin en grognant.
Paniquée, j'ai levé les yeux sur la droite, pour découvrir une grande armée de nains. Ils sont déjà en place et nous toisent du haut de la colline.
- Gandalf... je murmure, n'en croyant pas mes yeux.
- Pied d'Acier... dit-il en soupirant.
Thranduil hurle un ordre dans le vent. Sans que je n'ai pu respirer, les elfes tournent et marchent vers la colline d'une synchronisation incroyable. Quoi ? Il a vraiment l'intention d'attaquer les nains ?! J'ai froncé les sourcils. Je m'étais jurée de ne pas intervenir, mais ça allait beaucoup trop loin. Non, je ne le permettrai pas !
- Gandalf !
J'ai dégainé Nordeline, sentant l'adrénaline dans mes veines.
- Courez ! Placez-vous entre les deux armées, ils ne doivent pas se battre entre eux avant l'arrivée des orcs !
J'ai couru à toute vitesse entre les elfes. Sors des rangs et longe la colline devant eux. J'ai atteint un grand rocher pour leur faire face et ils s'arrêtent devant la colline, posant leur lance d'un bruit rauque.
- Que pensez-vous faire, incapable ?
J'ai croisé le regard froid de Thranduil, mais ne lui répond pas en tournant le dos. Pour le coup il n'a pas tort, que devrais-je faire maintenant ? Les empêcher de se battre ? Facile à dire... Comment fait-on pour arrêter deux armées ?
- Hey ! Thorin ! s'exclame une voix.
Pied d'acier s'avance tranquillement vers nous sur son « sanglier »... encore une fois... passons... Il porte un heaume qui entoure sa barbe rousse de chaque côté de ses joues. Mais surtout, et je fronce les sourcils, une énorme masse dans sa main droite aussi grosse que lui. Il se place en haut du rocher qui nous surplombe. Malgré sa petite taille, j'ai l'impression de voir un géant. Il se dégage de ce nain un charisme écrasant. Il a la posture d'un roi, comme Thorin, mais semble beaucoup plus nerveux.
- Bien le bonjour, comment allons-nous ?
Hein ? Il doit avoir une énorme confiance en lui, pour utiliser une telle familiarité. Je plante Nordeline au sol en laissant ma main sur le pommeau pour lui faire face. Gandalf se place à mes côtés en vitesse d'un air soucieux.
- J'ai une petite proposition à vous faire, commence-t-il d'un geste rassurant. Alors, si vous pouviez m'accorder quelques instants ?
Une pause et un silence étouffant sans réponse...
- J'aimerais vous demander aimablement si vous pourriez envisager DE FOUTRE LE CAMP !
Mes yeux s'ouvrent de surprise. Mais WHAT !? Je me tourne vers Gandalf incrédule, mais esquisse néanmoins un sourire d'amusement. Mais le magicien soupire en se tenant l'arête du nez... S'il n'était pas en face d'une armée elfe, je dirais que je pourrais sans doute bien m'entendre avec ce nain.
- Vous tous ! Et tout de suite ! dit-il d'une voix partant dans les aiguës.
- Allons, voyons Seigneur Dain, raisonne Gandalf.
- Gandalf le Gris, dites à cette meute de s'en aller. Ou j'inonderai le sol de leur sang !
Charmant... Et c'est quoi cet accent russe ? J'arque un sourcil en croisant les bras. Je ne pense pas qu'il ait prévu de capituler.
- Il n'y a nul besoin d'une guerre entre les nains, les hommes et les elfes. Une légion d'orcs marche sur la montagne. Retirez votre armée, je vous en prie.
- Je ne me retirerai devant aucun elfe, encore moins devant ce perfide roitelet ! Et pas non plus devant une femme, finit-il dans un murmure.
Ma parole... Il me regarde en faisant un clin d'œil. J'hallucine... Bilbon m'envoie un regard de compassion.
- Ce roi ne veut que du mal à mon peuple. S'il choisit de se tenir entre moi et les miens. Je lui fendrai sa jolie petite gueule en deux ! On verra s'il sourit encore !
Ok, j'aime particulièrement ce nain quand même... J'ai toujours aimé la brutalité des nains, ils sont tellement impulsifs et vivants. J'esquisse un sourire sur mon visage en poussant un soupir.
- En attendant, il y a surtout le titan de cet âge entre vous et les elfes, rétorque Gandalf.
Tsss... Je refuse d'être mêlée à ça moi. On m'a dit de protéger les peuples libres, pas de leur taper dessus. J'envoie à Gandalf un regard de reproche, qu'il évite royalement en remettant en place son chapeau...
- Et je suppose que c'est la femme ici présente, dit-il en pointant son arme dans ma direction.
- Tout juste... je réponds, fâchée.
Le nain rigole en se détournant, partant au galop vers son armée.
- Le Roi Thranduil est tombé bien bas pour se protéger derrière une femme !
Tsss... Parce que tu crois...
- Dain, attendez !
- Laissez-les avancer, voyons jusqu'où ils iront, rétorque Thranduil dégainant son sabre.
- Je m'en balance de tes menaces, princesse aux oreilles pointues ! Vous entendez les gars ! C'est parti !
Thranduil voit rouge, il bout de rage même... Plus loin, Dain crie des ordres que je ne comprends pas, mais l'armée commence déjà à bouger.
- Maliha, il faut les arrêter, murmure Gandalf.
- Et vous voulez que je fasse comment au juste ? je réponds dubitative.
- Faites ce que vous pouvez...
Facile à dire... L'armée bouge encore, criant de courage, mais les elfes derrière nous aussi. Je suis paniquée. Je ne peux rien faire, je suis impuissante. Ils sont tellement nombreux, comment arrêter deux armées ? Comment ?
- Reculez avec vos hommes, je me charge de Pied d'Acier et de ses brutes, lance Thranduil à Bard et ses hommes.
Je croise le regard de Bard un instant qui me renvoie un regard de tristesse et de désespoir et il avait bien raison. Où en étions-nous arrivés ? Les elfes avancent, pas à pas. Ils vont vraiment s'entre-tuer ?! Comment ne peuvent-ils pas trouver un arrangement à l'amiable ?
- Envoyez les béliers ! hurle Dain au loin.
- À vos armes ! crie Thranduil
- Thranduil c'est de la folie ! lance Gandalf dans un dernier espoir.
J'ai pris Nordeline, mais ne la lève pas. Attendant de voir la tournure des choses. Les nains à pied s'écartent pour faire place à une escouade de cavaliers. Là en l'occurrence, je ne peux rien faire... Je me retourne prise de peur vers Thranduil, les elfes bandent déjà leurs arcs. Je ne peux rien faire non plus...
J'ai fermé les yeux...
- Tirez !
Une grande volée a traversé le ciel dans un bruit sifflant et je l'ai suivi du regard paniqué. Tout est perdu... Les nains vont mourir par dizaine avec cette volée. Soudain Dain hurle un ordre, d'une détonation étonnante, d'énormes flèches passent au-dessus de l'armée des nains.
Elles sont immenses, plusieurs mètres de long et semblent tourner sur elles-mêmes en entraînant une corde ou autre chose avec elles de tout aussi grand.
Elles sont placées toutes les dix, côte à côte comme un bouclier... Ingénieux. Elles broient l'ensemble des flèches en quelques secondes et n'en laissent passer aucune. J'écarquille les yeux en réalisant la suite.
C'est une pierre, deux coups...
Car elles continuent leur route vers nous... Si grandes, si larges, les dégâts seront immenses.
Une idée Maliha, une idée, vite...
- Maliha ! hurle Gandalf.
- Je sais ! je réponds en brandissant la lame derrière moi.
J'ai couru à toute vitesse sur la gauche en longeant l'armée des elfes. Je ne savais pas vraiment quoi faire, mais je devais les arrêter. Je me suis retournée, déterminée, pour reprendre la course. Il me faudra un élan considérable. De toutes mes forces, le sol s'est affaissé sous mes pieds dans un saut puissant. Mon souffle s'est coupé, mon corps en suspens. Le vent siffle dans mes oreilles et l'adrénaline tape mes tempes en voyant les flèche devant moi.
D'un hurlement, j'ai fracassé le bois sans hésitation. Le choc contre Nordeline les fait partir en vrille autour de moi et les débris m'ont percutée de plein fouet. J'arrive à protéger mon visage en urgence, mais un morceau vient se planter dans ma cuisse. Leur vitesse de rotation était beaucoup trop élevée. Entamant la descente rapide dans le vide, j'arrive à me retourner pour regarder le résultat. Je suis arrivée à en avoir cinq, ce n'est pas grand-chose, mais c'est déjà pas mal.
Je retombe à terre avec difficulté dans un nuage de poussière dense et retire le morceau de bois en serrant les dents. Le spectacle m'a accablé, les autres flèches se sont écrasées sur le flanc de l'armée dans un bruit horrible d'aciers et de hurlements... J'ai détourné les yeux du spectacle déchirant...
- Bien joué... me lance Gandalf en posant une main sur mon épaule.
- Je n'ai pas réussi à toutes les avoir... Quel désastre...
-Maliha...
- Alors, vous les trouvez comment nos moulinettes ? rigole le nain en haut de sa colline.
D'un mouvement de sa masse, les cavaliers nains dévalent le flanc de la colline à vive allure.
- Tirez !
Quoi ? Regardant Thranduil abaisser son épée pour relancer une volée.
- Ça ne vous suffit pas ?! je hurle.
Il me regarde avec dédain et dégoût comme à son habitude. J'ai détourné les yeux de rage et poussé Gandalf pour reprendre la course. Sachant pertinemment que les nains se protégeront encore... Je m'élance de nouveau dans les airs après avoir fracassé le sol de colère sous mes pieds. Hurle, en tenant fermement Nordeline entre mes mains et percute les lourdes barres de bois. Six, j'en ai eu six cette fois-ci... Je m'écrase durement au sol, mais cette fois-ci, il n'y a aucun blessé du côté des elfes.
- Maliha ! hurle le magicien en me faisant signe qu'il se repliait.
J'ai atteint de nouveau mon rocher en les suivant des yeux, lui et Bilbon regagnaient un endroit sûr. Puis me détourne, regardant la cavalcade des béliers arriver vers nous au grand galop.
Ça suffit...
Je ne peux pas faire partie de cette bataille et je ne peux rien faire de plus. Thranduil me regarde attendant une réaction.
- Je n'ai pas à y participer, dis-je en plantant Nordeline dans la roche de colère.
Il fronce les sourcils, grogne et hurle un ordre. Les elfes se placent en formation en laissant les archers derrière, mais me détourne d'eux. Ils sont à quelques mètres de moi, retournant la terre de leurs sabots martelant le sol et je mets un genoux à terre, attendant le choc. Ils me contournent et la poussière me pique les yeux d'un courant d'air assourdissant.
- Épées ! j'entends hurler.
Je ferme les yeux, je ne veux pas voir ça. La tuerie de deux peuples faisant la guerre pour la richesse, on dirait les hommes sur Terre... Non, je n'ai pas signé pour ça. Plusieurs minutes passent. J'entends d'un coup le fracassement des armes, les hurlements de rage et de douleur. Mon cœur se déchire. Je croyais les elfes sages, je croyais que la Terre du Milieu, après toutes les histoires sombres, c'était unifiée... Mais non...
« Votre tâche est de protéger les peuples libres, pas de prendre parti... »
De toute manière je ne saurai qui protéger. Je ne suis dans aucun camp et cela me va très bien à cet instant. Pourtant, je me sens si triste, ça me déchire de l'intérieur.
Un bruit sourd et grave me parvient... Mon cœur manque un battement... Le choc de l'acier derrière moi s'interrompt et la terre tremble. Je tourne le regard vers les montagnes et sans que je sache si mes yeux me font défaut, d'immenses vers éventrent la terre. Des créatures horribles et leurs mâchoires broient la roche d'un seul mouvement.
Ma main se pose sur Nordeline, la serrant pour y croire, alors que ma bouche est grande ouverte de terreur. Les vers retournent sous terre laissant derrière eux des trous béants. Je les entends déjà, les cris de l'armée noire, un flot obscure, comme si la terre saignait et ils sont des centaines. Je reste figée encore un moment, voyant le flux s'intensifier. Jamais, même dans mes pires cauchemars, je n'aurais imaginé ça...
- En formation !
Le son d'un cor résonne dans la plaine et j'ai levé les yeux vers la voix noire. Azog... En haut, sur la plus haute tour, se déploient des drapeaux de guidages. Alors ça y est, nous y sommes... Là, je veux bien, car voici ma tâche.
La peur envahit mes veines. Me paralyse, voyant la densité noire augmenter encore et encore, elle semble sans fin...
Il va me falloir du courage, énormément de courage pour faire face et me dépasser. Je ferme les yeux me rappelant toutes les paroles de Glorfindel me décrivant les grandes batailles.
« Tu dois trouver quelque chose pour te concentrer, te focaliser et te donner la force »
J'ai regardé l'objet en question à mon poignet. "Musique", le liquide translucide fond et circule le long de mon bras pour atteindre mes oreilles. Prendre la forme de deux billes blanches avant que le son ne fasse vibrer mes tympans. J'ai fermé les yeux, m'imprègne de la musique qui fait danser mon âme, la remplissant de courage.
Ma peur s'atténue, la détermination, l'adrénaline la remplace progressivement et j'ai respiré ,libre. Retiré Nordeline de sa prison de roche, inspire, expire et descend de mon rocher. J'ai couru entre les elfes et les nains, toujours immobiles face au spectacle. Ma respiration est désordonnée, paniquée.
Si tu t'arrêtes maintenant Maliha, tu n'auras pas la force de repartir. Cours... Tu ne dois pas réfléchir... Seulement courir.
Je fronce les sourcils sous mes pensées et prends de la vitesse, les rangs orcs se forment au loin, toutes lances dehors. C'est une plaine noire maintenant, noire de créatures horribles. J'aperçois Thranduil en face de moi, il reste stoïque en regardant les autres.
- Dégagez ! je hurle. Ou soyez utile...
Il écarte sa monture, me laissant passer sous un regard noir. Je sors finalement de la zone de combat et continue seule sur la plaine.
Je m'arrête, reprends ma respiration et jauge du regard les orcs. La ligne est immense. Un vrombissement d'acier m'interpelle derrière, ce sont les nains, formant une barrière de boucliers.
- À la bataille ! À la bataille, suivez le Titan ! crie le nain derrière moi.
Au moins, il y en a qui n'ont pas peur de défendre leur terre.
Je fronce les sourcils et revient à l'armée d'orcs. Respire un bon coup, récupère Nordeline et la place devant mon visage... Les battements de mon cœur résonnent, le silence m'entoure, puis le son de la musique parvient dans mes oreilles...
Ma respiration se calme.
Comment un soldat peut-il avoir le courage de se lancer dans les bras de la mort ?
Cette question a tourné en boucle dans ma tête pendant des années. À chaque fois que je finissais une arme, que je la voyais danser sur l'hologramme, cette question venait hanter mon esprit. Maintenant, je suis comme eux et mon esprit ne m'ordonne pas de fuir en courant vers elle à mon tour...
La réponse est pourtant simple, j'en ai juste pris la décision. C'est aussi simple que ça. La décision de protéger des vies, de les protéger tous autant qu'ils sont face à cette noirceur. J'ai pris la décision de ne pas être spectateur, pas cette fois...
Déterminée, voyant les orcs se rapprocher, j'ai sauté pour éviter les lances dirigées vers moi. Lève Nordeline et l'abat au sol d'un vrombissement puissant.
Le choc est rude. D'un grand mouvement circulaire, j'ai projeté les orcs autour de moi pour créer une ouverture large. Ils arrivent par dizaines en seulement quelques secondes. Ne réfléchissant plus, j'entame les enchaînements qui sont devenus des automatismes...
Je sens à peine les lances s'enfoncer dans mes cuisses. Mon cœur est calme, ma respiration régulière. Je n'entends plus que le rythme dans mes oreilles et découpe, bras, jambes et têtes, à tour de bras sans me poser de questions.
Tant que je tiendrai le rythme, je le ferai !
Les mouvements circulaires à deux mains lacèrent les orcs. Sauter, tourner, emmagasiner de la force pendant le tour et abattre la lame à la verticale. Plier le genou et déployer le bras à l'horizontale. Tous mes mouvements s'enchainaient sans que je réfléchisse et j'ai béni Glorfindel...
Parer les coups, ou ne pas le faire. Encaisser les lacérations douloureuses sur les bras et les jambes, car elles ne durent que quelques secondes. Mais leur nombre augmente à mesure que les orcs se rassemblent autour de moi. Le sang gicle sur mon visage et bientôt, le goût en m'emplit la bouche, ma vue se brouille... La musique n'est plus là et le son des membres arrachés me parvient. Tout est noir autour de moi. Mes mains, le sang sur la lame, le sol et même mes vêtements...
Mon cœur s'affole et mon âme sombre dans une panique incontrôlable. Je ne reconnais pas celle que je suis à cet instant, je tue avec une telle facilité, une telle précision... Je sais que c'est mon devoir que j'ai signé... Mais c'est si monstrueux...
Libère-toi de tes sentiments...
Je sens l'ombre happer mon âme... Il serait si facile de ne rien ressentir et de laisser ma force prendre le contrôle...
Ce n'est pas si important, le résultat sera le même...
Mais, comme pour me sortir de mon indécision, plusieurs elfes courent et s'arrêtent à mes côtés, protégeant mes flancs, les nains sont là aussi. Mon courage redouble, je hurle de rage en retournant au combat, abandonnant l'idée de la laisser me prendre.
Je saute puissamment en l'air en hurlant et retombe à genou de toutes mes forces. L'onde de choc fait perdre pied aux orcs qui tombent à terre. Les elfes sur mes flancs s'avancent et les tuent rapidement, plantant leurs lames jusqu'à la garde.
On progresse à travers la marée noire, lentement, mais je vois que l'on avance. Si l'on tient ce rythme, on devrait en arriver à bout...
Les machines de guerre alliées passent à côté de moi, déchiquetant les orcs sur leurs passages d'une efficacité redoutable. Je sens encore mon cœur se serrer contre ma volonté face au spectacle horrible de la chaire réduite en bouillie, mais je retiens mon envie de vomir en continuant...
Un cor orc sonne soudain et les drapeaux bougent modifiant les ordres.
Plusieurs grognements me prennent les tripes. Ils sont géants, ils sont horribles... J'ignore ce que c'est et même dans mes rêves les plus fous, je n'aurais imaginé de telles créatures...
- Troll ! crie un elfe derrière moi.
L'armée de géants s'avance vers la position de Thranduil. Ils vont nous prendre à revers, nous écraser comme dans un étau. Merde. Ils ne doivent pas fendre notre formation, ils risqueraient de nous disperser... Si cela arrive, nous sommes tous morts. Je plisse les lèvres et commence à courir vers le roi de Mirkwood. Arrivée à sa hauteur, je me suis placée devant sa monture, faisant face à la créature immonde.
- Pensez-vous que j'ai besoin de vous ?
- La ferme... je murmure entre mes dents.
J'ai sauté pour atterrir sur les épaules de la créature. Plante Nordeline dans son crâne et pivote la lame pour confirmer l'exécution. Simple, efficace et rapide. Descends, me retourne vers Thranduil, mais n'ai pas eu le temps d'ouvrir la bouche que je me fais faucher.
La douleur me submerge... Il m'a fallu plusieurs secondes pour le comprendre... La vue est une torture. Je suis empalée sur des piques, j'en vois un sortir de mon ventre avant d'être projetée sur le côté. Je finis ma course après plusieurs roulades dans la poussière. Tousse difficilement, essayant de retirer le sang dans mes poumons et la terre dans ma bouche.
La douleur est abominable et je lâche un gémissement en bougeant un bras. J'ose baisser les yeux pour regarder mon état, mais je n'aurais pas dû... Mon bras droit est en charpie, le sang dégouline par terre et je ne distinct même pas mon coude... M'affole en n'en croyant pas mes yeux...
J'hurle à la mort, mon ventre brûle, mon bras bouge. Les os redeviennent droit et se soudent à une vitesse phénoménale. Je sens mes tripes remuer, mon ventre se tord de douleur et je fini par vomir du sang sous la nausée.
La douleur s'estompe et je me relève péniblement, retrouvant mon souffle. Respire à plein poumons et retrouve des yeux le troll qui m'a percuté.
La colère remplit mes veines... J'ai sus à l'instant même où j'ai pris Nordeline que j'avais lâché prise...
Une arme sans vie, laisse la force te contrôler.
J'ai laissé l'ombre enfermer mon âme presque avec joie... Cherchant à tomber dans la léthargie apaisante, laisser la force envahir mes muscles en colère. Mes yeux m'ont brûlé et ce fut le noir...
oOo
Le visage de la Titan est devenu glacé et ses yeux de sang... Son âme s'est réfugiée dans l'ombre qu'il avait créé pour elle. Plus rien d'humain ne s'affichait sur son visage. La lame s'est levée au-dessus d'elle, son pied s'est encastré dans la terre sous l'élan du début de sa course.
Il y eut un souffle dans les cheveux du roi elfe qui regardait la scène de ses yeux paniqués. Il avait déjà vu ce visage, ces yeux-là, sans vie et les souvenirs ont pris son cœur sans merci.
Le troll a hurlé de douleur quand la lame d'acier lui a tranché une jambe d'un seul coup. Il est tombé à terre pour y perdre sa tête. La lame a dansé encore et encore, des mouvements fluides de ses deux mains. Il eut envie de vomir...
Son poing s'est enfoncé dans le crâne d'un orc sans aucune hésitation. Sortit une arme inconnue à ses yeux pour tuer toutes les créatures autour d'elle en quelques secondes. D'un bras ferme, une visée irréprochable. Son visage était fermé et concentré, ne se fatiguant pas pour outre que tuer. Elle a couru vers un autre troll, tiré sur la longue chaîne qui lui servait de main pour l'attirer à elle et fendre son crâne de sa lame
Elle a continué à tuer tout autour d'elle, sans aucune fatigue, sans un autre but que d'abattre la masse noire. Les elfes l'entouraient, lui laissant instinctivement un passage plus grand vers l'ennemi. Tenant fermement la lame dans sa main, les têtes sont tombées, le bruit de l'acier fusait dans tous les sens. Les orcs reculaient, mais c'était déjà trop tard.
La peur se lisait dans leurs yeux avant de mourir. Les elfes la regardaient, n'arrivant pas à suivre tous les mouvements. Nordeline suivait, s'entourait autour d'elle, tombait sur les membres noirs, découpait la peau, déchirait les visages tordus de douleur. Ils peinaient à suivre la progression.
Une lance s'est enfoncée dans son flanc, l'incitant à lâcher la lame pour tomber à genoux.
oOo
J'ai suffoqué, la réalité est revenue d'un seul coup sous la douleur. J'ai regardé ma main qui tenait mon flanc en sang et l'autre tenant vigoureusement Nordeline sans vraiment comprendre ce qu'il venait de se passer.
Tout autour de moi, il n'y avait que la mort. Deux trolls étaient à terre et des dizaines d'orcs... J'étais au milieu de la marée noire, mais une marée de sang parsemée en flaques...
Je me suis relevée, sentant que mon corps avait fait le nécessaire. Je n'ai pas eu le temps de contempler plus longtemps le carnage, que j'ai aperçu Dain me faisant signe de me retourner.
- Derrière vous ! dit-il.
L'orc arrive sur moi, pivote et lui donne un coup de pied magistral qui le renvoie vers le nain à toute vitesse. Passe à côté de lui, faisant frémir sa barbe sous le courant d'air. Un autre orc vient déjà. Dain lui envoie un coup sous le menton, je le finis en lui tranchant le ventre dans sa chute.
Nous sommes encerclés, il y en a partout, je vois les rangs noirs s'approcher pour nous faire reculer contre la montagne. Ils cherchent à nous piéger, à nous enfermer pour mieux nous tuer... Non...
De colère, j'agrippe la chaîne retenant la boule d'acier piquante du troll mort. La tire hors des rangs et la fait tourner autour de moi. Lâche pour la laisser éventrer les rangs orc dans une vrille et finir sa course dans le ventre d'un troll.
- C'est un plaisir de combattre avec vous, ça ne manque pas de spectacle, me dit Dain.
- Tout le plaisir est pour moi, je lui réponds d'une révérence.
J'ignore combien de temps nous sommes restés là, à tuer sans répit. Mes mains sont moites de sang noir et je transpire à grandes gouttes. Thranduil sort des rangs pour galoper vers la cité rapidement. Elle est prise d'assaut, ils ont fait une percée dans le rempart...
- Merde...
Nous n'arrivons pas à les contenir sur deux fronts. Si je pars aider les hommes, je laisse les nains et les elfes se battre seuls, si je reste, les hommes périront dans les murs avec femmes et enfants... Les orcs se rassemblent devant nous, réformant les rangs et l'armée qu'il nous reste recule.
Un grand bruit nous arrête et les pierres de fermant jusqu'alors l'entrée des mines d'Erebor volent en éclat. Après plusieurs secondes de silence, je distingue Thorin et le reste de la compagnie des nains sortir en courant. Esquisse un sourire, suivi d'un soupir de soulagement, voyant dans ses yeux l'âme du nain que je connaîs. La détermination d'un roi...
Maliha, remontez à Dale les hommes ont besoin de vous, me lance Thorin en arrivant à ma hauteur. Nous nous chargerons du reste mon amie.
Je lui fis un signe de tête entendu et pose ma main sur son épaule.
- Je suis heureuse de vous revoir, Thorin.
- Moi aussi.
- Que les Valars vous accompagnent, je lui lance en partant vers la ville.
J'ai vu son sourire avant de me détourner. L'armée des Nains se rassemble autour de lui et là, en cet instant, je vois un roi. Un roi suivit par les siens. La place que Thorin doit avoir et je suis heureuse de l'aider. Heureuse de combattre à ses côtés, heureuse d'être là et d'entrevoir le courage emplir leur cœur.
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