Partie 11
Après un rapide coup d'œil pour s'assurer que les spectres n'étaient plus dans les parages, Caleb se laissa glisser le long du tronc suivit par Juliana. Thomas était allongé dans les feuilles mortes, tremblant de froid. Caleb dégrafa sa cape et le recouvrit : « Il est vraiment dans un sal état » constata-t-il. Après avoir sommairement vérifié qu'il n'était pas blessé, Caleb envoya Juliana chercher de l'eau pour désaltérer le jeune bucheron. Après cela, l'apprenti médecin et la jeune fille du boulanger s'accordèrent un peu de repos car ils n'avaient pas fermé l'œil de la nuit.
Thomas se réveilla quelques heures plus tard. L'esprit embrumé, il se redressa sur ses coudes et regarda Juliana et Caleb dormirent juste à côté de lui. Il passa sa main sur ses yeux avant de se lever. Il ramassa la cape et s'avança vers Caleb pour le couvrir avec. A peine eut t'il amorcé ce geste que le protéger du Père Salomon se redressa, sur la défensive. Tout aussi surpris, Thomas fit un bon en arrière : « Excuse moi, j'ai eu peur que... commença Caleb.
— Je comprends... Comment va Juliana ?
— Aussi bien que quelqu'un qui vient de passer une nuit sur une branche.
— Que faisiez-vous dans le bois une Nuit de la Terreur ? » s'étonna le jeune Colville.
Caleb se leva et fit signe à Thomas de s'éloigner pou ne pas déranger Juliana : « Nous sommes venus te ramener au village.
— Pourquoi ?
— Car ce n'est pas toi qu'Ils cherchent.
— Je l'ai bien remarqué. Ils ne m'ont rien fait.
— Pourquoi t'ais tu laissé prendre ?
— Car je ne veux plus vivres... J'ai... J'ai tué mon propre père, Caleb !
— Je sais tout ça ! Nous avons retrouvé son cadavre.
— Je suis un monstre... Je n'ai pas plus de valeur que ses spectres !
— Ne dis pas ça ! Juliana m'a tout raconté. Ton père te battait, tu n'as pas eu le choix. »
Thomas baissa les yeux : « Tu ne peux pas comprendre, Caleb... Cet homme, mon père... Je l'ai vu battre ma mère depuis ma naissance. Il l'a tué sous ses coups et j'ai toujours sus que si quelqu'un au village l'apprenait, il serait pendu haut et court. Je n'ai donc rien dit car c'est le seul parent qu'il me restait. Pendant dix-huit ans, je me suis fais battre sans jamais rechigner. Mais cette nuit là, ce fus la fois de trop... Si tu savais comme je regrette, Caleb. »
Le jeune homme ne savait que dire face à la détresse du jeune bucheron. Aucun mot n'aurait été assez fort à ce miment là. Caleb hésita longtemps avant de lui parler de leur lien de parenté : « Thomas, j'ai quelque chose à te dires. C'est le Père Salomon qui m'a tout dit hier. Nous avons la même mère : Coline.
— Comment connais-tu son prénom ? Personne n'en parle à Tintecloche. Pour tout le monde, c'était une trainée, rien de plus...
— Laisse-moi continuer, Thomas ! Coline, de son nom de jeune fille Fileur, à eut une relation avec un certain Liam Garnet. Cet homme est mon père. »
Il eut un silence avant que Thomas reprenne la parole : « Mon père sait mit à battre ma mère deux ans après ma naissance... Il savait... Il savait ! C'est de ta faute si elle est morte ! » Thomas explosa et se jeta sur Caleb. Il le frappa plusieurs fois avant que Juliana n'intervienne : « Je t'en prie, Thomas, arrête ! » Il s'exécuta. Juliana aida Caleb à se relever. Le jeune homme serra son flanc entre ses mains, le souffle court : « Tu es fou ! hurla Juliana, Caleb risque sa vie pour toi !
— Il ne risque rien ! Les spectres ne nous font rien !
— C'est faux ! s'écria la jeune fille, Ils ne te font rien mais Ils seront beaucoup moins cléments avec Caleb !
— De quoi parles-tu ? s'énerva Thomas.
— Le père de Thomas était un des descendants du Traitre. Personne ne le sait au village et c'est ce qui alimente les Nuits de la Terreurs : comme on ne sait pas qui Ils prennent, tout le monde se protège. »
Thomas tremblait : « Pourquoi fais-tu ça ? demanda t'il à Caleb.
— Parce que cette histoire a assez duré, je vais me sacrifier, je me rendrais aux tombeaux ce soir. Ainsi, Tintecoche connaitra enfin la paix.
— Tu ne reviendrais pas parmi les vivants.
— Je sais tout ça, Thomas. Mais je ne peu faire que ça maintenant que je connais ma véritable identité. Un de mes ancêtres à Trahi les siens. Tous ses soldats errent autour de Tinteclcohe dans le seul but de venger leur mort et de trouver le repos éternel. Si je peux leur apporter ce repos, ainsi que permettre aux habitants du village de vivre sereinement, j'accepte ce sacrifice. »
Il eut un long silence, un silence terrible... Caleb acceptait la mort, Juliana n'arrivait pas à ce faire à cette idée et Thomas n'arrivait pas à ressentir quoi que soit de cohérent. Depuis son enfance, son père lui disait que les émotions étaient affaire de faibles. Que devait-il ressentir à ce moment précis, face à ce jeune homme qui était en réalité son demi-frère ? La vérité le frappa comme un coup de poing dans le ventre : il n'avait jamais été seul à Tinteclcohe, Caleb avait toujours été là : son demi-frère, sa moitie, son petit frère. Caleb... Par ironie du sort, c'était le petit ami de Juliana, celle qu'il aimait tant. Thomas n'avait jamais rien partagé avec le protéger du Père Salomon si ce n'est haine et violence et aujourd'hui, à ce moment précis de leurs vies, il le regrettait terriblement. Thomas ressentit une force invisible lui enserrer le cœur puis la gorge, il ne pu retenir quelques larmes qui roulèrent en silence sur ses joues. Des larmes... Depuis combien de temps n'avait t'il pas pleuré ?
« Tu pleurs ? demanda Juliana, surprise de voir le jeune homme dans cet état.
— Je me rends compte, que, si tu vas au bout de ton projet, Caleb, je perdrais un petit frère.... Le petit frère que j'ai tant voulu avoir. Le petit frère que j'aurais voulus consoler les nuits d'orage... A la place, je n'ai su que te frapper et ta haïr parce-que tu avais la plus belle chose qui puisse exister : l'amour. Moi je n'avais rien, personne ne m'a jamais aimé au village. Si tu décide de passer les portes de la Mort, je te suivrais car je n'ai pas d'autres raisons de rester vivant. »
Juliana fondit en larme et s'éloigna. Thomas voulut la suivre mais Caleb l'en empêcha : « Il faut que tu reste vivant... Pour la protéger, la ramener à Tintecloche. Il faut que tu te défendes face aux villageoises, que tu racontes ton histoire et celle de notre mère, que tout le monde sache que tu n'es pas un meurtrier et que tu cachais tes souffrances derrière la violence. Prends soin de Juliana, Thomas. Tu l'as toujours aimé comme un fou, il y a toujours eu cette lueur dans tes yeux quand tu la regardais... Tu l'aimes sans doute plus que moi... Fais moi cette promesse, mon frère, aimes Juliana comme je ne l'ai jamais aimé, aide la à construit une vie stable et heureuse. S'il te plait.
— Si tu savais comme je regrette, Caleb. Comme je regrette d'avoir été aussi stupide envers toi.
— Tu n'as pas de regret à avoir. C'est toujours comme ça entre les frères : l'ainé martyrise le cadet mais ça ne les empêche pas de s'aimer. »
Thomas étreignit pour la première fois et la dernière fois son petit frère contre son cœur. Puis, Caleb alla partager un dernier moment de tendresse avec la belle Juliana, se plongea une dernière fois dans son regard si merveilleux et, enfin, il prit la direction des tombeaux, au nord. La journée était déjà bien avancée. Une fine pluie tombait du ciel et s'écrasait sur la couche de feuilles mortes qui recouvrait les sentiers. Le vent s'était levé, imperceptiblement, faisant danser les longs doigts noirs des arbres dénudés en ce jour de Novembre. Ici et là, le vent soulevait de petits tourbillons de feuilles aux couleurs jaunes, rouges et brunes. Un peu plus au sud, la carcasse de la jument de Monsieur Boncœur était irrémédiablement recouverte pas ces mêmes feuilles. En marchant droit vers le nord, Caleb n'avait pas peur. Bien au contraire ; il était incroyablement serein car il avait cette sensation de faire le bon choix et personne n'aurait put le persuader du contraire.
Il fit de plus en plus sombre et la brume monta du sol, enveloppant les lieux dans son rideau blafard. Caleb était désormais aux portes des tombeaux. Devant lui, les massifs battants de pierres grises s'élevaient à flanc de colline, ouverts telle une gueule béante conduisant droit aux catacombes. Le jeune homme frémit légèrement quand, de la bouche noire des tombeaux, s'éleva le chant macabre des spectres. Il inspira à fond, tourna une dernière fois la tête vers le monde des vivants puis s'avança vers les entrailles de la terre : « Quand je marche dans la vallée de l'ombre de la mort, je ne crains aucun mal... »
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