Chapitre 21 - 2/2
Allongé sur une table, lié à celle-ci fermement pour ne pas lui laisser une chance de fuir, il y avait une chose que je n'oublierai jamais chez cet homme. Ce n'était pas ses supplications, ce n'était pas ses cris ni même le fait qu'il gesticulait dans tous les sens en espérant que ses liens se briseraient et qu'il pourrait sauver sa peau. Ce n'était pas non plus son regard implorant pour que cela s'arrête.
Derrière moi, contre mon dos, ma mère tenait ce couteau qui me paraissait si lourd.
— Tu m'as observé le faire. Tu devrais en être capable maintenant.
— Et si je m'y prends mal ?
— Peu importe, sa souffrance ne doit pas t'atteindre. Ton travail à toi est de ne pas souffrir pour lui.
— Je ne sais pas si...
Mais bien plus que de continuer le travail de ma mère, ce qui me terrifiait c'était elle. Elle et les araignées qui ne l'effrayaient jamais et qui toujours nous observaient dans le coin d'une pièce.
Alors ma lame plongea, l'homme hurla. Bientôt, il ne fut plus capable de se plaindre, ce qui me terrifia.
Ce que je retiendrais toujours de cet homme et de ceux qui se trouvèrent à sa place par la suite serait cette lueur disparaissant dans leurs yeux. La vie qui les quittait pour les confier à la mort.
Doucement, comme effrayée par ce que je pourrais voir, mes paupières s'ouvrirent. Pas de douleur, ce qui avait de quoi m'étonner. Le chant des oiseaux venait me réveiller sans brusquerie. Même les rayons du soleil paraissaient tendres avec moi, ne m'agressant pas de leur lumière aveuglante, mais me réchauffant.
Puis, voulant me redresser, je fus rattrapée par la réalité. J'avais bien passé quelque temps avec Drake à supporter ses délires de démons venus de l'Enfer pour punir les âmes damnées. Chacun de mes mouvements s'accompagnait de douleur et je préférais rester allongée dans ce lit si moelleux que je reconnaissais. Ce devait être la première fois que j'étais véritablement heureuse de me trouver dans la chambre d'Hunter.
— Tu es réveillée ?
Une main se glissa dans la mienne. Celle du bel Alpha auquel je souriais.
— Tu es venue me chercher ?
Il glissa un doigt sur mes joues, recueillant de vilaines larmes qui fuyaient mes yeux sans mon autorisation.
— Merci, eus-je le courage de murmurer.
— Tout va bien maintenant. Je te promets de retrouver ce vampire et de lui faire subir au centuple ce qu'il t'a infligé.
Ses gestes possédaient une tendresse que je ne pus repousser. De toute manière, mon corps ne bougerait pas sans souffrir.
— Oanelle ?
— Elle va bien, m'assura-t-il. Elle est en pleine forme.
Et soudain, la porte s'ouvrit sur Ruth.
— Tu étais sévèrement blessée. Elle a joué les infirmières.
— Un hôpital aurait suffi, assurai-je.
— Oh que non, intervint alors Ruth qui empêcha Hunter de parler davantage. Si tu avais été à l'hôpital, aujourd'hui tu serais en fauteuil roulant alors qu'avec moi plus de fractures, de blessures ou de brûlures. Maintenant Monsieur l'Alpha, j'aimerais que vous me laissiez avec ma patiente préférée.
Hunter obéit et sortit en fermant derrière lui. Ruth attendit quelques instants avant de me sauter dessus pour me prendre dans ses bras et ainsi m'arracher des « Aïe » nombreux qui ne l'alertèrent pas.
— J'ai cru avoir une attaque lorsque je t'ai retrouvé dans ce nid de vampire.
— Je vais bien maintenant. Grâce à toi.
— La magie a du bon. Il fut un temps où les sorcières vivaient en tant que guérisseuses. Et ça, c'est ma spécialité.
Elle m'aida à m'asseoir sur le lit, me permettant de comprendre que les douleurs n'étaient que des courbatures un peu plus difficiles à supporter que la moyenne.
— Hella, j'ai pu soigner toutes tes blessures, mais j'aimerais que tu m'expliques certaines choses.
Ruth passa sa main derrière son dos, laissant apparaitre une baguette fine et élégante, décorée de petites fleurs et enveloppée d'une aura sur toute sa longueur. Une pierre verte à la base se mit à luire tandis que la pointe de l'objet magique se posa sur ma marque. Une décharge électrique se propagea furtivement dans tout mon corps, faisant alors apparaitre des vérités que j'avais cru être disparue depuis longtemps.
En vague magique commençant depuis ma marque pour se propager dans tout mon corps, des cicatrices se révélaient. Boursouflures d'objets tranchants, impacts de balles ou brûlures mineures.
— Ruth, qu'as-tu fait ?
— En voulant utiliser mes talents de guérisseuse, j'ai pu remarquer la trace de la magie. Je les ai recouvertes d'une toile pour les cacher en attendant de pouvoir te demander des explications.
Et merde.
Me levant du lit, prenant le temps de retirer la chemise dans laquelle mon corps se cachait à moitié, je m'approchai du miroir à pied, observant ce corps en culotte qui était le mien. Mes doigts tracèrent le chemin de chaque blessure qui avait eu le temps de guérir. Apparemment, elles n'avaient pas disparu. Elles n'étaient jamais parties.
J'avais cru que les secrets resteraient muets plus longtemps. Pourtant, il était temps qu'ils expriment leurs vérités.
— Les parents tentent de sculpter leurs enfants à leur image, voire en mieux. Je n'ai jamais eu de père ce qui a laissé à ma mère la possibilité de me modeler comme elle l'envisageait. Après tout, les chiens ne font pas des chats.
— Explique-moi.
Les secrets possédaient une vie bien éphémère. Aucun d'entre eux ne pouvait espérer être éternel. Peut-être que les miens se trouvaient aux portes de la mort, prêts à périr et révéler ce qu'ils cachaient ?
Alors mon doigt se posa sur ce qui ressemblait à des impacts de balles, au niveau de mon épaule droite.
— J'avais douze ans. Pour sauver sa vie, un homme m'a tiré dessus par trois fois. Mon épaule fracturée, je n'ai pu me servir que d'un couteau pour le tuer.
— N'es-tu pas droitière ?
— Ambidextre.
Puis je pointai une entaille dans la main qui semblait indiquer qu'un objet tranchant l'avait traversée.
— Même année, ses amis ont voulu se venger sans savoir qu'ils étaient également chassés. L'un d'entre eux a enfoncé une lame pour bloquer ma main dans un tronc d'arbre le temps de s'occuper de ma mère. J'étais en formation, pas ma mère. Elle les a décapités à la machette.
— Hella, tu veux dire que ta mère...
Je me tournai pour faire face à Ruth, mes cheveux blonds venant onduler sur ma poitrine.
— Elle m'a entrainé à survivre.
Il aurait été trop long de raconter l'histoire de chacune des marques sur mon corps, mais il en était une qui me semblait importante. La brûlure qui semblait former un masque au niveau de mes yeux. La peau blanche était fripée.
— Ma première rébellion. J'ai tenté de tuer ma mère, ce qui me valut de sa part l'eau bouillante de sa tisane aux herbes odorantes et fleurs parfumées.
Le bleu de mes yeux, plus pâle qu'au naturel, ne possédait plus le cercle sombre de leur pupille, presque entièrement disparu. Pour autant cela ne m'empêchait pas de voir correctement.
— Tu m'as dit qu'on avait caché mes blessures. Ma mère appliquait de sa « pommade faite maison » sur chacune d'entre elles, me permettant de guérir en quelques jours à peine.
— Tu ne devrais pas être capable de voir dans le cas contraire. Il devait s'agir d'un remède arakhny, très efficace pour guérir les blessures et leurs conséquences. Mais les marques restent. C'est pour cela que bien souvent on y ajoute de la toile de Tsuchigumo afin de permettre de cacher ces dernières. Comme un maquillage invisible.
Ruth ne jugeait pas mon passé. Elle se contenta de me présenter un pot contenant un gel grisâtre teinté de rouge qu'elle appliqua sur les impacts de balles. Ces dernières ne mirent pas longtemps avant de disparaitre.
— Remède de banshee, nomma-t-elle le produit tout en recouvrant chacune des marques sur mon corps. Larmes de banshee et sang de miroir brisé par son cri, sang de Licorne et celui d'une nymphe vierge. Le tout mélangé à...
— Un œil de Cyclope aveugle ? tentai-je après avoir entendu l'étrangeté de ces ingrédients.
— De l'aloe vera, finit-elle avec un sourire. Très difficile de par la rareté des ingrédients et sa préparation très précise.
— C'est-à-dire ?
— Le remède doit être préparé par un aveugle, il suffit de se bander les yeux. Et bien sûr sous les rayons d'une éclipse lunaire, de préférence une pleine lune, et sur la tombe d'un nourrisson mort depuis au moins un siècle. Plus la mort remonte à loin et plus le remède sera puissant.
— Puissant pour quoi ?
— Pour guérir n'importe quelle blessure, malédiction ou sortilège. Et dans ton cas, supprimer la magie dont ta mère t'a enveloppé et les cicatrices que sa vie t'a imposées.
Ses mains allèrent pour se poser sur les yeux. Je l'arrêtai.
— Hella, ta mère est morte. Elle ne te contrôlera plus. Ta dernière tentative a réussi, n'est-ce pas ?
— Tu sais ?
— J'ai deviné. Un accident de voiture n'aurait jamais pu tuer Malaurie.
Il était vrai que Ruth m'avait déjà avoué connaitre ma mère, et surtout ne pas l'apprécier. Mais de là à deviner ce que j'avais fait...
— Elle a été transportée à l'hôpital et tu es venue la voir. La première et dernière visite qu'elle aura. Malaurie est morte comme si elle n'avait attendu que ton passage pour se laisser partir dans les bras de la Mort.
— J'ai tripoté sous le capot de sa voiture et après son accident je l'ai achevée. Elle m'a appris à tuer, j'ai appliqué son savoir sur elle.
— L'arroseur arrosé.
Et avec mon autorisation, elle appliqua de son remède sur mon visage.
— Tu as tué ta mère, et je sens que tu as adoré ça, révéla Ruth à haute voix.
Oui, je l'avais fait. Et bon sang oui, j'avais adoré ça. Cette femme m'avait terrifiée durant des années, m'obligeant à affronter le danger sans aucune autre récompense que celle des friandises. Si ce que je faisais n'était pas bien, les cris n'étaient rien comparés aux restes.
Enfin, je supposais que tout n'avait pas été horrible à ses côtés.
Plus qu'un enfant, je ne savais pas du chien dressé ou du bon soldat serait la meilleure image pour décrire ma vie depuis l'enfance jusqu'à la mort de ma mère. Non, pas jusqu'à sa mort. Jusqu'à celle d'Aurélien, mon beau-père qui m'avait permis de faire l'expérience d'une vie en famille. Jusqu'à Martin, qui m'avait donné envie de vivre ma propre existence, loin de la vie qui m'avait semblé normale aux côtés de ma mère. Ils étaient les deux hommes qui m'avaient éveillée.
Avant eux, et surtout avant Martin, mon monde ne se composait que de combat, de fuite et de mort. Un monde en noir et blanc qui s'était illuminé sous les couleurs vivifiantes de la vie alors que son regard se posait sur moi. Martin et Hella, Hella et Martin, une histoire d'amour à l'eau de rose comme j'aurai pu en lire dans des romans pour adolescents avec deux jeunes s'aimant d'un amour impossible. Sauf que dans mon histoire, la fin avait été tragique. Pas de victoire du pouvoir de l'amour, juste le sacrifice d'un stupide amant transi et moi qui prenait conscience d'une vérité qui me servirait toute ma vie : l'amour, c'était pour les gamines boutonneuses en pleine crise d'adolescente. Moi j'étais Hella, splendide créature avec un chapeau de sorcière et pouvant faire jaillir des paillettes de ses mains. J'étais Magic Hella, la magical girl briseuse de burnes qui n'hésitait pas à casser les testicouilles de ceux qui commettaient l'erreur de menacer ma paisible nouvelle vie d'apprentie sorcière.
Et ma mauvaise expérience avec Drake n'avait fait que me conforter dans ce désir. Finalement, une vie normale n'était pas faite pour moi. J'aimais l'action. J'aimais être Hella Doux, sorcière Laga.
— Parfois on voudrait pouvoir fuir pour avoir une nouvelle vie. Mais il est des choses dont on ne peut s'éloigner. Je n'ai pas fui. J'ai affronté ce que l'on voulait m'imposer et je l'ai anéanti. Dans la vie, si tu veux quelque chose tu ne dois pas attendre qu'elle te tombe dans les mains. Tu dois l'arracher de l'emprise de ceux qui veulent te faire obstacle et leur péter toutes les dents s'ils résistent encore.
— Donc il faut voler ? interpréta Ruth, peu convaincue par son interprétation.
— C'est plus rapide que d'attendre ou que de construire l'objet de ton désir, non ?
Ce que j'avais voulu, je l'avais pris sans demander leur avis à ceux qui m'entouraient. Ma mère m'avait fait obstacle, je ne m'étais pas contentée de lui exploser les dents. J'avais volé sa vie pour en posséder une.
Et ce jour-là, je m'étais fait une promesse que Jalil avait contribué à réaliser. Oui, ce jour-là, alors libérée de ma mère je me l'étais jurée. Je vivrais ma vie, celle que j'aurai choisie sans contrainte ni obligation. Plus personne ne saurait me soumettre.
Plus jamais.
***
L'imagination d'un loup-garou de plusieurs centaines d'années d'existence n'était pas à prendre à la légère. Des blessures, il en avait vu, il en avait eu. Mais toutes les cicatrices sur la peau d'une jeune femme, des traces de combats face à des créatures surnaturelles, avaient de quoi interroger. Surtout lorsque cette même personne n'était ni chasseuse ni exécutrice pour les Soverains.
Il les visualisait, toutes ces marques aux formes étranges. Son esprit créait des scènes pour les mettre en contexte afin d'imaginer leur vécu et leur naissance. Aucune de ces idées ne le satisfaisait. Entre effusion de sang et torture, les perspectives d'un passé joyeux pour Hella n'existaient pas dans sa tête. Pour en avoir la certitude, il devait attendre qu'Oanelle parle. Sa jeune sœur, tendue comme un piquet, aurait le droit à la parole dès qu'il le lui aurait accordé.
— Oanelle, tu me cachais des choses sur le passé d'Hella. Tu es consciente de ça ?
La louve tenait dans sa main un dossier assez épais. Elle hocha de la tête avant de baisser les yeux. Il tendit la main, elle s'avança pour lui livrer ce qu'elle tenait.
Hunter ouvrit ce dernier, dévoilant alors des photos d'Hella. Il en sortit des petits paquets de feuilles reliées par un trombone et accompagnées de photos d'individus dont il ne savait rien pour le moment. Des morts.
— Amir Abdelbaky, commença Hunter en prenant le cliché d'un homme barbu. Djinn membre du groupe Al, une légion de Djinns particulièrement violents. Décapité avec le reste de sa légion.
Les corps avaient été retrouvés, pas les têtes.
— Un djinn, se répéta l'Alpha.
— Mon informateur sylvestre m'a expliqué que Hella les avait traqués un à un, prenant soin de les terrifier.
— Je vois ça. Les corps présentaient des blessures supposant l'emploi de la torture.
— Elle a pris leurs yeux.
Un ingrédient assez convoité.
Laissant ce dossier de côté, il passa à un suivant.
— Morine Tresson, sirène Alpha. Morte de déshydratation. On l'a empêché de retourner dans l'eau durant trop longtemps.
— Elle est la tueuse de Nice, se nourrissant de chair humaine un peu trop souvent et qui prenait son pied à torturer ses victimes dans des pseudos noyades avant de s'en repaître alors que ces dernières étaient encore vivantes. Ses écailles lui ont été arrachées.
— Je sais lire, Oanelle.
Il continua ainsi, nommant chacune de ces proies et donnant leur espèce. Il n'y avait pas un seul humain. On aurait pu croire au hasard, mais avec ces données et en sachant que l'Homme était l'espèce dominante dans sa densité sur Terre, le hasard était statistiquement impossible à ce stade.
Hella avait ciblé ces personnes. Ou plutôt sa mère, dont il tenait une photo dans les mains. Une femme particulièrement belle qui partageait peu de caractéristiques physiques avec sa fille. Une brune aux yeux noisette. Ah non, vert. Peut-être les deux ?
— Malaurie a dressé sa fille pour devenir une arme. Elle était également une sorcière, laissant supposer qu'elle voulait qu'Hella soit une sorcière parfaite et puissante qui saurait se débrouiller dans notre monde.
Si de nombreuses personnes auraient trouvé cela cruel, peu importe les traitements qu'elle avait infligés à sa fille sur un plan physique ou psychique par le biais de chasses et d'entrainements épuisants, Malaurie avait choisi pour Hella l'éducation la plus sécurisante. Elle avait confronté sa fille à la réalité du monde surnaturel et lui avait appris à survivre à ce dernier. Pire encore, elle avait appris à sa fille à devenir une sorcière. Toutes ses créatures avaient été dépouillées d'organes, de peau ou d'autres choses qui, pour une sorcière intelligente, représentaient des ingrédients de grande valeur.
Et pourtant, même conscient de cette possible vérité, Hunter grognait devant l'image de Malaurie, ne la voyant que comme un ennemi n'ayant pas su protéger sa fille. Hella n'avait dû voir que la mort et la violence. Pourtant le monde regorgeait aussi d'une beauté à découvrir, même dans le surnaturel.
— Oanelle, fais venir Hella dans mon bureau. Il faut qu'elle sache.
***
Elle n'avait pas changé. Même avec un nom différent, même devenue une sorcière, Linda restait la même. Une femme qui pensait être capable de se fondre dans la masse et être appréciée de tout le monde, ne se rendant pas compte de la réalité.
Les regards indécents, la jalousie de certains et pourtant jamais personne n'osait lui montrer en face leur ressenti. Mais bien plus que de ne pas l'apprécier, la plupart l'aimaient beaucoup. En particulier ce mystère autour d'elle et ce sentiment de flirter avec le danger. Souvent silencieuse, se moquant de chacun lorsqu'elle leur apportait de l'attention, Linda n'aimait qu'une chose à part mordiller son stylo comme un vampire faisant ses dents : elle-même. Mais avec Martin, tout était différent. On ne faisait plus simplement que l'admirer, on culpabilisait de la jalouser ou la détester. À son contact, le serpent vicieux qui préparait ses coups en douce pour te détruire avant que tu ne t'en rendes compte était devenu le plus doux des agneaux.
Et Martin était mort. Que Linda puisse être capable de tuer ne l'étonnerait pas. Tout en lui le poussait à croire que la Mort était une amie de la jeune femme. Mais tuer Martin ? Il avait été son monde, Frédéric l'avait vu dans ses yeux. Sa disparition l'avait dévasté au point où elle devait sans aucun doute s'empêcher d'aimer à nouveau.
Il avait glissé son collier dans sa poche. Frédéric ne haïssait pas Linda, il en avait pitié. Il espérait que l'objet puisse l'aider à aller mieux. Elle pourrait alors lui expliquer ce qui était arrivé cette nuit-là.
— Comment est-ce possible !?
Anthone Merwin s'égosilla avec une telle force qu'une banshee aurait pu en être terrifiée.
Installé sur un fauteuil, un arbre imposant trônait au centre de la pièce en cercle. Un chêne millénaire. L'homme, vieillard dans l'âge, mais fort dans son apparence, portait fièrement le nom du Chêne. Si les sorcières étaient dirigées par des Sièges appartenant au Convent, les druides trouvaient leur guide dans sept arbres qui donnaient leur nom aux sept druides choisis par ces derniers. Le chêne, le bouleau, le saule, l'aulne, le pommier, le noisetier et le houx. Tous sacrés. Et Frédéric avait prêté allégeance au Chêne.
Anthone Merwin avait ses origines auprès du grand Merlin, un druide ayant disparu avec son roi. Sa branche avait subsisté même si par la suite la sorcellerie était venue la souiller. Chez les Merwin, on naissait soit humain soit druide. Et les humains devenaient toujours des sorciers. L'un d'entre eux siégeait au Convent.
— Frédéric, es-tu en train de me dire que Dagda a choisi de prendre une sorcière sous son aile ?
— Oui, Linda Desondes, aujourd'hui répondant au nom d'Hella Doux.
— Desondes, tu dis ?
Ce nom ne semblait pas être inconnu pour Alban qui se leva.
— En as-tu parlé à quelqu'un d'autre ?
— Du Dagda ? Non.
— Et du nom de la sorcière ?
— Il n'y avait que moi et mon frère parmi les non humains. Officiellement, Linda Desondes a disparu après l'obtention de son diplôme.
— Que ça reste ainsi pour le moment.
— Chêne, devrais-je savoir quelque chose ?
— Pour le moment non. J'espère seulement me tromper, mais dans le cas contraire je préfère t'envoyer en mission.
Le Chêne semblait vraiment inquiet par l'apparition de ce nom.
— Je voudrais que tu enquêtes sur une mort qui remonte à quelques années.
— Laquelle ?
— Celle d'un homme. Cassian Desondes.
***
« Il court, il court », chantonnait-il dans sa tête. Il était pourtant inutile de le fuir. Logan serait toujours le plus grand des prédateurs. Lorsqu'il poursuivait une proie, cette dernière ne lui échappait jamais. Et aujourd'hui, toutes les chances étaient de son côté.
Sa proie courrait, comptant sur ses aptitudes de vampires pour se sortir de ce mauvais pas. Mais la vérité était tout autre. Il venait lui-même de se piéger en se précipitant dans une impasse. Le vampire était coincé. Pour autant, il ne semblait pas abandonner l'idée de pouvoir vaincre Logan. Tellement stupide.
Il fit face à Logan dont le sourire reflétait la folie de son état actuel. Logan sombrait librement dans cet état effrayant. Sa colère était bien trop grande pour qu'il se contienne. Et il n'était pas le seul à avoir ce ressenti.
— Pensais-tu pouvoir t'enfuir ?
— Qu'est-ce que tu me veux ?
Alors un autre individu entra en scène. Adolescent dans son apparence, il jouait avec la perle accrochée à l'une de ses mèches blondes. Autant le vampire ne connaissait pas Logan, autant personne n'ignorait l'identité de l'autre homme. Ses pas résonnèrent dans la grande pièce vieille et vide d'un lieu désaffecté.
— Vous, trembla le vampire arrogant.
— Maître Drake Nosferell, vous avez torturé la mauvaise personne.
Le vampire blêmit aussitôt, comprenant ce qui l'attendait.
— Logan, je te laisse t'en charger.
— Avec plaisir.
Le vampire hurla encore et encore tandis que Logan prenait tout son temps pour rendre ce qu'il avait fait subir à celle qui était sa mission.
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