- Oh mon dieu ! Mais quelle conne je fais !

Ça faisait cinq minutes que je me plaignais sur ma légendaire maladresse, et surtout sur ma fuite incompréhensible.

- C'est incroyable de faire ça. Il vient de t'annoncer ce qu'il a dans son cur, et tu le laisses en plan, lança James, à moitié hilare.

Lee était dans notre chambre, tandis que j'étais dans celle des deux garçons. Je n'osais as en sortir, de peur de croiser Tom.

- Dis, c'est pas pour te virer, mais...

- Mais pourquoi j'ai fait ça ? Je suis la pire personne, vraiment.

- June, tu pourrais...

- Imaginez qu'il soit en train de pleurer...

- June !

Je m'interrompis et regardai les garçons, pour la première fois depuis cinq minutes. Alex semblait blasé, et James... Et bien, James.

- Bon, tu l'aimes, ou non ? Demanda Alex rapidement.

- J'en sais rien. J'y ai jamais réfléchi sérieusement, Alex !

- Alors réfléchis dans ta chambre, et parle au cadavre du lit voisin au tien, répondît-Il en en levant et en me poussant vers la porte.

Je sortis, et leur souhaitant bonne nuit, et courrai jusque ma chambre. J'entrais dans celle ci et soupirai. Effectivement, Lee ressemblait à un mort. Elle avait toujours sa robe, mais une couverture était posée sur elle jusqu'à ses épaules. Je m'allongeai sur mon lit, omettant volontairement de retirer mes habits de la soirée, et fixai le plafond, toi en repensant au fait que je venais sûrement de briser le cur d'un garçon.

Point de vue de Tom

Je regardai une dernière fois la chambre dans laquelle j'étais ces derniers jours, avant d'empoigner la anse de ma valise et de sortir. Je traversai le couloir, accompagné de Boyle. Mais celui ci m'abandonna rapidement pour retrouver Sonia. Je continuai donc mon chemin seul. Je déposai mes affaires à l'entrée, et me dirigeai dans le réfectoire. Je remarquai directement Alex, et ses deux amis, chacun étant le contraire de l'autre. Mais aucun signe de leur amie brune. Alex tourna les yeux vers moi, et quand il me remarqua, me fit signe de le rejoindre. Après une grande hésitation, je décidai donc de m'assoir à côté de lui. La fille au style emo me jeta un regard méprisant.

- Tiens, le bad boy en a marre de ses amis ?

- Je viens parler à mon frère, répondis-je sur la défensive.

J'avais vu plusieurs fois June avec cette fille, et je ne comprenais vraiment pas comment les deux pouvaient être amies.

- Alors, comment elle va ? Demandai-je à mon frère. Je ne l'ai pas vue depuis... Hier.

- Je crois que ce que tu lui as dit l'a un peu chamboulé.

- Ouais, j'avais remarqué.

Alex rit. Tel que je la connaissais, elle était partie tout raconter à ses amis, et il était par conséquent au courant.

- Dis, Tom.

Je levai le regard vers lui.

- Prends soin d'elle, ok ?

Je restai là, à le fixer pendant quelques secondes, avant d'acquiescer.

- Je crois qu'elle aide à embarquer les valises dehors, ajouta mon frère.

Je compris l'allusion, me levai aussitôt, le remerciai et sortis. Je marchai rapidement, et me retrouvai rapidement dehors. La neige tenait, et la température se trouvait certainement être en dessous de zéro. Mais je la vis, au loin, et mon corps sembla se réchauffer soudainement. Je m'avançai vers elle. Lorsque je ne fus qu'à quelques mètres d'elle, je pus l'observer. Elle était dos à moi, et portait un bonnet gris qui recouvrait le haut de sa tête et aplatissait ses cheveux, relâchés. Elle se tourna finalement et me vit. Sa bouche s'entrouvrit, tandis qu'elle lâcha le sac qu'elle tenait auparavant.

- Salut, Princesse, lançai-je au tac-au-tac.

- Salut, Zorro.

Je souris, et fit un pas vers elle. Elle triturait ses doigts, les yeux baissés. Après quelques instants de silence, elle releva finalement la tête et plongea son regard dans le mien.

- Je suis désolée pour hier, murmura-t-elle.

- Moi aussi, j'ai été un peu direct. J'ai pas vraiment l'habitude.

Ce fut elle qui fit un pas en avant.

- Ne le sois pas.

Elle prit timidement ma main. Ses vêtements et accessoires chauds contrastaient avec mon unique gros pull.

- Tu sais, pour être honnête, je n'avais jamais pensé qu'il arriverait tout ça en un simple voyage continua June.

- C'est clair.

- Mais, je suis heureuse que ce soit arrivé. Parce que j'ai pus apprendre à te connaître. Enfin, à connaître le vrai toi.

- Le vrai moi ? L'interrogeai-je en pouffant.

- Oui... Le garçon gentil, protecteur, patient, très patient.

Elle lâcha un petit rire.

- Et surtout, celui que... Celui que j'ai embrassé cette soirée là. A cet instant, je crois que je savais que ce 'était pas Alex. C'était une illusion que je me faisais de lui. Enfin, c'est ce que je croyais. J'essayai de me persuader que c'était lui, parce que je ne voulais pas voir la réalité en face.

- Quelle réalité ?

- Que j'aimais ce garçon. Le garçon qui m'avait fait voyager. Celui que j'avais embrassé juste pour embêter son frère, et qui ne m'avait jamais reproché ça. Celui qui m'a suivi alors que je voulais tout quitter. Celui qui est en face de moi, maintenant.

Elle s'avança encore un peu, ce qui faisait qu'elle n'était plus qu'à quelques centimètres de moi.

- Alors, tu m'aimes ? Demandai-je, incertain.

- En réalité, je crois que je t'aime depuis très longtemps. Mais je ne m'en étais jamais rendu compte.

Je riais.

- C'est injuste ! Moi, j'attendais au loin, alors que toi, tu n'avais aucune idée de tout ça ? Tu as vraiment une conscience amoureuse à dési...

June me coupa en posant ses lèvres sur les miennes. Elle pressa son corps contre le mien, tandis que je répondis à son baiser. Je posai mes mains en coupe sur ses joues. A cet instant, je sus. Je sus que June était la fille que je désirais depuis si longtemps. Je sentis mon ventre s'enflammer, tandis que nous nous embrassions. Je rêvais de ce moment depuis si longtemps, et il dépassait toutes mes attentes. La fraicheur de nos lèvres collées semblait créer une étonnante chaleur qui traversait tout mon corps. A travers ce baiser, j'avais l'impression de la redécouvrir. Je découvrais une jeune fille encore plus séduisante que celle d'avant, et ses traits habituels, comme son humour dévalorisant, son sarcasme incessant, ou sa bonne humeur mélancolique, décuplés. Nous nous séparons à contre coeur, l'un contre l'autre, et je sentais sa respiration saccadée sur mes lèvres. Ses yeux bruns s'ouvrirent, et l'émotion qu'ils envoyaient semblait être à la fois basique, mais indéchiffrable. Quelque chose avait changé.

- Bon, les amoureux, on veut pas vous casser votre moment, mais...

Nous tournions notre tète à l'unisson, et vîmes que tous les autres adolescents nous regardaient. Je pouvais sentir de là où j'étais les joues de June chauffer, tandis que je lâchai un maigre rire. Alex s'avança le premier, me donna une tape sur l'épaule, et monta dans le bus. Les autres le suivirent, et bientôt, il ne restait plus que nous. Nous étions toujours aussi proches.

- Dis, tu crois que les choses changeront quand on sera de nouveau là-bas ?

June semblait inquiète, et ses lèvres commençaient à trembler.

- C'est certain.

Elle plissa les yeux.

- Mais je ne compte plus te laisser.

Son visage s'apaisa, et elle sourit. J'avais mon visage vers elle, mais elle se recula au dernier moment.

- Par contre, plus de bouteille dans la tête.

- Quoi ? Dis-je en reculant ma tête.

Elle leva les yeux au ciel.

- Le jour où on est arrivé. Je sortais du bus et j'ai reçu quelque chose à l'arrière de ma tête. Je me suis tourné, et j'ai vu que tu m'avais lancé une bouteille d'eau.

Je me souvins finalement.

- Oh, c'est vrai, répondit-je en me mettant à rire.

Nous restions quelques secondes, face à face.

- Bon, si on ne monte pas bientôt, je crois qu'ils vont nous laisser ici.

J'acquiesçai, et, tandis que je pris sa main, nous montions dans le bus. On s'assit derrière les garçons, et devant Lee. Alex nous félicita, un certain James nous lança un regard amical. Et, Lee...

- J'espère que tu vas pas attraper de morpions à cause de lui.

June sourit, puis se tourna vers la vitre. Elle regarda le paysage pendant longtemps, et je la regardai. Sa peau caramel était encore plus belle qu'elle l'était habituellement, avec les rayons du soleil qui se reflétaient devant nous.

On m'a dit un jour "il n'y a rien de plus précieux dans ce monde que d'exister pour quelqu'un", mais je n'avais jamais assimilé le sens de cette phrase. Ces derniers jours, et à cet instant plus que jamais, je comprenais enfin.

"Parfois, ton coeur a besoin de plus de temps pour accepter ce que ton esprit sait déjà"