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Chapitre 14: La danse des photons

Téodor n'était pas furieux, il était ivre de rage. Il crépitait comme si tout son corps était en court-circuit. Ses quatre mèches blanches dressées sur son crâne ondulaient tels des cobras prêts à se jeter sur leur proie.

— Mais quelle bande de petits racornis de la jugeote !

Ça devait être l'insulte suprême. Aucun n'osa rire. Le Maître Arcan semblait avoir pris cinquante centimètres et sa fureur faisait trembler les murs, au sens propre. Thys et Mélia avaient supplié Cid et Théo d'être présents lors de l'entretien avec leur Maître de premier cycle. Les garçons n'étaient pas franchement d'accord. Ils redoutaient le petit bonhomme aux pouvoirs fulgurants, mais le charme de Mélia avait opéré. Ils regrettaient maintenant d'avoir cédé et n'attendaient qu'une occasion pour s'éclipser. La porte était restée entrouverte. Cid fit signe à Théo et le plus discrètement possible, ils entamèrent leur fuite, petit pas par petit pas.

— Bon sang, on ne peut pas vous faire confiance ! Vous avez eu déjà bien trop d'expériences douloureuses face aux Indesiratas et vous en cherchez encore.

— Je voulais juste m'entrainer à sortir de mon corps, répondit Mélia d'une voix à peine audible. Vous m'avez dit que j'étais la Clairvoyante et que tout le monde comptait sur moi ! Vous attendez de moi des prouesses ! Et quand je tente quelque chose, vous êtes furieux !

— Pas furieux, je suis en train d'exploser ! tempêta Téodor Lux en poussant violemment la porte d'entrée bloquant ainsi la fuite des deux lâches.

— Vous vous restez ici tant que je n'ai pas tous les éléments de cette histoire.

— Mais j'ai mon cours de solfège, mentit maladroitement Théo.

— Assis ! glapit Téodor.

Ses yeux s'étaient rétrécis et la broussaille de ses sourcils semblait piquante. Ils serraient les poings et haletaient comme un buffle prêt à charger. Il n'y avait personne pour calmer sa rage.

Les quatre jeunes s'assirent donc docilement et laissèrent passer l'orage. Et il tempêta ferme ce jour-là. Des coups d'œil éclair, un déluge de reproches, un tonnerre de grognements en tout genre et des soupirs capables de déraciner les plantes en pot. À la fin, Téodor avait la voix éraillée et les cheveux ébouriffés.

— Compris ? demanda-t-il, déterminé, en plantant son regard dans chaque paire d'yeux.

— Oui Maître ! acquiescèrent les quatre amis.

Ils n'avaient pas écouté un seul mot, trop fascinés par le spectacle. De toute façon, ils savaient que Téodor leur reprochait leur désobéissance, leur naïveté et leur manque de maturité.

— Bon, alors qui prend contact avec lui ? insista Téodor en fixant Mélia.

— Quoi ? s'étonna la jeune fille.

— Qui explique le plan à Briac ? fulmina le Maître.

— Le plan ? Quel plan ?

— Mais n'avez-vous donc rien écouté, Niguedouilles rétrécis !

Devant les yeux écarquillés de ses interlocuteurs, Téodor prit une grande inspiration pour bloquer la nouvelle série de jurons qui lui remontait dans la gorge.

— Il faut récupérer cette mallette. Je ne veux surtout pas que l'un d'entre vous joue le héros. Mélia dit que Briac souhaite aider sa mère. Et bien qu'il le prouve !

— Vous voulez bien que l'on parle à Briac ? Et c'est Briac qui va aller chercher la mallette ?

— C'est ça, c'est ce que je m'évertue à vous expliquer depuis une demi-heure ! Ensuite, il nous donne cette mallette et on verra si l'on trouve une solution pour réveiller sa mère.

— Je me porte volontaire pour contacter Briac, s'empressa de proposer Mélia, il va tous les jeudis à l'espace multisports pour son cours d'escrime. Je l'attendrai à la sortie discrètement.

— Comment tu sais ça, toi ? s'étonna Thys.

Mélia rougit en haussant les épaules.

— Je le sais, c'est tout ! Alors c'est bon, on fait comme ça ?

— Tu n'y vas pas seule, ordonna Téodor. Tu l'abordes seule, mais les garçons seront cachés pas loin et Marceline Chanfrein et moi veillerons à distance.

Cette suggestion ne semblait pas plaire à la jeune fille, mais elle dut s'y résoudre. Téodor n'était pas d'humeur à concéder quoi que ce soit.

Le jeudi suivant, Mélia attendait fébrilement la fin du cours d'escrime dans le couloir, au deuxième étage de la salle multisports. Thys et Cid, assis au rez-de-chaussée, faisaient mine de jouer à la DS tout en observant les entrées et sorties.

— C'est dommage que Théo ait chopé les oreillons, juste aujourd'hui, fit remarquer Thys en secouant la tête, lui qui adore jouer les espions, c'était un rôle taillé pour lui.

— Tu l'as dit bouffi ! Il est complètement vénère ! Et il est où, sinon, le grand Maître illuminé ?

— Téodor Lux ? Il se tient au coin de la rue avec Marceline dans sa vieille R5 rouillée.

— Ça sert à rien, qu'est-ce qu'il peut voir de là-bas ?

— T'inquiète. Il va sentir s'il y a du danger...

— Ça m'étonnerait qu'il renifle quelque chose avec tous les poils qui lui recouvrent les narines...

Thys haussa les épaules avec un sourire et pianota machinalement sur sa DS. À l'étage, les escrimeurs sortirent bruyamment de la salle. C'était le groupe confirmé des 15-18 ans. Le masque sous le bras, les cheveux en sueurs, quatre filles bousculèrent Mélia pour rejoindre leur vestiaire. Les garçons étaient plus nombreux. Quelques-uns partirent sans se changer, la majorité passa devant Mélia pour regagner les vestiaires. La jeune fille eut d'ailleurs droit à quelques sifflements admiratifs et commentaires coquins qui la firent rougir. Mais elle ne reconnut pas Briac dans le groupe. Où donc se trouvait le Péragore ?

Elle attendit quelques minutes, mais déjà le vestiaire se vidait. Elle s'avança pour observer la salle d'entrainement. Il y avait du mouvement. Deux escrimeurs s'exerçaient encore. Rien ne les différenciait, même taille, même carrure. Tous deux avaient les cheveux bruns et le visage caché sous un masque grillagé. Seules les chaussures permettaient de comparer les deux hommes. L'un portait une paire d'Adidas noire à bandes bleues alors que le second avait des baskets blanches unies. L'un d'eux était-il Briac ? Les combattants enchainaient les attaques et les parades avec souplesse et rapidité. Puis soudain, « Adidas noires », d'une fente leste et précise, mit fin au combat avec une touche en plein cœur. Les deux hommes se saluèrent.

C'est seulement à cet instant que Mélia sentit la douleur et comprit le danger. Une myriade de petits marteaux ouvrageait dans son crâne, et l'air ambiant devint subitement glacial. La bouche de la jeune Ether s'assécha d'un coup.

« Ce n'est pas possible, je ressens la présence d'un Péragore, pourtant d'habitude Briac ne me fait pas cet effet-là ! »

Par instinct, elle se cacha derrière le portique des tenues blanches, pas certaine d'être bien camouflée en raison de son tee-shirt rouge. Elle observa les deux hommes. Ils ôtaient leur masque. « Adidas noires » était bien Briac et son adversaire n'était autre que Alan, son frère ainé.

« Oh ! Je ne savais pas qu'un autre Le Tallec faisait de l'escrime ! Téodor va me démoléculiser ! »

— Bravo les jeunes, mais c'est encore bien mou, critiqua une voix féminine, on va vous faire une petite démo de nos talents, tu viens Luc ?

— Avec plaisir, ma belle !

Un couple sortit d'un coin d'ombre, masque et fleuret en main.

« Par les Ethers Originels, Laetitia Yessel et Luc Porrexi ! J'ai atterri dans un nid d'Indesiratas ! »

Mélia n'en menait pas large. Elle contrôla son influx sanguin et sut apaiser les troubles que la seule présence des Péragores et des Milvuits déclenchait en elle. Mais sa situation était critique, si l'un d'entre eux l'apercevait, elle passerait un sale quart d'heure.

Pour l'instant, aucun ne percevait cette compagnie étrangère et les deux Milvuits commencèrent à se donner en spectacle. Comme deux félins excités, ils se firent face. À tour de rôle, ils menaient une attaque où chaque fente ressemblait à un bond agile. Laetitia poussait des petits cris jubilatoires à chaque touche pour agacer son adversaire. Luc Porrexi n'était pas en reste. Fin et athlétique, le jeune asiatique se contorsionnait et s'étirait pour éviter les coups puis se détendait comme un élastique pour essayer de planter le bout de son fleuret dans le corps de son rival. Le combat était beau et fascinant. L'espace d'un instant Mélia en oublia sa situation et compta même les points. Soudain, Laetitia ôta son masque et le jeta dans un coin de la salle.

— Trop chaud là-dessous ! Passons aux choses sérieuses, minauda-t-elle.

— Ça y est, la partie commence, jubila le Milvuit en retirant à son tour son masque et la veste épaisse qui le protégeait des coups.

Torse nu, il fit rouler ses pectoraux pour impressionner la jeune femme. Mais celle-ci, nullement déconcertée, ricana. En fixant son compagnon, elle glissa son fleuret sur sa langue et tira doucement pour faire perler une goutte de sang. Elle montrait son être carnassier.

— Hum ! Le sang va couler, mon cher Luc. Je vais te saigner. En 5 touches, OK.

— Je t'attends !

Et le combat reprit avec un rythme encore plus endiablé. Les frères Le Tallec, assis sur un banc, assistaient à un duel historique. Très admiratifs, ils enviaient la musculature sèche de Luc et la fluidité de mouvement de Laëtitia. Les coups étaient violents. Si Luc Porrexi avait marqué les premières touches, Laëtitia dominait maintenant. Par trois fois déjà son fleuret avait cinglé la peau mate du torse de son adversaire, laissant de belles traces violacées. Elle avait aussi atteint Luc à l'épaule. Elle s'apprêtait à donner le coup de grâce en réussissant un bond prodigieux qui lui ouvrait un accès royal au cœur du Milvuit quand son regard fut attiré par une tache rouge au milieu des tenues blanches rangées dans un coin de la salle. Ce fut comme si le temps s'arrêtait. Laëtitia Yessel propulsée à un mètre du sol sonda encore la zone.

« Elle m'a vue, c'est sûr ! Elle m'a vue, je suis fichue, paniqua la jeune fille. Il faut que je disparaisse ! Je veux être invisible ! »

Laëtitia Yessel, troublée, rata son attaque et Luc Porrexi en profita pour planter la pointe de son fleuret dans la poitrine de la jeune femme qui grimaça !

— Manque de concentration, ma grande ! Nous voici à égalité ! En garde pour l'assaut final !

— Non, attends ! J'ai vu quelque chose !

— Ça ne marche pas ça, Laëtie ! Ne te défile pas ! Je vais gagner ! En garde !

La Milvuit n'eut pas le choix. Son adversaire lui sautait dessus, elle eut juste le temps d'une parade instinctive. Luc Porrexi était déchainé, il avait vu la défaite de près et il tenait à sauver l'honneur, surtout devant les deux jeunes Péragores qui les observaient. Mélia profita de ce sursis pour se ressaisir. Elle ne pouvait pas quitter la salle sans être repérée par Alan et Briac qui se trouvaient pile face à la sortie. Et dès l'escarmouche finie, Laëtitia viendrait inspecter le portique pour comprendre qu'elle était l'origine de la tache rouge.

« Je dois utiliser les énergies pour me protéger, mais je sais faire si peu de choses ! La seule action efficace dont je suis capable c'est un airbag d'air pour contrer les coups. Mais je ne résisterai pas longtemps quand ils seront trois à m'attaquer ! Ou quatre, si Briac s'en mêle ! Si seulement, je pouvais disparaître de leur vue ! Disparaître de leur vue ! Mais oui, c'est ça ! »

Monsieur Clamart leur avait parlé en cours de physique du fonctionnement de la lumière et des nouvelles recherches pour tenter de rendre invisibles des objets. Mélia rassembla ses souvenirs à toute vitesse. Elle savait que la lumière était composée d'ondes électromagnétiques. Si ces ondes rencontrent une matière, elles sont réfléchies et c'est ce qui rend l'objet visible. Mais si la lumière est déviée dans une direction contraire à la normale, l'indice de réfraction devient négatif, autrement dit l'objet n'est plus capté par l'œil observateur.

« Il faut que j'essaie, je n'ai pas le choix, se motiva-t-elle en jetant un regard inquiet au combat qui ne manquerait pas de s'achever d'ici peu. »

Très rapidement, grâce à ses exercices d'entrainement, elle parvint à rentrer dans un état de concentration interne. Son Ingéni s'activa en émettant de discrets crépitements et la paume de ses mains chauffa instantanément. Ainsi, elle perçut nettement les molécules d'air qui l'enveloppaient et les atomes de matière qui se serraient ou se repoussaient. Elle focalisa toute sa pensée sur les particules de lumière et put discerner un flot de photons en mouvement.

Lentement, elle remua ses doigts et caressa les ondes lumineuses comme si elle essayait d'apprivoiser des insectes butineurs. Le contact fut assez long à s'établir, mais Mélia persévéra, sa vie en dépendait. Lorsque les particules de lumière l'acceptèrent, elle les dirigea gentiment. Elle traça des voies tout autour de son corps, comme si elle courbait la lumière, l'empêchant de l'atteindre et la laissa se reformer à l'identique derrière elle. Ce travail demandait une concentration de tout instant. Elle devait tout surveiller, ne rien laisser échapper. Le moindre photon rebelle pourrait la trahir.

— Et cinq points pour moi, glapit victorieusement Luc Porrexi.

Il était en sueur. Ses lèvres minces s'étiraient sur un sourire satisfait et il traversa la salle en une série de roues et sauts triomphants.

— Oh ! Cesse tes pitreries, s'énerva la Milvuit. J'ai été déconcentrée. Il y a là-bas quelque chose d'étrange.

— C'est ton problème ! Moi, j'ai gagné. Dans un combat, rien ne doit te distraire sinon t'es fichue. Et là, t'as perdu !

— Viens voir, plutôt que de m'empoisonner les oreilles avec tes cris de Nippon pas mûr.

L'insulte avait fait mouche. Luc Porrexi s'étouffa dans sa réponse et serra les poings. Il aurait volontiers envoyé une volée de coups dans la figure de la jeune femme, mais pas devant témoins. Il haussa les épaules et jeta un regard mauvais aux deux jeunes Péragores qui s'efforçaient de dissimuler un sourire.

— Venez, je vous dis. Il y a quelqu'un qui se cache là derrière, répéta la Milvuit.

Mélia à bout de force venait de laisser échapper une cohorte de photons et Laëtitia avait cru voir une main entre deux tenues d'escrime. La jeune Ether était en mode panique et commençait à malmener les particules de lumière trop vives à son goût. Si bien que des milliers de photons fuyaient sa caresse et suivaient le chemin de leur choix.

« Non. Non ! Ne partez pas, j'ai besoin de votre aide ! Là, regardez, je vous montre la route ! Doucement ! suppliait Mélia en s'efforçant de se calmer.

Les quatre Indesiratas se trouvaient maintenant devant le portique des tenues d'escrime sur lequel une vingtaine d'ensembles blancs pendaient plus ou moins bien rangés. D'un geste brusque, Laëtitia Yessel poussa le portique qui roula sur deux ou trois mètres avant de s'écrouler au sol, complètement démonté.

Derrière, il n'y avait rien. Juste un mur sale et deux toiles d'araignée.

— Alors c'est pour ces petites bêtes que tu fais tout ce cirque, se moqua Luc en désignant une araignée affolée qui s'éclipsait sur ses longues pattes effilées.

— Non, il y avait quelqu'un ici ! J'en suis sûre ! Concentre-toi ! Tu ne sens rien ?

— Arrête ton délire ! Mince, accepte ta défaite pour une fois Laëtie, s'énerva le jeune asiatique, tu n'es pas au niveau, c'est tout. C'est ça de vouloir jouer la pouffiasse des gros riches, tu t'empiffres de foie gras et tu prends du derrière !

Il reçut le regard noir des deux fils du "gros riche" et une baffe bien appuyée de Laëtitia Yessel, complètement vexée, qui partit chercher ses affaires à l'autre bout de la salle en bougonnant : « Gros derrière, gros derrière, il va voir... »

Luc Porrexi sans le vouloir avait fait diversion et laissé un sursis à Mélia, car la Milvuit l'avait bel et bien sentie et avait été à deux doigts de la toucher. Cependant, il fallait qu'ils se dépêchent tous de quitter cette salle, car la prouesse que la jeune fille réalisait pour se rendre invisible lui coûtait toute son énergie. Elle savait qu'elle puisait les ressources de son Ingéni plus que de raison et les contours de sa chair, dans laquelle son cristal était incrusté, la piquaient fortement.

Comme si Briac l'avait compris, il suggéra à ses compagnons d'aller se réconcilier autour d'un verre au bar d'à côté. Les deux Milvuits acceptèrent tout en se tirant la tête. Quand Mélia les vit se diriger vers la porte, elle amorça un soupir de soulagement qui fut contrarié par une entrée surprise.

— Mélia, Mélia, t'es là ? l'appela Thys en faisant irruption dans la salle Cid sur ses talons.

— Tiens, vlà de la compagnie, siffla Laëtitia qui se faufila entre les garçons et la porte pour leur couper la sortie. Que faites-vous là mes mignons ?

— Qu'avez-vous fait à ma sœur ! hurla Thys pour cacher sa terreur alors que Cid se décomposait.

— Ta sœur ? La blondinette anorexique qui ne veut pas nous donner son Ingéni ? Pas vu !

— Si, elle était là pour... pour... Il jeta un regard haineux à Briac. Pour régler une affaire. Et je l'ai sentie en danger. Que lui avez-vous fait ?

— Rien, mais c'est dommage ! Par contre ton copain et toi, vous allez être très coopératifs, vous souffrirez beaucoup, mais pas longtemps, ricana Luc Porrexi.

— Non, non ! Laissez-nous ! paniqua Cid. Moi, je ne suis pas comme vous ! Je suis normal moi ! Je veux partir !

Le Milvuit observa alors attentivement Cid. Il renifla bruyamment avec dédain.

— Toi, t'es une mauviette, c'est sûr que t'es pas comme nous, mais tu peux nous servir !

— On va faire ça là ? demanda Alan visiblement stressé.

— Ne t'inquiète pas mon bichon, minauda la belle Milvuit, c'est moi qui ai les clefs de la salle. Personne ne vient plus à cette heure et le sol est facile à nettoyer.

Briac était pâle et il se mordillait la joue. Son attitude n'échappa pas à Laëtitia Yessel.

— Eh ! Briac ! Ça va être ton premier ! Ne stresse pas mon chou, je vais te montrer comment lui arracher son caillou. Quoique celui-ci soit coriace, j'ai déjà essayé une fois, mais je me suis perfectionnée depuis !

Thys était tendu à l'extrême. Il ne voulait pas revivre l'horreur de la soirée d'anniversaire de Briac quand la traîtresse de Laëtitia Yessel avait fait crisser ses ongles sur son Ingéni avant de lui labourer la chair.

Il devait agir tout de suite. Il saisit la main de Cid et la serra à lui faire craquer les jointures. Il sentit aussitôt une force nouvelle affluer dans son cristal. Il se mit en état de transe méditative et pour une fois cela marcha au quart de tour. L'énergie fournie par Cid commençait à le saturer, il devait la libérer. Mais sous quelle forme ? Lui aussi fut attiré par les photons de lumière, mais contrairement à sa sœur, il ne les apaisa pas. Il les excita et les projeta en face de lui où se trouvaient Luc, Alan et Briac. Tous les photons vibrèrent à la même fréquence créant une amplification de l'intensité lumineuse qui aveugla les Indesiratas.

Mélia choisit cet instant pour réapparaître. Elle saisit un sabre exposé sur le mur et l'abattit comme une furie sur le visage de la Milvuit qui hurla de douleur. Cid et Thys la ruèrent de coups pour dégager le chemin et les trois jeunes s'échappèrent. Mais Luc Porrexi était déjà sur leur talon suivi par ses compères. Les Ostendes se précipitèrent dans les escaliers, tandis que le Milvuit d'un seul bond sauta un demi-étage et leur barra le passage.

Son regard était mauvais, il n'avait plus envie de perdre son temps à discuter. Il voulait faire mal, tout de suite. Ses doigts s'agitèrent, ses yeux devinrent blancs et les trois jeunes se crurent transpercés par des milliers de dards d'insectes. D'ailleurs sur leur peau de minuscules marques rouges naissaient, chacune évacuait une goutte de sang noir. La douleur des piqûres multipliée à l'infini était insoutenable et ils se mirent à hurler et se rouler par terre. Ils ne virent donc pas Téodor Lux et Marceline Chanfrein arriver. Les deux Maîtres Arcans semblaient furieux, leur Ingéni crépitait et libérait des étincelles si bien que Maître Lux avait une colonne de flammèches argentées qui jaillissait au-dessus de sa tête, juste à l'intersection de ses quatre mèches blanches.

— Lâches ! Quatre pour s'attaquer à des gamins, gronda le Grand Lux.

— Des gamins fort intéressants que tu vas nous laisser disséquer, vieux débris ! siffla Laëtitia le visage ensanglanté.

Elle agita à toute vitesse ses mains l'une autour de l'autre comme dans la ritournelle pour petits « ainsi font, font, font les petites marionnettes ». Mais il n'y avait là aucune volonté d'amuser, juste une haine violente qui allait se déchainer sur les jeunes toujours à terre. Marceline Chanfrein para l'attaque très posément alors que Téodor enveloppa ses Prudens et Cid d'un halo de douceur. Une lueur verte se propagea sur toute la surface de leur peau et calma la démangeaison.

— Vite, filez maintenant, aboya le grand Arcan en tissant un voile d'ondes électriques autour d'Alan et de Briac.

— Dépêchez-vous ! les exhorta Marceline, toujours en prise avec la Milvuit, qui bondissait partout et cherchait à trouver la faille de la vieille femme.

Les trois jeunes restaient prostrés au sol encore groggy par l'attaque de Luc Porrexi. Téodor se tourna vers eux, montra les dents en hurlant. Ce fut le déclencheur dont ils avaient besoin. Cid tressaillit, sauta sur ses pieds et attrapa Mélia. Ils dévalèrent les escaliers jusqu'au rez-de-chaussée. Thys les précéda en glissant sur la rampe. Affolés, ils traversèrent le hall désert et se heurtèrent à la porte en verre.

— C'est pas vrai, elle est fermée !

— Oh ! Eh ! Y a quelqu'un ? Vous nous avez oubliés ! hurla Cid.

— Laisse tomber, avec le boucan qu'on a fait, si le gardien était encore là, il aurait déjà rappliqué, fit remarquer Thys.

— Faut sortir, vite, vite ! hurla Mélia en donnant des coups de pied dans la porte.

— Poussez-vous !

Thys avait pris une chaise dans le hall. Il l'abattit contre la vitre avec un cri de rage. Mais celle-ci sembla rebondir sur le verre qu'elle n'ébrécha même pas.

— Ouaïe ! Ça tue les bras ! C'est du verre blindé ou quoi ? gémit le garçon.

— Par là ! proposa Mélia en désignant la loge du gardien.

Ils s'engouffrèrent dans une petite salle éclairée par une fenêtre haute. D'un geste vif, Cid balaya les registres et les stylos bien rangés sur le bureau. Puis Thys l'aida à transporter le meuble sous la fenêtre. Il fallut y ajouter une chaise pour atteindre l'ouverture salutaire. Quand Mélia parvint à ouvrir la fenêtre, une alarme s'enclencha et leur déchira les tympans.

Ils n'en firent pas cas et se hissèrent vers la sortie. En trois bonds, ils se retrouvèrent dehors. Sourds et terrorisés, ils continuèrent leur course jusqu'à la rue. Cid fut le premier à ralentir à bout de souffle.

— Attendez-moi ! J'en peux plus ! On va où ? s'époumona-t-il, plié en deux, les mains posées sur les cuisses.

Les jumeaux s'arrêtèrent et inspectèrent leurs arrières avec inquiétude. Toutes les lumières étaient éteintes dans l'Espace multisports. L'alarme hurlait toujours. La rue était déserte. Pas un chat à cette heure-ci, sous la pluie fine. Mélia aperçut alors la R5 de Téodor, sagement garée entre deux Land Rover. Par chance ou stratégie, le Maître n'avait pas fermé les portières. Les trois amis s'engouffrèrent à l'arrière du véhicule et se recroquevillèrent au pied des sièges.

— Qu'est-ce que l'on fait maintenant ? chuchota Mélia.

— On attend Téodor et Marceline, proposa Thys.

— Tu crois ? Ils ne sont que deux, les autres sont quatre, dit Cid.

— Ce sont des Maîtres Arcans, répliqua Mélia avec conviction.

Aucun d'eux n'était confiant. Il n'avait aucune vue, blottis à l'arrière de cette petite voiture. La nuit arrivait et la pénombre était effrayante. Les lampadaires allumés étiraient les ombres. Tout était menaçant.

— Qu'est-ce que l'on fait, répéta Cid, on part ?

— Trop risqué de quitter la voiture maintenant, répondit son copain.

Un bruit de course leur fit dresser les cheveux sur la tête. Quelqu'un s'approchait, les jeunes pouvaient entendre sa respiration saccadée. Ami ou ennemi ? Thys osa un coup d'œil.

— C'est juste un chien, souffla-t-il pour les deux autres.

L'animal ralentit et renifla un lampadaire qu'il se mit à arroser copieusement.

— J'en peux plus, explosa Cid, je me casse de là !

— Attends, aie confiance, ils vont venir, le supplia Mélia.

Le garçon bougonna et passa une main tremblante dans sa tignasse brune déjà complètement ébouriffée. Soudain, son regard fut attiré par un petit objet brillant qui pendait sous le volant.

— La clef, il a laissé la clef !

Il sauta par-dessus le siège, s'installa côté conducteur et fit tourner la clef. La voiture toussa puis hurla.

— Non Cid non ! geignit Mélia qui ferma les yeux.

— Fais pas le con, mec ! le supplia Thys en bondissant à son tour sur le siège avant.

Il n'eut que le temps de boucler sa ceinture, la voiture fit un soubresaut en avant et s'engagea sur la route heureusement déserte.

— On s'éloigne le plus possible de ces monstres ! marmonna Cid comme pour lui-même en fixant la route.

La pluie s'était intensifiée et un rideau de gouttelettes mouchetait le pare-brise. Cid plissa les yeux et donna un coup de volant pour éviter le trottoir. La voiture fit une embardée et les sièges grincèrent.

— Les essuie-glaces ! Mets les essuie-glaces ! cria Thys. Attention le camion à gauche ! Le camion, Cid !

Thys agrippa le volant et le tourna d'un coup sec vers la gauche pour engager la R5 dans une petite allée qui était en fait un escalier. La voiture guillerette sauta sur les marches en ballotant ses passagers qui hurlaient. En bas, il y avait une jolie fontaine éclairée par un lampadaire style Empire. Les trois jeunes fixèrent la fontaine et redoublèrent leurs cris.

— Freine, freine, freine ! s'égosilla Mélia en tirant sur le col de Cid.

Le garçon freina, les pneus crissèrent sur le gravier, la voiture fit un pas de danse sur le côté et chassa son arrière qui vint s'encastrer dans le lampadaire. Le moteur s'arrêta, les essieux couinèrent. Les trois jeunes se regardèrent. Ils n'avaient rien, mais ils n'eurent pas le temps de pousser un soupir de soulagement que déjà la lueur d'un gyrophare les enveloppa.

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