Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

9 : Parmi les ombres

Eldrid releva la tête, les yeux écarquillés sur les ténèbres.

Figée, elle n'osait plus effectuer le moindre mouvement.

C'était un bruit ténu, comme celui d'un pas léger qui foulait le tapis de brindilles et de feuilles jonchant le sol. Cela aurait pu être celui d'un animal, mais quelque chose lui criait qu'il s'agissait d'une présence humaine. Toute proche.

La nuit était sombre, beaucoup trop à son goût. Les étoiles ne suffisaient pas à éclairer l'entrelacs de branches et de broussailles qui l'entourait. Envahie d'un froid soudain, Eldrid tourna lentement la tête vers le soldat saxon. Il dormait à quelques pas d'elle.

Son regard scruta les bois. Le bruit s'était tu. Mais son ouïe discernait à présent un autre son qui fit tressaillir son cœur. Une respiration, lourde, quelque part devant elle. Tout près. Elle sentait la peur courir dans ses veines.

Doucement, centimètre après centimètre, Eldrid se glissa près de Godwin, ses doigts tendus vers la dague qui pendait à la ceinture du Saxon.

Elle n'osait plus respirer, et ses poumons criaient grâce.

Eldrid étouffa un cri lorsque les doigts de Godwin agrippèrent son poignet. Elle plaqua une main sur ses lèvres pour l'empêcher de parler, tâchant d'ignorer la douleur qui meurtrissait son avant-bras.

— Il y a quelqu'un, souffla-t-elle.

Godwin relâcha légèrement l'emprise sur son bras, mais elle pouvait toujours sentir la tension nichée dans son corps. Il était si immobile qu'elle n'osait même plus ciller de peur de troubler son attention. De sa main libre, il tira sa dague. Enfin, il se mit debout, lentement, intimant à Eldrid de rester à terre d'un simple geste.

Elle se tapit au sol, comme s'il pouvait absorber son corps tremblant et la dissimuler aux yeux du monde. Elle gardait le regard rivé à la silhouette du saxon qu'elle devinait à peine derrière le halo ténu des braises.

Les fourrés bruissaient dans l'obscurité, et Godwin y plongea sans un seul regard en arrière.
Un cri perça la nuit. C'était un cri de frayeur pure, émanant d'une voix féminine. Eldrid se redressa. Quelque chose de primaire venait de bondir en elle.

— Godwin !

Il était déjà de retour dans la lumière du feu, traînant avec lui une femme tremblante.

— Eldrid, ce n'est pas le moment...

— Relâche-la. Tout de suite  !

Elle venait de s'exprimer en norrois, et l'inconnue, prostrée, poussa un gémissement. Ses longs cheveux blonds tombaient devant son visage, mais Eldrid n'avait pas besoin de voir ses traits pour comprendre à quel point elle était apeurée. Il lui semblait que la silhouette qui se tenait devant elle pourrait se briser d'une seconde à l'autre.

— Vous êtes des Danois  ? gémit-elle en se recroquevillant davantage.

— Non, fit Eldrid en anglo-saxon. Non, tu n'as rien à craindre.

La trace d'accent qui subsistait dans sa voix fit fondre la jeune femme en larmes.

— Tu es Saxonne  ?

Elle hocha la tête dans une succession de sanglots.

— Ne me tuez pas... hoqueta la femme.

Eldrid sentit son cœur se serrer dans sa poitrine. Elle aussi avait prononcé ces mots à Godwin, il y avait une éternité de cela. Le Saxon, lui, ne sembla pas s'en émouvoir.

Il maintenait toujours sa lame entre eux, sans doute plus par réflexe que par réelle intention de s'en servir.

— Godwin  !

Eldrid se leva, s'approchant aussi près qu'elle le put. Elle nota que la Saxonne n'était vêtue que d'une simple tunique. Elle devait être frigorifiée.

— Godwin, range cette lame, articula-t-elle en anglo-saxon. Tu lui fais peur  !

Elle s'avança davantage, jusqu'à ce que ses doigts parviennent à frôler le poignet du guerrier. Il prit une profonde inspiration, et rengaina sa dague. Enfin, il s'agenouilla à la hauteur de la femme.

— Je suis Saxon, fit-il d'une voix douce. Comment t'appelles-tu  ?

— Me... Merewyn.

— Merewyn. Tu n'as rien à craindre. Je te le promets.

La femme se redressa, et Eldrid se figea devant le tas de haillons qu'elle tenait serré dans ses bras. La lame de Godwin rejaillit, mais il n'eut pas le temps de poser la moindre question.
Les pleurs d'un bébé fendirent la nuit.

Eldrid sursauta. Godwin, lui, fixait les hardes d'un air perplexe, comme s'il hésitait sur la conduite à suivre. Enfin, il rengaina pour la seconde fois son arme.

La Saxonne écarta les loques qui couvraient le nourrisson, posant sur lui un long regard embué de larmes.

— Il se nomme Eadwulf. Comme son père.

— Et où est-il  ? Son père  ?

Eldrid foudroya Godwin du regard. La réponse était évidente.

— Mon Eadwulf... Il m'a demandé de partir, il est resté combattre. J'étais avec d'autres femmes, mais les barbares nous ont rattrapées avant que nous puissions gagner la porte Nord de la ville. J'ai réussi à m'enfuir, mais les autres...

Elle leva son regard vers Godwin. Elle avait des yeux d'un bleu pâle, où paraissait se refléter l'horreur de ce qu'elle avait vécu.

— Pourquoi les cieux m'imposent-ils cette épreuve  ? murmura-t-elle.

Sa voix se brisa, en même temps que quelque chose sembla se déverrouiller en elle. Elle se redressa un peu plus, et les mots s'échappèrent de ses lèvres, irrépressibles.

— Eadwulf pleurait. J'avais tellement peur qu'ils me poursuivent, qu'ils l'entendent. Il faisait nuit, je ne savais plus où j'étais, je n'avais aucune idée d'où j'allais. Alors j'ai avancé, et je me suis réfugiée dans une ferme. Vous êtes arrivés et je me suis dissimulée.

— Pourquoi ne t'es-tu pas montrée  ?

— Vous parliez la langue des barbares. J'avais peur.

— Mais tu nous as suivis.

— Je vous ai entendu évoquer l'Est-Anglie. Je dois me rendre à Norwich. Eadwulf va m'y rejoindre. Il est sûrement déjà en chemin.

Eldrid tressaillit devant le ton de sa voix. Elle n'aurait su dire si elle y percevait les inflexions d'une confiance absolue, ou de désespoir infini.

~*~

Des murmures s'élevaient de l'autre côté des flammes. Dans une sorte de demi-sommeil amer, Eldrid sentait son esprit refluer sur le bord du monde des rêves à chaque inflexion du chuchotis. Elle ne faisait pas le moindre effort pour comprendre la teneur de la discussion.

Godwin et Merewyn. Deux Saxons. C'était ce qui aurait dû être.

Eldrid tourna lentement la tête, son œil captant les deux silhouettes qui se découpaient dans la lueur du feu.

Elle avait privé Godwin de la possibilité de vivre auprès des siens, de parler sa langue. Elle lui avait ôté le droit de se définir autrement que comme l'homme qui avait osé aimer une barbare.
Cela faisait longtemps qu'elle ne l'avait pas vu ainsi. Apaisé. Il n'était jamais serein avec elle. Il y avait à chaque instant ce pli sur son front, cette lueur dans son regard, cette crispation dans sa mâchoire.

Quelque chose gronda en elle.

Eldrid se sentait comme une étrangère.

Elle se demanda si le regard de Godwin s'élançait vers elle, par intermittence, ou si son esprit avait occulté toute trace de sa présence. Elle prit une longue respiration pour chasser l'interrogation qui envahissait ses pensées. C'était ridicule.

Elle était Danoise, lui était Saxon, et leurs deux cœurs n'aimaient pas le même royaume.

Son regard accrocha un mouvement soudain. La main de Godwin sur l'épaule de la Saxonne.

Son cœur se serra dans un bouillonnement de rage et de terreur.

Elle n'aimait pas Godwin.

Elle n'avait pas le droit de ressentir de la jalousie.

~*~

L'aube s'était levée quelques heures plus tard.

Le soldat saxon était allé relever les collets posés la veille, laissant Eldrid seule avec Merewyn. Eldrid était demeurée silencieuse, mal à l'aise, incapable de proférer quoi que ce fût. Depuis combien de temps ne s'était-elle pas retrouvée en compagnie d'une autre personne que Godwin ?

Malgré elle, il était devenu le centre de son univers, tout comme elle était devenue le sien.
Voilà ce qui l'avait tant travaillée durant la nuit. Elle avait été tirée aux confins de son monde, et, durant un instant, elle avait été terrifiée par la solitude.
— Merci. D'être intervenue la nuit dernière.

Elle sursauta au son de la voix de Merewyn.

— Godwin ne t'aurait pas fait de mal.

— Je sais. Mais ce n'est pas l'impression que j'ai eue sur le moment.

Eldrid eut un mince sourire.

— C'est un guerrier. Il a appris à se méfier de tout le monde, y compris des femmes saxonnes.

Et elle-même y était pour quelque chose. La réminiscence de la discussion nocturne s'imposa à elle. Merewyn savait-elle  ? Elle scruta un instant la jeune femme, sans trouver le moindre signe d'animosité sur son visage.

Godwin réapparut, lui offrant un prétexte pour se détourner de la conversation. Elle se leva et entraîna le Saxon à l'écart.

— Que suis-je supposée dire me concernant  ?

— Nous pouvons lui faire confiance, murmura-t-il en norrois.

— C'est toi qui étais à deux doigts de la tuer, pas moi.

Il leva les yeux au ciel.

— Nous pouvons lui faire confiance, mais il serait plus avisé que tu n'évoques pas ton... affinité avec les barbares. Elle a vu et ressenti des choses terrifiantes.

Eldrid ravala la réplique amère qui venait de brûler ses lèvres, et coula un regard vers la Saxonne.

— Que lui as-tu dit sur moi  ?

— Rien.

— De quoi avez-vous parlé cette nuit, alors  ?

Godwin l'observa d'un air surpris, et Eldrid se mordit la lèvre. Pourquoi avait-il fallu que son ton soit aussi acerbe  ?

— Depuis quand te préoccupes-tu de ce que je peux dire ou faire  ?

Eldrid se tança intérieurement. Elle était en train de dévoiler la ridicule animosité qui l'avait traversée pendant la nuit. Peu importait la teneur de leur échange.

— Simple curiosité.

Elle peina à rester impassible devant le regard moqueur que lui lança Godwin, et croisa les bras sur sa poitrine d'un air revêche. Pourquoi fallait-il qu'il parvienne toujours à lire en elle, peu importe l'acharnement qu'elle mettait à dissimuler ses pensées  ?

— Elle sait que tu es ma femme. Pour le reste, invente ce que tu voudras.

— Elle m'a entendue parler norrois. Elle doit bien avoir compris...

— Rien ne t'interdit de lui dire que tu as fréquenté des barbares. Mais garde à l'esprit que tu es Saxonne. D'accord  ?

Elle opina. Godwin la retint lorsqu'elle recula, imprimant une douce pression sur son avant-bras qui la fit frissonner.

— Eldrid.

— Oui  ?

— La nuit dernière, j'ai simplement essayé de la rassurer.

Elle haussa les épaules, et se dégagea d'un mouvement sec.

Avant de se détourner de lui, elle eut le temps de voir le sourire qui venait étirer ses lèvres.

~*~

Ils s'étaient remis en route. Eldrid n'avait de cesse de jeter des coups d'œil à Godwin, malgré elle. Son regard s'accrochait à lui par réflexe, comme en réponse à ce déséquilibre qu'elle ressentait depuis la veille. Et cela l'agaçait au plus haut point.

La question de Merewyn arriva plus vite qu'elle ne le pensait.

— Tu n'es pas tout à fait Saxonne, n'est-ce pas  ?
C'était un euphémisme, et ne sachant comment répondre, elle garda le silence.

— Excuse-moi. Je ne voulais pas t'offenser.

Eldrid jeta un regard à Godwin. Il marchait devant elles sans se préoccuper de leur conversation, et une bouffée de colère enfla en elle. Que pouvait-elle révéler sans s'attirer l'antipathie de la Saxonne ? Elle laissa s'écouler quelques secondes, tâchant de se composer un masque neutre.

— J'ai été capturée par des Danois lorsque j'étais enfant. J'ai été esclave, jusqu'à ce que Godwin...

Son masque se fissura, sa voix trembla. Sa phrase demeura en suspens. Elle était incapable de l'achever. Incapable, à vrai dire, de trouver les mots qui auraient fait d'elle une Saxonne.

— Je suis désolée.

Eldrid lui adressa un sourire, mais son cœur était serré. Son regard accrocha un instant celui du bébé que la Saxonne tenait dans ses bras. Il ne connaîtrait peut-être jamais son père, et sa mère serait pour toujours séparée de l'homme qu'elle aimait. Quelle était sa part de responsabilité dans cela  ?

Godwin avait tué des enfants danois, et elle l'avait traité de monstre. Mais quel genre de monstre était-elle, elle  ? Elle n'avait ni donné le moindre ordre ni abattu la moindre lame, mais son âme était maculée de sang.

Ses pensées furent interrompues par le son cristallin d'un ruisseau, l'empêchant de plonger davantage dans les affres vertigineuses de sa culpabilité.

Eldrid prit le bébé dans ses bras, pendant que Merewyn traversait le cours d'eau.

Elle sentit son ventre se tordre d'une douleur infinie, à la vue de ce petit corps endormi au creux de ses bras.

Elle se souvenait d'avoir porté l'enfant d'Örvar dans ses bras, alors qu'il n'était qu'un nourrisson. C'était il y a si longtemps. À l'époque, elle n'avait ressenti qu'un léger attendrissement, et surtout un amer regret face aux yeux gris de l'enfant qui lui rappelaient tant ceux d'Erling Bjarnason.

À présent, c'était différent.

Plus intime.

Infiniment plus douloureux.

Elle releva la tête pour chasser son trouble. Godwin était figé à quelques pas d'elle. Elle savait ce qu'il voyait devant lui. Il contemplait l'impossible.

Elle aurait voulu parler, mais les mots restèrent bloqués dans sa gorge. Le Saxon tourna les talons, traçant leur route.


------------------

Et voilà un nouveau chapitre ! Désolée pour l'attente. J'ai été bien bloquée, pas vraiment sur ce chapitre en lui-même, mais plus sur l'écriture tout court... Une sorte d'étrange passage à vide. Mais c'est passé. J'essaierai, vraiment, de poster à un rythme un peu plus régulier. :)

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro