Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

8 : Au bord du gouffre

Le tunnel s'ouvrit sur un abri rudimentaire, perdu au milieu d'une clairière. Une dense forêt étendait ses branches nues parsemées de givre aux alentours. C'était un lieu paisible, presque irréel après le sang qui avait coulé dans la nuit et leur lente progression dans les ténèbres. De maigres gouttes de pluie s'écrasaient au sol, comme une vaine tentative d'effacer les réminiscences de la nuit.

— Ne restons pas ici.

La jeune femme fut arrachée à sa contemplation par la voix de Godwin. Elle réalisa à quel point elle était épuisée, et elle aurait donné cher pour obtenir le luxe de fermer les yeux seulement quelques minutes. Mais le Saxon avait raison. Ils ne pouvaient s'attarder dans les environs, à la sortie d'un passage qui menait droit à une ville envahie par les Danois, Eldrid fût-elle dans leur camp.

Ils se mirent en marche.

Leurs mains restaient soudées l'une à l'autre. Eldrid se serait effondrée sans le contact de Godwin qui l'entraînait en avant. Elle était exténuée, un vent glacé sifflait à leurs oreilles, et les images sanglantes de la nuit dansaient toujours dans son esprit.

Le soleil était encore haut dans le ciel lorsque Godwin s'arrêta. Il désigna une bâtisse qui s'élevait non loin.

— Arrêtons-nous là.

C'était une ferme abandonnée. Elle avait dû l'être récemment tant le lieu paraissait encore habité par la présence de ses propriétaires.

Une fois à l'intérieur, Eldrid rassembla le peu d'énergie qui lui restait pour allumer un feu. Après l'obscurité et le froid mordant, la vision des flammes la revigora.

— Nous allons toujours chercher Theodore ?

— Oui. S'il s'est enrôlé en Est-Anglie, ce devrait être facile. Une armée se repère facilement.

— Il est vrai que les Saxons semblent avoir un don particulier pour repérer des armées, railla-t-elle. Je te rappelle que nous sommes au milieu de nulle part, après avoir fui une ville attaquée par des troupes danoises, troupes que ni toi ni personne n'a vu approcher.

Godwin lui jeta un regard agacé.

— Ce qui s'est passé cette nuit n'aurait jamais dû se produire. Les Danois nous ont tendu un piège.

— La dernière fois que nous avons croisé la route de l'armée danoise, elle a incendié une ville. Que crois-tu qu'ils aient fait à Londres ?

— Pourquoi cette question ?

— J'essaie de comprendre ce que les Danois essaient de faire. Quel intérêt Sveinn a-t-il à dévaster le royaume qu'il entend gouverner ?

— Faire subsister une armée en marche demande une quantité de vivres incommensurable. Pour une armée en terre étrangère, le moyen le plus simple est de piller ce dont ils ont besoin. Et puis, ce n'est pas le roi du Danemark qui est à la tête de cette armée, mais un dénommé Thorkell.

— Qui agit sous les ordres de Sveinn.

— Et Sveinn est au Danemark, quand Thorkell est ici, en Angleterre. Ce dernier pourrait soumettre la moitié de l'Angleterre, si ce n'est plus, avant que son roi l'apprenne et parvienne à l'en dissuader. Penses-tu qu'il mène cette armée par pure allégeance au Danemark, de façon totalement désintéressée ? Il est comme tous les autres, avide de richesses, de gloire et de chaos.

Eldrid acquiesça. Elle n'avait pas la moindre envie de s'aventurer sur le terrain d'une énième joute verbale avec Godwin concernant les Danois.

Elle contempla un instant les flammes qui se lançaient à l'assaut de l'écorce sèche. Il y avait quelque chose de fascinant dans cet acte inexorable. Les flammes détruisaient la moindre parcelle de ce qui se trouvait sur leur chemin, sans pitié, car c'était là leur seul moyen de survivre. Elles gagnaient toujours. Les Danois aussi.

Sa poitrine se serra.

— Nous devons retrouver Theodore le plus vite possible. S'il devait affronter l'armée...

— Nous le retrouverons.

— C'est étrange, n'est-ce pas ? Que je me sois attachée à lui, et qu'il se soit attaché à moi.

Godwin la dévisagea un instant.

— Parce que tu es Danoise, et qu'il est Saxon ? Je me suis bien attaché à toi, pourquoi ne le pourrait-il pas ?

— C'est différent. Theodore ne m'aime pas de la même façon que tu m'aimes. Je suppose que cela pourrait s'apparenter à ce qu'il ressentirait pour... je ne sais pas. Une sœur, peut-être.

— Une soeur ?

— À Londres, tu m'as dit que nous étions liés, tous les trois. Je doute que Theodore nous considère comme de simples amis. Il te voue un respect et une admiration tels.

Godwin eut un sourire.

— Lui et moi, nous avons perdu nos parents presque au même âge, et par une cause similaire. J'avais son âge lorsque je me suis engagé dans l'armée d'Æthelred. J'ai eu pour idéal des guerriers qui me racontaient leurs faits d'armes, et pour seul désir la vengeance. Je présume que j'ai offert à Theodore un modèle à suivre, à mon tour.

— Pour peu que l'on puisse qualifier de modèle une personne qui a perpétré des atrocités telles que celles que tu as...

— Je n'ai jamais prétendu être irréprochable, Eldrid. Il sait que la voie qu'il a choisie l'amènera à commettre des actes terribles, et j'espère qu'il n'aura jamais à faire ce que j'ai fait.

Il secoua la tête. Ses traits étaient tirés.

— J'avais son âge lorsque j'ai combattu pour la première fois, mais il me paraît si jeune. Je ne supporte pas l'idée qu'il risque de se mettre en danger par ma faute.

— Ce n'est pas de ta faute. Tu l'as dit, il a choisi par lui-même.

— Je n'aurais pas dû accepter qu'il reste avec moi. Je n'aurais pas dû entretenir son désir de vengeance. Je ne suis pas certain qu'il puisse quitter l'armée d'Est-Anglie aussi facilement que cela, Eldrid. Ou même qu'il le souhaite. Il n'a jamais rien connu d'autre que la guerre. Il deviendra un monstre, comme moi.

Eldrid sentit l'air lui manquer. C'était ainsi qu'elle l'avait vu, pendant si longtemps. Ainsi qu'elle le voyait encore, lorsque le sang danois perlait sur le fil de son glaive.

— Mais tu n'es pas un monstre, murmura-t-elle.

— Donne-moi une seule raison de le penser.

— Les monstres ne savent pas aimer.

Godwin la contempla un long moment.

— Et toi ? Sais-tu aimer ?

Eldrid se raidit. Fallait-il qu'il l'exaspère toujours ?

— Tu as le droit de me dire que tu ne peux que haïr. Si du moins c'est réellement ce que tu ressens, ce dont je doute. J'aimerais juste connaître ce qui se cache réellement au fond de ton cœur.

— Je l'ignore.

— Ne sais-tu vraiment pas, ou aurais-tu peur de chercher la vérité ? De voir que ton cœur ne bat plus pour Erling Bjarnason, de voir que tu ne me hais plus ?

— Je peux ne plus te haïr, sans pour autant t'aimer. Tu me l'as toi-même dit. Que je n'avais pas à t'aimer.

— C'est vrai. Mais cette réponse ne me suffit pas. Il doit bien y avoir quelque chose, entre la haine et l'amour, tu ne penses pas ?

Eldrid sentait la brûlure de son regard.

— Theodore... il ne lui restait rien, et tu l'as sauvé. Je comprends, tu sais. Je comprends pourquoi il s'est accroché ainsi à toi.

Eldrid sentit son visage s'empourprer. Elle détourna les yeux, pour tomber sur leurs doigts entrelacés. Depuis combien de temps se tenaient-ils ainsi ? Elle s'en était à peine aperçue.

— Non, fit-elle tandis que Godwin était sur le point de retirer sa main. Je... je...

Il entremêla de nouveau ses doigts aux siens.

— Tu n'as pas besoin de te justifier, fit-il simplement.

~*~

Le soleil pointait à peine, lorsque Godwin la réveilla.

Ils sortirent, quittant la chaleur du feu pour retrouver la brise glace de l'aube hivernale. La brume teintait les bâtiments d'une aura floue.

— Quand arriverons-nous en Est-Anglie ?

— À pied, pas avant plusieurs jours. Nous ne...

Le Saxon s'arrêta net. Un bruit d'objet brisé venait de s'élever de la grange adjacente. Eldrid sentit son cœur s'emballer. Godwin, lui, avait déjà tiré sa dague.

— Ne bouge pas, lui jeta-t-il en s'avançant vers la porte de l'édifice.

— Mais...

— Ne bouge pas ! siffla-t-il.

Il entrouvrit la porte, qui tourna sur ses gonds avec un grincement. Eldrid, elle, se liquéfiait un peu plus chaque seconde. Elle n'avait pas la moindre envie de rester seule. Les bâtiments autour d'elle lui parurent tout à coup emplis de menaces.

— Godwin, reviens !

Il lui lança un regard noir, lui intima de se taire, et s'engouffra à l'intérieur. Eldrid resta seule, tremblante. Un long frisson la parcourut au souvenir des pas qui avaient résonné derrière eux, dans le tunnel. Se pouvait-il qu'un Danois les ait suivis ? Elle se sentit brutalement vulnérable, seule au milieu de la brume.

Elle attendit quelques secondes, ne sachant que faire, puis entra à la suite du Saxon.

— God...

Un bras enserra sa poitrine en lui coupant le souffle.

Une lame vola à sa rencontre.

Elle n'avait même pas eu le temps d'esquisser le moindre geste.

Le moindre cri.

Le poignard suspendit sa course à quelques millimètres de sa jugulaire.

Un affreux juron anglo-saxon résonna à ses oreilles.

— Je t'avais demandé de rester dehors !

Rien ne pouvait décrire l'intense soulagement qui se répandit en elle. Son coeur vacillait dans sa poitrine. Son corps tout entier tremblait.

— Tu... tu aurais pu me tuer !

— Tu n'aurais pu t'en prendre qu'à toi-même.

Ils tâchaient de reprendre leurs souffles. L'air était chargé d'une odeur âcre et poussiéreuse. Godwin finit enfin par abaisser sa lame, mais son bras continuait de maintenir son étreinte.

Eldrid avait cruellement conscience de leurs corps, si proches. Plus proches qu'ils ne l'avaient été depuis longtemps. Depuis qu'ils avaient dérivé en mer vers les côtes saxonnes. À la respiration erratique de Godwin, elle sut que ses pensées cheminaient dans la même direction que les siennes.

Elle prit une profonde inspiration, tâchant de se rappeler pourquoi ils étaient là. Elle balaya la grange du regard. Elle n'avait pas la moindre envie de s'attarder.

— Il n'y a personne ici, murmura-t-elle. Ou nous aurions déjà été attaqués, tu ne penses pas ?

Elle posa sa main sur le bras de Godwin.

— Partons, d'accord ?

Godwin la libéra, et il recula d'un pas. Le vide qui s'ouvrit dans son dos la fit frissonner.

~*~

Eldrid avait à peine fermé l'œil la nuit précédente, malgré sa fatigue. Elle tâchait de comprendre l'impulsion qui la menait vers Godwin. Vers le guerrier saxon qui avait massacré tant des siens.

Elle se sentait perdue. Elle avait l'impression de tournoyer au bord d'un gouffre, sans pouvoir s'arrêter, sans savoir quel pas lui serait fatal.

Theodore s'était accroché à Godwin, et elle ressentait le même besoin irrépressible, à son tour. Elle s'accrocherait. Simplement le temps de retrouver son équilibre. Pas une seconde de plus.

Ils marchaient depuis des heures, lorsque Godwin se retourna brutalement vers elle.

— Que...

— Plus un mot.

— Quoi ?

— J'ai cru entendre quelque chose.

Elle se tut en comprenant qu'il essayait d'écouter les bruits qui les environnaient. Elle tendit l'oreille, mais ne perçut rien.

— J'ai la désagréable impression que nous sommes suivis, chuchota-t-il.

Elle écarquilla les yeux. Le regard du Saxon sondait les bois derrière elle, et il posa une main sur l'épaule d'Eldrid pour l'empêcher de se retourner à son tour.

— Le bruit dans la grange ? articula-t-elle le plus bas possible.

— C'est probable.

— Un Danois ? Ou un Saxon ?

— Je ne sais pas, mais je n'aime pas ça. Reste sur tes gardes, d'accord ?


------------------

Et un nouveau chapitre ! J'aimerais tellement trouver le temps d'écrire plus  😓

Dites-moi, seriez-vous intéressés si je postais la carte d'Angleterre que j'utilise pour me repérer, comme ce début de tome est assez mouvementé ?

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro