XXII : Into the bus
Je hais les autobus.
Surtout quand ceux-ci ne suivent pas le trajet convenu.
Thésée était installé confortablement à l'arrière du bus aux côtés de Léo qui s'amusait à taper sa main en rythme sur le siège de devant quand Annabeth demanda l'attention de ses amis.
-Bon alors. (Annabeth sortit de son sac un guide routier des Etats-Unis.) D'après ce que je sais, on devrait arriver à Las Vegas du côté de Seven Hills. Arrivés sur place, on avisera de la route à prendre.
Elle se mit alors à énoncer toutes les possibilités de chemin, de voies, de monstres, aussi, à prendre ou à éviter. Ils venaient à peine de partir du petit village paumé de la campagne où Thésée leur avait dévoilé sa véritable identité, que la fille d'Athéna s'était de nouveau plongée dans la nouvelle direction à prendre pour leur quête chérie.
Thésée se retourna quand même vers elle, où était assise à côté d'elle Piper. Cette dernière examinait attentivement la carte, comme pour s'imprégner de chaque chemin, de chaque ruelle, de chaque carrefour. Percy et Grover étaient juste à côtés d'elles, tout au fond du car. Percy faisait semblant de mémoriser lui aussi la carte, tandis que Grover écoutait en finissant de mâcher le bout d'aluminium qu'il avait arraché à l'abris de bus. Frank et Nico, assis sur l'autre rangée de Thésée, se penchaient par dessus leur siège afin de ne pas perdre le fil du plan.
Annabeth parla pendant une dizaine de minute, minutes auxquelles Thésée ne prêta pas vraiment attention.
Il réfléchissait plutôt à ce qu'il aurait à faire, lui, une fois à Las Vegas. Il savait que ce serait lui qui les guiderait vers la suite de la route.
Les paroles de la prophétie qu'Annabeth avait prononcé lui revinrent en tête. Donnera la marche vers le lieu précieux... Pas de doute. Ces vers faisaient directement référence à sa prophétie à lui. Les autres devaient penser que le terme précieux définissait la spécificité de l'endroit, mais Thésée savait que ce serait un endroit spécial pour lui, Thésée. Il savait qu'en s'y rendant, il trouverait le reste du puzzle pour enfin atteindre son objectif.
La seule chose qui le tracassait, c'est pourquoi et comment ce qu'il cherche lui pourrait les aider, eux.
La réponse nous viendra sûrement quand on y sera, se dit-il. Il espérait vraiment que ces camarades aient vraiment confiance en lui, sinon, le trajet risquerait d'être long et gênant. Surtout qu'il n'avait pas non plus envie de faire des efforts pour sociabiliser.
-On a plus qu'à espérer qu'une fois arrivés, on saura directement quelle direction prendre, conclut enfin Annabeth, ce qui capta de nouveau l'attention de Thésée.
-C'est vrai qu'on a toujours eu de la chance en ce qui concerne la route, ironisa Léo, qui avait niché sa tête entre les deux sièges pour faire face à la blonde.
-Regardez, le bus s'arrête, fit remarquer Frank innocemment.
Le car s'arrêta sur une aire, et toutes les personnes présentes descendirent se dégourdir les jambes.
En voyant personne de ses camarades en faire de même, Thésée s'abstint de se lever.
Et puis... il avait remarqué les trois types à l'avant les regarder d'un mauvais œil, en sortant. Thésée ne voulait pas avoir affaire à eux. Il avait peur que ces trois hommes ne soient pas que des humains. Et il était rincé de devoir combattre des monstres à longueur de journée.
Grover aussi, avait remarqué leur comportement étrange. Mais il avait décidé d'y faire abstraction, priant sûrement pour qu'ils ne remontent pas dans le bus, alors il avait fait de même.
-Hé, euh... Thésée, intervint Percy, un peu perturbé de l'appeler par son vrai nom. On a besoin que tu nous éclaire sur quelque chose, vu qu'on a un moment de tranquillité.
-Je t'écoute, répondit le concerné qui ne laissa pas transparaître sa nervosité.
-Raconte-nous comment tu as vécu dans la rue, intervint Annabeth en prenant la main de Percy dans la sienne. Depuis le début, je veux dire.
Bon... Quand faut y aller, faut y aller, non ?
Thésée inspira profondément et baissa la tête vers sa casquette, qu'il avait prise dans ses mains. Les inscriptions GAME OVER sur le devant commençaient à s'effacer, après tout ce temps qui était passé.
Refaire face à ces souvenirs est chose dure à surmonter. Pour tout le monde, j'entends.
-Je me souviens m'être réveillé dans la rue, commença-t-il. Dans une banlieue de New York.
-New York ? s'étonna alors Percy.
-Oui. J'avais dans les six ans, environ. Je ne savais pas où j'étais, ni comment j'étais arrivé là, et si j'avais mes parents quelque part. La seule chose dont je me souviens à ce moment là... c'est ce serpent. (Les intéressés haussèrent les sourcils, attendant des explications.) C'était un monstre, en réalité. Dès que je l'ai vu, il a foncé sur moi et m'a attaqué. Je me suis alors défendu. Je ne sais toujours pas comment j'ai pu m'en sortir, d'ailleurs, mais je me souviens avoir eu la peur de ma vie. (Il lança un regard en coin à Grover, Piper et Nico et se gratta l'arrière de la tête.) C'est d'ailleurs de là que viens ma phobie des serpents, hé hé.
-Tu m'étonnes, fit Léo, se faire attaquer par un serpent alors que tu sais à peine lire et écrire, c'est sûr que ça te traumatise après.
Thésée lui sourit légèrement, puis soupira lentement.
-J'ai alors erré dans la rue à la recherche de mes parents, et ce durant plusieurs années. Je me suis débrouillé pour éviter de me faire tuer par des monstres et survivre dans la rue, et j'ai appris à me défendre et à fabriquer des trucs qui pourraient m'être utile.
-Comme cette bombe à fumée que tu nous a lancé avant ta fuite, lança Nico en levant un sourcil.
-C'est ça, dit Thésée soudain embarrassé. (Il prit un air penaud.) Encore désolé, hein.
-Ça fait rien.
Nico avait prononcé ça de manière désinbolte. Ce garçon troublait beaucoup Thésée. Avec ses cheveux noirs, sa peau pâle et son allure nonchalante, le garçon donnait l'impression qu'il parlait plus avec les morts qu'avec les vivants. Mais bon. C'était le fils d'Hadès, après tout.
-Et tu as survécu tout seul, pendant tout ce temps ? Reprit Frank, intéressé par son histoire.
-Non, j'ai fait des rencontres, bien sûr. (Son regard s'assombrit aussitôt.) Certaines meilleures que d'autres... et j'ai fait pleins de villes, j'ai presque traversé tout le pays... et j'ai enfin découvert où se trouvait ma mère.
Léger silence. Thésée en conclut que les demi-dieux avaient retenu l'information, celle de la découverte de sa mère dans le coma, puisqu'ils le regardèrent d'un air désolé.
Thésée ne sut pas quoi dire. D'habitude, il envoyait balader les gens quand il se retrouvait dans ce genre de situation. Sentir qu'il avait des amis le perturbait, et même si Mina et Anton avaient su percer sa carapace, là c'était différent.
Ces demi-dieux étaient différents.
-J'ai fugué de chez moi à l'âge de sept ans, dit alors Annabeth. Je comprends ce que ça fait d'être seul.
-Ma mère a été tuée dans une incendie quand j'avais huit ans, renchérit Léo en haussant les épaules. On a tous au moins été victime d'un traumatisme, mais c'est pour ça qu'on est tous barrés !
La remarque de Léo le fit sourire.
C'était drôle la façon dont il avait de pratiquer l'autodérision, sur lui-même ou sur les autres.
Thésée se demanda ce qu'il ce serait passé s'il avait rencontré un satyre, ou un loup, plus jeune, et connu ces fameux camps de demi-dieux.
Mais s'il y avait été emmené, alors il aurait certainement été reconnu par son père, non ? Mais alors est-ce que...
-Et tu as donc rencontrés Anton et Mina il y a deux ans, alors, lança Annabeth. Comment ça se fait ? Où tu les as...
-Les gars, coupa Grover, on n'est plus tous seuls.
Le satyre lorgna les trois passagers qui venaient de remonter dans le bus. C'était les trois hommes qui ne semblaient pas bien normaux, selon Thésée. En se réinstallant sur leurs sièges, les trois types lancèrent des regards obliques vers eux. Ils portaient des lunettes de soleil, mais on savait bien que c'était eux qu'ils regardaient. Comme ceux qui lorgnaient d'un oeil mauvais les jeunes qui viennent s'installer au fond du car pour foutre le bordel.
Le silence s'installa chez les demi-dieux quand les autres passagers remontaient dans le bus. "On reprendra plus tard", avait déclaré Percy. Et tout le monde retourna à ses occupations de départ, c'est à dire, s'ennuyer, penser aux prochains dangers de la quête, réfléchir quant à tout cette histoire, ou faire passer le temps pour ne pas penser à tout ça.
Le trajet semblait durer une éternité, pour Thésée.
Lui n'arrêtait pas de songer à tout ce qu'il s'était passé ces derniers jours. Il repensait à son comportement, envers ses amis et les autres, et se demandait pourquoi il agissait ainsi. C'était comme si la présence de ces demi-dieux le changeait, comme si une lueur de bienveillance émanait autour d'eux.
Cette sensation fit frémir Thésée. Il n'aimait pas les choses qu'il ne pouvait comprendre, contrôler.
Il secoua de la tête. Ne pense pas à ça. Reste concentré sur tes objectifs.
Au bout d'une demi-heure de route, le ventre de Thésée se mit à gronder. Puis celui de Léo se fit entendre. Il remarqua du coin de l'œil Frank se tenir le ventre. Il était si tard que ça ?
Bon, ils n'avaient pas non plus vraiment mangé au déjeuner, ça pouvait se comprendre. Ah, les bons petits plats de Mina commençaient à lui manquer !
Thésée allait faire une remarque quand le bus s'engagea sur une seconde aire, près de la ville de Palm Desert.
-Euh, c'était sur la carte des arrêts ? demanda Frank tandis que le car se garait.
-Non, je ne crois pas, répondit Annabeth, les sourcils froncés.
-Terminus, tout le monde descend ! Cria alors le chauffeur d'une voix nasillarde.
Euh, quoi ?
Les passagers commençaient à se lever de leurs sièges et les demi-dieux se regardèrent, confus.
-On n'était pas censé aller à Las Vegas ? S'écria alors Annabeth en direction du chauffeur.
Le chauffeur tourna la tête vers elle, et la confusion vint recouvrir son visage.
-Euh, non, dit-il, soudain troublé. Je ne me souviens pas avoir dit pour Las Vegas... Allez, tout le monde dehors !
L'homme descendit pour aller ouvrir les soutes sous le regard perdu des demi-dieux.
C'était quoi, ce délire ? Ils se seraient trompés de ligne ? Pourtant, Frank avait bien dit qu'ils allaient à Las Vegas, et Annabeth n'avait pas relevé...
-Il y a quelque chose qui cloche, déclara cette dernière. On aurait dû se rendre directement à Las Vegas.
-C'est la Brume, annonça Percy, le visage grave. Je parie qu'un coup tordu se prépare. (Puis jetant sa veste sur l'épaule : ) Descendons, il y a peut-être un autre car qui se rend vraiment à Las Vegas, cette fois. Mais restez sur vos gardes.
La bande obtempéra. Thésée se rendit alors compte que Percy était le meneur, dans son groupe, et que personne ne semblait contester cela. C'était comme s'ils étaient habitués à recevoir des directives de sa part.
Thésée aperçu alors par la fenêtre les trois types qui regardaient les passagers récupérer leurs affaires.
Son cœur rata un battement. Caché derrière ses lunettes noires, Thésée crut voir celui du milieu lever la tête vers lui. Le sourire qu'il affichait ne faisait que rassurer Thésée dans ses doutes : Ces types ne présageaient rien de bon.
Descendus. À peine avaient-ils posés le pied par terre que le chauffeur remonta à l'intérieur, le visage préoccupé, et repartit, sans demander son reste et sans explications.
Le petit groupe regarda le véhicule s'en aller, perplexes.
-Au moins, il y a un Starbucks, ironisa Léo. Un problème de moins de réglé.
-Les gars, dit alors Thésée, je crois qu'on a un problème plus urgent.
C'est le cas de le dire : il ne restait plus qu'eux sur le parking, eux et les trois hommes. Qui regardaient droit sur eux, le visage fendu d'un sourire sinistre.
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Et voilà la suite ! Un peu en retard, certes, mais là !
Qu'est ce que vous en pensez ?
Vous aimez la façon dont les choses tournent ?
Les questions que Thésée se pose ?
La suite au prochain épisode !
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