Chapitre 3 : Réalisation
𝑳𝒆𝒆 𝑴𝒊𝒏𝒉𝒐 -
« Minho ? Est-ce que tu peux rester un instant ? »
Le brun qui s'apprêtait à sortir de la salle de danse jette un regarde à Hyunjin qui lui indique qu'il l'attendra dehors. Minho pivote donc sur ses talons et retourne voir sa prof, assise par terre devant le miroir qui lui indique de s'asseoir devant elle tandis qu'elle raye quelque chose sur une des feuilles éparpillées devant elle.
Assis en tailleur, Minho attend patiemment qu'elle ait fini. Il a un énorme respect pour cette femme qui a quitté le Japon pour venir enseigner dans son école. Elle a dansé pendant des années dans les meilleures troupes du monde et si elle est parfois dure avec eux, elle n'en reste pas moins très protective envers ses élèves. C'est pour cela qu'il est à peine surpris lorsqu'elle relève la tête pour planter son regard dans le sien et lui demander comment il va.
« Très bien, répond-il par automatisme avant de se reprendre en voyant ses yeux se plisser. Enfin, je ne suis pas au top de ma forme actuellement, mais ça va aller. »
Elle hoche la tête en silence sans cesser de le fixer et Minho finit par détourner le regard, la mâchoire serrée.
« Je ne sais pas s'il y a quelque chose sur lequel je peux t'aider, Minho, dit-elle finalement. Mais tu sais que si tu en as besoin tu peux me parler, n'est-ce pas ? »
Il hoche la tête en silence.
« Ta vie privée ne nous regarde pas, ajoute-t-elle. Mais j'ai discuté avec tes autres professeurs et nous sommes tous d'accord pour dire que ce quelque chose qui te tracasse impact fortement ta façon de danser. »
La mâchoire de Minho se serre d'autant plus alors que ses doigts viennent faire tourner les bagues qu'il porte aux doigts.
« Ce n'est pas une mauvaise chose de danser avec ses émotions, continue-t-elle. Au contraire. Mais actuellement, chez toi l'interprétation prime sur la technique. Tu es moins concentré, tu manques de précision. À ce rythme-là, tu vas te retrouver aux évaluations de fin de semestre en étant complètement à la traîne. »
Il peut sentir l'inquiétude dans sa voix.
« Minho ? »
Il relève la tête et lui adresse un sourire penaud.
« Je suis désolé, madame.
- Ce n'est pas à moi qu'il faut dire ça. »
Et Minho cesse de respirer. En face de lui, sa professeure déblatère sur le fait que c'est pour lui-même qu'il devrait se reprendre en main, mais Minho ne l'écoute plus. Il ne pense qu'à Jisung car il vient de se rendre que, aveuglé par sa propre auto persuasion des bien-fondés de son comportement, il ne s'était même pas excusé.
Il connaît Jisung, il n'aura jamais la prétention de dire que c'est lui qui le connaît le plus, mais ce qui est vrai, c'est qu'il a passé des heures à discuter avec lui et qu'il l'a vu dans ses moments de faiblesse, alors il sait. Il sait que Jisung ne pourra pas avancer tant qu'il n'aura pas la certitude que rien n'est de sa faute.
Ça le frappe d'un coup. Il ne comprend pas comment il a pu passer presque un mois sans s'en rendre compte. Sans jamais se remettre en question. Est-il à ce point égoïste ?
« Je suis trop con, murmure-t-il.
- Pardon ?
- Rien. Vous avez raison madame. Il faut que je me reprenne. »
Il se relève et s'incline bien bas.
« Prends soin de toi, Minho. »
Il lui adresse un sourire crispé et sort de la salle en s'insultant mentalement.
« Qu'est-ce qu'elle voulait ? demande Hyunjin lorsqu'il sort.
- Je t'en parlerai plus tard. Faut que je trouve Chan. »
Hyunjin fronce ses sourcils mais ne dit rien et ils s'en vont vers le réfectoire. Ils repèrent rapidement leurs amis et Minho vient se poster devant Chan en ignorant les regards des autres, et plus spécial celui de Jisung qu'il sent lui brûler le front.
« Faut que je te parle.
- Ça ne peut pas attendre, Minho ? demande Chan en haussant un sourcil. Je viens à peine de me poser là.
- Si, ça peut. »
Il se laisse tomber sur une chaise et sort son téléphone en ignorant les regards étonnés de ses amis.
« Tu ne manges pas, hyung ? lui demande Felix.
- J'ai pas faim. »
Alors Chan lève les yeux au ciel et fait glisser son plateau devant Hyunjin qui, perturbé par le comportement de Minho, n'était pas allé chercher son repas.
« C'est toi qui payes, dit Chan simplement en passant devant Minho qui se lève d'un bond pour le suivre.
- Je payerai.
- À tout à l'heure, » lance Changbin d'une voix peu assurée.
Ils s'éloignent du réfectoire et sortent dans le soleil de juin.
« Qu'est-ce qu'il se passe ? demande le plus vieux en suivant Minho dans les rues de Séoul.
- J'ai réalisé un truc, répond le brun sans le regarder.
- À propos de quoi ?
- De Jisung. »
Il ne dit rien, mais Minho peut sentir son regard qui a dévié un instant du trottoir pour venir se poser devant lui.
« On se pose et tu m'expliques ? »
Minho acquiesce et – hasard ou pas – ils se retrouvent dans le même restaurant de ramen où ils étaient allés avant l'épisode des cerisiers.
« Je ne sais pas vraiment comment expliquer, commence le brun en fixant son ami, attendant peut-être qu'il le comprenne sans qu'il ait besoin de prendre la parole.
- Commence peut-être par me dire à quel niveau se situe le problème.
- C'est moi le problème. »
Les yeux de son vis-à-vis s'ouvrent en grand alors que les siens se ferment.
« Qu'est-ce que tu racontes ?
- Je crois que... Je crois que je ne suis vraiment pas fait pour ce monde, marmonne le brun en laissant tomber son front sur la table.
- Développe.
- Je ne lui ai pas dit pardon. Quand je l'ai laissé comme un con après l'avoir embrassé. »
Minho redresse la tête pour la baisser de nouveau immédiatement, peu désireux de voir le regard d'incompréhension mêlé de pitié de Chan.
« N'importe qui se serait excusé, explicite Minho. N'importe qui. Ne serait-ce que pour la forme. "C'était une erreur, je suis désolé." C'est ce qu'une personne normale aurait dit, non ?
- Minho, je ne crois pas que-
- Si. C'est ce que n'importe qui aurait dit. Mais évidemment moi, je ne l'ai pas dit. »
Il sert ses baguettes tellement fort dans ses mains que ça lui fait mal. Lorsqu'il se force à desserrer les doigts c'est pour voit des traces rouges dans ses paumes et, comme à peu près tout ces derniers temps, cela lui fait penser à Jisung. À Jisung et à ses traces en demi-lune dans le creux de ses mains.
De combien de traces est-il responsable désormais ? Combien de fois Jisung a-t-il dû serrer les poings en le voyant rigoler avec ses amis en sachant qu'il lui avait brisé le cœur ?
« Minho ?
- Je lui ai dit que c'était une erreur et je me suis barré, murmure le brun. Je suis vraiment un enfoiré.
- Si t'étais vraiment un enfoiré, tu ne te poserais pas ces questions, lui dit Chan doucement.
- Ça fait presque un mois. J'aurai dû me les poser bien avant, grince Minho.
- C'est pour ça que tu dis que tu n'es pas adapté pour ce monde ? Parce que les questions débiles que tout le monde se pose, tu te les poses avec un train de retard ? »
Il a touché juste, comme d'habitude. Alors Minho se contente de hocher la tête en silence.
« C'est de la merde.
- Hein ? »
Il relève la tête pour fixer Chan qui s'est appuyé contre le dossier de sa chaise, les bras croisés et le regard dur.
« C'est de la merde ce que tu dis, Minho. C'est le monde qui n'est pas adapté à toi et pas l'inverse. Nan mais sérieux Minho. T'es vraiment trop con parfois. »
Le brun regarde son aîné, la bouche entre ouverte. Il ne s'attendait pas à une telle réponse. Chan ferme les yeux un instant en se pinçant l'arête du nez puis se redresse pour poser ses coudes sur la table et fixer Minho au-dessus de ses doigts joints.
« Si vraiment tu n'étais pas "adapté" comme tu dis, dit-il en le fixant. C'est quelque chose dont tu devrais être fier. T'es un artiste pour l'amour de Dieu ! s'exclame-t-il. Depuis quand les artistes sont adaptés à la société hein ? »
Ils se fixent un instant avant qu'un léger ricanement nerveux ne s'échappe de ses lèvres.
« Sérieusement, Minho. Je comprends ce que tu veux dire, mais crois-moi, Jisung sait très bien que tu es désolé. »
Minho le regarde, les yeux plissés d'incompréhension.
« Le lendemain, après les cerisiers. Il m'a appelé pour me demander de vérifier que tu allais bien. Il m'a aussi demandé de te dire que tu n'étais pas une horrible personne et qu'il comprenait parfaitement pourquoi tu avais fait ça et que... »
Il se tait un instant.
« Que c'était pour ça que ça faisait aussi mal. »
Minho sent un frisson le parcourir et vient plonger son visage entre ses mains.
Pourquoi tu es comme ça, Jisung ? Pourquoi faut-il que tu sois si compréhensif ?
« Il a vraiment dit ça ? bredouille-t-il et Chan hoche la tête. Putain de bordel de merde...
- Ça ne coûte rien de lui envoyer un message, tu ne crois pas ? »
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